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16/09/2014 | FRANCE | N°13-22075

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 16 septembre 2014, 13-22075


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Maria X... a été placée sous sauvegarde de justice le 26 mai 2004 puis sous tutelle le 25 novembre 2004 ; qu'elle est décédée le 24 octobre 2005 ; que, le 1er octobre 1998, elle avait conclu un bail commercial avec une société appartenant à deux de ses petits-enfants ; qu'après avoir obtenu un titre exécutoire contre cette dernière pour défaut de paiement des

loyers, elle a signé, le 1er avril 2004, une transaction et un avenant au ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Maria X... a été placée sous sauvegarde de justice le 26 mai 2004 puis sous tutelle le 25 novembre 2004 ; qu'elle est décédée le 24 octobre 2005 ; que, le 1er octobre 1998, elle avait conclu un bail commercial avec une société appartenant à deux de ses petits-enfants ; qu'après avoir obtenu un titre exécutoire contre cette dernière pour défaut de paiement des loyers, elle a signé, le 1er avril 2004, une transaction et un avenant au bail commercial initial ;
Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation de ces actes formée par Mme Annie X..., fille de l'intéressée et légataire universelle, l'arrêt retient qu'il appartient uniquement à la cour de rechercher si, à la date de leur signature, Maria X... se trouvait " dans un état d'insanité d'esprit " au sens de l'article 489-1 ancien du code civil, devenu l'article 414-2 du code civil, et qu'il incombe à la demanderesse de rapporter la preuve de l'insanité d'esprit de sa mère à la date des actes litigieux, ce qu'elle ne fait pas ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de Mme Annie X..., qui fondait sa demande d'annulation non seulement sur les dispositions des articles 489 et 489-1 anciens du code civil, mais également sur celles de l'article 503 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation des actes signés par Maria X... et datés du 1er avril 2004, l'arrêt rendu le 21 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne la société Pyrénéon aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Pyrénéon à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Ce moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande d'annulation des actes signés par Madame Maria Y... veuve X... et datés du 1er avril 2004 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la cour s'attachera exclusivement à rechercher si à la date de signature des actes litigieux que sont la transaction et l'avenant au bail en date du 1er avril 2004, signés par Mme Maria Y... veuve X..., celle-ci se trouvait alors dans un état d'insanité d'esprit au sens de l'article 414-2 du code civil ;
Ainsi que l'a précisément relevé le premier juge, il n'est pas discuté :
. que les actes en date du 1er avril 2004 ne portent pas en eux-mêmes la preuve d'un trouble mental chez Mme Maria Y... veuve X... ;
. qu'à cette date, cette dernière n'était pas placée sous sauvegarde de justice, cette mesure de protection n'ayant été prononcée que par ordonnance du 26 mai 2004 ;
. que l'ordonnance, de placement sous tutelle est intervenue le 25 novembre 2004, se référant à une requête en ouverture de la procédure en date du 26 mai 2004 et à un certificat du Docteur Z..., médecin spécialiste inscrit sur la liste établie par le procureur de la République, en date du 23 mars 2004 ;
Il s'en évince que l'action aux fins d'ouverture d'une mesure de tutelle est bien antérieure au décès de Mme Maria Y... veuve X..., de même que le prononcé de cette décision de protection avec un mandat de gérance donné à un tiers. Cela répond à l'un des critères ouvrant la possibilité à Mme Annie X... d'attaquer pour insanité d'esprit les actes litigieux sur le fondement de l'article 414-2 du code civil ;
La cour fait sienne l'analyse pertinente et complète faite par le premier juge des documents produits tant en première instance qu'en cause d'appel en ce que :
. il appartient à Mme Annie X... de rapporter la preuve de l'insanité d'esprit de sa mère au moment de la signature des actes ;
. les témoignages produits par l'appelante ne prouvent nullement que la signature de ces actes serait intervenue le 18 février 2004, soit le jour où Eric X... est venu chercher sa grand-mère à la maison de retraite pour l'emmener dans les locaux de la SARL PYRENEON, ni que cette signature aurait été extorquée ce même jour, ni enfin que Mme Maria Y... veuve X... ne disposait pas de ses facultés de discernement au moment de la signature ;
. il est surprenant de voir Mme Annie X... soutenir que les actes auraient été nécessairement signés le 18 février 2004, précédant d'un mois le certificat médical du Docteur Z... plutôt que le 1er avril 2004, date portée sur lesdits actes ;
. il est tout aussi contradictoire pour celle-ci de faire état, dans son audition du 7 juin 2004, de la volonté de sa mère de récupérer les locaux et de soutenir que le 1er avril ou même le 18 février 2004, cette dernière ne disposait plus de toutes ses facultés mentales pour consentir un nouveau bail sur ces locaux ;
. l'autorisation donnée par le juge des tutelles, le 10 mars 2005, en vue d'une action en nullité des actes ne présume en rien de l'issue d'une telle procédure.
