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23/09/2014 | FRANCE | N°13-19355

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 23 septembre 2014, 13-19355


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 14 février 2013), que la SCI Prestige Montesquieu (la SCI) a contracté auprès de la compagnie 1818 Banquiers privés, aujourd'hui Banque privée 1818 (la banque), en complément d'un prêt principal destiné à financer la construction d'un ensemble immobilier, un prêt-relais conventionnellement indissociable du premier concours, pour financer la TVA afférente à l'opération ; qu'assignée en remboursement de ce prêt-relais, la SCI, qui, en cours de procédure, a vendu

l'immeuble et effectué ce remboursement, a recherché la responsabili...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 14 février 2013), que la SCI Prestige Montesquieu (la SCI) a contracté auprès de la compagnie 1818 Banquiers privés, aujourd'hui Banque privée 1818 (la banque), en complément d'un prêt principal destiné à financer la construction d'un ensemble immobilier, un prêt-relais conventionnellement indissociable du premier concours, pour financer la TVA afférente à l'opération ; qu'assignée en remboursement de ce prêt-relais, la SCI, qui, en cours de procédure, a vendu l'immeuble et effectué ce remboursement, a recherché la responsabilité de la banque ;

Sur le premier moyen :
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt du rejet de sa demande tendant à la condamnation de la banque à lui verser la somme de 36 000 euros, alors, selon le moyen :
1°/ que la SCI faisait valoir que le refus de la banque de débloquer les fonds nécessaires au règlement des dernières factures émises par l'entreprise générale Spie l'avait placée dans la nécessité de contracter un crédit complémentaire pour faire face à ces échéances et sollicitait, en conséquence, la condamnation de la banque à lui rembourser le coût de ce crédit ; qu'en déboutant la SCI de cette demande sans motiver sa décision sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en toute hypothèse, le professionnel du crédit est tenu de verser les fonds qu'il s'est engagé à prêter ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la banque n'avait pas commis une faute source de responsabilité en s'abstenant de débloquer les fonds qu'elle s'était engagée à prêter, nécessaires au règlement des dernières factures émises par l'entreprise générale Spie contraignant ainsi la SCI à contracter un nouveau crédit pour faire face à ces échéances, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt constate qu'au moment où la SCI a demandé à la banque de payer la facture de l'entreprise de construction, en mobilisation du prêt principal, elle lui était redevable, depuis plus d'un mois, d'une somme de 735 731, 96 euros au titre du prêt-relais ; qu'il constate encore que la banque avait, en vain, demandé à la SCI de lui remettre le bordereau de cession Dailly garantissant ledit prêt et les justificatifs des démarches effectuées auprès de l'administration fiscale afin d'obtenir le remboursement de son crédit de TVA ; qu'en l'état de ces constatations, desquelles il résulte que la banque était fondée à refuser d'honorer l'appel de fonds litigieux en raison des manquements de la SCI à ses obligations contractuelles, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise, a, par une décision motivée, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt du rejet de sa demande en condamnation de la banque à lui verser la somme de 5 480 000 euros, correspondant au prix supplémentaire qu'elle aurait tiré de la vente de son immeuble si la banque ne s'était pas opposée à une vente à la découpe et ne l'avait pas obligée à le vendre en bloc, alors, selon le moyen :
1°/ que le banquier qui propose à son client un prêt destiné à réaliser une opération spécifique doit vérifier qu'elle ne se heurte à aucun obstacle ; qu'en affirmant que la banque n'avait pas commis de faute sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la construction d'un bien à usage locatif, condition à laquelle la banque avait subordonné l'octroi du prêt relais destiné à fournir des sommes équivalentes au montant de la TVA devant être récupérée, permettait effectivement à l'emprunteur de la récupérer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
2°/ que les conséquences légales de l'application d'une règle de droit n'ont pas à être prouvées ; qu'en affirmant que la SCI n'établissait pas que la construction d'un bien par une société civile immobilière en vue de sa location future ne lui permettait pas de récupérer la TVA quand la capacité de récupérer la TVA dépendait d'une règle fiscale qu'il lui appartenait de déterminer, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile ;
