LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche : Vu l'article 1135 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Risc Group (la société Risc), actuellement en liquidation judiciaire aux droits de laquelle vient M. X... en qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire, a consenti à l'association CRESS et à la société civile professionnelle Cubic (la SCP Cubic) des contrats d'abonnement et de prestations incluant la fourniture d'un matériel informatique et l'accès à un service collaboratif et de sécurité informatique, ainsi que la location du matériel ainsi fourni, qui a été cédé par la société Risc à la société Parfip France ; qu'après livraison et installation conforme, l'association CRESS et la SCP Cubic, se plaignant de dysfonctionnements persistants du processus de sauvegarde des données, ont fait assigner la société Risc et la société Parfip afin d'obtenir la résolution des contrats et le paiement de diverses sommes ; Attendu que, pour écarter la responsabilité alléguée de la société Risc pour n'avoir pas vérifié si le système de sécurité informatique qu'elle mettait en oeuvre était compatible avec la connexion internet dont disposaient ses clientes, l'arrêt relève que, répondant aux doléances de celles-ci, la société Risc leur a conseillé de modifier leur connexion et qu'il n'y a pas lieu de pallier la carence de l'association CRESS et de la SCP Cubic dans l'administration de la preuve ; Qu'en se déterminant ainsi, alors, d'une part, que la société Risc, prestataire de service professionnel, était tenue envers ses clients profanes d'un devoir d'information et de conseil qui l'obligeait à se renseigner préalablement sur leurs besoins et à les informer des contraintes techniques de l'installation téléphonique proposée et, d'autre part, que s'il incombait en vertu du contrat à l'association CRESS et à la SCP Cubic de déterminer la configuration de l'installation et de se doter des équipements nécessaires, notamment un accès adéquat au réseau de télécommunication, elles devaient recevoir à cet effet une information circonstanciée et personnalisée de la société Risc dont il appartenait à celle-ci de justifier, la cour d'appel, qui n'a pas constaté qu'une telle preuve avait été apportée, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deux autres branches du moyen : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 octobre 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ; Condamne M. X..., ès qualités, aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux juillet deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour l'association Centre de ressources de l'économie sociale et solidaire et la société Cubic Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté l'association CRESS et la SCP CUBIC de leurs demandes de résolution des contrats d'abonnement de prestations incluant la fourniture d'un matériel informatique les liant à la SA RISC GROUP et d'avoir condamné l'association CRESS à payer :- à la SA RISC GROUP la somme de 1. 121, 82 ¿ majorés des intérêts au taux contractuel,- à la SAS PARFIP France la somme en principal de 4. 368, 56 ¿ au titre des loyers outre la somme de 436, 85 ¿ au titre de la clause pénale, avec les intérêts au taux légal à compter du 31 mai 2010 et d'avoir condamné la SCP CUBIC à payer :- à la SA RISC GROUP la somme de 3. 901, 38 ¿ outre les intérêts au taux contractuel-à la SAS PARFIP France la somme en principal de 14. 931, 15 ¿ au titre des loyers outre la somme de 1. 493, 11 ¿ au titre de la clause pénale avec intérêts au taux légal à compter du 10 août 2010 ;AUX MOTIFS PROPRES QUE « suivant acte des 21 et 23 juillet 2009, l'association CRESS et la SCP CUBIC ont conclu avec la SA RISC GROUP, d'une part, des condamnations d'abonnement de prestations incluant la fourniture d'un matériel informatique et l'accès au service collaboratif et de sécurité informatique et d'autre part, des contrats de location de matériel, l'association CRESS ayant opté pour un matériel « BACKUP » avec 60 loyers mensuels de 80, 13 euros et la SCP CUBIC pour une matériel « RISC BOX » avec 60 loyers de 278, 67 euros ; que le 29 juillet 2009, l'association CRESS et la SCP CUBIC ont signé chacune un procès-verbal d'installation et de livraison attestant de l'installation et de la conformité des matériels commandés ; que conformément aux termes de l'article 14 des conditions de location, selon lequel « le locataire reconnait au loueur le droit de transférer la propriété de la solution objet des présentes et de céder les droits résultant des présentes », la société RISC GROUP a cédé l'équipement loué à la société PARFIP France spécialisée dans la location longue durée de biens mobiliers aux professionnels ; que l'association CRESS et la SCP CUBIC sollicitent la résolution des contrats des 21 et 28 juillet 2009 et la condamnation de la société RISC GROUP à rembourser 766, 26 euros à l'association CRESS, ainsi que 1781, 19 euros à la SCP CUBIC et à payer 5. 