De même, en dehors des certificats émanant des docteurs A... et Z..., tels qu'évoqués et analysés par le premier juge et à l'examen desquels il est expressément renvoyé, il n'est pas plus démontré :
* d'une part, la réalité et l'importance de l'évolution de la maladie d'Alzheimer dont Mme Maria Y... Veuve X... était atteinte au moins depuis le 14 décembre 2001 alors même que des courriers écrits depuis en 2002 et 2003 par l'intéressée attestent d'une certaine capacité à s'occuper de ses affaires, à s'inquiéter de ne plus percevoir de loyers et à engager pour ce faire une procédure qui a conduit à l'ordonnance de référé du 8 juillet 2003 ;
* d'autre part, le fait qu'elle " ne sait plus les papiers qu'elle a signés ", ce qui l'affectait, caractériserait un trouble du raisonnement ou de la conscience, encore moins une insanité d'esprit de naturel altérer son discernement et à invalider tout consentement, étant souligné par le premier juge que la mesure de tutelle est intervenue au motif d'un trouble de mémoire et d'orientation altérant les facultés mentales de la personne désormais protégée, n'entraînant pas ainsi nécessairement une disparition ou une altération de sa faculté de jugement ;
II est tout aussi opérant de relever que le consentement ainsi donné par Mme Maria Y... veuve X... à la transaction et à l'avenant au bail dont s'agit, s'inscrit dans un contexte familial, certes conflictuel, mais pour lequel l'intérêt de cette dernière pouvait être aussi de voir continuer l'oeuvre de ses mari et fils défunts, par le maintien d'une relation contractuelle et d'un bail avec la SARL Pyrénéon, sans forcément être contradictoire avec la procédure en résiliation du bail et en expulsion de la locataire ayant donné lieu à l'ordonnance de référé précitée ;
Bien au contraire, qui plus est dans le contexte familial rappelé, un bailleur peut toujours renoncer à poursuivre l'expulsion du locataire dès lors qu'il y trouve avantage notamment pas l'augmentation du loyer commercial telle que visée dans la transaction et l'avenant au bail dont s'agit, ainsi qu'il sera développé ci-après ;
L'appelante n'est plus fondée à se prévaloir de la motivation de l'arrêt rendu le 15 décembre 2011 par la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier qui dans le cadre de la plainte déposée par Mme Annie X... pour abus de faiblesse, a confirmé l'ordonnance du magistrat instructeur ayant dit n'y avoir lieu à suivre à l'égard de quiconque, et donc de Rieja X... ou d'Eric X..., de ce chef de poursuite ;
En effet, si pour justification de ce non-lieu la cour d'appel retient « qu'entre le mois de février 2004 et le mois d'avril 2004, période au cours de laquelle les actes litigieux avaient été signés par Mme Maria X..., celle-ci était bien dans une situation de faiblesse psychologique due à sa maladie et à son très grand âge... », mais que cependant, lesdits actes n'ont pas gravement préjudicié aux droits et aux intérêts de cette dernière, cet état de faiblesse n'est pas pour autant démonstratif de l'insanité d'esprit de Mme Maria Y... veuve X..., au sens de l'article 414-2 précité, au jour de la signature des actes litigieux.