3°/ que le juge est tenu de respecter les limites du litige telles que fixées par les parties dans leurs conclusions ; qu'en affirmant que la SCI ne pouvait se prévaloir du préjudice tiré de l'impossibilité de récupérer la TVA acquittée sur les travaux de construction quand elle ne sollicitait pas la réparation de ce préjudice, mais de celui tiré de la nécessité de vendre dans l'urgence le bien en bloc et non par appartements aux fins de récupérer la TVA et de rembourser au plus vite le prêt litigieux, la cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

4°/ que tout antécédent sans lequel le dommage ne se serait pas produit en est la cause ; qu'en se bornant à énoncer que la SCI n'avait pas été contrainte de vendre en bloc l'immeuble litigieux, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la situation dans laquelle la banque avait, par sa faute, placé la SCI en imposant une opération qui ne permettait pas de récupérer la TVA, n'était pas à l'origine de sa décision de vendre l'immeuble en bloc et du préjudice qui en résultait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
5°/ que, par un courrier du 19 janvier 2010 adressé à la banque, la SCI rappelait les raisons qui l'avaient conduite à renoncer à son projet de commercialiser l'immeuble à construire pour lui substituer le projet, imposé par la banque, de le mettre en location ; qu'à l'interrogation de la banque qui s'étonnait que « le programme immobilier (¿) fasse l'objet d'une commercialisation », elle répondait « que la commercialisation du programme a (vait) toujours été envisagée et que le schéma juridique a (vait) été adapté à votre demande en raison de votre situation » ; qu'il ressortait ainsi des termes clairs et non équivoques de ce courrier que la vente de l'immeuble à construire avait toujours été « envisagée » par la SCI mais que celle-ci s'était finalement résolue à le louer à la demande de la banque, dont l'objet social interdisait le financement de projets immobiliers destinés à être vendus ; qu'en affirmant que ce courrier établissait que la SCI avait toujours eu l'intention de construire son immeuble pour le vendre et non pour le louer, quand celui-ci établissait qu'elle avait accepté de se plier au schéma juridique de la location imposé par la banque, la cour d'appel l'a dénaturé en violation de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt relève que le conseil donné à la SCI d'abandonner son statut de société de construction-vente au profit de celui de société patrimoniale classique n'avait pas pour seul but de permettre à la banque de lui consentir l'emprunt sollicité mais tendait aussi à modifier le régime fiscal des résultats de la SCI, dans l'intérêt de ses associés ; qu'il relève encore que la SCI avait reconnu que le remboursement de TVA avait finalement eu lieu dans le cadre de la vente de l'ensemble immobilier intervenue le 9 novembre 2010 et en déduit que le prêt-relais ayant financé l'opération voulue par l'emprunteur n'était pas indu ; qu'il retient que la SCI ne démontrait pas que la banque se serait opposée à un projet de vente à la découpe dont elle l'aurait avisée en cours de procédure ; qu'en l'état de ces appréciations, faisant ressortir qu'il n'était pas établi que ce serait par la faute de la banque que la SCI avait été obligée de vendre son bien en bloc et dans l'urgence, la cour d'appel, sans méconnaître son office ni les termes du litige, a légalement justifié sa décision ;
Attendu, en second lieu, que c'est par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, de la lettre de la SCI du 19 janvier 2010, rendue nécessaire par l'ambiguïté de ses termes, que la cour d'appel, par motif adopté, a retenu que cette société a reconnu avoir toujours eu l'intention de construire son immeuble pour le vendre et non pour le louer ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SCI Prestige Montesquieu et M. X..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société Prestige Montesquieu et M. X..., ès qualités.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait débouté la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU de sa demande tendant à obtenir la condamnation de la société BANQUE PRIVEE 1818 à lui verser la somme de 36. 