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21/10/2014 | FRANCE | N°13-86057

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 21 octobre 2014, 13-86057


Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Philippe X...,- M. Jean-Claude Y..., tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de sa fille mineure Sophia Y..., partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7e chambre, en date du 10 juin 2013, qui, pour homicide involontaire, a condamné le premier à six mois d'emprisonnement avec sursis et 10 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 9 septembre 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l

'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Vannie...

Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Philippe X...,- M. Jean-Claude Y..., tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de sa fille mineure Sophia Y..., partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7e chambre, en date du 10 juin 2013, qui, pour homicide involontaire, a condamné le premier à six mois d'emprisonnement avec sursis et 10 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 9 septembre 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Vannier, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de Mme le conseiller VANNIER, les observations de la société civile professionnelle CÉLICE, BLANCPAIN et SOLTNER et de la société civile professionnelle GATINEAU et FATTACCINI, la société civile professionnelle GADIOU et CHEVALLIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. le premier avocat général BOCCON-GIBOD ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Saleha Y..., qui a souffert, après son accouchement pratiqué par M. Z..., obstétricien, le 10 janvier 1997, d'une hémorragie de la délivrance traitée par M. X..., anesthésiste réanimateur, a présenté, dans les suites immédiates, un coma végétatif irréversible dû à une encéphalopathie post-anoxique consécutive à un oedème aigu du poumon par surcharge circulatoire ayant entraîné un arrêt cardiaque réversible ; que M. Z...et M. X...ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel pour avoir involontairement causé une incapacité totale de travail supérieure à trois mois sur la personne de Saleha Y..., par imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, le premier, en faisant preuve de passivité et de carence dans le suivi post-opératoire de sa patiente et en s'abstenant de prendre en charge un risque dangereux, le second, en traitant de manière inadaptée et lente l'hémorragie de la délivrance ; que Saleha Y...étant décédée le 1er avril 2005, M. X...a également été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour avoir involontairement causé la mort de sa patiente par un traitement inadapté de l'hémorragie post partum, en créant, par la quantité de produits perfusés, une surcharge circulatoire, sans contrôle de ce remplissage par la mesure de pression veineuse centrale, et en refusant de transférer la patiente dans un service de réanimation où elle aurait pu bénéficier d'une prise en charge différente ; que le tribunal correctionnel a relaxé M. Z...et condamné M. X...pour homicide involontaire et a prononcé sur les intérêts civils ; que M. X..., le ministère public relativement à ce prévenu et la partie civile ont relevé appel de ce jugement ;
En cet état ;
Sur le moyen unique de cassation, proposé pour M. X..., pris de la violation des article 591 et 593 du code de procédure pénale et des articles 121-3 et 221-6 du code pénal défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, défaut de réponse aux conclusions ;
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré M. X...coupable de l'infraction d'homicide involontaire et l'a condamné à la peine de six mois d'emprisonnement avec sursis ;
