LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les entrepôts de la société Linda textiles (la société), sis à Aubervilliers, respectivement assurés par les sociétés Axa France IARD (la société Axa) et Generali assurances, ont été incendiés au cours de violences urbaines le 4 novembre 2005 ; que la société a assigné la société Axa en exécution du contrat d'assurance les liant ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses trois premières branches, tel que reproduit en annexe :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de limiter l'indemnisation de ses préjudices par la société Axa, à la somme de 51 527 euros au titre du matériel et à celle de 1 176 995 euros, au titre du stock de marchandises, et de la débouter de sa demande au titre des pertes financières et d'exploitation ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'interprétation du contrat d'assurance et du donné acte du 16 juillet 1999 de la société Axa qui a précisé à la société que « les marchandises sont couvertes au titre du contrat référencé et non exclues comme mentionné dans l'affaire nouvelle à effet du 24 décembre 1997 », ce que leur ambiguïté rendait nécessaire, que la cour d'appel a décidé, hors de toute dénaturation, sans avoir à effectuer une recherche sur l'existence d'une prétendue aggravation du risque que ses propres constatations rendaient inopérante, que d'une part, aucune autre clause du contrat que celle relative au montant des biens ou responsabilités garantis par sinistre n'était affectée par le donné acte, et d'autre part, que cette clause précisant pour chaque bien ce qui est exclu ou quel est le plafond de garantie, la garantie n'était pas plafonnée et qu'elle était due pour les marchandises dans la limite de la valeur déclarée ;
D'où il suit que le moyen, qui est inopérant en sa deuxième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et attendu que la cinquième branche du moyen unique du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident ne sont pas de nature à permettre l'admission de ces pourvois ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa quatrième branche :
Vu les articles 1134 du code civil et L. 121-1 du code des assurances ;
Attendu que pour limiter l'indemnisation des préjudices de la société par la société Axa à la somme de 51 527 euros au titre du matériel, l'arrêt énonce, sur le calcul de l'indemnité, qu'au vu des surfaces déclarées et de la configuration respective des lieux, il convient de dire que le local assuré par la société Generali représentait 15 % de la surface totale de stockage et des immobilisations ; qu'en conséquence, la garantie Axa couvre 85 % soit, au vu des évaluations, 173 202 euros pour le matériel ; qu'il convient donc de réduire à proportion l'évaluation des dommages pour ramener ceux-ci à 35 % soit 51 527,70 euros pour le matériel ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le contrat d'assurance stipulait, s'agissant du matériel, un plafond de garantie d'un montant de 609 796,05 euros, la cour d'appel a dénaturé celui-ci et violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Axa France IARD à payer à la société Linda textiles la somme de 51 527,70 euros au titre du matériel, avec intérêts au taux légal à compter du 19 octobre 2007 et capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du code civil, l'arrêt rendu le 25 septembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Axa France IARD aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Axa France IARD , la condamne à payer à la société Linda textiles la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Linda textiles.
Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir limité l'indemnisation, par la Sté Axa France IARD, des préjudices subis par la Sté LINDA TEXTILES à la somme de 51.527 ¿ au titre du matériel et à celle de 1 176 995 ¿, s'agissant du stock de marchandises, et de l'avoir déboutée de sa demande au titre des pertes financières et d'exploitation ;