000 euros ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE contrairement à l'affirmation posée par le Tribunal, il résulte de l'examen de la note de synthèse établie le 23 janvier 2008 par la banque prêteuse après consultation de Me Y..., notaire de M. Patrick X..., associé unique de L'EURL P. B. H elle-même gérante de la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU, et adressée au représentant de la SCI, que si la banque a conseillé à la SCI d'abandonner son statut de SCI de construction-vente au profit du statut de SCI patrimoniale classique, ce n'est pas seulement afin de permettre à la banque de lui consentir l'emprunt sollicité, son objet social lui interdisant de prêter au premier type de SCI, mais aussi pour garantir M, Patrick X...que l'activité de la SCI patrimoniale, à condition de se limiter à la conservation et à la location des immeubles construits, ne serait pas imposée à l'impôt sur les sociétés, mais continuerait à l'être au niveau des associés, par l'imposition sur le revenu, dans la catégorie des revenus fonciers ; qu'il peut être affirmé que M. X..., consultant, ancien représentant légal de la société TIR GROUPE qu'il avait cédée à la société. SODEOEIO pour un prix de 150 millions d'euros, souhaitait contracter avec la BANQUE PRIVEE 1818, avec laquelle il envisageait alors plusieurs types de partenariats et investissements, pour des raisons purement patrimoniales, et cherchait simultanément à éviter au maximum la fiscalisation de ses opérations financières ; à ce titre, M. X..., associé unique de la société Rail, gérant la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU, dans laquelle il disposait de 45 % des parts, ne pouvait compte tenu de sa surface financière et de son expérience des affaires être considéré comme une personne non avertie, attendant de sa banque l'exercice à son égard d'une obligation de conseil et de mise en garde ; que la modification des statuts de la SCI opérée par l'assemblée générale extraordinaire du 31 mars 2008 correspondait en conséquence à son intérêt, et il a en réalité choisi en toute connaissance de cause de modifier la forme de la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU qu'il importe de souligner que la SCI a effectivement modifié ses statuts le 31 mars 2008 et que l'acte de prêt-relais de TVA du 5 février 2008, signé sans la moindre réserve plus d'un mois auparavant par la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU, avait pour objet le financement " d'un ensemble immobilier à usage locatif qui comportera vingt-huit logements pour une surface totale de logement de 2050 m2 et de quatre locaux d'activité sur 210 m "'; que de même, le prêt principal de 4, 900. 000 euros rappelait son objet en ces termes : " les fonds sont destinés à la construction hors taxes d'un ensemble immobilier à usage locatif situé à NANTERRE, 3640, rue Montesquieu " ; que la durée du prêt était d'ailleurs de douze années afin de permettre l'amortissement du crédit par la perception régulière des loyers pendant toute cette période et les garanties mises en place incluaient une délégation des loyers au profit de la banque ; que s'il ressort des pièces susmentionnées que le changement de statut de la SCI conditionnait l'octroi ces prêts et que la SCI l'a accepté en toute connaissance de cause ; qu'il n'est pas établi que la banque a conseillé ce changement de statut tout en sachant que la SCI maintiendrait néanmoins son projet de construction-vente, le financement devenant alors fautif ; qu'au contraire, il est aujourd'hui prouvé que la SCI a en réalité pris l'initiative d'un second changement de statut par une nouvelle assemblée générale du 3 avril 2008, quatre jours seulement après l'assemblée modificative susvisée, et antérieurement à la signature du prêt principal de 4. 900. 000 euros, modification qu'elle n'a pas portée à la connaissance de la banque puisqu'elle n'a publié cette assemblée générale que deux ans et demi plus tard, lors de la revente en bloc de l'immeuble construit ; que nul n'est admis à se prévaloir de sa propre turpitude, et la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU ne peut se prévaloir de l'impossibilité pour elle de récupérer la TVA du fait du choix du statut de SCI immobilière se livrant à une opération patrimoniale de construction-location, conséquence qu'elle n'ignorait pas et qui résultait des conventions qu'elle avait librement signées ; qu'au demeurant le préjudice allégué par la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU et qui aurait consisté à ne pouvoir récupérer la TVA acquittée sur les travaux de construction de l'immeuble, est inexistant dans la mesure où la société appelante a elle-même reconnu que le remboursement de TVA qu'elle affirmait impossible a finalement bien eu lieu dans le cadre de la vente de l'ensemble immobilier à la société ASTARTE CAPITAL, intervenue le 9 novembre 2010 par le ministère de Me Y... notaire ; que le prêt-relais de TVA n'était donc pas indu puisqu'il a bien servi à financer l'opération voulue par l'emprunteur ; que