La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/09/2014 | FRANCE | N°13-14646

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 septembre 2014, 13-14646


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. X... que sur le pourvoi incident éventuel relevé par la société Platina Affiliates :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 septembre 2012), que M. X..., alors salarié de la société Infos France, filiale de la société IF Finance, devenue Infos Europe (la société Infos Europe), a souscrit le 29 juillet 2005 à une augmentation du capital de cette dernière dont il est devenu coassocié avec la société Platina Affiliates (la société PA) ; que, le

même jour, M. X... et la société PA ont conclu, en présence de la société I...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. X... que sur le pourvoi incident éventuel relevé par la société Platina Affiliates :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 septembre 2012), que M. X..., alors salarié de la société Infos France, filiale de la société IF Finance, devenue Infos Europe (la société Infos Europe), a souscrit le 29 juillet 2005 à une augmentation du capital de cette dernière dont il est devenu coassocié avec la société Platina Affiliates (la société PA) ; que, le même jour, M. X... et la société PA ont conclu, en présence de la société Infos Europe, un pacte d'associés contenant un engagement de non-concurrence souscrit par M. X... à l'égard des sociétés du groupe Infos ; que, par lettre du même jour adressée à M. X..., la société PA s'est engagée à rémunérer cet engagement par le versement mensuel d'une certaine somme jusqu'à ce que l'intéressé soit délié de son obligation ; que M. X... est devenu salarié de la société Infos Europe à compter de mars 2006 ; que, le 11 décembre 2006, les parties ont conclu un nouveau pacte d'associés réitérant dans les mêmes termes la clause de non-concurrence et précisant que cet acte remplaçait et annulait toutes conventions ou tous documents antérieurs entre les parties, et en particulier le pacte d'associé du 29 juillet 2005 ; que, M. X... ayant été licencié le 16 juin 2008, la société PA lui a versé l'indemnité contractuellement fixée de juillet 2008 au 31 mars 2009, date à laquelle M. X... a été relevé de son obligation de non-concurrence ; que la société PA a été mise en liquidation amiable, MM. Y... et Z... (les liquidateurs) étant désignés liquidateurs ; que M. X... les a fait assigner ès qualités en paiement des sommes qu'il estimait lui être dues pour la période du 29 juillet 2005 au 16 juin 2008 ; que les liquidateurs, ès qualités, ont demandé reconventionnellement la restitution des sommes versées en rémunération de la clause de non-concurrence ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il n'est pas permis au juge, lorsque les termes d'une convention sont clairs et précis, d'en dénaturer le contenu sous prétexte d'interprétation ; que, selon l'article 8 du pacte d'associés du 11 décembre 2006, l'exposant s'était engagé à respecter une obligation de non-concurrence « pendant la durée des présentes et pendant une durée de 18 mois suivant la perte de sa qualité d'associé et/ ou de salarié de l'une des sociétés du groupe Infos », tandis que l'article 9 précisait que les engagements souscrits dans le pacte prendraient effet à compter de la réalisation de l'augmentation de capital et s'imposeraient aux parties tant que l'associé opérationnel demeurerait propriétaire des titres, dans la limite d'une durée de dix ans ; qu'il en résultait que l'associé opérationnel s'était engagé à une obligation de non-concurrence pendant l'exécution du pacte d'associés, en sa qualité d'associé et pendant 18 mois après la perte de la qualité de salarié et/ ou d'associé ; qu'en retenant, par motifs adoptés, que l'exposant n'avait pas demandé, avant son licenciement, le paiement de cette rémunération et que la société Platina Affiliates soutenait à juste titre que, pendant la durée d'exécution du contrat de travail, il devait se consacrer exclusivement à ses activités salariées, pour en déduire « qu'il était manifestement dans l'intention commune des parties que la rémunération de la clause ne soit due qu'à compter du départ de M. X... du groupe Infos » quand il résultait clairement de la clause de non-concurrence qu'elle était opposable à ce dernier pendant toute la durée du pacte d'associés, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'article 8 du pacte d'associés du 11 décembre 2006, en violation de l'article 1134 du code civil ;