" aux motifs adoptés des premiers juges ; que s'agissant du docteur X..., qu'il est lui reproché, sous la seule qualification pénale restant applicable, d'avoir " par maladresse, imprudence, inattention, négligence, ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, involontairement causé la mort de Saleha Y...en l'espèce par un traitement inadapté de l'hémorragie du post partum présenté par Saleha Y...en créant, par la quantité de produits perfusés, une surcharge circulatoire, sans contrôle de ce remplissage par la mesure de la pression veineuse centrale et en refusant de transférer la patiente dans une service de réanimation où elle aurait pu bénéficier d'une prise en charge différente ", c'est-à-dire d'avoir commis une faute au sens du 3'alinéa de l'article 121-3 du code pénal, directement cause du dommage ; qu'il résulte des conclusions du rapport d'expertise établi par les professeurs A...et B...et confirmées par le second collège expertal lequel a ajouté que le M. X...avait adopté une " pratique de la réanimation n'ayant pas suivi les normes professionnelles acceptées " ; que la cause de l'oedème pulmonaire ayant entraîné l'arrêt cardiaque et les lésions cérébrales y consécutives, réside essentiellement dans le choix réalisé par cet anesthésiste réanimateur des liquides perfusés, l'absence de mise en place d'une voie veineuse centrale et le transfert tardif de la patiente dans une unité de réanimation ; qu'en effet qu'il résulte de l'exposé chronologique ci-dessus ; que le M. X..., après avoir administré une dose importante de Syntocinon (45 unités autotal ayant été passées à 08h20, heure du premier malaise rapport C...page 23), médicament qui, à cette dose, a un effet antidiurétique rapport C...page 26, a administré à Saleha Y...deux ampoules de Nalador à 11 h00 et deux nouvelles ampoules à 17h30, alors, d'une part, que cette molécule a une inter-action médicamenteuse avec les ocytociques de type Syntocinon rapport C...page 26, et, d'autre part, que le dossier de la procédure révèle, que si la prescription de Nalador était courante à l'époque des faits, ce médicament ne possédait pas d'autorisation de mise sur le marché pour les hémorragies de la délivrance, ce dont le M. X...a d'ailleurs implicitement convenu à l'audience au cours de laquelle il a déclaré (cf l'exposé ci-dessus) à propos de ce médicament : " à cette époque, il n'était pas encore reconnu complètement ; j'ai pris la décision de lui donner ce médicament " ; que, de plus, le Vidal 1997 attirait tout particulièrement l'attention des praticiens sur le risque éventuel d'accident de la pression sanguine pulmonaire pouvant aller jusqu'à l'oedème pulmonaire (le Laboratoire Schering, fabricant cette molécule, faisant état d'1 cas pour 1 000), et sur le strict respect des règles de posologie : pas plus de trois ampoules en 24 heures, précisant qu'un tel dépassement n'a pas pour conséquence d'améliorer les effets thérapeutiques mais de majorer le risque de survenue d'effets secondaires ou d'événements indésirables ; qu'ainsi donc si le choix du Nalador pour lutter contre l'hémorragie du post-partum pourrait, à lui seul, ne pas apparaître fautif, en revanche le non respect de la posologie-qui est démontré, quoi qu'en dise le M. X...-l'était incontestablement ; que d'autre part que le premier rapport d'expertise a fait le bilan des entrées et des sorties de liquides, et constatait comme le second rapport, bien que celui-ci avec une erreur de soustraction) un excédent de 2 400 ml, cet " excès d'apport liquidien lors du remplissage vasculaire, car le volume de l'hémorragie avait été surestimé " ayant entraîné l'oedème aigu du poumon ; que M. X...a reproché aux experts de ne pas avoir comptabilisé la diurèse de la matinée, dès la prise en charge en réanimation de la patiente, estimant dès lors à 4 250 ml et non à 3 500 ml le volume des urines ; qu'il a, par ailleurs, évalué les pertes insensibles (pertes d'eau naturelles liées à la transpiration, à la respiration ainsi qu'à la température de la patiente) à 1 250 ml et les pertes liées au volume hémorragique à 1 500 ml correspondant à l'équivalent de 4 culots globulaires si l'on considère une hémoglobine à 7, 4 g/ 1, et a donc estimé que le bilan des entrées et des sorties était équilibré, ainsi qu'il l'a redit à l'audience : " le bilan des entrées et des sorties ont été équivalentes dans le cas de Saleha Y..." alors surtout pour minimiser les apports que " 500 ml veut dire qu'on met un flacon de 500 ml mais on n'injecte pas cette dose systématiquement " et que " à 16 heures (..) le flacon de 500 mg n'était pas complètement fini (...) le fait de placer un flacon ne veut pas dire qu'il est injecté complètement " ; mais qu'ainsi que l'a relevé le Magistrat Instructeur, en page 15 de leur rapport d'expertise, MM. A...et B...mentionnent expressément que la diurèse de la journée, de 06h15 à 23h00, est de 3, 5 litres, et ont estimé les pertes