AUX MOTIFS QUE sur la garantie des dommages aux biens, la Sté AXA fait valoir qu'il était dans l'intention commune des parties que les garanties « dommages aux biens » soient plafonnées à la somme de 609 796 ¿, et que son « donné acte » n'a pas modifié ce plafond ; qu'à titre subsidiaire, elle demande l'application des articles L.113-2 et L.113-9 du code des assurances, à raison de la valeur des biens stockés dans deux entrepôts au regard de la valeur initialement déclarée ; que la Sté LINDA TEXTILES avance que seuls les matériels sont concernés par une limitation de garantie, les marchandises ayant été intégrées au contrat sans limitation par le donné acte de juillet 1999 de la Sté AXA ; que la Sté AXA ne saurait prétendre qu'en écrivant le 16 juillet 1999 à la Sté LINDA TEXTILES que « les marchandises sont couvertes au titre de votre contrat référencé ci-dessus et non exclues comme mentionné dans l'affaire nouvelle à effet du 24 décembre 1997 », ce donné acte renverrait au plafond de garantie prévu pour les matériels dès lors qu'au bas du donner acte, il est mentionné qu' « il n'est en rien dérogé aux autres clauses et conditions du contrat » ; qu'au regard du subsidiaire, elle répond que, s'agissant d'une aggravation du risque, seul l'article L.113-4 du code des assurances, que la compagnie n'a pas invoqué, était applicable, qu'au demeurant, l'expert a dissocié les stocks entreposés dans un autre lieu, assuré par GENERALI ; que d'une part, aucune autre clause du contrat que celle relative au montant des biens ou responsabilités garantis par sinistre n'est affectée par le donner acte, et d'autre part, cette clause précisant pour chaque bien ce qui est exclu ou quel est le plafond de garantie, l'absence de plafond dans le donner acte ne peut qu'être interprétée pour dire que la garantie n'est pas « plafonnée », qu'elle est donc due pour les marchandises dans la limite de la valeur déclarée, soit la somme de 1 219 592 ¿ ; que, sur le calcul de l'indemnité, dans ses conclusions, la Sté LINDA TEXTILES précise (page 12) qu'à la même adresse, à Aubervilliers, elle louait un local commercial de 315, 60 m2 au sol plus une mezzanine en parquet, assuré par la Sté GENERALI, et un local de 1620 m2 avec 4 mètres sous plafond assuré par la Sté AXA ; qu'il résulte par ailleurs du rapport de Madame X..., expert sapiteur, que l'estimation du stock des marchandises entreposées dans les locaux détruits lors du sinistre a été faite en soustrayant à l'estimation du stock total de l'entreprise à la date du sinistre l'évaluation du stock de marchandises existant en d'autres lieux que dans les locaux d'Aubervilliers, de sorte que le total estimé du sinistre ne distingue pas entre ce qui devait se trouver dans les locaux assurés auprès de la Cie GENERALI de ce qui se trouvait dans les locaux assurés par la Cie AXA ; qu'au vu des surfaces déclarées, et de la configuration respective des lieux, (hauteur d'une part, mezzanine d'autre part), il convient de dire que le local assuré par la Sté GENERALI représentait 15 % de la surface totale de stockage et des immobilisations ; qu'en conséquence, la garantie AXA couvre 85 % soit, au vu des évaluations, (173 202 ¿ pour le matériel et 3 956 287 ¿ pour les marchandises) la somme de 3 510 065 ¿ (147 222 ¿ + 3 362 844 ¿ ) ; que la sous assurance, par rapport à la valeur déclarée, (assurée) est donc de 1 ¿ 1 219 592,10 / 3 510 065,70) 65 %, qu'il convient donc de réduire à proportion l'évaluation des dommages pour ramener ceux-ci à 35 % soit 1 228 523 ¿ (51 527,70 pour le matériel et 1 176 995,40 pour les marchandises) ; qu'en conséquence, l'assureur est tenu de payer en deniers ou quittance la somme de 51 527 ¿, au titre du matériel et de 1 176 995 ¿ au titre des marchandises, cette dernière somme ne dépassant pas la somme assurée ; que sur la garantie des pertes d'exploitation, il résulte des conditions spéciales de la police que les garanties des pertes financières « sont acquises s'il en est fait mention aux conditions particulières et sous réserve des exclusions ci-après et des exclusions générales prévues au chapitre E ; qu'en l'espèce, les conditions particulières ne faisant pas état de cette garantie, il y a lieu de débouter la société Linda Textiles de sa demande de ce chef ;
