LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'ORLÉANS, chambre correctionnelle, en date du 16 juillet 2013, qui, pour escroqueries et dénonciations mensongères, l'a condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis, 1 500 euros d'amende, et a prononcé sur intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 28 mai 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel, président, M. Germain, conseiller rapporteur, Mme Nocquet, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller GERMAIN, les observations de la société civile professionnelle DELVOLVÉ, de la société civile professionnelle DIDIER et PINET, avocats en la Cour, et les conclusions de M. le premier avocat général BOCCON-GIBOD ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen cassation, pris de la violation des articles 313-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable d'escroquerie du 24 juin 2010 au 18 novembre 2011 à La Rochelle et du 3 janvier 2011 au 18 novembre 2011 à Orléans et l'a condamné à une peine d'emprisonnement de six mois avec sursis et à une peine d'amende de 1 500 euros ;
" aux motifs propres qu'il apparaissait invraisemblable que M. X... eût été victime en 2010 à La Rochelle puis en 2011 à Orléans de vols commis dans des circonstances quasiment identiques selon le récit qu'il en avait lui-même fourni : deux individus, agissant à visage découvert, avaient frappé à la porte du logement qu'il occupait dans une résidence sécurisée, l'un des deux individus l'ayant menacé avec une arme de poing portée à la ceinture, cet homme l'ayant invité « à ne pas faire le caïd » (vol commis à La Rochelle) ou « à ne pas faire le beau » (vol commis à Orléans) ; qu'il apparaissait de même invraisemblable qu'eussent été dérobés à M. X... en 2011 à Orléans un téléphone portable Motorola Rock R et deux téléphones portables Philips 755 alors que des objets identiques lui avaient déjà été volés en 2007 à Bordeaux et qu'il n'avait été en mesure de justifier le 4 janvier 2011 que de factures émises en février, mars et avril 2006, en 2011 à Orléans un appareil photo BENQ DC- C800 alors qu'un objet identique lui avait déjà été dérobé en 2007 à Bordeaux et qu'il n'avait été en mesure de justifier le 4 janvier 2011 que d'une facture émise en avril 2006, en 2011 à Orléans un routeur D-Link alors qu'un objet identique lui avait déjà été dérobé en 2007 à Bordeaux et qu'il n'avait été en mesure de justifier le 4 janvier 2011 que d'une facture émise en août 2006, en 2011 à Orléans un ordinateur portable Toshiba Satellite A 100-81 alors qu'un objet identique lui avait déjà été dérobé en 2007 à Bordeaux et qu'il n'avait été en mesure de justifier le 4 janvier 2011 que d'une facture émise en juin 2006, en 2011 à Orléans un ordinateur portable Acer 5220 alors qu'un objet identique lui avait déjà été dérobé en 2010 à La Rochelle et qu'il n'avait été en mesure de justifier le 4 janvier 2011 que d'une facture émise en octobre 2008, et en 2011 à Orléans un téléphone portable LG KP 500 alors qu'un objet identique lui avait déjà été dérobé en 2010 à La Rochelle et qu'il n'avait été en mesure de justifier le 4 janvier 2011 que d'une facture émise en juin 2009 ; qu'il est enfin invraisemblable que lui eût été dérobé le 3 janvier 2011 à Orléans un ensemble home cinéma Logitech Z-5400 alors qu'un tel ensemble home cinéma avait été saisi le 16 novembre 2011dans son appartement parisien et que ses allégations selon lesquelles il aurait racheté en magasin dans l'intervalle un tel ensemble se heurtaient aux renseignements obtenus du fabricant, selon qui la fabrication de ce modèle avait été interrompue en 2007 ;
" et aux motifs adoptés que sa culpabilité résultait d'un faisceau d'indices concordants :- les faits déclarés comme des vols à domicile les 5 janvier 2007 à Bordeaux, 23 juin 2010 à La Rochelle et 3 janvier 2011 à Orléans présentaient de singulières similitudes : commis sous la menace d'une arme de poing (La Rochelle et Orléans), ou d'un couteau (Bordeaux), par un (Bordeaux) ou deux individus (La Rochelle et Orléans) non cagoulé (s), contraignant la victime à ouvrir sa porte,- un butin à la fois habituel (ordinateurs, téléviseurs, téléphones portables, hifi, appareils photo, home cinémas ...) et très peu banal (livres, vêtements, dont à chaque fois plusieurs dizaines de polos demarques),- il était invraisemblables qu'une même personne subît trois vols à main armée à domicile dans trois villes différentes en l'espace de quatre ans pour lui dérober notamment une série de polos Ralph Lauren,- une mise en scène photographique des justificatifs sollicités par la compagnie d'assurance pour les deux sinistres de La Rochelle, à défaut de factures, l'inspecteur de cette compagnie ayant relevé l'incohérence de conserver une série de photos de polos et blousons de marque plutôt que leur facture,- découverte, lors de la perquisition au domicile parisien du prévenu, de plusieurs objets identiques à ceux dont il avait déclaré le vol à Orléans, La Rochelle ou Bordeaux et dont il ne disposait pas de justificatifs d'achat, les explications de M. X... à ce sujet, selon lesquelles il avait pu se tromper de factures justificatives lors de sa plainte ou encore qu'il avait racheté strictement les mêmes objets, en double ou triple exemplaire, que ceux qui lui avaient été volés, s'agissant de matériel de téléphonie et d'informatique rapidement obsolète, n'étant pas convaincantes surtout pour un jeune homme féru de technologie et de modernité comme il se décrit,- le passeport, prétendument volé à Orléans, avait été retrouvé lors de la perquisition parisienne au domicile du prévenu ;