insensibles à 1 000 ml, le volume hémorragique étant, quant à lui, impossible à quantifier ; que, de plus, page 2 de leur rapport, les premiers experts mentionnent l'existence de 13 feuillets de surveillance journalière, heure par heure, faisant notamment état de la diurèse horaire ; qu'ainsi donc il est évident que la diurèse a bien été comptabilisée sur l'ensemble de la journée pour le calcul de l'évaluation de l'excès de remplissage ; que d'ailleurs lors de l'interrogatoire du 10 juin 2004, le M. X...avait lui-même déclaré que la diurèse de la journée, qu'il qualifiait d'importante, avait été de l'ordre de 3 à 4 litres, ce qui rejoint le décompte fait par les premiers experts ; que, de surcroît, le M. X..., à qui les experts avaient demandé " pourquoi n'avez-vous pas transfusé de culots globulaires à Saleha Y...alors que l'hémoglobine était à 4, 7 g ? ", avait répondu que ce résultat biologique lui avait paru faux en l'état du tableau clinique ; il ajoutait avoir pensé que la patiente avait reçu de grandes quantités de liquide sous forme de perfusion ce qui avait provoqué une hémodilution (dilution de toutes les constantes biologiques) ; il avait donc réduit le volume des perfusions et s'était donné quelques heures de réflexion (page12 du rapport) ; qu'il a d'ailleurs confirmé ce point à la barre " si elle était à 4, 9 grammes d'hémoglobine il y avait effectivement danger ; à ce taux, la personne est blafarde, se sent mal ; mais nous avions tout le contraire ; c'est la raison pour laquelle je n'ai pas fait d'analyses complémentaires ; c'est pourquoi je pense que les résultats donnés par la machine sont faux " ; qu'ainsi donc si le bilan des entrées et des sorties avait été équilibré, comme l'affirme le M. X..., il n'aurait pas eu besoin de se laisser le temps de la réflexion et aurait certainement réagi avec plus de diligence face à un taux d'hémoglobine à 4, 9 g/ l qui, même si on le considérait comme faussé, demeurait tout de même inquiétant et méritait que l'on procédât à des examens complémentaires comme le suggèrent les experts dans leurs conclusions ; qu'il est donc établi que le bilan des entrées et des sorties fait apparaître un excédent de 2 400 ml qui est trop important pour représenter, le volume hémorragique, d'autant plus que, tant les médecins que les sages-femmes ont décrit un faible saignement et non une hémorragie franche ; que, de surcroît, même réduit à 1. 400 ml, l'excès de perfusion est, selon les experts C...et Cupa, mal toléré chez une patiente qui avait pris 16 kgs pendant la grossesse et sur les membres inférieurs de laquelle existaient des oedèmes et qui présentait donc un état de rétention hydroélectrolitique (qui avait d'ailleurs incité le M. X...à la classer ASA 2) ; que l'excès d'apport liquidien lors du remplissage vasculaire résultant d'une maladresse fautive est donc établi ; qu'enfin que le refus de transfèrement de Saleha Y...en service de réanimation ; que le M. X...a encore revendiqué à l'audience, transfèrement qui était jugé utile par M. Z...et par Mme D..., aurait pu permettre un autre type de prise en charge de la patiente dans le cadre de décisions adoptées collégialement ; que M. X...a produit un extrait du dossier médical de Saleha Y...faisant état des recherches qu'il aurait réalisées pour faire admettre sa patiente en réanimation, mais cette feuille de surveillance a permis de constater que les annotations faisant état de ses diligences sont intervenues, dans la nuit du 10 au 11 janvier 1997, à partir de minuit, alors que Saleha Y...présentait déjà les premiers signes d'oedème pulmonaire, et absolument pas au moment où le M. Z...en a fait la demande ; Donc que M. X...a commis des manquements dans le cadre du traitement de l'hémorragie du post partum présentée par Saleha Y...en créant, par le surdosage et l'excès de quantité de produits perfusés, une surcharge circulatoire, sans contrôle de ce remplissage par la mesure de la pression veineuse centrale et en refusant de transférer la patiente dans un service de réanimation où elle aurait pu bénéficier d'une prise en charge différente ; Que même si le décès de Saleha Y...est survenu à distance du geste médical fautif, les manquements établis à l'encontre de M. X...,- qui n'a pas accompli, au regard des connaissances et de l'état de la science et de l'art médical de l'époque, les diligences normales compte tenu de ses compétences d'anesthésiste-réanimateur, sont la cause essentielle et déterminante de ce décés ; qu'en effet aux termes de leurs conclusions datées du 10 mai 2010, les professeurs E...et F... considèrent que l'arrêt cardiaque survenu au décours de la réanimation post-partum étant responsable de l'état neurologique de la patiente, le décès de celle-ci, dont l'origine réside dans une pneumopathie d'inhalation, complication fréquente de la nutrition entérale mise en place chez les patients en coma végétatif, est en lien certain avec les manquements mis en évidence par les premiers experts ;