la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU invoque en cause d'appel un autre grief à l'appui de sa demande réparatoire en indiquant que ce serait par la faute de la banque qu'elle aurait été forcée de céder en bloc et dans l'urgence selon promesse du 30 juin 2010- réitérée le 9 novembre 2010- l'ensemble immobilier qu'elle a fait construire, et ce afin de se procurer le crédit nécessaire au remboursement du crédit de TVA de 738, 354, 15 euros ; qu'outre qu'il n'a jamais été prévu que l'ensemble immobilier devait faire l'objet d'une vente, que ce soit en bloc ou " à la découpe ", force est de constater que la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU ne démontre pas que la banque se serait opposée à un projet de vente à la découpe dont l'aurait avisé M. X...en cours de procédure, (alors que son second changement de statut, dissimulé à son contractant, permettait à la SCI une telle vente), non plus qu'elle justifie de ce que l'immeuble litigieux aurait pu être vendu par elle appartement par appartement pour un prix global de 13. 580. 000 euros ;
AUX MOTIFS ADOPTES QU'il est constant que ta SCI a effectivement modifié ses statuts dans ce sens le 31 mars 2008 (pièce 15 des demandeurs), et que les prêts dont s'agit (prêt principal et prêt complémentaire de crédit TVA) ont été souscrits par la SC1 sous son nouveau statut, avec pour objet le financement de la construction d'un immeuble destiné à la location et non à la vente ; que s'il ressort de ces pièces que le changement de statut de la SC1 conditionnait l'octroi des prêts et que la SCI l'a accepté, elles n'établissent pas que la Banque a conseillé ce changement de statut tout en sachant que la SC1 maintiendrait néanmoins son projet initial de construction-vente, ce qui serait incontestablement fautif, la Banque participant alors à un financement contraire à son objet social ; que deux lettres qui ont été échangées les 12 et 19 janvier 2010 entre la SCI et la Banque ne permettent pas davantage de caractériser une telle faute de la Banque, la position des parties divergeant ; qu'ainsi, dans sa lettre du 12 janvier 2010 la Banque s'étonne d'avoir appris la vente de l'immeuble par la SCI dans la mesure où le prêt avait été consenti pour une durée de 12 ans pour permettre le financement de la construction d'un ensemble immobilier à usage locatif, ajoutant que si le financement avait été consenti pour une construction-vente le prêt n'aurait pas été consenti pour une telle durée ; que dans sa lettre en réponse du 19 janvier 2010 la SCI s'étonne de l'étonnement manifesté par la Banque en rappelant qu'elle a toujours eu l'intention de construire pour vendre et que le schéma juridique de l'opération a été adapté à ta demande de la Banque ; qu'en tout état de cause, en admettant que la Banque ait été fautive dans l'exécution de son obligation de conseil, la SCI ne rapporte pas la preuve d'un lien de causalité entre cette prétendue faute et les préjudices qui en seraient résultés pour elle, savoir l'impossibilité de récupérer la TVA du fait du choix du statut de SCI immobilière se livrant à une opération patrimoniale de construction-location, le défaut de remboursement subséquent du crédit TVA et l'obligation subséquente de vendre l'immeuble pour rembourser ce crédit ; qu'elle ne justifie en effet d'aucune démarche auprès de l'administration fiscale en vue de se faire rembourser la TVA ni d'un refus de cette administration à sa demande ; que l'exposé théorique et comparatif des régimes fiscaux auquel elle se livre dans ses écritures ne saurait constituer un moyen de preuve suffisant ; qu'en outre, sa lettre du 10 janvier 2010 ci-dessus évoquée révèle que la SCI a toujours eu l'intention de construire son immeuble pour le vendre et non pour le louer ; que c'est donc avec mauvaise foi qu'elle soutient avoir été dans l'obligation de vendre pour rembourser le crédit TVA ; que la SCI est par conséquent mal fondée en son action en responsabilité contre la Banque et doit être déboutée de l'ensemble de ses réclamations indemnitaires qui en découlent ;
