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10/07/2014 | FRANCE | N°13-19563

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 10 juillet 2014, 13-19563


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la Caisse autonome de retraite des chirurgiens-dentistes et sages-femmes du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;

Sur le troisième moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 622-24 du code de commerce, L. 642-2 et D. 642-1 du code de la sécurité sociale ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par jugement du 21 mai 2010, le tribunal de grande instance de Grenoble a ouvert une procédure de

redressement judiciaire à l'égard de M. X..., chirurgien-dentiste, et a désigné M. Y....

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la Caisse autonome de retraite des chirurgiens-dentistes et sages-femmes du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;

Sur le troisième moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 622-24 du code de commerce, L. 642-2 et D. 642-1 du code de la sécurité sociale ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par jugement du 21 mai 2010, le tribunal de grande instance de Grenoble a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de M. X..., chirurgien-dentiste, et a désigné M. Y... en qualité de mandataire judiciaire ; que la créance privilégiée déclarée par la Caisse autonome de retraite des chirurgiens-dentistes et des sages-femmes a fait l'objet d'une contestation ;

Attendu que pour n'admettre que partiellement cette créance, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que la déclaration de la créance résultant des cotisations dues au titre de l'année 2010 est sans objet, ladite créance, qui a fait l'objet d'une contrainte du 15 septembre 2010 notifiée par lettre recommandée dont l'avis de réception a été signé le 28 octobre 2010, étant postérieure à l'ouverture de la procédure collective ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les cotisations réclamées pour l'année 2010 étaient exigibles le 1er janvier 2010, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et de M. Y..., ès qualités, et les condamne à payer à la Caisse autonome de retraite des chirurgiens-dentistes et sages-femmes la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour la Caisse autonome de retraite des chirurgiens-dentistes et sages-femmes

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a rejeté les créances, comme non admises, correspondant aux cotisations couvrant la période de 1982 à 1996 ;

AUX MOTIFS PROPRES QU' « en application des dispositions des articles L244-2, L244-3 et L244-11 du Code de sécurité sociale, l'action en recouvrement des cotisations et majorations de retard se prescrit par cinq ans à compter du délai d'un mois fixé par la mise en demeure et qui ne peut concerner que des cotisations exigibles dans les trois ans qui précèdent son envoi ; qu'en l'espèce, pour les cotisations - de l'année 1982, il est justifié d'une mise en demeure en date du 10 avril 1986 ; - de l'année 1984, il est justifié d'une mise en demeure en date du 10 avril 1986 » ; - de l'année 1986, il est justifié d'une mise en demeure en date du 20 novembre 1986 ; - de l'année 1987, il est justifié d'une mise en demeure en date du 13 novembre 1987 ; - de l'année 1988, il est justifié d'une mise en demeure en date du 14 novembre 1988 ; de l'année 1989, il est justifié d'une mise en demeure en date du 8 novembre 1989 ; - de l'année 1996, il est justifié d'une mise en demeure en date du 21 novembre 1996 ; que de la déclaration de créance de la CARCDSF à la procédure collective de Monsieur Michel X... soit en date du 30 juillet 2010, le délai de 5 ans susvisé ayant commencé à courir à l'expiration du délai d'un mois à compter de chacune des mises en demeure en cause était expiré et à défaut d'acte interruption dans le délai ; que l'action en recouvrement des cotisations pour chacune des années susvisées était prescrite lors de l'introduction de la présente procédure à la date de la déclaration de la caisse le 30 juillet 2010 ; que l'ordonnance déclarant prescrite l'action en recouvrement correspondant à chacune de ces années sera confirmée » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU' « il ressort de la décision du conseil constitutionnel du 11 février 2011 que les membres des professions libérales placés en redressement ou en liquidation judiciaire doivent bénéficier de la remise automatique des majorations de retard et des frais de procédure applicable en vertu de l'article L.243-5 du Code de la sécurité sociale ; que par conséquent, seul le principal de la créance déclarée par la caisse sera examiné, les majorations et frais de procédure ne sont pas retenus au titre de la créance ; qu'en deuxième lieu, en France, l'affiliation des chirurgiens-dentistes à une caisse de retraite est obligatoire ; la caisse se prévaut à bon droit des dispositions de l'article R.643-1 du Code de la sécurité sociale et il a déjà été jugé par la Cour de justice des communautés européennes à plusieurs reprises que le droit communautaire ne porte pas atteinte à la compétence des états membres pour aménager leur régime de sécurité sociale ; que par ailleurs, il a également été jugé par la Cour de justice que la gestion d'un régime de sécurité sociale de base reposant sur un mécanisme de solidarité ne constituait pas une activité économique soumise aux dispositions des directives relatives au jeu de la concurrence ; que par conséquent, les dispositions de droit interne que conteste dans leur principe M. X... lui sont applicables ; que sur le détail de la créance, une contrainte exécutoire à la valeur d'un jugement ; que la prescription applicable est celle des décisions de justice ; que si le montant réclamé devait être contesté en fonction des revenus de l'assujetti, cette contestation devait intervenir par voie d'opposition à contrainte et ce dans les délais mentionnés dans les actes de significations ; que de façon synthétique, la créance de la CARCDSF se décompose comme suit :