" aux motifs propres que quant à M. X...à qui est reproché l'homicide involontaire de Saleha Y..., il convient de rappeler qu'au jour de l'accouchement, 10 janvier 1997, et en application du décret 94-1050 du 5 décembre 1994 relatif aux conditions techniques de fonctionnement des établissements de santé en ce qui concerne la pratique de l'anesthésie codifiée sous les articles D 712-45 et suivants du code de la santé publique (dispositions abrogées en décembre 2004 et remplacées par les articles D6124-97 et suivants) la surveillance post-interventionnelle par principe confiée à un médecin anesthésiste-réanimateur, avait pour objet de contrôler les effets résiduels des médicaments anesthésiques et leurs éliminations et de faire face, en tenant compte de l'état de santé du patient, aux complications éventuelles liées à l'intervention ou à l'anesthésie et qu'en outre le personnel para médical était placé sous la responsabilité médicale du médecin anesthésiste-réanimateur qui devait pouvoir intervenir sans délai, ce médecin décidant, notamment, du transfert du patient dans le secteur d'hospitalisation et les modalités de ce transfert ; que les premiers juges par des motifs que la cour fait siens, ont caractérisé les manquements du docteur X..., qui, non seulement, a fait usage de produits non autorisés à l'époque mais encore les a administrés en surdose, ce qui a généré une surcharge circulatoire non contrôlée et a imposé, malgré l'avis contraire de son confrère, le maintien de Saleha Y...dans son service en refusant de la transférer dans le service de réanimation une prise en charge spécifique aurait pu être faite ; que ces manquements sont la cause directe et certaine de l'atteinte à l'intégrité physique de Saleha Y...qui est tombée dans un coma végétatif irréversible au cours duquel, et en raison de cet état, Saleha Y...est décédée d'un syndrome de Mendelson » ;
" alors que l'article L. 221-6 du code pénal exige, pour recevoir application, que soit constatée l'existence certaine d'un lien de causalité entre la faute du prévenu et le décès de la victime ; que les juges du fond ont constaté qu'à la suite des soins prodigués par M. X..., Saleha Y...a été plongée dans un état de coma végétatif et qu'elle est décédée huit années plus tard d'une pneumopathie d'inhalation dite syndrome de Mendelson ; que pour déclarer le prévenu coupable d'homicide involontaire, les juges du fond ont considéré qu'il n'avait pas accompli les diligences normales compte tenu de ses compétences d'anesthésiste réanimateur et que ces manquements étaient la cause de l'état neurologique de la patiente, décédée ultérieurement d'une pneumopathie d'inhalation ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si cette pneumopathie d'inhalation n'était pas le seul fait en relation de causalité avec le décès, la cour d'appel a privé de base légale sa décision au regard des textes susvisés " ;
Attendu que, pour déclarer M. X...coupable de l'infraction d'homicide involontaire, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors qu'elle a démontré l'existence d'un lien de causalité direct entre les fautes du prévenu et le décès de la victime, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le premier moyen de cassation, proposé pour M. Y..., pris de la violation des articles 121-3, 222-19 du code pénal, 1147, 1382, 1383 du code civil, 470-1, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a dit que M. Z...n'avait commis aucune faute lors de l'accouchement de Saleha Y...et de ses suites, et dit n'y avoir lieu à application de l'article 470-1 du code de procédure pénale ;