1°) ALORS QUE la société SCI PRESTIGE MONTESQUIEU faisait valoir que le refus de la banque de débloquer les fonds nécessaires au règlement des dernières factures émises par l'entreprise générale SPIE l'avait placée dans la nécessité de contracter un crédit complémentaire pour faire face à ces échéances et sollicitait, en conséquence, la condamnation de la BANQUE à lui rembourser le coût de ce crédit ; qu'en déboutant la SCI de cette demande sans motiver sa décision sur ce point, la Cour d'appel a violé l'article du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, le professionnel du crédit est tenu de verser les fonds qu'il s'est engagé à prêter ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la banque n'avait pas commis une faute source de responsabilité en s'abstenant de débloquer les fonds qu'elles s'étaient engagée à prêter, nécessaires au règlement des dernières factures émises par l'entreprise générale SPIE contraignant ainsi la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU à contracter un nouveau crédit pour faire face à ces échéances, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait débouté la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU de sa demande tendant à obtenir la condamnation de la société BANQUE PRIVEE 1818 à lui verser la somme de 5. 480. 000 euros (correspondant au prix supplémentaire qu'elle aurait tiré de la vente de son immeuble si la Banque ne s'était pas opposée à une vente à la découpe et ne l'avait pas obligée à le vendre en bloc) ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE contrairement à l'affirmation posée par le Tribunal, il résulte de l'examen de la note de synthèse établie le 23 janvier 2008 par la banque prêteuse après consultation de Me Y..., notaire de M. Patrick X..., associé unique de L'EURL P. B. H elle-même gérante de la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU, et adressée au représentant de la SCI, que si la banque a conseillé à la SCI d'abandonner son statut de SCI de construction-vente au profit du statut de SCI patrimoniale classique, ce n'est pas seulement afin de permettre à la banque de lui consentir l'emprunt sollicité, son objet social lui interdisant de prêter au premier type de SCI, mais aussi pour garantir M, Patrick X...que l'activité de la SCI patrimoniale, à condition de se limiter à la conservation et à la location des immeubles construits, ne serait pas imposée à l'impôt sur les sociétés, mais continuerait à l'être au niveau des associés, par l'imposition sur le revenu, dans la catégorie des revenus fonciers ; qu'il peut être affirmé que M. X..., consultant, ancien représentant légal de la société TIR GROUPE qu'il avait cédée à la société. SODEOEIO pour un prix de 150 millions d'euros, souhaitait contracter avec la BANQUE PRIVEE 1818, avec laquelle il envisageait alors plusieurs types de partenariats et investissements, pour des raisons purement patrimoniales, et cherchait simultanément à éviter au maximum la fiscalisation de ses opérations financières ; à ce titre, M. X..., associé unique de la société Rail, gérant la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU, dans laquelle il disposait de 45 % des parts, ne pouvait compte tenu de sa surface financière et de son expérience des affaires être considéré comme une personne non avertie, attendant de sa banque l'exercice à son égard d'une obligation de conseil et de mise en garde ; que la modification des statuts de la SCI opérée par l'assemblée générale extraordinaire du 31 mars 2008 correspondait en conséquence à son intérêt, et il a en réalité choisi en toute connaissance de cause de modifier la forme de la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU qu'il importe de souligner que la SCI a effectivement modifié ses statuts le 31 mars 2008 et que l'acte de prêt-relais de TVA du 5 février 2008, signé sans la moindre réserve plus d'un mois auparavant par la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU, avait pour objet le financement " d'un ensemble immobilier à usage locatif qui comportera vingt-huit logements pour une surface totale de logement de 2050 m2 et de quatre locaux d'activité sur 210 m "'; que de même, le prêt principal de 4, 900. 000 euros rappelait son objet en ces termes : " les fonds sont destinés à la construction hors taxes d'un ensemble immobilier à usage locatif situé à NANTERRE, 3640, rue Montesquieu " ; que la durée du prêt était d'ailleurs de douze années afin de permettre l'amortissement du crédit par la perception régulière des loyers pendant toute cette période et les garanties mises en place incluaient une délégation des loyers au profit de la banque ; que s'il ressort des pièces susmentionnées que le changement de statut de la SCI conditionnait l'octroi ces prêts et que la SCI l'a accepté en toute connaissance de cause ; qu'il n'est pas établi que la banque a conseillé ce changement de statut tout en sachant que la SCI maintiendrait néanmoins son projet de construction-vente, le financement devenant alors fautif ; qu'au contraire, il est aujourd'hui prouvé que la SCI a en réalité pris l'initiative d'un second changement de statut par une nouvelle assemblée générale du 3 avril 2008, quatre jours seulement après l'assemblée modificative susvisée, et antérieurement à la signature du prêt principal de 4. 900. 