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09/07/2014 | FRANCE | N°13-19013

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 09 juillet 2014, 13-19013


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 6 mars 2013), que, le 7 juillet 1947, Jean X... a épousé en secondes noces Mathilde Y... sous le régime de la communauté des biens réduite aux acquêts ; que, le 6 décembre 1999, les époux ont adopté le régime de la communauté universelle avec clause d'attribution intégrale des biens communs au conjoint survivant ; que, le 22 mai 2000, Mathilde Y... a adopté M. Jean-Claude X..., né du premier mariage de son m

ari ; que Jean X... est décédé le 4 février 2006 ; que la révocation de...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 6 mars 2013), que, le 7 juillet 1947, Jean X... a épousé en secondes noces Mathilde Y... sous le régime de la communauté des biens réduite aux acquêts ; que, le 6 décembre 1999, les époux ont adopté le régime de la communauté universelle avec clause d'attribution intégrale des biens communs au conjoint survivant ; que, le 22 mai 2000, Mathilde Y... a adopté M. Jean-Claude X..., né du premier mariage de son mari ; que Jean X... est décédé le 4 février 2006 ; que la révocation de l'adoption a été prononcée le 25 mars 2009 à la demande de Mathilde Y... ; que celle-ci étant décédée le 19 mars 2010, M. Jean-Claude X... a assigné Mme Mireille X..., épouse Z..., née de l'union des époux X...- Y..., en liquidation de la succession de leur père et en retranchement des avantages matrimoniaux excédant la quotité disponible ;
Attendu que M. Jean-Claude X... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable cette dernière demande, alors, selon le moyen :
1°/ que l'enfant dont l'adoption simple par le conjoint survivant a été révoquée postérieurement au décès de son parent biologique est privé de toute vocation successorale dans la succession du conjoint survivant ; qu'en conséquence, cet enfant est recevable à se prévaloir de la protection spécifique de l'action en retranchement ouverte au bénéfice des enfants qui ne sont pas issus des deux époux ; qu'en l'espèce, l'adoption simple de M. Jean-Claude X... par Mathilde Y..., seconde épouse de son père, Jean X..., a été révoquée postérieurement au décès de ce dernier ; que M. Jean-Claude X... qui s'est alors trouvé privé de toute vocation successorale dans la succession de Mathilde Y... était recevable à exercer l'action en retranchement des avantages matrimoniaux consentis par Jean X... à Mathilde Y... ; qu'en décidant l'inverse, au prétexte qu'au jour du décès de son père M. Jean-Claude X... qui était encore adopté simple de Mathilde Y..., ne pouvait exercer l'action en retranchement, et que ses droits successoraux seraient figés au jour de l'ouverture de la succession et ce « quels que fussent les événements survenus postérieurement, comme la révocation par Mathilde Y... de l'adoption de son beau-fils », la cour d'appel a violé l'article 1527 du code civil, ensemble l'article 364 du même code ;
2°/ que l'enfant adopté simple du conjoint survivant dont l'adoption simple a été révoquée postérieurement au décès de son parent biologique se trouve dans une situation identique à celle de tout enfant non commun du couple quant à l'atteinte susceptible d'être portée à ses droits successoraux en cas de remariage de son auteur sous le régime de la communauté universelle ; que la finalité de la protection accordée aux seconds commande qu'elle soit accordée au premier au regard du principe de non-discrimination édicté par la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en déclarant M. Jean-Claude X... irrecevable à agir en retranchement des avantages matrimoniaux consentis par son père à sa seconde épouse, cependant que ces avantages matrimoniaux portaient à ses droits successoraux une atteinte exactement identique à celle qu'aurait subie, dans la même situation, tout enfant non commun du couple, la cour d'appel a consacré une discrimination à l'encontre de l'adopté simple dont l'adoption est révoquée, en violation de l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 14 de cette Convention, ensemble l'article 1527 du code civil ; Mais attendu qu'ayant relevé que M. Jean-Claude X... avait été l'objet, avant le décès de son père, d'une adoption simple de la part de Mathilde Y..., laquelle n'avait été révoquée que postérieurement à l'ouverture de la succession, et retenu, à bon droit, que la nature et l'étendue des droits successoraux des héritiers s'apprécient au regard de leur situation à l'ouverture de la succession, de sorte que M. Jean-Claude X... avait, à cette date, les mêmes droits que l'enfant né du mariage des deux époux, c'est par une exacte application des articles 1527, alinéa 2, et 368 du code civil, et sans violer l'article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la situation dénoncée comme discriminatoire étant née du seul fait de la révocation de l'adoption, à la demande de l'adoptante, après le décès du père, que la cour d'appel a décidé que l'action en retranchement ne lui était pas ouverte ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour M. X.... Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevables les demandes de Monsieur Jean-Claude X... à l'encontre de Madame Mireille Z... ; AUX MOTIFS QUE « l'adoption du régime de communauté universelle avec clause d'attribution intégrale au profit du conjoint survivant reporte au décès de celui-ci la liquidation de la succession du prémourant, en revanche la nature et l'étendue des droits successoraux des héritiers s'apprécient au regard de leur propre situation à la date du décès de leur auteur ; Qu'or le 4 février 2006, jour du décès de Jean X..., son fils Jean-Claude X..., enfant adoptif de Mathilde Y..., avait les mêmes droits qu'un enfant légitime des deux conjoints et ne bénéficiait donc pas de la protection spécifique de l'action prévue par l'article 1527, alinéa 2 du Code civil puisque, dans le cas d'enfants légalement issus d'un couple marié, l'avantage matrimonial consenti entre les époux n'est pas regardé comme une libéralité qui serait susceptible d'excéder, aux dépens des héritiers réservataires, la quotité disponible entre époux ; Qu'ainsi, les droits de Jean-Claude X... dans la succession de son père, définitivement figés à la date du décès de ce dernier, ne lui permettent pas d'exercer l'action en retranchement contre Mireille Z..., héritière de Mathilde Y..., et ce quels que fussent les événements survenus postérieurement, comme la révocation par Mathilde Y... de l'adoption de son beau-fils ; Qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et de déclarer irrecevables les demandes de Jean-Claude X... » ; 1/ ALORS QUE l'enfant dont l'adoption simple par le conjoint survivant a été révoquée postérieurement au décès de son parent biologique est privé de toute vocation successorale dans la succession du conjoint survivant ; qu'en conséquence, cet enfant est recevable à se prévaloir de la protection spécifique de l'action en retranchement ouverte au bénéfice des enfants qui ne sont pas issus des deux époux ; qu'en l'espèce, l'adoption simple de Monsieur Jean-Claude X... par Mathilde Y..., seconde épouse de son père, Jean X..., a été révoquée postérieurement au décès de ce dernier ; que Monsieur Jean-Claude X..., qui s'est alors trouvé privé de toute vocation successorale dans la succession de Mathilde Y..., était recevable à exercer l'action en retranchement des avantages matrimoniaux consentis par Jean X... à Mathilde Y... ; qu'en décidant l'inverse, au prétexte qu'au jour du décès de son père Monsieur Jean-Claude X..., qui était encore adopté simple de Mathilde Y..., ne pouvait exercer l'action en retranchement, et que ses droits successoraux seraient figés au jour de l'ouverture de la succession et ce « quels que fussent les événements survenus postérieurement, comme la révocation par Mathilde Y... de l'adoption de son beau-fils » (arrêt, p. 3, alinéa 6, in fine), la Cour d'appel a violé l'article 1527 du Code civil, ensemble l'article 364 du même Code ; 2/ ALORS QUE l'enfant adopté simple du conjoint survivant dont l'adoption simple a été révoquée postérieurement au décès de son parent biologique se trouve dans une situation identique à celle de tout enfant non commun du couple quant à l'atteinte susceptible d'être portée à ses droits successoraux en cas de remariage de son auteur sous le régime de la communauté universelle ; que la finalité de la protection accordée aux seconds commande qu'elle soit accordée au premier au regard du principe de non-discrimination édicté par la Convention Européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales ; qu'en déclarant Monsieur Jean-Claude X... irrecevable à agir en retranchement des avantages matrimoniaux consentis par son père à sa seconde épouse, cependant que ces avantages matrimoniaux portaient à ses droits successoraux une atteinte exactement identique à celle qu'aurait subie, dans la même situation, tout enfant non commun du couple, la Cour d'appel a consacré une discrimination à l'encontre de l'adopté simple dont l'adoption est révoquée, en violation de l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention Européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales et de l'article 14 de cette Convention, ensemble l'article 1527 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 13-19013
Date de la décision : 09/07/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

