LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à M. et Mme X... du désistement de leur pourvoi principal ;
Met Mme Y... hors de cause ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 13 septembre 2011), que M. et Mme X... ont vendu à M. et Mme Z..., par l'intermédiaire de Mme A... exerçant sous l'enseigne C2S Immobilier, une maison située sur le territoire de la commune de Caumont-sur-Durance (la commune) ; que la commune a revendiqué la propriété de la cour contiguë à la maison ; que les acquéreurs, soutenant que leur consentement avait été vicié par une erreur substantielle sur la consistance de la chose vendue, ont assigné leurs vendeurs en annulation de la vente et en remboursement du prix, ainsi que l'agence immobilière et le notaire en remboursement des frais d'agence et des frais d'acte ;
Sur les premier et deuxième moyens du pourvoi incident, réunis :
Vu l'article 1315 du code civil ;
Attendu que pour annuler la vente pour erreur sur la substance de la chose vendue, l'arrêt retient que M. et Mme X... ne peuvent pas se prévaloir d'avoir acquis par prescription la propriété de la cour contiguë à la maison, s'agissant d'un espace faisant partie du domaine public, non déclassé et imprescriptible ;
Qu'en statuant ainsi, par simple affirmation et par des motifs ne permettant pas de caractériser l'appartenance de la cour litigieuse au domaine public, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le troisième moyen du pourvoi incident :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation prononcée sur le deuxième moyen du pourvoi incident entraîne la cassation par voie de conséquence de la disposition critiquée par le troisième moyen du pourvoi incident ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il prononce la nullité du contrat de vente et condamne Mme A... exerçant sous l'enseigne C2S Immobilier à payer à M. et Mme Z... la somme de 8 000 euros en remboursement des frais d'agence, l'arrêt rendu le 13 septembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes, autrement composée ;
Condamne M. et Mme X... et M. et Mme Z... aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit octobre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, aux Conseils, pour Mme A....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, confirmatif à cet égard, d'AVOIR prononcé la nullité pour erreur sur la substance de la vente immobilière du 12 mai 2006, régularisée par acte authentique du 22 août 2006 ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur et Madame Z... fondent leur action sur l'erreur sur la substance de la chose vendue et l'article 1110 du Code civil, soutenant qu'ils entendaient acheter leur maison avec la cour attenante et qu'ils ont découvert après l'achat que la cour ne leur avait pas été vendue ; qu'ils prétendent l'établir par les mentions de l'acte et par la production d'une correspondance de la commune de CAUMONT et du plan cadastral qui sera évoqué ci-après ; qu'aux termes de l'article 552 du code civil, la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous s que lorsque la vente porte sur une parcelle totalement ou partiellement bâtie, la description du bâti revêt un caractère indicatif et l'omission d'un élément dans cette description n'implique pas qu'il n'a pas été transmis; qu'en reprenant la description du bien figurant dans l'origine de propriété, donc sans l'indication de la cour, et non celle qui lui était transmise par l'agent immobilier, portant mention d'une cour fermée, le notaire n'a pas retranché une partie de la vente ; que l'acte porte sur une parcelle identifiée au cadastre sous le n°BK66 pour la contenance mentionnée dans l'acte soit 76 m2 s que l'emprise au sol du bâti est de 66 m2 ; que la surface non bâtie de cette parcelle, qualifiée cour par le vendeur comme par l'acquéreur, fait effectivement partie de la vente et il n'est ni prétendu ni établi qu'elle aurait fait l'objet d'une éviction à l'initiative d'un tiers ; que le non bâti peut néanmoins se situer hors de la vente s'il est démontré qu'il appartient à un tiers ; que certes le rappel de l'existence d'une servitude de passage permet de présumer que le non bâti fait bien partie de la vente s que cependant l'acte le plus ancien qui en porte mention est celui du 5 juin 1978 aux termes duquel: "Il existe sur la cour de l'immeuble sise au sud de celui-ci un droit de passage pour les habitations sises à l'est, le vendeur ne pouvant apporter aucune précision sur l'origine de la servitude" ; que l'usucapion ne peut être utilement invoquée par Monsieur