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15/10/2014 | FRANCE | N°13-18384

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 15 octobre 2014, 13-18384


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Constate qu'à la suite de la liquidation judiciaire de la société The Congres House, l'instance a été reprise par Mme X..., agissant en qualité de liquidateur de cette société ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 1er mars 2013), que la commune de Saint-Esprit (la commune), qui, par contrat du 15 juin 2001, avait donné en location une salle de spectacles à la société World privilège club, aux droits de laquelle se trouve la société The Congres House (la société), a résilié cet

te convention par lettre du 5 décembre 2006 ; que la société, revendiquant l'ap...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Constate qu'à la suite de la liquidation judiciaire de la société The Congres House, l'instance a été reprise par Mme X..., agissant en qualité de liquidateur de cette société ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 1er mars 2013), que la commune de Saint-Esprit (la commune), qui, par contrat du 15 juin 2001, avait donné en location une salle de spectacles à la société World privilège club, aux droits de laquelle se trouve la société The Congres House (la société), a résilié cette convention par lettre du 5 décembre 2006 ; que la société, revendiquant l'application du statut des baux commerciaux, a contesté la validité de ce congé devant les juridictions de l'ordre judiciaire ; que la commune a soulevé une exception d'incompétence au profit des juridictions administratives ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme X..., ès qualités, fait grief à l'arrêt de déclarer les juridictions de l'ordre judiciaire incompétentes pour connaître du litige, alors, selon le moyen :
1°/ que, d'une part, un service public industriel et commercial suppose la satisfaction d'un intérêt général et sa délégation, une mise en concurrence ; que pour écarter la compétence de l'ordre judiciaire pour statuer sur la résiliation d'un contrat de location ayant pour objet la gestion technique et financière d'une salle appartenant à la commune, la cour d'appel a considéré que cet objet avait la nature d'une délégation de service public industriel et commercial ; qu'en statuant ainsi, d'une part, sans caractériser l'intérêt général qui se serait attaché à cette activité exercée en toute autonomie par le locataire, autorisé à louer ou produire toutes manifestations à caractère public ou privé et cela sans liste exhaustive (concerts, meetings, événementiel, sports, meetings d'entreprises, colloques, foires, salons ou assimilés, etc.), et, d'autre part, sans que sa délégation n'ait été précédée d'une mise en concurrence comme le prévoit l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales, la cour d'appel a violé, par fausse qualification, la loi des 16-24 août 1790, ensemble, le décret du 16 fructidor an III ;
2°/ que, d'autre part, la clause exorbitante du droit commun est celle qui ne pourrait par nature se trouver dans un contrat analogue de droit privé ; que pour juger que la rupture du contrat convenu entre la commune et la société portant location d'une salle ne relevait pas de la compétence du juge judiciaire, la cour d'appel a retenu 1) l'existence d'une clause prévoyant l'obligation de mise à disposition de la salle à la commune sans contrepartie plusieurs fois par an pour l'organisation de ses propres manifestations, 2) la mise à disposition quatre fois par an de la salle à des oeuvres caritatives pour l'image de la commune, 3) la mise à disposition d'un électricien agent communal, 4) l'adoption par le locataire en accord avec le propriétaire de la dénomination « The Congres House, Ville du Saint Esprit », et 5) l'obligation de diffuser l'activité du site ; qu'en statuant ainsi, cependant que la simple mise à disposition ponctuelle du local au profit du bailleur, le choix d'une dénomination et le souci du renom de l'activité dans l'intérêt commun des contractants, et la mise à disposition par le bailleur d'un agent contre facturation des prestations de maintenance n'étant pas insusceptibles par leur nature de se trouver dans un contrat de droit privé, dès lors que l'activité elle-même n'était soumise à aucun contrôle de la part de la commune, que le locataire faisait valoir sans être contredit que le loyer versé tenait nécessairement compte des contraintes nées des deux types de mises à disposition, que les initiatives favorisant l'image du site correspondaient à l'intérêt bien compris des deux parties, et que la maintenance, comprenant l'électricien communal, était facturée au locataire, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la présence de clauses exorbitantes justifiant la qualification de contrat administratif, a violé la loi des 16-24 août 1790, ensemble, le décret du 16 fructidor an III ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le contrat conclu entre les parties faisait obligation au preneur de mettre les locaux à disposition de la commune pour l'organisation de manifestations prévues avec une périodicité déterminée et ne donnant pas lieu à redevance, la cour d'appel a jugé à bon droit qu'une telle clause était exorbitante du droit commun, de sorte que la convention revêtait un caractère administratif ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en sa première branche qui critique des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen, qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze octobre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour Mme X..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société The Congres House.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré les juridictions de l'ordre judiciaire incompétentes pour connaître des demandes de la Société The Congres House contre la commune de Saint-Esprit ;