L'appelante ne justifie pas plus dans ces conditions d'un éventuel défaut de consentement de la part de Mme Maria Y... veuve X... à raison de manoeuvres dolosives qui ne se présument pas, conformément aux dispositions de l'article 1116 du code civil ;
Le fait pour Eric X... d'avoir visité sa grand-mère le 18 février 2004 pour ensuite l'emmener dans les locaux de l'entreprise, ne peut attester avec certitude, d'une volonté de celui-ci et au travers de sa personne, de la SARL PYRENEON, de surprendre le consentement de l'intéressée et de la tromper, alors que cette société à caractère familial tout comme Mme Maria Y... veuve X..., elle-même, avaient un intérêt certain et commun à voir se poursuivre l'activité de l'entreprise, aucun élément, tel qu'une candidature d'un nouveau locataire, ne venant démontrer que la bailleresse aurait eu intérêt à poursuivre l'exécution de l'ordonnance du 3 juillet 2003 ;
Enfin, contrairement à ce que soutient l'appelante, la transaction litigieuse ne saurait être exempte de concessions réciproques, en l'état de l'augmentation de loyer consentie par la locataire, étant observé que jusqu'à ce jour, jamais aucune action en augmentation du loyer n'avait été initiée par les bailleurs depuis l'origine du bail ;
Par ailleurs, l'évaluation de la valeur locative des locaux loués à hauteur de 1. 907, 33 € par mois effectuée par l'expert B... dans le cadre d'un contentieux successoral entre les héritiers de Mme Maria Y... veuve X..., ne peut caractériser ni une insanité d'esprit de la part de cette dernière qui aurait consenti un nouveau loyer à hauteur de 765 € par mois, ni une absence de contrepartie sérieuse ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS DES PREMIERS JUGES QU'il appartient à Madame X... de rapporter la preuve de l'insanité d'esprit au moment de la signature des actes, que l'action aux fins de tutelle ou de curatelle ait été introduite avant ou après leur signature. Mais si l'insanité d'esprit a existé avant et après la signature des actes, il appartient alors à la SARL de prouver que la signature est intervenue dans un intervalle de lucidité ;
Les deux attestations produites par Madame X... selon lesquelles les petits-fils de Madame Y... sont passés la chercher le 18 février 2004 ou étaient présents à la maison de retraite trois mois avant le 30 mai 2004 ne prouvent rien et notamment pas que la signature de Madame Y... ait été extorquée en février 2004 ni que Madame Y... ne disposait pas de ses facultés de discernement au moment de la signature ;
...
L'autorisation donnée par le juge des tutelles le 10 mars 2005 en vue d'une action en nullité des actes ne présume en rien de l'issue qui aurait pu être celle de cette procédure ;
Il ressort du certificat médical établi par le docteur A... que Madame Y... était atteinte d'une maladie d'Alzheimer, limitant ses possibilités d'autonomie, depuis au moins le 14 décembre 2001 ;
L'examen des courriers écrits par elle à cette même époque en 2002 et 2003 démontre que cette limitation ne concernait pas ses capacités intellectuelles puisqu'elle s'occupe elle-même des litiges l'opposant à Madame Rieja X..., gérante de la société ;
Le certificat médical du Docteur Gilles Z..., en date du 23 mars 2004 fait état de troubles de la mémoire et de l'orientation et non du jugement, ni de la faculté de compréhension ;
Il ne dit pas que Madame Y... ne sait pas ce qu'elle fait, mais qu'elle « ne sait pas les papiers qu'elle a signés (ce qui semble l'affecter) » ;
Le trouble qui justifie ses conclusions se situe donc dans le domaine de la mémoire, Madame Y... ne se souvenant pas de ce qu'elle a pu faire, sans que l'on sache à quelle distance de ses actes. Le médecin ne mentionne pas de trouble du raisonnement ou de la conscience. Au contraire, Madame Y... fait preuve d'une certaine lucidité et se rend compte de ses pertes de mémoire puisqu'elle en est affectée ;
C'est d'ailleurs également un trouble de la mémoire et de l'orientation qui fonde la décision du juge des tutelles qui constate en conséquence une altération des facultés mentales, mais pas une disparition, ni même une altération, de sa faculté déjuger ni une insanité d'esprit de nature à altérer son discernement et à invalider son consentement, consentement qui a de surcroît été donné dans un cadre familial, ce qui est différent d'un consentement donné à un tiers totalement étranger ;