et Madame X... qui se prévalent de la jonction du juste titre à la possession que si la surface litigieuse n'est pas imprescriptible ; que Monsieur et Madame Z... produisent un plan cadastral de 1945 sur lequel le bâtiment figure comme jouxtant non un espace privatif non bâti mais une voie publique, or le domaine public est imprescriptible ; qu'à supposer que ce document doive être lu comme représentant une construction occupant la totalité de la parcelle sans espace entre le bâtiment et la voie publique et que cette construction soit celle démolie et reconstruite sous l'empire de Monsieur et Madame B... qui l'avaient acquise de Monsieur C... par acte du 19 novembre 1975 aux termes duquel les acquéreurs "s'engagent à faire démolir la remise existante sur le terrain présentement par eux acquis ; ils s'engagent à faire édifier sur ledit terrain une maison dont les trois quarts de la superficie totale sera destinée à l'habitation" ; que la réalisation de cet engagement ne suffit à rendre compte des circonstances dans lesquelles l'espace public a pu de fait, en l'absence de décision de déclassement, être incorporé à la surface de la parcelle vendue ; que l'erreur sur la substance est démontrée ; que s'agissant de la privation d'un attribut essentiel d'une petite maison de ville, à savoir l'existence d'un espace découvert telle une cour, les acquéreurs sont fondés dans leur action en annulation de la vente, la clause d'exclusion de garantie n'étant pas applicable à l'erreur de l'acquéreur sur les qualités substantielles de la chose vendue ;
1°) ALORS QU'en vertu de l'article 552 du Code civil, la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous ; que cette règle signifie que le propriétaire du sol est également propriétaire du sous-sol et de ce qui empiète sur son sol mais ne concerne pas la propriété du terrain clos non bâti entourant un sol bâti; qu'en recourant, pour justifier sa décision, à un principe manifestement inapplicable en l'espèce, la Cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 552 du Code civil;
2°) ALORS QUE l'erreur n'entraîne la nullité que si elle présente un caractère déterminant et si elle est excusable; que n'est pas excusable l'erreur commise par un contractant qui disposait, au moment où il a signé, de tous les éléments nécessaires pour apprécier la portée de ses engagements et le bénéfice qu'il pouvait en retirer ; qu'en relevant que la cour fermée n'était pas mentionnée dans l'acte mais en considérant néanmoins qu'elle constituait un élément substantiel du consentement des époux Z..., la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant par fausse application les articles 1109 et 1110 du Code civil ;
3°) ALORS QUE l'erreur n'entraîne la nullité que si elle présente un caractère déterminant et si elle est excusable ; que ne peut être considérée comme déterminante l'erreur portant sur la contenance exacte du bien vendu en présence d'une clause excluant tout recours contre l'ancien propriétaire « pour erreur dans la désignation, le cadastre» ; qu'en considérant néanmoins que l'erreur dans la contenance cadastrale avait pu substantiellement vicier le consentement des époux Z..., la Cour d'appel a violé les articles 1109 et 1110 du Code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, confirmatif à cet égard, d'AVOIR prononcé la nullité pour erreur sur la substance de la vente immobilière du 12 mai 2006, régularisée par acte authentique du 22 août 2006 ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur et Madame Z... fondent leur action sur l'erreur sur la substance de la chose vendue et l'article 1110 du Code civil, soutenant qu'ils entendaient acheter leur maison avec la cour attenante et qu'ils ont découvert après l'achat que la cour ne leur avait pas été vendue ; qu'ils prétendent l'établir par les mentions de l'acte et par la production d'une correspondance de la commune de CAUMONT et du plan cadastral qui sera évoqué ci-après ; qu'aux termes de l'article 552 du code civil, la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous s que lorsque la vente porte sur une parcelle totalement ou partiellement bâtie, la description du bâti revêt un caractère indicatif et l'omission d'un élément dans cette description n'implique pas qu'il n'a pas été transmis; qu'en reprenant la description du bien figurant dans l'origine de propriété, donc sans l'indication de la cour, et non celle qui lui était transmise par l'agent immobilier, portant mention d'une cour fermée, le notaire n'a pas retranché une partie de la vente ; que l'acte porte