000 euros, modification qu'elle n'a pas portée à la connaissance de la banque puisqu'elle n'a publié cette assemblée générale que deux ans et demi plus tard, lors de la revente en bloc de l'immeuble construit ; que nul n'est admis à se prévaloir de sa propre turpitude, et la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU ne peut se prévaloir de l'impossibilité pour elle de récupérer la TVA du fait du choix du statut de SCI immobilière se livrant à une opération patrimoniale de construction-location, conséquence qu'elle n'ignorait pas et qui résultait des conventions qu'elle avait librement signées ; qu'au demeurant le préjudice allégué par la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU et qui aurait consisté à ne pouvoir récupérer la TVA acquittée sur les travaux de construction de l'immeuble, est inexistant dans la mesure où la société appelante a elle-même reconnu que le remboursement de TVA qu'elle affirmait impossible a finalement bien eu lieu dans le cadre de la vente de l'ensemble immobilier à la société ASTARTE CAPITAL, intervenue le 9 novembre 2010 par le ministère de Me Y... notaire ; que le prêt-relais de TVA n'était donc pas indu puisqu'il a bien servi à financer l'opération voulue par l'emprunteur ; que la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU invoque en cause d'appel un autre grief à l'appui de sa demande réparatoire en indiquant que ce serait par la faute de la banque qu'elle aurait été forcée de céder en bloc et dans l'urgence selon promesse du 30 juin 2010- réitérée le 9 novembre 2010- l'ensemble immobilier qu'elle a fait construire, et ce afin de se procurer le crédit nécessaire au remboursement du crédit de TVA de 738, 354, 15 euros ; qu'outre qu'il n'a jamais été prévu que l'ensemble immobilier devait faire l'objet d'une vente, que ce soit en bloc ou " à la découpe ", force est de constater que la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU ne démontre pas que la banque se serait opposée à un projet de vente à la découpe dont l'aurait avisé M. X...en cours de procédure, (alors que son second changement de statut, dissimulé à son contractant, permettait à la SCI une telle vente), non plus qu'elle justifie de ce que l'immeuble litigieux aurait pu être vendu par elle appartement par appartement pour un prix global de 13. 580. 000 euros ;
AUX MOTIFS ADOPTES QU'il est constant que ta SCI a effectivement modifié ses statuts dans ce sens le 31 mars 2008 (pièce 15 des demandeurs), et que les prêts dont s'agit (prêt principal et prêt complémentaire de crédit TVA) ont été souscrits par la SC1 sous son nouveau statut, avec pour objet le financement de la construction d'un immeuble destiné à la location et non à la vente ; que s'il ressort de ces pièces que le changement de statut de la SC1 conditionnait l'octroi des prêts et que la SCI l'a accepté, elles n'établissent pas que la Banque a conseillé ce changement de statut tout en sachant que la SC1 maintiendrait néanmoins son projet initial de construction-vente, ce qui serait incontestablement fautif, la Banque participant alors à un financement contraire à son objet social ; que deux lettres qui ont été échangées les 12 et 19 janvier 2010 entre la SCI et la Banque ne permettent pas davantage de caractériser une telle faute de la Banque, la position des parties divergeant ; qu'ainsi, dans sa lettre du 12 janvier 2010 la Banque s'étonne d'avoir appris la vente de l'immeuble par la SCI dans la mesure où le prêt avait été consenti pour une durée de 12 ans pour permettre le financement de la construction d'un ensemble immobilier à usage locatif, ajoutant que si le financement avait été consenti pour une construction-vente le prêt n'aurait pas été consenti pour une telle durée ; que dans sa lettre en réponse du 19 janvier 2010 la SCI s'étonne de l'étonnement manifesté par la Banque en rappelant qu'elle a toujours eu l'intention de construire pour vendre et que le schéma juridique de l'opération a été adapté à ta demande de la Banque ; qu'en tout état de cause, en admettant que la Banque ait été fautive dans l'exécution de son obligation de conseil, la SCI ne rapporte pas la preuve d'un lien de causalité entre cette prétendue faute et les préjudices qui en seraient résultés pour elle, savoir l'impossibilité de récupérer la TVA du fait du choix du statut de SCI immobilière se livrant à une opération patrimoniale de construction-location, le défaut de remboursement subséquent du crédit TVA et l'obligation subséquente de vendre l'immeuble pour rembourser ce crédit ; qu'elle ne justifie en effet d'aucune démarche auprès de l'administration fiscale en vue de se faire rembourser la TVA ni d'un refus de cette administration à sa demande ; que l'exposé théorique et comparatif des régimes fiscaux auquel elle se livre dans ses écritures ne saurait constituer un moyen de preuve suffisant ; qu'en outre, sa lettre du 10 janvier 2010 ci-dessus évoquée révèle que la SCI a toujours eu l'intention de construire son immeuble pour le vendre et non pour le louer ; que c'est donc avec mauvaise foi qu'elle soutient avoir été dans l'obligation de vendre pour rembourser le crédit TVA ; que la SCI est par conséquent mal fondée en son action en responsabilité contre la Banque et doit être déboutée de l'ensemble de ses réclamations indemnitaires qui en découlent ;