000 euros à l'association CRESS et 8. 000 euros à la SCP CUBIC à titre de dommages et intérêts, faisant valoir que ce n'est que le 26 août 2009 que trois postes d'ordinateur seulement sur 21 ont été configurés et que par la suite, elles ont eu à déplorer de nombreux dysfonctionnements et manquements graves dans le fonctionnement du serveur mis en place ; que la charge de la preuve incombe aux appelants qui avaient signé le 29 juillet 2009 le bon de livraison et d'installation par lequel elles reconnaissaient que « l'installation est terminée et que le matériel fonctionne » ; qu'ainsi que l'a relevé le tribunal, la SA RISC GROUP a bien fourni les matériels prévus aux contrats ainsi que cela ressort des mails échangés par les parties et si la mise en fonctionnement des systèmes informatiques a été retardée et n'a eu lieu qu'après le 29 juillet 2009, parfois d'ailleurs en raison de l'impossibilité de joindre le titulaire d'un poste, la SA RISC GROUP a répondu aux demandes d'intervention de l'association CRESS ou de la SCP CUBIC ; que les appelantes produisent devant la Cour un rapport d'audit établi le 12 janvier 2012 par un technicien d'ASCII INFORMATIQUE qui, bien qu'il ait indiqué que le système de sauvegarde avait été mis hors service, a pu néanmoins conclure, au vu des documents remis par les appelantes, que « le volume de sauvegarde journalier de celles-ci ne semblait pas avoir été bien appréhendé par la société RISC GROUP, ainsi que l'impact négatif que cette sauvegarde pouvait avoir sur la qualité de leur réseau au vu de la qualité de leur connexion internet » ; que cependant, le 9 juin 2010, la société RISC GROUP avait écrit à la SCP CUBIC « après vérification auprès de notre service technique, celui-ci nous précise qu'il vous a averti par emails d'alerte de non-connexion de votre sauvegarde ; il nous précise qu'il vous appartient de connecter vos postes à internet lors de la planification horaire prévue pour la sauvegarde, notre technicien nous indique également un problème de bande passante et vous recommande une connexion SDSL. Nous vous rappelons à ce titre qu'il vous appartient de respecter certains pré-requis techniques, conformément à nos dispositions contractuelles (articles 2-2 et 5-2 de nos Conditions Générales). Il nous informe enfin que votre capacité maximale de sauvegarde est sur le point d'être atteinte et que vous avez été avertis par email d'alerte (¿). Votre capacité de sauvegarde étant insuffisante, et bien que cela relevait de vos obligations contractuelles, nous avons prévenu notre service technique. Un technicien prendra donc contact prochainement avec vous » ; que dans ces conditions, il n'apparait pas que les pièces versées aux débats suffisent à démontrer l'existence de manquements de la société RISC GROUP assez graves pour pouvoir justifier la résolution des contrats litigieux, étant observé qu'il n'appartient pas à la Cour, à ce stade de la procédure, d'organiser une mesure d'expertise pour palier la carence des appelantes dans l'administration de la preuve ; que c'est en conséquence à bon droit que le tribunal, pour des motifs pertinents que la Cour adopte, a débouté l'association CRESS et la SCP CUBIC de leurs demandes tout en faisant droit aux demandes reconventionnelles des intimées en paiement de loyer et pénalités contractuelles, avec intérêts au taux légal » ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « (¿) selon l'article 1184 du Code civil « la condition résolutoire est toujours entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des parties ne satisferait pas à son engagement » ; qu'en l'espèce, la SCP CUBIC et l'association CRESS ont signé le 29 juillet 2009 un bon de livraison et d'installation par lequel elle ont attesté que « l'installation est terminée et que le matériel fonctionne » ; qu'en outre, il ressort des mails échangés entre les parties que la SA RISC GROUP a bien fourni les matériels prévus au contrat ; que par ailleurs si la mise en fonctionnement des systèmes informatiques a été retardées et n'a eu lieu qu'après le 29 juillet 2009, parfois d'ailleurs en raison de l'impossibilité de joindre le titulaire d'un poste (cas de Monsieur Y...), la SA RISC GROUP a répondu aux demandes d'intervention de l'association Centre de Ressources de l'Economie Sociale et Solidaire ou de la SCP CUBIC et a ainsi satisfait