AUX MOTIFS QUE le contrat passé le 15 juin 2001 entre la Commune du Saint-Esprit et la société World Privilege Club aux droits de laquelle vient la société The Congres House, est intitulé « PROTOCOLE D'ACCORD CONTRAT DE LOCATION » ; que l'objet de ce contrat est de confier à la partie dénommée « locataire » la gestion technique et financière de la salle de spectacle et de dépendances, à l'exception de la salle de danse et du parking ; que la commune du Saint-Esprit a imposé au locataire le nom du site « The Congres House, Ville de Saint-Esprit », dans le but exprès de permettre la reconnaissance rapide du site par le grand public facilitant le plan de communication, la substitution d'une SARL « The Congres House »devant être constituée dans un certain délai, l'obligation de faire connaître par tous moyens le site d'exploitation, à respecter le cahier des charges sécurité de la commission préfectorale, à prévenir les administrations dont le propriétaire, de toutes manifestation prévue ; que le montant de la redevance a été fixé avec des tarifs différents en fonction du type de manifestation ; que par ailleurs, un certain nombre de manifestations, ne donnant pas lieu à redevance, ont été prévues avec une périodicité déterminée, devant être organisées par le locataire de concert avec le propriétaire, pour mettre l'accent sur l'implication de la commune à aider les défavorisés, ainsi que des manifestations organisées par le propriétaire lui-même ; que la Commune du Saint-Esprit met à disposition de la salle l'électricien qu'elle rémunère elle même, et les règlements seront opérés sur un titre de recette devant être émis chaque mois sur délibération du conseil municipal ; qu'il en résulte un faisceau d'indices suffisant à mettre en évidence l'existence au sein de la commune d'un service public à caractère industriel et commercial, dont une partie seulement a été déléguée à la société The Congres House, pour une durée limitée qui n'a plus été renouvelée à compter du 15 juin 2007 ; que le contrat ne peut donc pas être qualifié de bail commercial ; qu'il est de nature administrative par son objet et les clauses exorbitantes du droit commun relevées ci-dessus affectant ses modalités d'exécution ; que dans ce cadre juridique, en l'absence de question présentant un caractère sérieux pour justifier une question préjudicielle, la contestation relative au refus de renouvellement de l'occupation de la salle, et à l'indemnisation de l'éviction dont se plaint la société The Congres House et l'action de la commune en paiement de redevances impayées, ne peuvent ressortir à la compétence judiciaire, en dépit de la clause attributive incluse au contrat, qui doit être réputée non avenue dans un contrat administratif ; que par ailleurs, les actes postérieurs tendant à la reprise de possession des lieux par la commune ont été validés par la juridiction administrative, et la position d'occupante sans titre de la société The Congres House ne permet pas de constater l'existence d'une voie de fait qui aurait autorisé les juridictions de l'ordre judiciaire à connaître des demandes indemnitaires postérieures à juin 2007 ; que le jugement du 4 décembre 2007 sera par conséquent infirmé en toutes ses dispositions, les juridictions de l'ordre judiciaire déclarées incompétentes et la partie renvoyée à mieux se pourvoir ;
1°) ALORS D'UNE PART QU'un service public industriel et commercial suppose la satisfaction d'un intérêt général et sa délégation, une mise en concurrence ; que pour écarter la compétence de l'ordre judiciaire pour statuer sur la résiliation d'un contrat de location ayant pour objet la gestion technique et financière d'une salle appartenant à la commune de Saint-Esprit, la cour d'appel a considéré que cet objet avait la nature d'une délégation de service public industriel et commercial ; qu'en statuant ainsi, d'une part sans caractériser l'intérêt général qui se serait attaché à cette activité exercée en toute autonomie par le locataire, autorisé à louer ou produire toutes manifestations à caractère public ou privé et cela sans liste exhaustive (concerts, meetings, évènementiel, sports, meetings d'entreprises, colloques, foires, salons ou assimilés, etc.), et, d'autre part, sans que sa délégation n'ait été précédée d'une mise en concurrence comme le prévoit l'article L 1411-1 du code général des collectivités territoriales, la cour d'appel a violé, par fausse qualification, la loi des 16-24 août 1790, ensemble, le décret du 16 fructidor an III ;
2°) ALORS D'AUTRE PART QUE la clause exorbitante du droit commun est celle qui ne pourrait par nature se trouver dans un contrat analogue de droit privé ; que pour juger que la rupture du contrat convenu entre la commune de Saint-Esprit et la Société The Congres House portant location d'une salle ne relevait pas de la compétence du juge judiciaire, la cour d'appel a retenu 1) l'existence d'une clause prévoyant l'obligation de mise à disposition de la salle à la commune sans contrepartie plusieurs fois par an pour l'organisation des ses propres manifestations, 2) la mise à disposition quatre fois par an de la salle à des oeuvres caritatives pour l'image de la commune, 3) la mise à disposition d'un électricien agent communal, 4) l'adoption par le locataire en accord avec le propriétaire de la dénomination « The Congres House, Ville du Saint Esprit », et 5) l'obligation de diffuser l'activité du site ; qu'en statuant ainsi, cependant que la simple mise à disposition ponctuelle du local au profit du bailleur, le choix d'une dénomination et le souci du renom de l'activité dans l'intérêt commun des contractants, et la mise à disposition par le bailleur d'un agent contre facturation des prestations de maintenance n'étant pas insusceptibles par leur nature de se trouver dans un contrat de droit privé, dès lors que l'activité elle-même n'était soumise à aucun contrôle de la part de la commune, que le locataire faisait valoir sans être contredit que le loyer versé tenait nécessairement compte des contraintes nées des deux types de mises à disposition, que les initiatives favorisant l'image du site correspondaient à l'intérêt bien compris des deux parties, et que la maintenance, comprenant l'électricien communal, était facturée au locataire, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la présence de clauses exorbitantes justifiant la qualification de contrat administratif, a violé la loi des 16-24 août 1790, ensemble, le décret du 16 fructidor an III.
