LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les deux moyens réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 juin 2013), que le 18 avril 2005, Mme X..., avocate, qui avait mis fin, par démission, à la collaboration libérale qui la liait à M. Y..., faisant valoir que cette situation avait perduré en fait jusqu'à ce que celui-ci, apprenant son état de grossesse, mette fin à leur relation contractuelle, a saisi le bâtonnier aux fins d'arbitrage ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt infirmatif de dire que le contrat de collaboration en date du 23 novembre 2003 s'est terminé le 19 juillet 2005 et la débouter de toutes ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que la démission d'un avocat collaborateur libéral doit être claire et non équivoque ; que tel n'est pas le cas d'une démission suivie immédiatement d'une « rétractation commune » des deux parties qui décident de poursuivre la relation contractuelle de façon identique, moyennant une rétrocession d'honoraires mensuelle fixe et régulière ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de la cour d'appel que Mme X... a, nonobstant l'envoi d'une lettre de démission, poursuivi sa collaboration auprès de M. Y... pendant plus de dix mois ; qu'en décidant néanmoins que la démission du 18 avril 2005 était effective, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les dispositions des articles 18 de la loi n° 2005-8823 du 2 août 2005, 7 de la loi de n° 71-1130 du 31 décembre 1971, 129 et 142 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ;
2°/ que l'avocat qui exerce, à titre libéral, pour le compte et dans le cabinet de l'un de ses confrères, qui lui verse une rétrocession d'honoraires mensuelle fixe, est présumé être son collaborateur ; que dans ce cas, il appartient à la partie qui prétend que la relation de travail s'effectuait en réalité dans le cadre de vacations, par principe non régulières, d'en apporter la preuve ; que bien qu'ayant constaté que les parties « ont poursuivi leurs relations » jusqu'au 2 mars 2006 moyennant « le maintien de la rémunération fixée au contrat de collaboration de 2003 », la cour d'appel a décidé que la relation s'était néanmoins poursuivie sous forme de vacations, sans toutefois nullement caractériser celles-ci ; qu'à défaut de constater la présomption de collaboration libérale et de faire peser sur M. Y... la charge de la preuve contraire, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des articles 18 de la loi n° 2005-8823 du 2 août 2005, 7 de la loi de n° 71-1130 du 31 décembre 1971, 129 et 142 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 qu'elle a violés ;
3°/ que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en énonçant que Mme X... avait démissionné le 18 avril 2005, tout en accordant crédit aux attestations selon lesquelles elle aurait fait part à des tiers de son intention de démissionner « fin juillet ou début août, en septembre 2005, voire début 2006 », la cour d'appel s'est manifestement contredite ; que ce faisant, elle a violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ qu'en s'abstenant de vérifier si le versement par M. Y... de la rétrocession d'honoraires mensuelle pendant le congé de Mme X... en février 2006 n'était pas le signe de la poursuite d'un véritable contrat de collaboration, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 18 de la loi du 2 août 2005, 7 de la loi du 31 décembre 1971, 129 et 142 du décret du 27 novembre 1991 ;
5°/ que même à considérer que Mme X... avait la qualité de vacataire, elle pouvait néanmoins prétendre à des honoraires de résultats sur les dossiers qu'elle avait accomplis, s'il en avait été convenu ainsi avec M. Y... ; qu'en écartant purement et simplement toutes les demandes indemnitaires de Mme X... sans rechercher si celle-ci ne pouvait pas prétendre à des honoraires de résultats sur les dossiers sur lesquels elle a travaillé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 18 de la loi n° 2005-8823 du 2 août 2005, 7 de la loi de n° 71-1130 du 31 décembre 1971, 129 et 142 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ;
Mais attendu qu'appréciant les éléments de fait et les moyens de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, sans se contredire ni inverser la charge de la preuve, a souverainement considéré, en l'absence d'écrit des parties, qu'après l'expiration de son délai de prévenance, soit à compter du 19 juillet 2005, Mme X... n'était plus liée à M. Y... par un contrat de collaboration libérale, mais qu'elle effectuait des vacations pour le compte de ce dernier, peu important que leur montant fût égal à la rémunération fixée dans le contrat de collaboration de 2003, ce qui rendait sans objet ses demandes indemnitaires fondées sur l'existence d'un tel contrat ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier octobre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le contrat de collaboration de Mlle X... en date du 23 novembre 2003 s'est terminé le 19 juillet 2005 et d'avoir débouté celle-ci de toutes ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE liées par le contrat de collaboration libérale signé le 26 novembre 2003, les parties ont poursuivi leurs relations, dans le cadre de ce contrat selon Maître X..., sous forme de vacations selon Maître Y..., au-delà de la fin du délai de prévenance expirant le 18 juillet 2005, pour s'achever le 2 mars 2006 selon la lettre