La décision de tutelle est par ailleurs intervenue dans un contexte qui est parfaitement résumé par le deuxième paragraphe de la deuxième page de l'ordonnance du juge des tutelles et qui a justifié la désignation d'un mandataire extérieur à la famille ;
1°) ALORS QUE Madame Annie X... fondait sa demande en nullité des actes datés du 1er avril 2004 sur les dispositions de l'article 503 du Code civil dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007, aux termes desquelles les actes antérieurs pourront être annulés si la cause qui a déterminé l'ouverture de la tutelle existait notoirement à l'époque où ils ont été faits, si bien qu'en ne s'expliquant pas sur l'application de ces dispositions, la Cour d'appel a méconnu les dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'il résulte des dispositions de l'article 503 du Code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 5 mars 2007, applicable en la cause, que les actes antérieurs à l'ouverture de la tutelle pourront être annulés si la cause qui a déterminé cette mesure existait notoirement à l'époque où ils ont été faits, si bien que la Cour d'appel, qui relève que la maladie d'Alzheimer ayant déterminé l'ouverture de la tutelle de Madame Y... veuve X... par un jugement du 25 novembre 2004 avait été médicalement constatée antérieurement à la date des actes du 1er avril 2004, n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations au regard du texte précité.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Ce moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande d'annulation des actes signés par Madame Maria Y... veuve X... datés du 1er avril 2004 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la cour s'attachera exclusivement à rechercher si à la date de signature des actes litigieux que sont la transaction et l'avenant au bail en date du 1er avril 2004, signés par Mme Maria Y... veuve X..., celle-ci se trouvait alors dans un état d'insanité d'esprit au sens de l'article 414-2 du code civil ;
Ainsi que l'a précisément relevé le premier juge, il n'est pas discuté :
. que les actes en date du 1er avril 2004 ne portent pas en eux-mêmes la preuve d'un trouble mental chez Mme Maria Y... veuve X... ;
. qu'à cette date, cette dernière n'était pas placée sous sauvegarde de justice, cette mesure de protection n'ayant été prononcée que par ordonnance du 26 mai 2004 ;
. que l'ordonnance, de placement sous tutelle est intervenue le 25 novembre 2004, se référant à une requête en ouverture de la procédure en date du 26 mai 2004 et à un certificat du Docteur Z..., médecin spécialiste inscrit sur la liste établie par le procureur de la République, en date du 23 mars 2004 ;
Il s'en évince que l'action aux fins d'ouverture d'une mesure de tutelle est bien antérieure au décès de Mme Maria Y... veuve X..., de même que le prononcé de cette décision de protection avec un mandat de gérance donné à un tiers. Cela répond à l'un des critères ouvrant la possibilité à Mme Annie X... d'attaquer pour insanité d'esprit les actes litigieux sur le fondement de l'article 414-2 du code civil ;
La cour fait sienne l'analyse pertinente et complète faite par le premier juge des documents produits tant en première instance qu'en cause d'appel en ce que :
. il appartient à Mme Annie X... de rapporter la preuve de l'insanité d'esprit de sa mère au moment de la signature des actes ;
. les témoignages produits par l'appelante ne prouvent nullement que la signature de ces actes serait intervenue le 18 février 2004, soit le jour où Eric X... est venu chercher sa grand-mère à la maison de retraite pour l'emmener dans les locaux de la SARL PYRENEON, ni que cette signature aurait été extorquée ce même jour, ni enfin que Mme Maria Y... veuve X... ne disposait pas de ses facultés de discernement au moment de la signature ;
. il est surprenant de voir Mme Annie X... soutenir que les actes auraient été nécessairement signés le 18 février 2004, précédant d'un mois le certificat médical du Docteur Z... plutôt que le 1er avril 2004, date portée sur lesdits actes ;
. il est tout aussi contradictoire pour celle-ci de faire état, dans son audition du 7 juin 2004, de la volonté de sa mère de récupérer les locaux et de soutenir que le 1er avril ou même le 18 février 2004, cette dernière ne disposait plus de toutes ses facultés mentales pour consentir un nouveau bail sur ces locaux ;
. l'autorisation donnée par le juge des tutelles, le 10 mars 2005, en vue d'une action en nullité des actes ne présume en rien de l'issue d'une telle procédure.