" 1) alors que le juge correctionnel ne peut prononcer une peine pour un fait qu'il qualifie délit qu'autant qu'il constate l'existence de toutes les circonstances exigées par la loi pour que ce fait soit punissable ; qu'en outre tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que le délit d'escroquerie ne peut être caractérisé que par l'emploi de moyens frauduleux, la remise de fonds ou valeurs et un préjudice en résultant et qu'à la condition que les manoeuvres imputées au prévenu aient été déterminantes de la remise ; qu'en l'espèce, les énonciations de l'arrêt, qui portent uniquement sur le caractère identique, s'agissant des circonstances de leur commission et leurs objets, des vols subis par le prévenu, ne définissent aucun des éléments constitutif du délit d'escroquerie ; que la cour d'appel n'a en effet précisé ni les manoeuvres dont le prévenu aurait été l'auteur, ni en quoi ces manoeuvres auraient déterminé une remise de fonds, ni en quoi avait consisté la remise prévue par l'article 313-1 du code pénal ; qu'elle n'a donc pas justifié sa décision ;
" 2°) alors que le juge correctionnel ne peut prononcer une peine pour un fait qu'il qualifie délit qu'autant qu'il constate l'existence de toutes les circonstances exigées par la loi pour que ce fait soit punissable ; qu'en outre, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; qu'en retenant exclusivement le caractère invraisemblable des circonstances dans lesquelles le prévenu avait été victime de plusieurs vols pour dire l'escroquerie caractérisée, la cour d'appel a statué par des motifs hypothétiques " ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 434-26 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de dénonciation mensongère à une autorité judiciaire ou administrative entraînant des recherches inutiles commise le 24 juin 2010 à La Rochelle et les 3 et 4 janvier 2011 à Orléans et l'a condamné à une peine d'emprisonnement de six mois avec sursis et à une peine d'amende de 1 500 euros ;
" aux mêmes motifs que ceux énoncés supra ;
" alors que le juge correctionnel ne peut prononcer une peine pour un fait qu'il qualifie délit qu'autant qu'il constate l'existence de toutes les circonstances exigées par la loi pour que ce fait soit punissable ; qu'en outre tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que la dénonciation mensongère à l'autorité judiciaire ou administrative des faits constitutifs d'un crime ou d'un délit qui ont exposé les autorités judiciaires à d'inutiles recherches n'est pénalement punissable qu'en l'état d'une plainte mensongère ; qu'en l'espèce les juges du fond se sont bornés à retenir le caractère quasiment identique des circonstances dans lesquelles les vols subis par M. X... avaient été commis, puis la similitude des objets de ces vols, enfin le défaut de justification des factures d'achats des objets dérobés ; qu'ils n'ont cependant pas constaté le caractère mensonger des plaintes pour vol déposées par M. X... ; qu'en l'absence de telles constatations se rapportant à l'un des éléments constitutifs de l'infraction poursuivie et sanctionnée pénalement, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision " ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du code civi l, 2, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. X... à payer à la société MMA assurances, partie civile, la somme de 9 156, 90 euros ;
" aux motifs propres que la juridiction du premier degré avait fait une exacte appréciation du préjudice résultant directement pourla société MMA assurances, des agissements délictueux du prévenu ;
" et aux motifs adoptés qu'au vu des éléments du dossier, il convenait d'accorder neuf mille cent cinquante-six euros et quatre-vingt dix centimes (9 156, 10) en réparation du préjudice matériel ;
" alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; qu'en l'espèce la cour d'appel n'a caractérisé le préjudice de la société MMA assurances ni dans son existence ni dans son étendue ; qu'elle n'a donc pas justifié son arrêt " ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du code civil, 2, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. X... à payer à la société Sogessur, partie civile, la somme de 500 euros ;
" aux motifs qu'il y avait lieu de n'allouer à cette partie civile que la seule somme de 500 euros au titre du vol du 23 juin 2010 ;
" alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; qu'en l'espèce la cour d'appel n'a caractérisé le préjudice de la société Sogessur ni dans son existence ni dans son étendue ; qu'elle n'a donc pas justifié son arrêt " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit des parties civiles, des indemnités propres à réparer les préjudices en découlant ;
D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix septembre deux mille quatorze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;