La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/09/2014 | FRANCE | N°13-23149

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 17 septembre 2014, 13-23149


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 11 avril 2013), rendu sur renvoi après cassation (3e chambre civile, 26 septembre 2007, pourvoi n° 06-15.669), que, pour la réalisation d'une opération immobilière, la Société immobilière de la ville de Nice (la SIVN), aux droits de laquelle vient la commune de Nice, a chargé la société Groupement français de construction (société GFC), venant aux droits de la société Mistral travaux, de l'exécution des lots « terrassements généraux » et Â

« gros oeuvre », le marché d'entreprise stipulant des délais pour remise des do...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 11 avril 2013), rendu sur renvoi après cassation (3e chambre civile, 26 septembre 2007, pourvoi n° 06-15.669), que, pour la réalisation d'une opération immobilière, la Société immobilière de la ville de Nice (la SIVN), aux droits de laquelle vient la commune de Nice, a chargé la société Groupement français de construction (société GFC), venant aux droits de la société Mistral travaux, de l'exécution des lots « terrassements généraux » et « gros oeuvre », le marché d'entreprise stipulant des délais pour remise des documents d'exécution relatifs aux travaux et pour exécution de ces travaux ; qu'alléguant le non-respect de ces délais, la SIVN a assigné en paiement de pénalités de retard la société GFC, qui a, par voie reconventionnelle, sollicité le règlement de travaux supplémentaires ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la commune de Nice fait grief à l'arrêt de fixer à quarante-sept le nombre de jours de retard et de condamner la société GFC à lui payer la somme de 192 526,34 euros, avec intérêts au taux contractuel de 17 % par an à compter du 11 janvier 2006, alors, selon le moyen, que la clause pénale est la compensation des dommages-intérêts que le créancier souffre de l'inexécution de l'obligation principale ; que la commune de Nice faisait valoir, dans ses conclusions, que le marché de travaux prévoyait un délai global contractuel d'exécution de 12 mois et un délai particulier de 8 mois pour l'ensemble des lots « terrassement généraux » et « gros ¿uvre » ; qu'elle indiquait que, selon les pièces du marché, les pénalités de retard étaient prévues en cas de retard du constructeur sur le délai d'exécution fixé par le contrat pour son ou ses lots ; qu'elle en déduisait qu'au regard de l'obligation de résultat souscrite par l'entrepreneur, qui doit mettre en oeuvre tous les moyens matériels et humains pour respecter les délais d'exécution de l'ouvrage prévus au contrat, les indemnités de retard imputables à la société Mistral travaux devaient être calculées automatiquement et sans la moindre référence à une imputation ou une faute de l'entreprise de travaux ; qu'en se bornant à affirmer que les parties n'auraient pas sérieusement contesté les conclusions expertales et en déduisant du total des jours de retard, pour le calcul des pénalités de retard dues par la société GFC, les jours qui n'auraient pas été imputables au constructeur, sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si les dispositions contractuelles ne prévoyaient pas un délai ferme d'exécution, au-delà duquel le constructeur était redevable de pénalités de retard, sans considération pour l'imputabilité des jours de retard, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1229 du code civil ;
Mais attendu que la juridiction de renvoi s'est conformée, sur ce point, à l'arrêt de cassation qui l'avait saisie ;
D'où il suit que le moyen est irrecevable ;
Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que les pénalités relatives à la remise tardive des documents avaient déjà été appliquées sur les situations de travaux de la société GFC, ainsi que l'avait vérifié l'expert judiciaire, et retenu que la commune de Nice ne pouvait pas solliciter le paiement d'une somme qu'elle avait déjà reçue, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes et qui a pu en déduire, sans dénaturation, que cette demande devait être rejetée, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le troisième moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la commune de Nice au dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la commune de Nice à payer à la société GFC construction la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de la commune de Nice ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept septembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour la commune de Nice.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR fixé à 47 jours le nombre de jours de retard, et D'AVOIR condamné la société GFC à payer la somme de 192.526,34 € à la Ville de NICE, avec intérêts au taux contractuels prévu par la norme NF P 03-001, soit 17%, par an à compter du 11 janvier 2006 ;