" aux motifs qu'il ne peut être imputé au M. Z...aucune faute lors de l'accouchement et ses suites qui serait en relation directe et même indirecte et certaine avec les blessures dont Saleha Y...a été, un temps, victime ; qu'aucun manquement aux règles de l'art et aux données connues de la science lors de l'accouchement ne peut lui être imputé, l'accouchement a été pratiqué normalement selon les processus idoines au regard de l'état de santé de la patiente et de l'enfant à naître et la délivrance a été complète dés l'accouchement, ainsi il ne peut être imputé au M. Z...d'être parti trop rapidement, sa patiente étant au regard de l'épreuve subie dans un état de santé considéré comme " normal " et relevant du suivi du médecin réanimateur, et le M. Z...a assuré le suivi de sa patiente dès qu'il a été alerté par la sage-femme, en faisant, compte tenu de ses interventions à l'extérieur de la clinique, intervenir son associé présent sur les lieux pour s'assurer qu'aucun résidu indésirable persistait par une révision utérine, laquelle a confirmé une délivrance effectivement complète et a permis la suture des plaies causées pour l'accouchement, mais encore il est venu au chevet de sa patiente dans l'après-midi, a proposé vainement à son confrère qui en avait prioritairement la responsabilité un transfert en réanimation puis a pris téléphoniquement des nouvelles de celle-ci qui paraissait bien aller, plus tard dans l'après-midi sans être informé des résultats connus des analyses qui étaient alarmantes ; qu'ainsi à bon droit les premiers juges, par des motifs que la cour adopte aussi, 7 sont-ils entrés en voie de relaxe du M. Franquebalme de l'infraction de blessures involontaires ;
" et aux motifs que M. Y...personnellement et ès qualités est recevable en son action fondée sur les dispositions de l'article 470-1 du code de procédure pénale puisque la juridiction répressive saisie, sur ordonnance d'un magistrat instructeur, de poursuites exercées pour une infraction non intentionnelle au sens des deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article 121-3 du code pénal, a prononcé la relaxe du docteur Z...et que cette partie civile a demandé, avant la clôture des débats devant les premiers juges, l'application des règles du droit civil afin d'obtenir la réparation des dommages subis résultants des faits qui ont fondé la poursuite ; que l'obligation de tout médecin de donner à son patient des soins attentifs, consciencieux et conformes aux données acquises de la science emporte, lorsque plusieurs médecins collaborent à l'examen ou au traitement de ce patient, l'obligation pour chacun d'eux, d'assurer un suivi de ses prescriptions afin d'assurer ses responsabilités personnelles au regard de ses compétences ; qu'il ne peut être imputé au M. Z...aucune faute, au sens des articles 1382 et 1147 du code civil, qui serait en lien de causalité avec l'atteinte à l'intégrité physique de Saleha Y...; qu'en effet si les médecins experts ont relevé une perte de temps dans le traitement obstétrical de l'hémorragie, le docteur Z...dès qu'il a été alerté, s'est fait substituer par son associé présent sur les lieux lequel est intervenu immédiatement et a donné les soins adaptés à la patiente ; qu'il ne peut pas plus être imputée au M. Z...une carence dans le suivi post-opératoire puisqu'il a pris le relais de son associé à son retour dans la clinique auprès de sa patiente et s'est heurté, alors qu'il proposait le transfert de sa patiente dans un service spécialisé à l'avis contraire de son confrère, qui avait à l'époque pouvoir de décision ; qu'enfin il n'a pas manqué de prendre des nouvelles de sa patiente en cours d'après-midi qui paraissaient rassurantes, la mère jouant avec son enfant, aucune information ne lui étant donnée sur les résultats biologiques disponibles et susceptibles de le faire réagir au regard de leur teneur ; que par suite M. Y...personnellement et ès qualité doit être débouté de ses prétentions dirigées contre le docteur Z...;
