LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 27 septembre 2012), que M. X... a été engagé le 1er février 1984 par la société Constructions de Maisons Lafitte en qualité de mécanicien-grutier ; que, victime d'un accident du travail le 17 juillet 2008, il a fait l'objet d'une visite de reprise le 13 octobre 2009 puis d'un second examen médical par le médecin du travail le 17 novembre 2009, au terme duquel il a été conclu à son inaptitude au poste de mécanicien ; que le salarié a refusé les postes de reclassement proposés ; qu'il a fait l'objet de deux autres visites médicales les 13 et 27 janvier 2010, à la suite desquelles le médecin du travail a maintenu ses conclusions au regard des propositions de l'employeur ; que le salarié a été licencié le 24 février 2010 pour inaptitude, refus non justifié des deux postes de reclassement proposés et impossibilité de reclassement ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de décider que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen :
1°/ que en cas de licenciement d'un salarié inapte à son poste, l'employeur est tenu de procéder à des recherches de reclassement au vu du second avis délivré par le médecin du travail ; qu'en l'espèce, à l'occasion du second examen, le médecin du travail a déclaré le salarié « Inapte au poste de Mécanicien. Contre indication au port de charges supérieures à 5-7 kg et mouvements répétitifs de l'épaule droite. Inapte au poste de grutier. Apte au poste entretien léger sans manutention et à un poste administratif » ; que la société a transmis au salarié une première proposition de poste le 30 novembre 2009, portant sur un poste mixte, que le salarié a refusé, puis une seconde proposition de poste le 29 décembre 2009 portant sur un poste purement administratif, que le salarié a également refusé ; qu'en décidant que l'employeur avait failli à son obligation de reclassement sans constater que le poste purement administratif proposé n'était pas conforme aux préconisations du médecin du travail, ni constater l'existence d'un autre poste disponible et compatible avec ces préconisations, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-10, L. 1226-12, L. 1226-14 et L. 1226-15 du code du travail ;
2°/ qu'aux termes de la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, le salarié a été licencié pour inaptitude définitive à son poste de travail, mais également pour refus non justifié à plusieurs reprises d'accepter les deux postes de reclassement proposés, l'un sur un poste à l'atelier avec des tâches de préparation de commandes et de rangement, l'autre sur un poste de nature strictement administrative, et absence de tout autre reclassement possible ; qu'effectivement, conformément à l'avis d'aptitude du médecin du travail, l'employeur avait proposé au salarié un poste purement administratif, comprenant des tâches de préparation des commandes, accueil téléphonique, suivi des demandes des clients, suivi des problèmes de service après-vente et résolution de ceux-ci et classement des archives, que le salarié a refusé ; qu'ainsi, en se bornant, pour déclarer le licenciement du salarié sans cause réelle et sérieuse, à retenir que son refus d'un poste non administratif était justifié, sans examiner l'autre motif de la lettre de licenciement, invoquant son refus d'un poste de nature strictement administrative, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1232-6 du code du travail ;
3°/ qu'aux termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, le salarié a été licencié pour « absence de tout autre reclassement possible, de tout autre poste vacant, au sein de notre société » ; qu'en déclarant le licenciement du salarié sans cause réelle et sérieuse, sans examiner le motif de la lettre de licenciement invoquant l'absence de tout autre poste de reclassement possible, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1232-6 du code du travail ;
Mais attendu que le refus d'un poste de reclassement ne pouvant à lui seul constituer un motif justifiant le licenciement du salarié déclaré inapte à son poste, la cour d'appel, examinant celui tiré de l'impossibilité, à la suite du refus par le salarié de deux postes, de reclasser ce salarié sur un autre poste, a constaté que les propositions de reclassement adressées, postérieurement à ce refus, au médecin du travail et au salarié, manquaient, en dépit d'une insuffisance dénoncée par le contrôleur du travail, de précision au regard des préconisations de ce médecin et que l'employeur n'avait pas alors poursuivi sa démarche ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Constructions de Maisons Lafitte aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Constructions de Maisons Lafitte et condamne celle-ci à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Ricard, avocat aux Conseils, pour la société Constructions de Maisons-Lafitte.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit le licenciement de M. X... dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'avoir condamné la société Constructions de Maisons-Lafitte au paiement des sommes de 31. 164 € au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et de 22. 308, 67 € au titre du complément de l'indemnité spéciale de licenciement avec intérêts à compter du 9 septembre 2010 ;