FILIATION - Filiation adoptive - Adoption simple - Effets - Droits successoraux de l'adopté dans la famille de l'adoptant - Etendue - Défaut d'ouverture de l'action en retranchement d'un avantage matrimonial - Révocation de l'adoption - Absence d'influence

FILIATION - Filiation adoptive - Adoption simple - Effets - Droits successoraux de l'adopté dans la famille de l'adoptant - Etendue - Portée CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 14 - Interdiction de discrimination - Violation - Défaut - Cas - Défaut d'ouverture de l'action en retranchement d'un avantage matrimonial à l'enfant d'un époux prédécédé, adopté par le conjoint survivant RESERVE - Quotité disponible - Quotité spéciale entre époux - Présence d'enfants d'un premier lit - Action en retranchement - Exclusion - Cas

La nature et l'étendue des droits successoraux des héritiers s'apprécient au regard de leur situation à l'ouverture de la succession. Ne viole pas l'article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales la cour d'appel qui juge que l'enfant d'un époux prédécédé, qui avait été adopté par le conjoint survivant, n'est pas fondé à se prévaloir de l'action en retranchement prévue à l'article 1527, alinéa 2, du code civil, en dépit de la révocation de cette adoption simple, à la demande de l'adoptante, après l'ouverture de la succession


Références :

article 1527, alinéa 2, du code civil

article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 06 mars 2013

Sur le défaut d'ouverture de l'action en retranchement d'un avantage matrimonial à l'enfant d'un époux prédécédé, adopté par le conjoint survivant, à rapprocher :1re Civ., 11 février 2009, pourvoi n° 07-21421, Bull. 2009, I, n° 30 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 09 jui. 2014, pourvoi n°13-19013, Bull. civ. 2014, I, n° 130
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, I, n° 130

Composition du Tribunal
Président : Mme Bignon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Sarcelet
Rapporteur ?: M. Savatier
Avocat(s) : SCP Bénabent et Jéhannin, SCP Tiffreau, Marlange et de La Burgade

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.19013
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