aux prestations d'assistance téléphonique et de maintenance ; que le CRESS et la SCP CUBIC ne rapportent pas la preuve qui leur incombe d'une défaillance des systèmes mis en place dont le choix leur est imputable et pour lequel la SA RISC GROUP s'est dégagée contractuellement de toute responsabilité ; qu'il s'avère ainsi que le CRESS et la SCP CUBIC ne justifient pas d'une faute suffisamment grave de la SA RISC GROUP dans l'exécution de ses obligations contractuelles pour justifier la résiliation du contrat, tel n'étant pas le cas du retard mis à l'installation des systèmes informatiques ; que par les contrats les liant à la SA RISC GROUP, le CRESS et la SCP CUBIC ont reconnu à la SA RISC GROUP le droit de transférer la propriété de la « solution » et de céder les droits en résultant ; que la SAS PARFIP France a versé aux débats les factures d'achat des matériels loués au CRESS et à la SCP CUBIC en date du 31 juillet 2009 et les mises en demeure de régler les loyers échus et impayés sous peine de résiliation du contrat de location, qu'elle leur a envoyées par lettres recommandées avec avis de réception en date du 31 mai 2010 et du 10 août 2010 ; qu'il y a lieu en conséquence de débouter le CRESS et la SCP CUBIC de leurs demandes de constater la résiliations des contrats de location de matériels (¿) » ; 1°/ ALORS QUE le vendeur d'un produit complexe est tenu d'une obligation de délivrance, laquelle n'est pleinement exécutée qu'une fois réalisée la mise au point effective de la chose vendue ; qu'en l'espèce, l'association CRESS et la SCP CUBIC ne contestaient pas que le matériel ait été livré et installé mais soutenaient que la « solution » informatique objet du contrat ¿ à savoir la sauvegarde et la sécurisation de leurs données informatiques ¿ n'avait jamais été opérationnelle ; qu'elles en déduisaient que la société RISC GROUP avait ainsi manqué à son obligation de délivrance ; qu'en se bornant néanmoins, pour débouter l'association CRESS et la SCP CUBIC de leur demande de résolution contractuelle, à relever que les exposantes avaient signé un bon de livraison et d'installation attestant du fonctionnement du « matériel » sans rechercher si la « solution » informatique objet du contrat avait fait l'objet d'une mise au point effective et était bien opérationnelle, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1184 et 1604 du code civil ; 2°/ ALORS QUE l'obligation de délivrance pesant sur le vendeur n'est pleinement exécutée qu'une fois réalisée la mise au point effective de la chose vendue ; que c'est au vendeur qui se prétend libéré de cette obligation de délivrance qu'incombe la charge d'établir qu'il a rempli celle-ci et qu'il a donc satisfait à son obligation de mise au point ; qu'il appartenait dès lors à la société RISC GROUP, vendeur de matériel complexe, d'établir qu'elle avait satisfait à son obligation de mise au point de la solution informatique objet du contrat ; qu'à cet égard, les bons de livraison et d'installation signés par l'association CRESS et la SCP CUBIC attestant seulement du bon fonctionnement technique des matériels livrés lors de leur branchement étaient impropres à faire présumer que la « solution » informatique objet du contrat ¿ à savoir la mise en place d'un système permettant la sauvegarde et la sécurisation des données ¿ était opérationnelle ; qu'en faisant néanmoins peser la charge de la preuve des dysfonctionnements du système informatique sur l'association CRESS et la SCP CUBIC cependant qu'il appartenait à la société RISC GROUP d'établir qu'elle avait satisfait à son obligation de délivrance, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
3/ ALORS QUE le vendeur professionnel, traitant avec un profane ou un professionnel d'une autre spécialité, est tenu, spécialement lorsque le contrat porte sur une chose complexe tel un système de sauvegarde informatique, d'une obligation de conseil à l'égard de l'acheteur ; qu'en l'espèce, pour écarter tout manquement de la société RISC GROUP, la Cour d'appel s'est bornée à constater que cette dernière avait averti ses cocontractantes, par un courrier du 9 juin 2010, que les dysfonctionnements rencontrés « résultaient d'un problème de bande passante et de connexion internet insuffisante » ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société RISC GROUP avait prescrit à ses cocontractantes une solution adaptée à leurs besoins en s'assurant de la compatibilité de leur plate-forme aux outils informatiques fournis et ne s'était pas montrée négligente dans la recherche de solutions aux problèmes rencontrés par les acquéreurs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1604 et 1135 du code civil.