LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu selon l'arrêt attaqué que Mme X..., engagée le 1er mars 1983 en qualité de vendeuse polyvalente par la société Soditex, a été licenciée pour motif économique par lettre du 23 novembre 2009 après avoir accepté la convention de reclassement personnalisé le 20 suivant ;
Sur le pourvoi principal de la salariée pris en ses trois moyens :
Attendu que ces moyens ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le pourvoi incident de l'employeur :
Vu l'article L. 1233-67 du code du travail dans sa rédaction applicable à la cause ;
Attendu que pour confirmer le jugement ayant accordé au salarié une indemnité de préavis et congés payés afférents l'arrêt retient que le licenciement pour motif économique ouvre droit à ces indemnités ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il n'était pas discuté que la salariée avait accepté la convention de reclassement personnalisé, ce dont il résultait qu'aucune indemnité de préavis ne pouvait lui être allouée dès lors que le licenciement pour motif économique reposait sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi principal de la salariée ;
Sur le pourvoi incident :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne l'employeur à payer une indemnité de préavis et congés payés afférents ; l'arrêt rendu le 9 avril 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi et statuant de ce chef ;
Infirme le jugement du conseil des prud'hommes de Clermont-Ferrand du 21 juin 2011 en ce qu'il condamne la société Soditex à payer une indemnité de préavis et congés payés afférents à la salariée ;
Déboute la salariée de cette demande ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté les demandes de Madame X... tendant à voir dire et juger que son licenciement pour motif économique est dénué de cause réelle et sérieuse et obtenir le paiement de la somme de 35.000 euros à titre de dommages intérêts pour rupture abusive ;
AUX MOTIFS QUE par lettre recommandée avec accusé de réception, en date du 23 novembre 2009, la SAS SODITEX a notifié à Mme Josiane X... son licenciement pour motif économique ; cette lettre fait état d'une conjoncture économique défavorable et d'une baisse continue du chiffre d'affaires de l'entreprise qui s'est fortement accélérée au cours des premiers mois de l'exercice 2009, d'une impossibilité de couvrir ses frais fixes mensuels et d'une situation comptable largement déficitaire ; la SA SODITEX ajoute, dans ce courrier, qu'elle est dans l'obligation de réduire l'effectif au niveau des postes de vente, qu'elle a recherché tout poste de reclassement, recherche qui s'est avérée infructueuse puisque Mme X... a refusé sa proposition concernant un poste au sein de la SAS SODITEX ; la SAS SODITEX communique les résultats comptables de ses exercices 2009 et 2010 qui traduisent effectivement une baisse qui s'accélère et une chute de son chiffre d'affaires de 38 % en trois ans ; la réalité du motif économique de Mme X... n'est donc pas sérieusement contestable ;
ALORS QUE la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige doit énoncer, lorsqu'un motif économique est invoqué, à la fois la raison économique qui fonde la décision et sa conséquence précise sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié, à défaut de ces mentions la motivation de la lettre de licenciement est imprécise et celui-ci ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement qui se bornait à invoquer des difficultés économiques et la nécessité de supprimer deux postes de vendeuse, sans mentionner la conséquence précise de ces difficultés sur l'emploi ou le contrat de travail de la salariée, ne répondait pas aux exigences légales de motivation ; qu'en considérant néanmoins que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les articles L 1233-16 et L 1233-3 du code du travail ;
Et ALORS QUE les difficultés économiques invoquées à l'appui d'un licenciement pour motif économique doivent être appréciées au niveau du groupe ou du secteur d'activité du groupe dont relève l'entreprise ; alors que la sté SODITEX indiquait elle-même qu'elle appartenait à un groupe, la cour d'appel a considéré que la réalité du motif économique du licenciement n'était pas sérieusement contestable, au vu des résultats comptables de la SAS SODITEX ; qu'en statuant ainsi alors que la lettre de licenciement ne faisait état que de difficultés de la SAS SODITEX et que les difficultés économiques invoquées à l'appui du licenciement pour motif économique devaient être appréciées au niveau du groupe ou du secteur d'activité du groupe dont relève la SAS SODITEX, la cour d'appel a violé l'article L.1233-3 du code du travail ;