AUX MOTIFS QU'« en ce qui concerne la demande au titre des pénalités de retard et au titre de l'exécution, la cour constate que dans le cadre de son rapport l'expert X... a fait une analyse détaillée des demandes présentées par la Ville de NICE et a mis en exergue plus particulièrement le manque de clarté des pièces contractuelles dans les dispositions au titre des pénalités de retard ; la cour relève aussi que les immeubles ont été réceptionnés avant la date d'achèvement tous corps d'état fixée au 12/04/91 ; que cependant l'expert retient 47 jours de retard au titre des pénalités imputables à la société MISTRAL, soit la somme de 192.526,34 € ; qu'en effet, et selon l'expert, le délai initial du 7/08/90 devait être prorogé de 13 semaines, incluant un retard de deux semaines pris par le maître d'ouvrage et le maître d'oeuvre dans le lancement des travaux, de 17 jours au titre des intempéries pendant le chantier ; qu'en définitive, le délai doit être fixé au 29/11/90, conduisant donc à un retard de seulement 47 jours ; la cour constate que les conclusions expertales ne font pas l'objet de contestations sérieuses de la part des deux parties alors même qu'elles ont pu s'expliquer largement dans le cadre d'une mesure d'expertise qui a duré plusieurs années et qu'elles ont été à même de présenter à l'expert l'ensemble de leurs pièces et argumentation sur ce point ; la cour en conséquence réformant parte in qua la décision appelée fixe à 47 jours le retard imputable à la société MISTRAL et donc à la somme de 192.526,34 € le montant des pénalités de ce chef » (arrêt p. 4) ;
ALORS QUE la clause pénale est la compensation des dommages et intérêts que le créancier souffre de l'inexécution de l'obligation principale ; que la Ville de NICE faisait valoir, dans ses conclusions (pp. 15 à 21), que le marché de travaux prévoyait un délai global contractuel d'exécution de 12 mois, et un délai particulier de 8 7 mois pour l'ensemble des lots « terrassement généraux » et « gros oeuvre » ; qu'elle indiquait que, selon les pièces du marché, les pénalités de retard étaient prévues en cas de retard du constructeur sur le délai d'exécution fixé par le contrat pour son ou ses lots ; qu'elle en déduisait qu'au regard de l'obligation de résultat souscrite par l'entrepreneur, qui doit mettre en oeuvre tous les moyens matériels et humains pour respecter les délais d'exécution de l'ouvrage prévus au contrat, les indemnités de retard imputables à la société MISTRAL TRAVAUX devaient être calculées automatiquement, et sans la moindre référence à une imputation ou une faute de l'entreprise de travaux ; qu'en se bornant à affirmer que les parties n'auraient pas sérieusement contesté les conclusions expertales, et en déduisant du total des jours de retard, pour le calcul des pénalités de retard dues par la société GFC, les jours qui n'auraient pas été imputables au constructeur, sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si les dispositions contractuelles ne prévoyaient pas un délai ferme d'exécution, au-delà duquel le constructeur était redevable de pénalités de retard, sans considération pour l'imputabilité des jours de retard, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1229 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté la Ville de NICE du surplus de ses demandes et notamment de celle formée contre la société GFC en paiement de la somme de 18.622,87 € au titre des pénalités de retard de remise de documents, avec intérêts ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE « la SIVN (SOCIETE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE NICE) sollicite la condamnation des requises au paiement de la somme de 122.158 F TTC pour des pénalités de retard dans la remise de documents ; qu'elles résultent d'une disposition contractuelle et qu'elles n'ont pas été contestées lors de leur application ; que ces pénalités de retard ont été retenues sur les situations de travaux de la SA GROUPEMENT FRANÇAIS DE CONSTRUCTION comme l'a constaté l'expert X..., il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande » (jugement, p. 7) ;
ET AUX MOTIFS PROPRES QU'« en ce qui concerne la demande faite par la Ville de NICE au titre des pénalités de remise de documents, la cour constate que ces pénalités ont déjà été appliquées sur les situations de travaux de la société GFC CONSTRUCTION ; que ce point a d'ailleurs été vérifié et reconnu exact par l'expert ; la cour dira en conséquence que la Ville de NICE ne peut pas venir demander à nouveau la condamnation à des pénalités dont elle a déjà reçu paiement ; cette demande sera rejetée et la décision confirmée de ce chef » (arrêt p. 4) ;
1/ ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que l'expert judiciaire notait, dans son rapport (p. 287), que « la remise tardive de documents d'exécution (plans des fournisseurs de MISTRAL, ALVEODALLE et FERDER) est l'un des facteurs de retard qui pénalisent MISTRAL sur les travaux, et je ne vois pas très bien pourquoi l'entreprise devrait être pénalisée une deuxième fois pour ce même retard » ; qu'il indiquait ainsi que l'entreprise de travaux avait pris du retard dans l'exécution du chantier, ce qui faisait l'objet de pénalités de retard d'exécution, et qu'elle était également responsable d'un retard dans la transmission des documents dont elle avait la charge, ce qui avait contribué à ses retards d'exécution ; qu'il estimait redondant de sanctionner le retard d'exécution et le retard dans la transmission des documents ; qu'en aucun cas, il n'a constaté que les pénalités contractuellement prévues pour le retard dans la transmission des documents auraient été appliquées sur les situations de travaux ; qu'en affirmant néanmoins le contraire, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'expert judiciaire et violé l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause, ensemble l'article 1134 du code civil ;