2°/ que, sauf stipulation contraire, l'associé n'est pas, en cette qualité, tenu de s'abstenir d'exercer une activité concurrente de celle de la société et doit seulement s'abstenir d'actes de concurrence déloyale ; que l'exposant faisait valoir que la clause de non-concurrence insérée dans un pacte d'associé ne pouvait être assimilée à celle contenue dans un contrat de travail dès lors que, contrairement au régime applicable au salarié, aucune disposition légale ne prévoyait une obligation de non-concurrence attachée à la qualité même d'associé ; qu'en considérant que l'engagement de ce dernier couvrait nécessairement la période postérieure à la rupture du contrat de travail dès lors que pendant son exécution il était déjà tenu à une obligation de non-concurrence, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'engagement de non-concurrence stipulée pour la période antérieure à la rupture du contrat de travail visait à empêcher l'associé, en cette qualité, de se livrer à des actes de concurrence contre la société pendant la durée du pacte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
3°/ que la rémunération de la clause de non-concurrence pendant la période d'exécution du contrat de travail, s'analysant en un complément de salaire, n'est pas dénuée de cause ; qu'en retenant, par motifs adoptés, que la rémunération prévue au titre de l'engagement de non-concurrence pendant la durée d'exécution du contrat de travail du salarié était sans cause en ce qu'elle portait sur un engagement de non-concurrence sans objet, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et 1221-1 du code du travail ;
Mais attendu, d'une part, qu'appréciant la commune intention des parties et les éléments de preuve qui lui étaient soumis, par une interprétation souveraine que l'ambiguïté des conventions litigieuses rendait nécessaire, la cour d'appel a, par motifs propres et adoptés, en se référant non seulement à l'article 12 du pacte d'associé du 11 décembre 2006 mais également à la convention antérieure du 29 juillet 2005 et à la lettre adressée le même jour par la société PA à M. X..., qui en éclairaient le sens et la portée, considéré que le demandeur ne pouvait solliciter le paiement de l'indemnité de non-concurrence pour la période durant laquelle il était salarié ; qu'en l'état de cette interprétation, exclusive de toute dénaturation, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Attendu, d'autre part, qu'après avoir, par motifs propres et adoptés, par une appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis, relevé que M. X..., lorsqu'il était salarié, n'avait pas sollicité le paiement de l'indemnité de non-concurrence et que des différentes conventions souscrites entre les parties ressortait leur commune intention que l'indemnité ne fût due qu'à compter du départ de M. X... du groupe Infos, l'arrêt retient que le versement de l'indemnité de non-concurrence était privé de cause en raison de l'exécution de son contrat de travail et que cette indemnité couvrait nécessairement la période postérieure à la fin du contrat de travail de M. X... ; que la cour d'appel, qui a procédé à la recherche qui lui était demandée, a légalement justifié sa décision ;
Et attendu, enfin, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni de ses conclusions d'appel que M. X... ait soutenu devant la cour d'appel que l'indemnité qu'il estimait lui être due durant l'exécution de son contrat de travail, au titre de son engagement de non-concurrence, constituait un complément de salaire ; que le moyen est nouveau et mélangé de fait et de droit ;
D'où il suit que le moyen, qui ne peut être accueilli en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait de statuer sur le pourvoi incident éventuel :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit, au pourvoi principal, par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté le salarié et associé opérationnel (M. X..., l'exposant) de la société employeur (la société Infos France, filiale de la société If France, devenue Infos Europe) de sa demande de condamnation des liquidateurs (MM. Y... et Z...) de l'associé principal (la société Platina Affiliates) de cette société employeur à lui payer une certaine somme au titre la clause de non-concurrence stipulée dans le pacte d'associés qui les liait, pour la période du 29 juillet 2005 au 16 juin 2008 ;