1)ALORS QUE la police d'assurance précisait, dans ses conditions particulières relatives aux dommages aux biens, que la garantie des marchandises était exclue ; qu'elle ne mentionnait en conséquence aucun plafond de garantie ; qu'il était seulement indiqué, non pas dans les dispositions relatives aux garanties, mais dans un document intitulé « précision sur l'activité et les moyens de protection », que la valeur du stock de marchandises était « inférieure à 8.000.000 F. » ; que le dont acte avait seulement précisé que les marchandises étaient couvertes au titre du contrat d'assurance, sans préciser dans quelle limite ; qu'en énonçant cependant que l'absence de plafond dans le dont acte « ne pouvait qu'être interprétée pour dire que la garantie n'est pas plafonnée, qu'elle est donc due pour les marchandises dans la limite de la valeur déclarée, soit la somme de 1.219.592,10 euros (8.000.000 F) », la cour d'appel a dénaturé le contrat d'assurance, ensemble le dont acte, et violé l'article 1134 du code civil ;
2) ALORS QUE, subsidiairement, l'assureur ne peut se prévaloir de l'aggravation des risques quand, après en avoir été informé de quelque manière que ce soit, il a manifesté son consentement au maintien de l'assurance, notamment en continuant de percevoir les primes ou en payant une indemnité après un sinistre ; que la société Linda Textiles faisait valoir, en l'espèce, que la compagnie AXA avait eu connaissance de la valeur des stocks entreposés dans les locaux assurés et avait indemnisé un précédent sinistre avant d'établir le dont acte étendant la garantie aux marchandises, sans mentionner de plafond de garantie ; qu'en décidant néanmoins d'appliquer la limite de garantie de 8.000.000 F dont elle a estimé qu'elle résultait de la police d'assurance, et en lui appliquant de surcroit un abattement de 65 % en raison d'une prétendue « sous- assurance », sans rechercher, comme l'y invitaient expressément les conclusions de l'assurée, si l'assureur n'avait pas en toute connaissance de cause manifesté son consentement au maintien de l'assurance, nonobstant l'augmentation de la valeur du stock, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE, plus subsidiairement encore, la cour d'appel a considéré que la garantie était due pour les marchandises dans la limite de la valeur déclarée, soit 1.219.592,10 euros ; qu'elle a encore estimé que le montant des marchandises détruites dans les locaux assurés par la société Axa était de 3.362.844 euros ; qu'en disant cependant que l'assureur n'était tenu d'indemniser la société Linda textiles qu'à hauteur de la somme de 1.176.995,40 euros au titre des marchandises, la cour d'appel a derechef violé l'article 1134 du code civil ;
4) ALORS QU'en tout état de cause, le contrat d'assurance stipulait, s'agissant du matériel, un plafond de garantie d'un montant de 4.000.000 F, soit 609.796,05 ¿ ; que la cour d'appel a considéré que la valeur des matériels détruits dans les locaux assurés par la compagnie Axa était de 147.222 ¿ ; qu'en limitant cependant à la somme de 51.527 ¿ l'indemnité due par l'assureur, en raison d'une prétendue « sous-assurance », la cour d'appel a, à nouveau, violé l'article 1134 du code civil ;
5) ET ALORS ENFIN QUE les conditions particulières du contrat d'assurance mentionnaient une garantie, à hauteur de « 30% soit 1.200.000 F maximum », des « pertes financières suite à dommages » en cas d'incendie ou d'explosion ; qu'en énonçant que les conditions particulières ne faisaient pas état d'une garantie des pertes financières, la cour d'appel a, une fois encore, dénaturé les conditions particulières du contrat d'assurance et violé l'article 1134 du code civil.Moyen produit au pourvoi incident éventuel par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour la société Axa France IARD.