2/ ALORS QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que la Ville de NICE invitait le juge, dans ses conclusions (pp. 21 à 24), à vérifier si les pénalités de retard dans la remise des plans et documents complets avaient été réellement prélevées, indépendamment des mentions du rapport d'expertise qui n'avait pu porter sur cette question ; qu'elle indiquait que les situations de travaux intermédiaires avec les avis de paiement mensuels faisaient état des retenues calculées au pourcentage du prix du contrat, c'est-à-dire des retenues au titre du retard d'exécution, mais que les retards au titre de la transmission des plans, aisément reconnaissables à leur retenue forfaitaire de 500 F par jour, n'avaient jamais été comptabilisés sur les états intermédiaires ; qu'en se bornant à affirmer que les pénalités au titre de ces retards de transmission avaient déjà été appliquées sur les situations de travaux de la société GFC, pour en déduire que la Ville de NICE ne pouvait pas en demander à nouveau le paiement au constructeur, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas des situations de travaux, qui ne mentionnaient pas les sommes forfaitaires de 500 F contractuellement prévues au titre des pénalités de retard dans la transmission de documents, que ces pénalités n'avaient en réalité pas été comptabilisées et effectivement payées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
3/ ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE les situations de travaux établies par l'entrepreneur n'ont qu'un caractère provisoire et ne peuvent pas être opposées à la vérification définitive des mémoires, pour l'établissement des comptes entre les parties ; que la Ville de NICE invitait le juge, dans ses conclusions (pp. 21 à 24), à vérifier si les pénalités de retard dans la remise des plans et documents complets, quand bien même elles avaient été mentionnées sur les états de situation, avaient été réellement prélevées, en l'état des contestations de la société MISTRAL TRAVAUX, dans le décompte général définitif ; qu'elle affirmait, en produisant ce décompte, qu'il en résultait que les indemnités de retard tarifées à hauteur de 500 F par jour de retard calendaire pour les retards de transmission de plans, n'avaient pas été comptabilisées ; qu'en se bornant à constater que ces pénalités avaient déjà été appliquées sur les situations de travaux de la société GFC, pour en déduire que la Ville de NICE ne pouvait pas demander à nouveau la condamnation du constructeur à des pénalités dont elle avait déjà reçu paiement, sans rechercher si, en l'état du caractère provisoire des situations de travaux, qui ne pouvaient dès lors servir de référence, il ressortait du décompte final effectué entre les parties que les pénalités litigieuses n'avaient pas été comptabilisées et payées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la Ville de NICE à payer à la société GFC la somme de 47.779,05 € au titre des travaux supplémentaires avec intérêts au taux de 17% l'an à compter du 18/09/91, jour de la réception des travaux ;
AUX MOTIFS QUE « la cour constate enfin que la Ville de NICE se reconnaît débitrice de la somme de 47.779,05 € ; la cour constate qu'il s'agit de travaux supplémentaires qui se rattachent au marché initial ; la cour constate aussi que bien qu'aucun ordre de service n'ait été signé, la Ville de NICE n'a jamais contesté la réalité de ces travaux ; qu'elle les a acceptés lors de la réception des travaux en n'émettant aucune réserve de ce chef ; la cour dira en conséquence que cette somme portera intérêt au taux de 17% l'an à compter du 18/09/91, jour de la réception des travaux » (arrêt p. 4) ;
ALORS QUE les travaux supplémentaires dont un entrepreneur demande le paiement doivent avoir été, soit commandés par le maître d'ouvrage avant leur exécution, soit acceptés par lui sans équivoque après leur exécution ; que la cour d'appel a constaté que la société GFC avait contracté avec la SIVN au travers d'un marché forfaitaire (jugement p. 8), ce dont il résultait que les prestations supplémentaires effectuées ne pouvaient recevoir paiement, et le cas échéant le retard dans ce paiement ne pouvait se voir sanctionner par l'application du taux d'intérêt conventionnellement prévu, que si ces prestations avaient été dûment autorisées par le maître d'ouvrage ; qu'en constatant qu'aucun ordre de service n'avait été signé par la Ville de NICE (arrêt p. 4), et en condamnant néanmoins cette dernière à payer à la société GFC une somme de 47.779,05 € au titre des prestations supplémentaires réalisées, en y appliquant le taux conventionnel de 17% l'an à compter de la réception des travaux, au motif inopérant que la Ville aurait accepté ces prestations lors de la réception des travaux en n'émettant aucune réserve de ce chef, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé une acceptation non équivoque du maître d'ouvrage après exécution des travaux, a violé les articles 1134 et 1793 du code civil, ensemble l'article 1153 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 13-23149
Date de la décision : 17/09/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11 avril 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 17 sep. 2014, pourvoi n°13-23149


Composition du Tribunal
Président : M. Mas (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Gadiou et Chevallier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.23149
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award