sur une parcelle identifiée au cadastre sous le n°BK66 pour la contenance mentionnée dans l'acte soit 76 m2 s que l'emprise au sol du bâti est de 66 m2 ; que la surface non bâtie de cette parcelle, qualifiée cour par le vendeur comme par l'acquéreur, fait effectivement partie de la vente et il n'est ni prétendu ni établi qu'elle aurait fait l'objet d'une éviction à l'initiative d'un tiers ; que le non bâti peut néanmoins se situer hors de la vente s'il est démontré qu'il appartient à un tiers ; que certes le rappel de l'existence d'une servitude de passage permet de présumer que le non bâti fait bien partie de la vente s que cependant l'acte le plus ancien qui en porte mention est celui du 5 juin 1978 aux termes duquel: "Il existe sur la cour de l'immeuble sise au sud de celui-ci un droit de passage pour les habitations sises à l'est, le vendeur ne pouvant apporter aucune précision sur l'origine de la servitude" ; que l'usucapion ne peut être utilement invoquée par Monsieur et Madame X... qui se prévalent de la jonction du juste titre à la possession que si la surface litigieuse n'est pas imprescriptible ; que Monsieur et Madame Z... produisent un plan cadastral de 1945 sur lequel le bâtiment figure comme jouxtant non un espace privatif non bâti mais une voie publique, or le domaine public est imprescriptible ; qu'à supposer que ce document doive être lu comme représentant une construction occupant la totalité de la parcelle sans espace entre le bâtiment et la voie publique et que cette construction soit celle démolie et reconstruite sous l'empire de Monsieur et Madame B... qui l'avaient acquise de Monsieur C... par acte du 19 novembre 1975 aux termes duquel les acquéreurs "s'engagent à faire démolir la remise existante sur le terrain présentement par eux acquis ¿ ils s'engagent à faire édifier sur ledit terrain une maison dont les trois quarts de la superficie totale sera destinée à l'habitation" ; que la réalisation de cet engagement ne suffit à rendre compte des circonstances dans lesquelles l'espace public a pu de fait, en l'absence de décision de déclassement, être incorporé à la surface de la parcelle vendue ; que l'erreur sur la substance est démontrée ; que s'agissant de la privation d'un attribut essentiel d'une petite maison de ville, à savoir l'existence d'un espace découvert telle une cour, les acquéreurs sont fondés dans leur action en annulation de la vente, la clause d'exclusion de garantie n'étant pas applicable à l'erreur de l'acquéreur sur les qualités substantielles de la chose vendue ;
1°) ALORS QUE le possesseur d'un bien immobilier muni d'un titre de propriété est présumé en être le propriétaire, la preuve contraire incombant à celui qui revendique la propriété ; que les juges ne peuvent statuer par simple affirmation et doivent préciser sur quels éléments ils se fondent; qu'en considérant la présomption de propriété bénéficiant aux époux X... comme renversée par la simple affirmation de la commune de CAUMONT-SURDURANCE non étayée du moindre élément de preuve, la Cour d'appel a méconnu les règles d'administration de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil, ensemble les articles 544 et 1350 du même Code;
2°) ALORS QUE la propriété s'établit par les présomptions les meilleures et les mieux caractérisées ; que ces présomptions incluent non seulement le titre et la possession mais encore l'état des lieux, le cadastre et l'acquittement de l'impôt foncier; que les juges doivent donc s'expliquer sur les différentes présomptions invoquées ; qu'en ne s'expliquant, ni sur la situation des lieux, la cour étant close, ni sur le cadastre qui attribuait la surface litigieuse aux époux X..., ni sur le fait que ces derniers avaient toujours acquitté l'impôt foncier au titre de cette surface, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 544 du Code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, confirmatif à cet égard, d'AVOIR condamné l'agence C2S IMMOBILIER à verser à Monsieur et Madame Z... la somme de 8.000 € en remboursement des frais d'agence ;
AUX MOTIFS QUE l'annulation entraîne d'une part les restitutions réciproques du prix et de l'immeuble vendu, ainsi que le remboursement des frais et honoraires perçus par le notaire et l'agent immobilier qui n'ont plus le support de la vente ;
ALORS QUE la cassation qui interviendra sur le fondement du premier ou du deuxième moyen de cassation entraînera l'annulation par voie de conséquence de ce chef de dispositif et ce, par application de l'alinéa 2 de l'article 625 du Code de procédure civile.