AUX MOTIFS propres et adoptés QUE le premier pacte d'associés conclu e 29 juillet 2005 entre M. Philippe X... et la société Platina Affiliates, en présence de la société IF Finance, comportait un article 8 intitulé " clause de non-concurrence " recevant application pendant la durée du pacte ainsi que pendant une durée de 18 mois suivant la perte de la qualité d'associé, de salarié ou de mandataire social de l'une des sociétés du groupe Infos ; que, par courrier du même jour adressé à M. X... qui y avait apposé la mention " bon pour accord ", la société Platina Affiliates s'était engagée à lui verser la somme mensuelle brute de 7. 500 € en rémunération de la clause de non-concurrence « tant que nous vous demanderons de vous y conformer » ; qu'il était ajouté : « dès lors que nous vous aurons délié de vos obligations au titre de l'article 8 du pacte, vous ne pourrez plus prétendre à aucune rémunération, indemnité ou autre somme (autre que celles qui vous seraient dues au titre de l'exécution de votre contrat de travail et/ ou de votre mandat social) » ; que le second pacte d'associés conclu entre les mêmes parties le 11 décembre 2006 comportait un article 3 intitulé " droit de préemption ", un article 6 concernant le « départ de l'actionnaire opérationnel » et un article 8 dénommé " clause de non-concurrence " comportant une limitation dans l'espace et le temps et ne mentionnant aucune rémunération ; que les premiers juges, par des motifs pertinents que la cour adoptait, avaient justement considéré que la commune intention des parties avait consisté à substituer au pacte d'associés du 29 juillet 2005 celui du 11 décembre 2006 sans pour autant remettre en cause la validité du courrier du 29 juillet 2005 portant engagement de rémunérer la clause de non-concurrence, les stipulations du pacte du 11 décembre 2006 ne venant aucunement remettre en cause le principe et le montant de cette rémunération ; que cette volonté des parties s'était par ailleurs concrétisée par le versement par la société Platina Affiliates à M. X... de la somme de 71. 370, 97 € au titre de la rémunération de son engagement de non-concurrence sur la base mensuelle convenue, soit 7. 500 € bruts, pour la période de juillet 2008, M. X... ayant été licencié le 16 juin 2008, au 31 mars 2009, date à laquelle il avait été relevé par la société Platina Affiliates de son obligation de non-concurrence ; que les premiers juges avaient également justement considéré que la société Platina Affiliates ne prouvait aucunement le non-respect par M. X... de son obligation de non-concurrence entre le 16 juin 2008 et le 31 mars 2009 ; qu'il se déduisait de ce qui précédait que les premiers juges avaient justement débouté la société Platina Affiliates de sa demande de restitution de la somme de 71. 370, 97 €, le paiement parfaitement causé étant exclusif d'un enrichissement sans cause ; que M. X... avait également été justement débouté de sa demande en paiement de la somme de 259. 354, 84 € au titre de la rémunération de la clause de non-concurrence pour la période du 29 juillet 2005 au 16 juin 2008 puisque la portée de cet engagement couvrait nécessairement la période postérieure à la fin du contrat de travail, étant donné que, pendant son exécution, le salarié se trouvait déjà tenu à une obligation de non-concurrence ; qu'enfin M. X... avait également été justement débouté de sa demande de rémunération au titre de la clause de non-concurrence entre le 23 mars 2009, date de son relèvement, et le 16 décembre 2009, date d'expiration du délai contractuel de 18 mois, puisque le courrier du 29 juillet 2005 précisait expressément que la rémunération cesserait d'être due dès lors que M. X... serait délié de son obligation de non-concurrence, ce fait juridique étant ad-venu le 31 mars 2009, date à compter de laquelle M. X... avait été relevé de son obligation de non-concurrence ainsi que l'en avait informé la société Platina Affiliates dans un courrier qu'elle lui avait adressé le 23 mars 2009 (arrêt attaqué) ; qu'il était constant que M. X... n'avait, antérieurement à son licenciement, jamais demandé à la société Platina Affiliates de lui verser la rémunération prévue dans la lettre accord ; que, comme le soutenait à juste titre la société Platina Affiliates, M. X... devait, pendant la durée de son contrat de travail, se consacrer exclusivement à ses activités salariées à l'égard de son employeur, la société Infos Europe ; qu'il ne pouvait donc valablement prétendre percevoir une rémunération complémentaire de la part de la société Platina Affiliates au titre d'une obligation de non-concurrence qui était par là même sans objet, la rémunération correspondante étant sans cause ; qu'il résultait des éléments qui précédaient qu'il était manifestement de la commune intention des parties que cette rémunération ne fût due qu'à compter du moment où M. X... aurait quitté le groupe Infos ;