II est fait grief à l'arrêt D'AVOIR condamné la société AXA FRANCE IARD à payer à la société LINDA TEXTILES la somme de 51 527,70 euros au titre du matériel et celle de 1 176 995,40 euros au titre des marchandises;
AUX MOTIFS QUE « sur la garantie dommages aux biens : aucune autre clause du contrat que celle relative au montant des biens ou responsabilités garantis par sinistre n'est affectée par le donner acte et, d'autre part cette clause précisant pour chaque bien ce qui est exclu ou quel est le plafond de garantie, l'absence de plafond dans le donner acte ne peut qu'être interprétée pour dire que la garantie n'est pas « plafonnée », qu'elle est donc due pour les marchandises dans la limite de la valeur déclarée, soit la somme de 1 219 592,10 euros (8 000 000 francs) ; que, sur le calcul de l'indemnité, dans ses conclusions, la société LINDA TEXTILES précise (p. 12) qu'à la même adresse à Aubervilliers, elle louait un local commercial de 315, 60 m2 au sol plus une mezzanine en parquet, assuré par la société GENERALI et un local de 1620 m2 avec 4 mètres sous plafond, assuré par la société AXA ; qu'il résulte par ailleurs du rapport de Madame X..., expert sapiteur, que l'estimation du stock des marchandises entreposées dans les locaux détruits lors du sinistre a été faite en soustrayant à l'estimation du stock total de l'entreprise à la date du sinistre l'évaluation du stock de marchandises existant en d'autres lieux que dans les locaux d'Aubervilliers de sorte que le total estimé du sinistre ne distingue pas entre ce qui se trouvait dans les locaux assurés auprès de la compagnie GENERALI de ce qui se trouvait dans les locaux assurés par la compagnie AXA ; qu'au vu des surfaces déclarées et de la configuration des lieux (hauteur d'une part, mezzanine d'autre part), il convient de dire que le local assuré par la société GENERALI représentait 15 % de la surface totale de stockage et des immobilisations, qu'en conséquence, la garantie d'AXA couvre 85 % soit, au vu des évaluations (173 202 euros pour le matériel et 3 956 287 euros pour les marchandises) la somme de 3 510 065,70 euros (147 222 + 3 362 844) ; que la sous-assurance, par rapport à la valeur déclarée (assurée) est donc de (1-1 219 592,10/3 510 065,70) 65%, qu'il convient donc de réduire à proportion l'évaluation des dommages pour ramener ceux-ci à 35 %, soit 1 228 523,10 euros (51 527,70 euros pour le matériel et 1 176 995,40 euros pour les marchandises) ; qu'en conséquence l'assureur est tenu de payer, en deniers ou quittance, la somme de 51 527,70 euros au titre du matériel et celle de 1 176 995,40 euros au titre des marchandises, cette dernière somme ne dépassant pas la somme assurée ; que sur la garantie des pertes d'exploitation, il résulte des conditions spéciales de la police (chap. B) que les garanties des pertes financières "sont acquises s'il en est fait mention aux conditions particulières et sous réserve des exclusions ci-après et des exclusions générales prévues au chapitre E" ; qu'en l'espèce les conditions particulières ne faisant pas état de cette garantie, il y a lieu de débouter la société LINDA TEXTILES de sa demande de ce chef» ;
1) ALORS QU'en application du principe indemnitaire, l'indemnité d'assurance ne doit pas être une source d'enrichissement pour l'assuré ; qu'en conséquence le cumul d'indemnités est prohibé en assurances de dommages ; qu'en condamnant la société AXA FRANCE IARD à payer à la société LINDA TEXTILES la somme de 51 527,70 euros au titre du matériel et celle de 1 176 995,40 euros au titre des marchandises, sans rechercher, comme le faisait valoir AXA dans ses conclusions, quelle était la ventilation de l'indemnité d'assurance versée par la société GENERALI, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de contrôler le respect du principe indemnitaire et a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 121-4 du code des assurances ;
2) ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; qu'il existait en l'espèce un désaccord sur la surface du local situé à Aubervilliers et assuré par la société GENERALI -le contrat d'assurances GENERALI ainsi que les conclusions de première instance de l'assuré évoquant un local de 1000 m2 tandis qu'une note en délibéré en date du 26 mars 2010 évoque un local de 315,60 m2 ; qu'en retenant qu' « au vu des surfaces déclarées et de la configuration respective des lieux (hauteur, d'une part, mezzanine, d'autre part) il convient de dire que le local assuré par la société GENERALI représentait 15 % de la surface totale de stockage et des immobilisations, qu 'en conséquence la garantie d'AXA couvre 85 % soit, au vu des évaluations (173 202 euros pour le matériel et 3 956 287 euros pour les marchandises), la somme de 3510065,70 euros», sans s'expliquer sur le calcul opéré, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE dans ses conclusions (13 juin 2012, p. 20), la société AXA FRANCE IARD faisait valoir que « le local assuré par la compagnie AXA représentait 61,83 % de la surface totale de l'entrepôt d'Aubervilliers comprenant les deux locaux contigus et que le local assuré auprès de la compagnie GENERALI représentait 38,17 % de la surface du même entrepôt » ; qu'en retenant que « le local assuré par GENERALI représentait 15 % de la surface totale de stockage et des immobilisations et qu'en conséquence, la garantie d'AXA couvre 85 % », sans s'expliquer sur son calcul ni sur le rejet du calcul effectué par la compagnie AXA, la cour a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, en violation de l'article 455 du code de procédure civile.