LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique : Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X...qui, assisté de M. Y..., avocat, avait exercé une action prud'homale afin de recouvrer un solde de primes d'intéressement et d'indemnité compensatrice de congés payés, a, après que l'affaire eut été radiée pour défaut de diligences du demandeur, puis réinscrite au rôle, sur les conclusions de M. Y..., avant de donner lieu à un jugement constatant la péremption de l'instance, recherché la responsabilité professionnelle de l'avocat, pour manquement à son obligation de diligence, réclamant une indemnité égale au montant des sommes dont il avait poursuivi le paiement contre son employeur ; que le tribunal, après avoir estimé les chances de succès de cette action à un certain pourcentage, a condamné M. Y... à indemniser son client, dans cette limite, de la chance perdue de percevoir les sommes qu'il entendait obtenir de son ancien employeur ; Attendu que, pour infirmer ce jugement, l'arrêt retient non seulement qu'une partie du chiffre d'affaires revendiqué par M. X...avait été, sous son contrôle, répartie au profit des commerciaux du service, et que sur la période de cinq années précédant l'introduction de l'instance prud'homale qui seule pouvait ouvrir droit à rémunération en application de l'article L. 3245-1 du code du travail, le seuil contractuel de déclenchement des primes d'intéressement n'avait été atteint qu'à quatre reprises, mais encore qu'il n'en résulte aucun préjudice indemnisable dès lors que M. X..., lui-même redevable d'une importante créance de dommages-intérêts envers son employeur, se serait vu légitimement opposer une compensation absorbant intégralement cette créance de rappel de commissions et indemnités de congés payés pour la période non prescrite ; Qu'en statuant ainsi, en considération des modalités de paiement d'une créance dont ils constataient l'existence, circonstance étrangère aux chances raisonnables de succès de l'action en recouvrement dont l'avocat a privé son client en laissant périmer l'instance, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ; Condamne M. Y... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. Y... et le condamne à payer à M. X...la somme de 2 500 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour M. X.... Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR écarté l'action en responsabilité que M. X...avait formée contre son ancien avocat, M. Y... ; AUX MOTIFS QUE ce manquement engage la responsabilité de Me Y... dans le cadre du mandat d'assistance confié par M. X...; que, pour obtenir réparation d'un préjudice, M. X...doit établir qu'il subit une perte de chance réelle et sérieuse de gagner son procès, non équivalente à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée ; que M. X..., qui avait démissionné de son emploi le 30 octobre 2000, a intenté une action devant le conseil de prud'hommes le 17 mars 2005 ; qu'il demandait paiement de commissions à hauteur de 45 800 euros calculées sur la base du taux de 10 % du chiffre d'affaires réalisés par son service sécurité de 1998 à 2000 figurant dans le grand livre de son employeur, la société STA, outre l'indemnité compensatrice de congés payés sur ces commissions à hauteur de 3. 813 ¿ soit un total de 49. 613 ¿ ; que la société STA avait fait état devant le conseil de prud'hommes d'un chiffres d'affaires des ventes pour le secteur sécurité dirigé par M. X...de 435. 518, 89 ¿, ce qui est conforme à l'évaluation revendiquée par M. X...; que, sur la totalité de ce chiffre d'affaires, les pièces produites par l'intimé, qui sont les pièces fondant les conclusions de la société STA, montraient qu'une partie du chiffre d'affaires chiffré à 295. 716, 50 ¿ était réparti au profit des commerciaux du service ainsi qu'en faisait foi les bulletins de salaire versés au débat ; que M. X..., qui validait les sommes versées aux commerciaux de son équipe en qualité de chef de service, n'apporte aucune explication convaincante sur ce point ; que, surtout, son action en paiement de commissions et indemnité compensatrice de congés payés est soumise au délai de prescription de cinq ans de l'article L. 3245-1 du Code du travail ; que la saisine du conseil de prud'hommes est intervenue le 17 mars 2005 produisant son effet interruptif à compter de la réception de la lettre recommandée de convocation de l'employeur soit en l'espèce le 18 mars 2005 ; qu'il en résulte que toutes les réclamations antérieures au 18 décembre 1999 pour tenir compte du paiement à terme échu des commissions sont prescrites avec effet libératoire extinctif pour l'employeur de M. X...; que seule la période du 18 décembre 1999 au 30 octobre 2000 pouvait ouvrir droit à rémunération ; qu'il ressort des pièces produites que les conditions du contrat du travail prévoyant le déclenchement du droit à commission, à savoir un montant de chiffre d'affaires supérieur à 50. 000 francs mensuels, n'ont été atteintes qu'à quatre reprises pendant la période concernée ; que M. X..., qui avait été condamné par le Tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand le 24 janvier 2005 à payer à son ancien employeur, la société STA, la somme de 22. 085, 99 ¿ de dommages et intérêts et n'avait réglé qu'une somme de 2. 009, 54 ¿, pouvait donc légitimement se voir opposer par son employeur la compensation absorbant intégralement sa créance de rappel de commissions et indemnité compensatrice de congés payés pour la période non prescrite ; qu'en conséquence, M. X...ne justifie pas d'un préjudice indemnisable au titre de la perte de chance et doit être débouté de sa demande contre Me Y... ; ALORS QUE la perte de chance consécutive à la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable constitue un préjudice indemnisable ; qu'en retenant, pour décider que M. X...n'avait subi aucun préjudice en raison de la faute de son avocat, qu'il n'aurait pas pu recevoir de paiement du rappel de commissions et des indemnités compensatrice de congés payés auxquels il aurait pu prétendre pour la période non prescrite s'il avait été correctement défendu dès lors que cette créance aurait été éteinte par compensation avec les dommages et intérêts alloués à son employeur, en exécution d'un jugement du Tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand du 24 janvier 2005, quand M. X...a subi un préjudice par la faute de son avocat du seul fait qu'il a été privé des commissions et des indemnités compensatrices de congés payés, quand bien même cette créance aurait été payée par compensation avec une créance dont son employeur était titulaire à son égard, la cour d'appel a déduit un motif inopérant ; qu'ainsi, elle a violé l'article 1147 du Code civil.