Exercice Montant retenu en ¿

Titre

observation

1979 71,49

Contrainte du 19 juin 1984 - (prescription quinquennale de la créance non intervenue) signifiée le 29 août 1984 à domicile

Prescription trentenaire du titre exécutoire non intervenu

1980 1981

266,79

286,65 Contrainte du 15 octobre 1981 signifiée à domicile le 2 février 1984

Titre exécutoire définitif non prescrit

1982

0 Pas de titre exécutoire mais mise en demeure remontant à 1986

prescription

1983

1449,02 Contrainte du 19 juin 1984 signifiée à domicile le 29 août 1984

Titre exécutoire définitif non prescrit

1984

0 Pas de titre exécutoire

1985

1503,54 Contrainte du 3 mars 1986 signifiée à personne le 26 mai 1986

prescription

1986

0 Mise en demeure du 21 novembre 1986

prescription

1987

0 Mise en demeure du 6 novembre 1987

prescription

1988

0 Mise en demeure du 16 novembre 1988

prescription

1989

0 Mise en demeure du 19 novembre 1989

prescription

1990

0 Jugement du Tribunal de police de Paris du 27 mai 1991 qualifié de contradictoire à signifier

Jugement non avenu car non signifié

prescription

1991 1992

1994

3582,70 4776,23

4027,27

Contrainte du 2 octobre 1996 Signifiée à domicile le 11 décembre 1996

Titre exécutoire définitif non prescrit

1993

6108,24 Contrainte du 12 juillet 1995 signifiée à personne le 24 août 1995

Idem

1995

6226,93 Contrainte du 19 juin 1996 signifiée à personne le 21 août 1996

Idem

1996

0 Ni mise en demeure, ni titre

Créance prescrite

1997

2372,27 Contrainte du 20 septembre 2001

Idem

1998

4963,15 Contrainte du 6 octobre 2011

Idem

1999

6430,04 Contrainte du 22 février 2000 signifiée en mairie le 16 mai 2000

Idem

2000

6785,18 Contrainte du 30 janvier 2011 signifiée en mairie le 13 mars 2001

Idem

2001

5249 Contrainte du 7 mars 2002 signifiée en mairie le 15 mai 2002

Idem

2002

6578 Contrainte du 24 octobre 2002 signifiée en mairie le 6 décembre 2002

Idem

2003

4846 Contrainte du 13 octobre 2003 signifiée en mairie le 3 novembre 2003

Idem

2004

2896 Contrainte du 19 octobre 2004 signifiée à personne le 24 octobre 2004

Recours rejeté

2005

5051 Contrainte du 9 novembre 2005 signifiée en mairie le 30 novembre 2005

Idem

Recours devant le TASS déclaré irrecevable

2006 2007

6490

5523 Contrainte du 5 février 2008 signifiée en l'étude d'huissier le 22 mai 2008

Titre exécutoire non prescrit

2008

2009 5633

5968

Contrainte du 29 juin 2010 notifié le 2 juillet 2010 Créance antérieure à l'ouverture de la procédure collective

2010

0

Contrainte du 15 septembre notifiée par LRAR signée le 28 octobre 2010 Sans objet : créance postérieure à l'ouverture de la procédure collective

Total admis : 97 083,50 ¿ à titre privilégié » ;

ALORS QUE, PREMIEREMENT, aux termes de l'article L.244-3 du code de la sécurité sociale, la mise en demeure interrompt la prescription de l'action ; qu'en cas d'interruption de la prescription gouvernant l'action et sauf exception, une prescription trentenaire est substituée à la prescription originaire ; qu'en décidant le contraire, pour considérer les cotisations prescrites, les juges du fond ont violé les articles L.244-3 du code de la sécurité sociale ainsi que l'article 2262 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 ;

ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, si aux termes de l'article L.244-11 du code de la sécurité sociale, l'action en recouvrement, concernant les actes d'exécution forcée, se prescrit par cinq ans, cette prescription ne concerne que l'accomplissement des actes d'exécution forcée ; qu'en opposant un délai de cinq ans, qui était inapplicable, les juges du fond ont violé l'article L.244-11 du code de la sécurité sociale, par fausse application et l'article 2262 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008, par refus d'application.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a déclaré non-admise la créance résultant du jugement du tribunal de police de PARIS en date du 27 mai 1991 ;

AUX MOTIFS QUE « par jugement du Tribunal de police en date du 27 mai 1991 contradictoire à signifier, Monsieur Michel X... est condamné à payer la somme principale de 31 035 frs outre majorations de retard et la somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts à la CARCDSF en qualité de partie civile ; qu'il est constant que cette décision n'a pas été signifiée ; que cette absence de signification n'est pas imputable au seul ministère public, la partie civile pouvant y procéder en application des dispositions de l'article 554 du Code de procédure pénale ; que cette décision du Tribunal de police non signifiée dans le délai de prescription de l'action publique applicable est dès lors non exécutable et y compris la condamnation au titre de l'action civile, compte tenu des dispositions de l'article 133-6 du Code pénal, faute de caractère définitif de ce jugement rendant les règles du Code civil en matière de prescription inapplicables» ;

ALORS QUE, PREMIEREMENT, eu égard à la rédaction de l'article 410 du Code de procédure pénale, dans l'état où il se trouvait en 1991, le prévenu régulièrement cité à comparaître et ne fournissant aucune excuse reconnue valable, était jugé contradictoirement ; que le prononcé du jugement faisait courir à lui seul le délai d'appel ; qu'à l'expiration du délai d'appel, le jugement devenait définitif ; qu'en l'espèce, le jugement du 27 mai 1991, dès lors que le prévenu a été cité à personne sans présenter d'excuses, a été rendu contradictoirement conformément à l'article 410 du Code de procédure pénale applicable en l'espèce ; qu'en décidant qu'il s'agissait d'un jugement contradictoire à signifier, quand une telle mention ne résulte en aucune façon de la décision, les juges du fond ont dénaturé le jugement du 27 mai 1991 ;

ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, et en tout cas, faute d'avoir recherché, en se reportant à l'article 410 du Code de procédure pénale, tel qu'il existait à l'époque, si le jugement rendu n'était pas un jugement contradictoire faisant à lui seul courir le délai d'appel et si, faute d'appel dans le délai, le jugement n'était pas définitif permettant la mise en oeuvre de l'article 133-6 du Code pénal rendant applicables à la prescription des condamnations civiles d'une décision pénale les règles du code civil, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 410 du Code de procédure pénale dans sa rédaction existant à l'époque et de l'article 133-6 du Code pénal.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a écarté la déclaré sans objet la déclaration de créance de la CARCDSF portant sur les cotisations dues au titre de l'année 2010 ;

AUX MOTIFS ADOPTES QUE la créance en cause ayant donné lieu à une contrainte du 15 septembre 2010, notifiée le 28 octobre 2010, ne devait pas donner lieu à déclaration de créance, alors que la créance est postérieure à l'ouverture de la procédure collective ;

ALORS QUE, PREMIÈREMENT, les cotisations d'assurance vieillesse dues par les professionnels exerçant à titre libéral sont regardées comme dues dès le premier jour de l'exercice en cause ; qu'en déclarant sans objet la déclaration de créance portant sur les cotisations dues au titre de l'année 2010, les juges du fond ont violé les articles L 622-24 du Code de commerce et L 642-1, L 642-2 et D 642-1 du Code de la sécurité sociale ;

ALORS QUE, DEUXIÈMEMENT, les cotisations d'assurance vieillesse dues par les professionnels exerçant à titre libéral sont regardées comme dues dès le premier jour de l'exercice en cause ; qu'en s'abstenant de s'expliquer si, à raison de cette circonstance, la CARCDSF n'était pas fondée à déclarer les cotisations dues par Monsieur X... au titre de l'exercice 2010, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles L 622-24 du Code de commerce et L 642-1, L 642-2 et D 642-1 du Code de la sécurité sociale ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 13-19563
Date de la décision : 10/07/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 28 mars 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 10 jui. 2014, pourvoi n°13-19563


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Odent et Poulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.19563
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