" 1°) alors que, se rend coupable d'une faute d'imprudence le médecin qui n'accompli pas les diligences normales et les vérifications nécessaires ; qu'en l'espèce, il est constant que lorsque le docteur Z...a rendu visite à Saleha Y..., aux alentours de 16h30, il a pris connaissance des résultats des examens médicaux de sa patiente, lesquels révélaient une baisse du taux d'hémoglobine, ce qui, selon les experts, témoignait d'un saignement persistant ou d'une hémodilution ; qu'il est cependant reparti de la clinique sans effectuer ou ordonner d'examens complémentaires aux fins d'identifier la cause de cette anémie ; que ce faisant, il a fait preuve d'une carence qui a concouru à la dégradation de l'état de santé de la victime ; qu'en considérant qu'il ne peut être reproché au docteur Z...aucune faute lors de l'accouchement et ses suites qui serait en relation certaine avec les blessures dont Saleha Y...a été victime, quand le prévenu n'a pas accompli les diligences normales compte tenu de sa qualité, de sa compétence et des moyens dont il disposait, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 121-3 et 222-19 du code pénal ;
" 2°) alors que, selon l'article 470-1 du code de procédure pénale, le tribunal saisi de poursuites pour blessures involontaires qui prononce une relaxe demeure compétent pour accorder, en application des règles de droit civil, réparation de tous les dommages résultant des faits qui ont fondé la poursuite ; qu'en l'espèce, en ne se préoccupant pas davantage de Saleha Y..., cependant qu'il savait qu'elle présentait une anémie lorsqu'il est venu à son chevet vers 16h30, le docteur Z...a manqué à son obligation d'apporter à sa patiente tous les soins que son état de santé rendait nécessaires ; qu'en déboutant M. Y...de sa demande de réparation fondée sur les articles 470-1 du code de procédure pénale et 1147 du code civil, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles précités " ; Attendu que, pour dire que M. Z...n'avait commis aucune faute lors de l'accouchement de Saleha Y...et de ses suites et n'y avoir lieu à application de l'article 470-1 du code de procédure pénale, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en cet état, et dès lors qu'elle a sans insuffisance ni contradiction et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, exposé les motifs pour lesquels elle estimait que la preuve d'une faute civile, démontrée à partir et dans les limites des faits objets de la poursuite, n'était pas rapportée à la charge de M. Z..., la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, proposé pour M. Y...pris de la violation des articles 731 du code civil, 2, 3, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a débouté M. Y...de sa demande d'indemnisation au titre de la perte de chance de survie ;
" aux motifs qu'aucune indemnité pour perte de chance ne peut être accordée, le droit de vivre jusqu'à un âge statistiquement déterminé n'étant pas certain au regard des aléas de la vie et des fluctuations de l'état de santé de toute personne, pour être tenu pour un droit acquis transmissible à ses héritiers lorsque survient un événement qui emporte le décès ;
" alors que toute personne victime d'une infraction a droit d'obtenir la réparation du dommage, quelle qu'en soit la nature, dont elle a personnellement et directement souffert ; que le droit à réparation résultant du préjudice lié à la perte de chance de survie qui résulte de la souffrance morale éprouvée par la victime, avant son décès et due à la conscience d'une vie abrégée, se transmet à son décès à ses héritiers ; qu'en l'espèce, M. Y...sollicitait dans le cadre de son action successorale la réparation de la perte de chance de survie subie par son épouse en raison des manquements reprochés aux prévenus ; qu'en le déboutant de sa demande par les motifs repris au moyen, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision " ;
Attendu que, pour débouter les héritiers de la victime de leur demande de réparation du préjudice de cette dernière résultant de sa perte de chance de voir sa vie prolongée conformément à l'espérance de vie d'une personne de son âge, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que, contrairement à ce qui est soutenu au moyen, il n'avait pas été demandé réparation de la souffrance morale éprouvée par la victime avant son décès et due à la conscience d'une vie abrégée, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale.
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt et un octobre deux mille quatorze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 13-86057
Date de la décision : 21/10/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10 juin 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 21 oct. 2014, pourvoi n°13-86057


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.86057
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