ALORS QUE, d'une part, il n'est pas permis au juge, lorsque les termes d'une convention sont clairs et précis, d'en dénaturer le contenu sous prétexte d'interprétation ; que, selon l'article 8 du pacte d'associés du 11 décembre 2006, l'exposant s'était engagé à respecter une obligation de non-concurrence « pendant la durée des présentes et pendant une durée de 18 mois suivant la perte de sa qualité d'associé et/ ou de salarié de l'une des sociétés du groupe Infos », tandis que l'article 9 précisait que les engagements souscrits dans le pacte prendraient effet à compter de la réalisation de l'augmentation de capital et s'imposeraient aux parties tant que l'associé opérationnel demeurerait propriétaire des titres, dans la limite d'une durée de dix ans ; qu'il en résultait que l'associé opérationnel s'était engagé à une obligation de non-concurrence pendant l'exécution du pacte d'associés, en sa qualité d'associé et pendant 18 mois après la perte de la qualité de salarié et/ ou d'associé ; qu'en retenant, par motifs adoptés, que l'exposant n'avait pas demandé, avant son licenciement, le paiement de cette rémunération et que la société Platina Affiliates soutenait à juste titre que, pendant la durée d'exécution du contrat de travail, il devait se consacrer exclusivement à ses activités salariées, pour en déduire « qu'il était manifestement dans l'intention commune des parties que la rémunération de la clause ne soit due qu'à compter du départ de M. X... du groupe Infos » (jugement, p. 10, al. 2) quand il résultait clairement de la clause de non-concurrence qu'elle était opposable à ce dernier pendant toute la durée du pacte d'associés, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'article 8 du pacte d'associés du 11 décembre 2006, en violation de l'article 1134 du code civil ;
ALORS QUE, d'autre part, sauf stipulation contraire, l'associé n'est pas, en cette qualité, tenu de s'abstenir d'exercer une activité concurrente de celle de la société et doit seulement s'abstenir d'actes de concurrence déloyale ; que l'exposant faisait valoir (v. ses concl. signifiées le 2 avril 2012, p. 10) que la clause de non-concurrence insérée dans un pacte d'associé ne pouvait être assimilée à celle contenue dans un contrat de travail dès lors que, contrairement au régime applicable au salarié, aucune disposition légale ne prévoyait une obligation de non-concurrence attachée à la qualité même d'associé ; qu'en considérant que l'engagement de ce dernier couvrait nécessairement la période postérieure à la rupture du contrat de travail dès lors que pendant son exécution il était déjà tenu à une obligation de non-concurrence, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'engagement de non-concurrence stipulée pour la période antérieure à la rupture du contrat de travail visait à empêcher l'associé, en cette qualité, de se livrer à des actes de concurrence contre la société pendant la durée du pacte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
ALORS QUE, au demeurant, la rémunération de la clause de non-concurrence pendant la période d'exécution du contrat de travail, s'analysant en un complément de salaire, n'est pas dénuée de cause ; qu'en retenant, par motifs adoptés, que la rémunération prévue au titre de l'engagement de non-concurrence pendant la durée d'exécution du contrat de travail du salarié était sans cause en ce qu'elle portait sur un engagement de non-concurrence sans objet, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et 1221-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-14646
Date de la décision : 16/09/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 20 septembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 16 sep. 2014, pourvoi n°13-14646


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.14646
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award