De même, en dehors des certificats émanant des docteurs A... et Z..., tels qu'évoqués et analysés par le premier juge et à l'examen desquels il est expressément renvoyé, il n'est pas plus démontré :
* d'une part, la réalité et l'importance de l'évolution de la maladie d'Alzheimer dont Mme Maria Y... Veuve X... était atteinte au moins depuis le 14 décembre 2001 alors même que des courriers écrits depuis en 2002 et 2003 par l'intéressée attestent d'une certaine capacité à s'occuper de ses affaires, à s'inquiéter de ne plus percevoir de loyers et à engager pour ce faire une procédure qui a conduit à l'ordonnance de référé du 8 juillet 2003 ;
* d'autre part, le fait qu'elle " ne sait plus les papiers qu'elle a signés ", ce qui l'affectait, caractériserait un trouble du raisonnement ou de la conscience, encore moins une insanité d'esprit de naturel altérer son discernement et à invalider tout consentement, étant souligné par le premier juge que la mesure de tutelle est intervenue au motif d'un trouble de mémoire et d'orientation altérant les facultés mentales de la personne désormais protégée, n'entraînant pas ainsi nécessairement une disparition ou une altération de sa faculté de jugement ;
II est tout aussi opérant de relever que le consentement ainsi donné par Mme Maria Y... veuve X... à la transaction et à l'avenant au bail dont s'agit, s'inscrit dans un contexte familial, certes conflictuel, mais pour lequel l'intérêt de cette dernière pouvait être aussi de voir continuer l'oeuvre de ses mari et fils défunts, par le maintien d'une relation contractuelle et d'un bail avec la SARL Pyrénéon, sans forcément être contradictoire avec la procédure en résiliation du bail et en expulsion de la locataire ayant donné lieu à l'ordonnance de référé précitée ;
Bien au contraire, qui plus est dans le contexte familial rappelé, un bailleur peut toujours renoncer à poursuivre l'expulsion du locataire dès lors qu'il y trouve avantage notamment pas l'augmentation du loyer commercial telle que visée dans la transaction et l'avenant au bail dont s'agit, ainsi qu'il sera développé ci-après ;
L'appelante n'est plus fondée à se prévaloir de la motivation de l'arrêt rendu le 15 décembre 2011 par la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier qui dans le cadre de la plainte déposée par Mme Annie X... pour abus de faiblesse, a confirmé l'ordonnance du magistrat instructeur ayant dit n'y avoir lieu à suivre à l'égard de quiconque, et donc de Rieja X... ou d'Eric X..., de ce chef de poursuite ;
En effet, si pour justification de ce non-lieu la cour d'appel retient « qu'entre le mois de février 2004 et le mois d'avril 2004, période au cours de laquelle les actes litigieux avaient été signés par Mme Maria X..., celle-ci était bien dans une situation de faiblesse psychologique due à sa maladie et à son très grand âge... », mais que cependant, lesdits actes n'ont pas gravement préjudicié aux droits et aux intérêts de cette dernière, cet état de faiblesse n'est pas pour autant démonstratif de l'insanité d'esprit de Mme Maria Y... veuve X..., au sens de l'article 414-2 précité, au jour de la signature des actes litigieux.
L'appelante ne justifie pas plus dans ces conditions d'un éventuel défaut de consentement de la part de Mme Maria Y... veuve X... à raison de manoeuvres dolosives qui ne se présume pas, conformément aux dispositions de l'article 1116 du code civil ;
Le fait pour Eric X... d'avoir visité sa grand-mère le 18 février 2004 pour ensuite l'emmener dans les locaux de l'entreprise, ne peut attester avec certitude, d'une volonté de celui-ci et au travers de sa personne, de la SARL PYRENEON, de surprendre le consentement de l'intéressée et de la tromper, alors que cette société à caractère familial tout comme Mme Maria Y... veuve X..., elle-même, avaient un intérêt certain et commun à voir se poursuivre l'activité de l'entreprise, aucun élément, tel qu'une candidature d'un nouveau locataire, ne venant démontrer que la bailleresse aurait eu intérêt à poursuivre l'exécution de l'ordonnance du 3 juillet 2003 ;
Enfin, contrairement à ce que soutient l'appelante, la transaction litigieuse ne saurait être exempte de concessions réciproques, en l'état de l'augmentation de loyer consentie par la locataire, étant observé que jusqu'à ce jour, jamais aucune action en augmentation du loyer n'avait été initiée par les bailleurs depuis l'origine du bail ;
Par ailleurs, l'évaluation de la valeur locative des locaux loués à hauteur de 1. 907, 33 € par mois effectuée par l'expert B... dans le cadre d'un contentieux successoral entre les héritiers de Mme Maria Y... veuve X..., ne peut caractériser ni une insanité d'esprit de la part de cette dernière qui aurait consenti un nouveau loyer à hauteur de 765 € par mois, ni une absence de contrepartie sérieuse ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS DES PREMIERS JUGES QU'il appartient à Madame X... de rapporter la preuve de l'insanité d'esprit au moment de la signature des actes, que l'action aux fins de tutelle ou de curatelle ait été introduite avant ou après leur signature. Mais si l'insanité d'esprit a existé avant et après la signature des actes, il appartient alors à la SARL de prouver que la signature est intervenue dans un intervalle de lucidité ;
Les deux attestations produites par Madame X... selon lesquelles les petits-fils de Madame Y... sont passés la chercher le 18 février 2004 ou étaient présents à la maison de retraite trois mois avant le 30 mai 2004 ne prouvent rien et notamment pas que la signature de Madame Y... ait été extorquée en février 2004 ni que Madame Y... ne disposait pas de ses facultés de discernement au moment de la signature ;
...