SECOND MOYEN (subsidiaire) DE CASSATION
Le moyen fait grief à la cour d'appel d'avoir refusé de poser au juge administratif la question préjudicielle de savoir si un contrat ayant pour objet de confier au locataire la gestion technique et financière d'une salle appartenant à une collectivité publique dans laquelle il peut organiser les manifestations de son choix peut être regardé comme ayant la nature d'une délégation de service public industriel et commercial ;
AUX MOTIFS QUE le contrat passé le 15 juin 2001 entre la Commune du Saint-Esprit et la société World Privilege Club aux droits de laquelle vient la société The Congres House, est intitulé « PROTOCOLE D'ACCORD CONTRAT DE LOCATION » ; que l'objet de ce contrat est de confier à la partie dénommée « locataire » la gestion technique et financière de la salle de spectacle et de dépendances, à l'exception de la salle de danse et du parking ; que la commune du Saint-Esprit a imposé au locataire le nom du site « The Congres House, Ville de Saint-Esprit », dans le but exprès de permettre la reconnaissance rapide du site par le grand public facilitant le plan de communication, la substitution d'une SARL « The Congres House »devant être constituée dans un certain délai, l'obligation de faire connaître par tous moyens le site d'exploitation, à respecter le cahier des charges sécurité de la commission préfectorale, à prévenir les administrations dont le propriétaire, de toutes manifestation prévue ; que le montant de la redevance a été fixé avec des tarifs différents en fonction du type de manifestation ; que par ailleurs, un certain nombre de manifestations, ne donnant pas lieu à redevance, ont été prévues avec une périodicité déterminée, devant être organisées par le locataire de concert avec le propriétaire, pour mettre l'accent sur l'implication de la commune à aider les défavorisés, ainsi que des manifestations organisées par le propriétaire lui-même ; que la Commune du Saint-Esprit met à disposition de la salle l'électricien qu'elle rémunère elle même, et les règlements seront opérés sur un titre de recette devant être émis chaque mois sur délibération du conseil municipal ; qu'il en résulte un faisceau d'indices suffisant à mettre en évidence l'existence au sein de la commune d'un service public à caractère industriel et commercial, dont une partie seulement a été déléguée à la société The Congres House, pour une durée limitée qui n'a plus été renouvelée à compter du 15 juin 2007 ; que le contrat ne peut donc pas être qualifié de bail commercial ; qu'il est de nature administrative par son objet et les clauses exorbitantes du droit commun relevées ci-dessus affectant ses modalités d'exécution ; que dans ce cadre juridique, en l'absence de question présentant un caractère sérieux pour justifier une question préjudicielle, la contestation relative au refus de renouvellement de l'occupation de la salle, et à l'indemnisation de l'éviction dont se plaint la société The Congres House et l'action de la commune en paiement de redevances impayées, ne peuvent ressortir à la compétence judiciaire, en dépit de la clause attributive incluse au contrat, qui doit être réputée non avenue dans un contrat administratif ; que par ailleurs, les actes postérieurs tendant à la reprise de possession des lieux par la commune ont été validés par la juridiction administrative, et la position d'occupante sans titre de la société The Congres House ne permet pas de constater l'existence d'une voie de fait qui aurait autorisé les juridictions de l'ordre judiciaire à connaître des demandes indemnitaires postérieures à juin 2007 ; que le jugement du 4 décembre 2007 sera par conséquent infirmé en toutes ses dispositions, les juridictions de l'ordre judiciaire déclarées incompétentes et la partie renvoyée à mieux se pourvoir ;
ALORS QU'en cas de difficulté sérieuse de qualification de contrat administratif par son objet, en l'occurrence de l'assimilation à la délégation d'un service public industriel et commercial d'un contrat de location ayant pour objet de confier la gestion financière et technique d'une salle appartenant à une commune à un locataire libre d'en faire l'usage de son choix, le juge judiciaire doit poser la question au juge administratif ; qu'en refusant de le faire, cependant que la difficulté de la question résultait de son énoncé même, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé la loi des 16-24 août 1790, ensemble l'article 49 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 13-18384
Date de la décision : 15/10/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Fort-de-France, 01 mars 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 15 oct. 2014, pourvoi n°13-18384


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.18384
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