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22/10/2014 | FRANCE | N°14-60123;14-60124

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 22 octobre 2014, 14-60123 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° R 14-60.123 et S 14-60.124 ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que du 12 au 26 juin 2013 ont été organisées les élections des représentants au comité d'entreprise et des délégués du personnel au sein de la société Dekra industrial, suivant un accord d'entreprise et des protocoles préélectoraux prévoyant le recours au vote électronique ; que le syndicat CFTC de la métallurgie des Hauts-de-Seine a saisi le 12 juillet 2013 le tribunal d'instance d'une de

mande d'annulation des élections ; que l'Union départementale de la CFTC de la ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° R 14-60.123 et S 14-60.124 ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que du 12 au 26 juin 2013 ont été organisées les élections des représentants au comité d'entreprise et des délégués du personnel au sein de la société Dekra industrial, suivant un accord d'entreprise et des protocoles préélectoraux prévoyant le recours au vote électronique ; que le syndicat CFTC de la métallurgie des Hauts-de-Seine a saisi le 12 juillet 2013 le tribunal d'instance d'une demande d'annulation des élections ; que l'Union départementale de la CFTC de la Haute-Vienne est intervenue volontairement à l'instance le 30 septembre 2013 ;

Sur le premier moyen du pourvoi n° S 14-60.124 :

Attendu que le syndicat CFTC de la métallurgie des Hauts-de-Seine fait grief au jugement de rejeter les exceptions d'illégalité soulevées par ce syndicat, alors, selon le moyen :

1°/ que la contradiction de motifs équivaut au défaut de motif ; que les motifs du jugement du 21 octobre 2013, dans lequel le tribunal a refusé, dans la même espèce, de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité sont contraires à ceux du jugement critiqué ; qu'en statuant ainsi par motifs contradictoires, le jugement a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que méconnaît les droits de la défense et l'exigence de motivation, le jugement qui ne répond pas à un moyen opérant ; que le syndicat avait développé dans ses conclusions et soutenu oralement que les articles R. 2314-10 et R. 2324-6 du code du travail sont contraires à l'article 8 de la loi informatique et libertés ; que le jugement n'a procédé ni à l'évaluation du caractère sérieux de la question de l'illégalité des dispositions contestées, ni à la motivation de sa décision au regard de la branche du moyen exposé par le demandeur et invoquant le non-respect de l'article 8 de la loi informatique et libertés modifiée ainsi que l'empiétement irrégulier sur la portée des articles 226-19, 226-22 et 226-23 du code pénal ; que le tribunal a violé les articles 455 et 458 du code de procédure civile ainsi que l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3°/ qu'une appréciation générale ne constitue pas une motivation permettant à la Cour de cassation d'exercer son contrôle sur la conformité de la décision attaquée aux règles de droit ; que le tribunal a rejeté l'exception d'illégalité des articles R. 2314-10 et R. 2324-6 du code du travail au seul motif d'ordre général et de pure forme qu' « aucune précision n'a été apportée par la loi sur les conditions et modalités à adopter par décret », que « dès lors, les articles critiqués, ayant toutes les apparences de la légalité, l'exception (...) ne présente pas un caractère sérieux et ne justifie pas la saisine de la juridiction administrative » ; qu'en faisant reposer son rejet sur un motif d'ordre général et de pure forme, le tribunal a violé les articles 455 et 458 du code de procédure civile et l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu, d'abord, qu'à la supposer établie, une contradiction de motifs ne peut être retenue qu'en cas de contradiction entre deux dispositions d'une même décision ;

Attendu, ensuite, que le tribunal, qui a relevé que les modalités du vote électronique consacré par la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économique numérique ont été fixées par le décret n° 2007-602 du 25 avril 2007, lequel soumet les personnes chargées de la gestion et de la maintenance du système informatique à une obligation de confidentialité, a fait ressortir que les articles R. 2314-10 et R. 2324-6 du code du travail sont de nature à garantir la confidentialité des opérations de vote ainsi que la sincérité du scrutin ; qu'il en a exactement déduit que la question de la légalité de ces dispositions ne présentait pas de caractère sérieux, de sorte qu'il n'y avait pas lieu de saisir par voie de question préjudicielle la juridiction administrative ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le deuxième moyen du pourvoi n° S 14-60.124 :

Vu les principes généraux du droit électoral et les articles L. 2314-23 et L. 2324-21 du code du travail ;

Attendu que pour déclarer irrecevable la demande du syndicat CFTC de la métallurgie des Hauts-de-Seine « en annulation des élections professionnelles et tendant à invalider l'accord d'entreprise du 19 avril 2013 et les accords préélectoraux du 17 mai 2013 y afférents », le tribunal retient que M. X..., délégué syndical de la CFTC, a signé les deux accords préélectoraux du 17 mai 2013, que des candidats, dont M. X..., ont été présentés aux élections professionnelles par le président du syndicat CFTC sans émettre de réserves, qu'au regard de la jurisprudence et de ces éléments de fait, le syndicat CFTC de la métallurgie des Hauts-de-Seine est irrecevable à contester la validité des élections et à solliciter leur annulation ;

Attendu cependant que le protocole préélectoral qui répond aux conditions de validité définies par les articles L. 2314-3-1 et L. 2324-4-1 du code du travail peut être contesté devant le juge judiciaire en ce qu'il contiendrait des stipulations contraires à l'ordre public, notamment en ce qu'elles méconnaîtraient les principes généraux du droit électoral ;

Qu'en statuant comme il a fait, alors que le syndicat invoquait une violation du principe de liberté et de sincérité du vote, le tribunal a violé les textes et principes susvisés ;

Et sur le premier moyen du pourvoi n° R 14-60.123 :

Vu les articles R. 2314-28 et R. 2324-24 du code du travail et l'article 2241 du code civil ;

Attendu que pour déclarer irrecevable l'intervention volontaire de l'Union départementale des syndicats CFTC de la Haute-Vienne, le tribunal retient que s'il est de principe que la demande en justice interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion, cette interruption ne profite qu'à celui qui a introduit l'instance, qu'en l'espèce, les résultats des élections contestées ont été proclamés le 26 juin 2013, que l'Union départementale de la CFTC de la Haute-Vienne a donné mandat à son conseil pour la représenter par courrier du 28 septembre 2013, lequel a versé aux débats des conclusions en intervention volontaire le 30 septembre 2013, soit plus de trois mois après la proclamation des résultats de sorte que cette intervention est forclose ;

Attendu cependant que la saisine du tribunal d'instance par toute partie recevable à agir aux fins d'annulation des élections professionnelles, interrompt le délai de forclusion des articles R. 2314-28 et R. 2324-24 du code du travail au bénéfice des autres parties à l'instance dont les demandes tendent aux mêmes fins ;

Qu'en statuant comme il a fait, le tribunal a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi n° R. 14-60.123, sur les troisième, quatrième et cinquième moyens du pourvoi n° S 14-60.124 :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a rejeté les exceptions d'illégalité soulevées par le syndicat CFTC de la métallurgie des Hauts-de-Seine, le jugement rendu le 23 janvier 2014, entre les parties, par le tribunal d'instance de Limoges ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Guéret ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Dekra industrial à payer, d'une part, à l'Union départementale de la CFTC de la Haute-Vienne la somme de 2 000 euros, d'autre part, au syndicat CFTC de la métallurgie des Hauts-de-Seine celle de 1 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre deux mille quatorze.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-60123;14-60124
Date de la décision : 22/10/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Limoges, 23 janvier 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 22 oct. 2014, pourvoi n°14-60123;14-60124


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:14.60123
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