ALORS au surplus QUE d'une part, pour apprécier les difficultés économiques invoquées par l'employeur, le juge doit se placer à la date de rupture du contrat, et que, d'autre part, ni la réalisation d'un chiffre d'affaires moindre, ni la baisse des bénéfices, ne suffisent à établir la réalité de difficultés économiques ; que pour considérer que la réalité du motif économique du licenciement intervenu le 23 novembre 2009 n'était pas sérieusement contestable, la cour d'appel a relevé que « la SAS SODITEX communique les résultats comptables de ses exercices 2009 et 2010 qui traduisent effectivement une baisse qui s'accélère et une chute de son chiffre d'affaires de 38 % en trois ans » ; qu'en statuant comme elle l'a fait, alors d'une part que la situation devait être appréciée à la date du licenciement intervenu le 23 novembre 2009 et d'autre part que la baisse des résultats comptables et du chiffre d'affaires ne ne suffit pas caractériser la réalité des difficultés économiques, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;
Et AUX MOTIFS QUE Mme X... estime encore que la S. A. S. SODITEX aurait manqué à son obligation de reclassement au motif que les propositions de postes qui lui ont été faites étaient une modification de son contrat de travail et manquaient de précisions pour n'être pas renseignées sur l'aménagement du temps de travail et de possibles conséquences sur les heures supplémentaires, alors que, suite à la suppression de son poste et faute de postes disponibles au sein de la société SODITEX, elle a formulé une proposition de reclassement en date du 1er octobre 2009, au sein de la société SODIFTEX en un lieu distant seulement de quelques centaines de mètres, sur un poste de vendeuse, identique, à temps plein ou à temps partiel en détaillant de manière précise et circonstanciée la durée hebdomadaire du travail et la rémunération hors primes, laquelle était au moins équivalente ; la société SODITEX a donc bien satisfait à son obligation de reclassement ; ¿le licenciement de Mme Josiane X... ayant une cause réelle et sérieuse, le jugement du Conseil de Prud'hommes de Clermont-Ferrand du 21 juin 2011 sera donc infirmé en ce qu'il a condamné la SAS SODITEX à lui payer des dommages-intérêts pour rupture abusive ;
ALORS QUE la proposition d'une modification du contrat de travail que le salarié peut toujours refuser ne dispense pas l'employeur de son obligation de reclassement et l'employeur ne peut limiter ses offres en fonction de la volonté présumée de l'intéressé de les refuser ; que la cour d'appel a considéré que l'employeur avait satisfait à son obligation de reclassement en considérant que la proposition du 1er octobre 2009 avait été faite à la salariée « à titre de reclassement », « suite à la suppression de son poste » ; qu'en statuant comme elle l'a fait alors que dans ledit courrier, l'employeur faisait uniquement état d'une « réorganisation de l'entreprise dans le cadre de laquelle à terme deux postes de vendeuses sont appelés à être supprimés », sans que l'employeur n'informe la salariée de la suppression de son poste ni des conséquences d'un refus de la proposition, la cour d'appel a violé l'article L 1233-4 du code du travail ;
Et ALORS QUE les juges du fond ne peuvent procéder par affirmations ; que la cour d'appel a affirmé qu'aucun poste n'était disponible au sein de la société SODITEX ; qu'en procédant par affirmations, sans même préciser d'où elle tirait cette affirmation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS enfin QUE le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ; que la cour d'appel a considéré que l'employeur avait satisfait à son obligation de reclassement ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans constater que l'employeur avait justifié avoir recherché, mais en vain, toutes possibilités de reclassement dans l'entreprise et dans le groupe, parmi les entreprises dont l'activité, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettaient d'effectuer des permutations de personnels, sur un emploi relevant de la même catégorie que celui occupé par la salariée ou à défaut sur un emploi d'une catégorie inférieure, la cour d'appel a violé l'article L 1233-4 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Madame X... tendant à obtenir le paiement de la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de l'obligation d'exécuter le contrat de travail de bonne foi et déloyauté ;