du 9 mars 2006 adressée par Maître Y... à Maître X... ; que même si elle n'en a pas avisé l'Ordre, il est acquis que c'est Maître X... elle-même qui a mis fin à son contrat de collaboration libérale en donnant régulièrement sa démission le 18 avril 2005 et en précisant la durée du délai de prévenance expirant le 18 juillet 2005 ; que par ailleurs, alors qu'elle reste taisante sur le contenu des attestations produites par l'appelant, il apparaît qu'elle a eu l'occasion, courant juin, fin juillet ou début août, en septembre 2005, voire début 2006, de faire part auprès de tiers de son intention de démissionner, de son souhait de trouver un rythme de travail plus compatible avec sa vie de famille, d'annoncer sa démission effective, d'indiquer qu'elle n'était plus collaboratrice de Maître Y... mais assurait des vacations pour lui, notamment dans l'attente du recrutement d'un nouveau collaborateur (trice), à l'arrivée duquel elle cesserait ces vacations après avoir cumulé ses congés ; que dès lors et dans ce cas d'espèce, le maintien de la rémunération fixée dans le contrat de collaboration de 2003 est insuffisant, à lui seul, pour établir que les parties auraient convenu de la poursuite, de fait d'une collaboration libérale ; qu'il y a lieu d'infirmer la sentence du 27 juin 2007 sur ce point ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la démission d'un avocat collaborateur libéral doit être claire et non équivoque ; que tel n'est pas le cas d'une démission suivie immédiatement d'une « rétractation commune » des deux parties qui décident de poursuivre la relation contractuelle de façon identique, moyennant une rétrocession d'honoraires mensuelle fixe et régulière ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de la Cour d'appel que Mlle X... a, nonobstant l'envoi d'une lettre de démission, poursuivit sa collaboration auprès de M. Y... pendant plus de dix mois ; qu'en décidant néanmoins que la démission du 18 avril 2005 était effective, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les dispositions des articles 18 de la loi n° 2005-8823 du 2 août 2005, 7 de la loi de n° 71-1130 du 31 décembre 1971, 129 et 142 du décret n° 91-1197 du 27 Novembre 1991 ;
ALORS D'AUTRE PART QUE l'avocat qui exerce, à titre libéral, pour le compte et dans le cabinet de l'un de ses confrères, qui lui verse une rétrocession d'honoraires mensuelle fixe, est présumé être son collaborateur ; que dans ce cas, il appartient à la partie qui prétend que la relation de travail s'effectuait en réalité dans le cadre de vacations, par principe non régulières, d'en apporter la preuve ; que bien qu'ayant constaté que les parties « ont poursuivi leurs relations » jusqu'au 2 mars 2006 moyennant « le maintien de la rémunération fixée au contrat de collaboration de 2003 », la Cour d'appel a décidé que la relation s'était néanmoins poursuivie sous forme de vacations, sans toutefois nullement caractériser celles-ci ; qu'à défaut de constater la présomption de collaboration libérale et de faire peser sur M. Y... la charge de la preuve contraire, la Cour d'appel a méconnu le sens et la portée des articles 18 de la loi n° 2005-8823 du 2 août 2005, 7 de la loi de n° 71-1130 du 31 décembre 1971, 129 et 142 du décret n° 91-1197 du 27 Novembre 1991 qu'elle a violés ;
ALORS, EGALEMENT, QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en énonçant que Mlle X... avait démissionné le 18 avril 2005, tout en accordant crédit aux attestations selon lesquelles elle aurait fait part à des tiers de son intention de démissionner « fin juillet ou début août, en septembre 2005, voire début 2006 », la Cour d'appel s'est manifestement contredite ; que ce faisant, elle a violé les dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS ENCORE QU'en s'abstenant de vérifier si le versement par M. Y... de la rétrocession d'honoraires mensuelle pendant le congé de Mlle X... en février 2006 n'était pas le signe de la poursuite d'un véritable contrôle de collaboration, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 18 de la loi du 2 août 2005, 7 de la loi du 31 décembre 1971, 129 et 142 du décret du 27 novembre 1991.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Mlle X... de toutes ses demandes en indemnités ;
AUX MOTIFS QUE les demandes d'indemnités présentées par Maître X..., supposant le maintien du contrat de collaboration deviennent sans objet ; que par voie de conséquence, la sentence du 27 décembre 2007 doit également être infirmée à l'exception des frais d'arbitrage pour lesquels le Bâtonnier a donné acte aux parties du règlement, chacune, de la part d'arbitrage lui incombant ; que Maître X... ne démontre pas et n'offre d'ailleurs pas de démontrer qu'elle n'était pas réglée, au moment de son départ effectif de la totalité de ses vacations ;
ALORS QUE même à considérer que Mlle X... avait la qualité de vacataire, elle pouvait néanmoins prétendre à des honoraires de résultats sur les dossiers qu'elle avait accomplis, s'il en avait été convenu ainsi avec M. Y... ; qu'en écartant purement et simplement toutes les demandes indemnitaires de Mlle X... sans rechercher si celle-ci ne pouvait pas prétendre à des honoraires de résultats sur les dossiers sur lesquels elle a travaillé, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 18 de la loi n° 2005-8823 du 2 août 2005, 7 de la loi de n° 71-1130 du 31 décembre 1971, 129 et 142 du Décret n° 91-1197 du 27 Novembre 1991.