1°) ALORS QUE le banquier qui propose à son client un prêt destiné à réaliser une opération spécifique doit vérifier qu'elle ne se heurte à aucun obstacle ; qu'en affirmant que la banque n'avait pas commis de faute sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la construction d'un bien à usage locatif, condition à laquelle la banque avait subordonné l'octroi du prêt relais destiné à fournir des sommes équivalentes au montant de la TVA devant être récupérée, permettait effectivement à l'emprunteur de la récupérer, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
2°) ALORS QUE les conséquences légales de l'application d'une règle de droit n'ont pas à être prouvées ; qu'en affirmant que la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU n'établissait pas que la construction d'un bien par une société civile immobilière en vue de sa location future ne lui permettait pas de récupérer la TVA quand la capacité de récupérer la TVA dépendait d'une règle fiscale qu'il lui appartenait de déterminer, la Cour d'appel a violé l'article 12 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE le juge est tenu de respecter les limites du litige telles que fixées par les parties dans leurs conclusions ; qu'en affirmant que la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU ne pouvait se prévaloir du préjudice tiré de l'impossibilité de récupérer la TVA acquittée sur les travaux de construction quand la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU ne sollicitait pas la réparation de ce préjudice, mais de celui tiré de la nécessité de vendre dans l'urgence le bien en bloc et non par appartements aux fins de récupérer la TVA et de rembourser au plus vite le prêt litigieux, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du Code de procédure civile. ;
4°) ALORS QUE tout antécédent sans lequel le dommage ne se serait pas produit en est la cause ; qu'en se bornant à énoncer que la société PRESTIGE MONTESQUIEU n'avait pas été contrainte de vendre en bloc l'immeuble litigieux, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la situation dans laquelle la banque avait, par sa faute, placé la société PRESTIGE MONTESQUIEU en imposant une opération qui ne permettait pas de récupérer la TVA, n'était pas à l'origine de sa décision de vendre l'immeuble en bloc et du préjudice qui en résultait, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
5°) ALORS QUE par un courrier du 19 janvier 2010 adressé à la banque, la SCI PRESTIGE rappelait les raisons qui l'avaient conduite à renoncer à son projet de commercialiser l'immeuble à construire pour lui substituer le projet, imposé par la banque, de le mettre en location ; qu'à l'interrogation de la banque qui s'étonnait que « le programme immobilier (¿) fasse l'objet d'une commercialisation », elle répondait « que la commercialisation du programme a (vait) toujours été envisagée et que le schéma juridique a (vait) été adapté à votre demande en raison de votre situation » ; qu'il ressortait ainsi des termes clairs et non équivoques de ce courrier que la vente de l'immeuble à construire avait toujours été « envisagée » par la SCI PRESTIGE MONTESQUIEU mais que celle-ci s'était finalement résolue à le louer à la demande de la Banque, dont l'objet social interdisait le financement de projets immobiliers destinés à être vendus ; qu'en affirmant que ce courrier établissait que la SCI avait toujours eu l'intention de construire son immeuble pour le vendre et non pour le louer, quand celui-ci établissait qu'elle avait accepté de se plier au schéma juridique de la location imposé par la banque, la Cour d'appel l'a dénaturé en violation de l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-19355
Date de la décision : 23/09/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 14 février 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 23 sep. 2014, pourvoi n°13-19355


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Tiffreau, Marlange et de La Burgade

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.19355
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