AUX MOTIFS QUE rien ne permet de considérer que la SAS SODITEX dont le souci était à la fois d'assurer la pérennité de l'entreprise et le reclassement des salariés licenciés ait agi avec une quelconque mauvaise foi ; Mme X... doit donc être déboutée de sa demande en dommages-intérêts de ce chef ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation emportera cassation de l'arrêt sur ce point et ce, en application de l'article 624 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Madame X... tendant à obtenir le paiement de la somme de 4.000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination et non respect des critères d'ordre de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE Mme X... soutient ensuite que la SAS. SODITEX n'aurait pas respecté les critères d'ordre et qu'elle aurait été victime de discrimination au motif qu'elle comptait une grande ancienneté dans l'établissement, plus de 26 ans, et que des salariés beaucoup plus jeunes en ancienneté sur le même poste de vendeur ont été écartés de la procédure sans motif apparent alors que la SAS SODITEX justifie avoir rigoureusement respecté les dispositions de l'article L 1233-5 du code du travail en prenant en compte l'ensemble des critères légaux, et pas seulement l'ancienneté, qu'elle a bien, et de manière objective, appliqué un barème entre les cinq vendeuses de la société pour parvenir au licenciement de deux d'entre elles, que notamment, le critère de la performance était retenu et que Mme X... a réalisé le deuxième chiffre d'affaires le moins élevé des vendeuses et la décision du conseil d'allouer 1.000 euros à titre de dommages-intérêts du fait du non-respect des critères d'ordre de licenciement sera infirmée ;
ALORS QUE les critères déterminant l'ordre des licenciements doivent être mis en oeuvre à l'égard de l'ensemble du personnel de l'entreprise relevant d'une même catégorie professionnelle ; que la cour d'appel a affirmé que « la SAS SODITEX justifie avoir rigoureusement respecté les dispositions de l'article L 1233-5 du code du travail en prenant en compte l'ensemble des critères légaux, et pas seulement l'ancienneté, qu'elle a bien, et de manière objective, appliqué un barème entre les cinq vendeuses de la société pour parvenir au licenciement de deux d'entre elles » ; qu'en statuant comme elle l'a fait alors que l'application des critères ne pouvait être limitée aux seuls vendeurs mais devait être mise en oeuvre à l'égard de l'ensemble du personnel de l'entreprise relevant d'une même catégorie professionnelle, la cour d'appel a violé l'article L 1233-7 du code du travail.Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Soditex.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement prononcé le 21 juin 2011 par le conseil de prud'hommes de Clermont-Ferrand en ce qu'il a condamné la société SODITEX à payer à Madame Josiane X... la somme de 2.879 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et la somme de 287,90 euros au titre des congés payés sur préavis ;
AUX MOTIFS QUE « le licenciement pour cause économique de Mme X... lui ouvre droit à une indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents soit aux sommes de 2.879 ¿ et 287,90 ¿ » ;
ALORS QUE l'acceptation, par le salarié, d'une convention de reclassement personnalisé, exclut tout versement, à son profit, d'une indemnité compensatrice de préavis et d'une indemnité au titre des congés y afférents ; qu'en retenant que le licenciement pour motif économique de Madame Josiane X..., ouvrait droit, à son profit, au versement d'une indemnité compensatrice de préavis de 2.879 euros et d'une indemnité au titre des congés payés y afférents de 287,90 euros, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée (conclusions de la société SODITEX, p. 8 § 1er à 5), si la salariée n'avait pas accepté, le 20 novembre 2009, la convention de reclassement qui lui avait été proposée par la société SODITEX, le 13 novembre 2009, lors de son entretien préalable, de sorte qu'elle ne pouvait prétendre au bénéfice de telles indemnités, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-67 du code du travail dans sa version applicable antérieurement au 30 juillet 2011.