L'autorisation donnée par le juge des tutelles le 10 mars 2005 en vue d'une action en nullité des actes ne présume en rien de l'issue qui aurait pu être celle de cette procédure ;
Il ressort du certificat médical établi par le docteur A... que Madame Y... était atteinte d'une maladie d'Alzheimer, limitant ses possibilités d'autonomie, depuis au moins le 14 décembre 2001 ;
L'examen des courriers écrits par elle à cette même époque en 2002 et 2003 démontre que cette limitation ne concernait pas ses capacités intellectuelles puisqu'elle s'occupe elle-même des litiges l'opposant à Madame Rieja X..., gérante de la société ;
Le certificat médical du Docteur Gilles Z..., en date du 23 mars 2004 fait état de troubles de la mémoire et de l'orientation et non du jugement, ni de la faculté de compréhension ;
Il ne dit pas que Madame Y... ne sait pas ce qu'elle fait, mais qu'elle « ne sait pas les papiers qu'elle a signés (ce qui semble l'affecter) » ;
Le trouble qui justifie ses conclusions se situe donc dans le domaine de la mémoire, Madame Y... ne se souvenant pas de ce qu'elle a pu faire, sans que l'on sache à quelle distance de ses actes. Le médecin ne mentionne pas de trouble du raisonnement ou de la conscience. Au contraire, Madame Y... fait preuve d'une certaine lucidité et se rend compte de ses pertes de mémoire puisqu'elle en est affectée ;
C'est d'ailleurs également un trouble de la mémoire et de l'orientation qui fonde la décision du juge des tutelles qui constate en conséquence une altération des facultés mentales, mais pas une disparition, ni même une altération, de sa faculté de juger ni une insanité d'esprit de nature à altérer son discernement et à invalider son consentement, consentement qui a de surcroît été donné dans un cadre familial, ce qui est différent d'un consentement donné à un tiers totalement étranger ;
La décision de tutelle est par ailleurs intervenue dans un contexte qui est parfaitement résumé par le deuxième paragraphe de la deuxième page de l'ordonnance du juge des tutelles et qui a justifié la désignation d'un mandataire extérieur à la famille ;
1°/ ALORS QUE le Docteur Z..., médecin spécialiste inscrit sur la liste établie par le procureur de la République, qui avait examiné Madame Y... veuve X... une semaine avant la date des actes litigieux avait conclu qu'elle présentait une altération de ses facultés mentales qui rend nécessaire qu'elle soit représentée de façon continue dans les actes de la vie civile, si bien qu'en écartant ce certificat comme n'établissant pas une altération des facultés de discernement de l'intéressée de nature à altérer son consentement à l'acte, la Cour d'appel a méconnu l'article 489 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 5 mars 2007 ;
2°/ ALORS QU'en retenant que la mesure de tutelle est intervenue au motif d'un trouble de mémoire et d'orientation altérant les facultés mentales de la personne désormais protégée, n'entraînant pas ainsi nécessairement une disparition ou une altération de sa faculté de jugement, la Cour d'appel s'est déterminée par des motifs contradictoires violant ainsi l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 13-22075
Date de la décision : 16/09/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 21 mai 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 16 sep. 2014, pourvoi n°13-22075


Composition du Tribunal
Président : Mme Bignon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.22075
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