AUX MOTIFS QUE les propositions de poste de reclassement doivent être écrites ; qu'au cas d'espèce, la société a transmis à M X... une première proposition, de poste le 30 novembre 2009, portant sur un poste mixte de préparation des commandes de fournisseurs et de rangement des chantiers et nettoyage ; que M. X... a refusé cette proposition le 11 décembre suivant, motif pris de ce que sa réalisation connue de lui-était contraire aux préconisations du médecin du travail ; qu'une seconde correspondance de l'employeur du 29 décembre 2009 a entendu préciser les caractéristiques du poste ci-avant refusé (" aucune manipulation d'objet lourd ") et proposer-en cas de refus-d'adjoindre à la préparation des commandes des tâches d'accueil téléphonique, de suivi commandes clients et des problèmes de service après-vente et de classement des archives ; que la société a enregistré le refus de son salarié d'occuper un poste purement administratif par lettre datée du 14 janvier 2010 et proposé à M. X... " un poste non administratif qui sera totalement conforme aux dites prescriptions " ; qu'aucune précision n'a été apportée par la société quant au port de charges et aux gestes répétitifs de l'épaule droite ; qu'auprès du médecin du travail, la société a fait état d'une proposition plus développée le 25 janvier 2010 ; qu'aucune précision suffisante n'était cependant apportée quant au poids des charges ni aux gestes répétés de l'épaule droite, la société évoquant " l'absence de manutention lourde et un entretien léger des chantiers " ; que le médecin du travail a répondu que les tâches proposées étaient possibles " s'il s'agit de tâches administratives ou d'entretien léger et contre indiquées si elles nécessitent une manutention supérieure à 5/ 7 Kgs et s'il y a des gestes répétitifs de l'épaule droite " ; que cette insuffisance de précision a été dénoncée par le contrôleur du travail le 1er février 2010 ; que la société n'a pas poursuivi sa démarche en apportant toutes précisions utiles tant au salarié qu'au médecin du travail ; qu'elle ne peut aujourd'hui reprocher à M. X... d'avoir refusé un poste dont les caractéristiques afférentes aux préconisations n'étaient pas fixées ; que ces circonstances écartent le respect de l'obligation de reclassement ; que la société sera condamnée à payer à M. X... une indemnité représentant douze mois de salaire soit la somme réclamée de 31. 164 € ; que le refus de M. X... n'étant pas abusif, il sera fait application de l'article L. 1226-14 aux termes duquel l'employeur doit verser une indemnité spéciale de licenciement représentant deux fois l'indemnité de licenciement prévue par l'article L. 1234-9 du Code du travail »
ALORS QU'en cas de licenciement d'un salarié inapte à son poste, l'employeur est tenu de procéder à des recherches de reclassement au vu du second avis délivré par le médecin du travail ; qu'en l'espèce, à l'occasion du second examen, le médecin du travail a déclaré le salarié « Inapte au poste de Mécanicien. Contre indication au port de charges supérieures à 5-7 kg et mouvements répétitifs de l'épaule droite. Inapte au poste de grutier. Apte au poste entretien léger sans manutention et à un poste administratif » ; que la société a transmis au salarié une première proposition de poste le 30 novembre 2009, portant sur un poste mixte, que le salarié a refusé, puis une seconde proposition de poste le 29 décembre 2009 portant sur un poste purement administratif, que le salarié a également refusé ; qu'en décidant que l'employeur avait failli à son obligation de reclassement sans constater que le poste purement administratif proposé n'était pas conforme aux préconisations du médecin du travail, ni constater l'existence d'un autre poste disponible et compatible avec ces préconisations, la Cour d'appel a violé les articles L. 1226-10, L. 1226-12, L. 1226-14 et L. 1226-15 du Code du travail ;
ALORS QU'aux termes de la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, le salarié a été licencié pour inaptitude définitive à son poste de travail, mais également pour refus non justifié à plusieurs reprises d'accepter les deux postes de reclassement proposés, l'un sur un poste à l'atelier avec des tâches de préparation de commandes et de rangement, l'autre sur un poste de nature strictement administrative, et absence de tout autre reclassement possible ; qu'effectivement, conformément à l'avis d'aptitude du médecin du travail, l'employeur avait proposé au salarié un poste purement administratif, comprenant des tâches de préparation des commandes, accueil téléphonique, suivi des demandes des clients, suivi des problèmes de service après-vente et résolution de ceux-ci et classement des archives, que le salarié a refusé ; qu'ainsi, en se bornant, pour déclarer le licenciement du salarié sans cause réelle et sérieuse, à retenir que son refus d'un poste non administratif était justifié, sans examiner l'autre motif de la lettre de licenciement, invoquant son refus d'un poste de nature strictement administrative, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1232-6 du Code du travail ;
ALORS ENFIN QU'aux termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, le salarié a été licencié pour « absence de tout autre reclassement possible, de tout autre poste vacant, au sein de notre société » ; qu'en déclarant le licenciement du salarié sans cause réelle et sérieuse, sans examiner le motif de la lettre de licenciement invoquant l'absence de tout autre poste de reclassement possible, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1232-6 du Code du travail.