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19/06/2014 | FRANCE | N°13-17130

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 19 juin 2014, 13-17130


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 6 mars 2013), que M. X..., salarié de la société Peugeot Citroën automobiles (l'employeur), affecté à la Fonderie de Charleville-Mézières de 1985 à juin 2008, en qualité d'électricien, d'électromécanicien, puis de technicien de maintenance, a déclaré le 24 janvier 2006 un carcinome broncho-pulmonaire pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes (la caisse) ; que M. X... a saisi une juridi

ction de sécurité sociale d'une action en reconnaissance de la faute inex...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 6 mars 2013), que M. X..., salarié de la société Peugeot Citroën automobiles (l'employeur), affecté à la Fonderie de Charleville-Mézières de 1985 à juin 2008, en qualité d'électricien, d'électromécanicien, puis de technicien de maintenance, a déclaré le 24 janvier 2006 un carcinome broncho-pulmonaire pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes (la caisse) ; que M. X... a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ; Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de lui déclarer opposables les conséquences financières de la reconnaissance de sa faute inexcusable, alors, selon le moyen :
1°/ qu'un délai de cinq jours utiles ne peut être retenu comme un délai suffisant pour permettre à l'employeur de consulter les pièces du dossier de l'instruction et assurer le caractère contradictoire de la procédure ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale ; 2°/ que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que pour juger que la société avait disposé de cinq jours utiles, la cour d'appel a retenu qu'elle ne démontrait pas ne pas avoir reçu la lettre du 27 juin 2006 dès le lendemain, soit le 28 juin 2006 ; qu'en statuant ainsi quand l'employeur indiquait n'avoir reçu cette lettre que le 29 juin 2006 et que la caisse n'avait pas contesté ce point, se contentant de conclure à l'irrecevabilité de la demande d'inopposabilité formulée par l'employeur, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de considérer que la date de réception de la lettre de clôture alléguée par l'employeur était constante au seul motif qu'elle n'était pas expressément contestée par la caisse, laquelle soutenait seulement que la demande d'inopposabilité était nouvelle en cause d'appel et donc irrecevable, n'a pas méconnu l'objet du litige ;
Et attendu que l'arrêt retient qu'il ressort des éléments produits que le délai pour consulter le dossier a été notifié à l'employeur par lettre du 27 juin 2006, la caisse indiquant que la décision interviendrait le 6 juillet suivant soit un délai de six jours francs ou de cinq jours utiles ; que l'employeur disposait de personnel pour l'examen du recours, proche du lieu de consultation du dossier, et qu'il n'a, ensuite, émis aucune contestation sur ce délai et son caractère utile ; Qu'en l'état de ces constatations et énonciations relevant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve soumis à son examen, la cour d'appel a pu, abstraction faite du motif surabondant critiqué par le moyen, déduire que l'employeur avait bénéficié d'un délai suffisant pour consulter le dossier de sorte que la caisse avait satisfait à son obligation d'information ;D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux dernières branches : Attendu que l'employeur fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :1°/ que la charge de la preuve que les conditions posées par un tableau de maladie professionnelle sont réunies incombe au salarié ; que pour juger que le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles n'avait pas à être saisi, la cour d'appel a affirmé que l'employeur ne rapportait pas la preuve qu'entre 1992 et 1997, le salarié n'avait pu être exposé au risque ; qu'en statuant ainsi, quand il appartenait au salarié d'apporter la preuve qu'il avait été exposé au risque pendant plus de dix ans, condition posée par le tableau n° 30 bis, et non à l'employeur qu'il n'y avait pas été exposé, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;
2°/ que la simple éventualité d'une durée d'exposition au risque conforme au tableau ne saurait être retenue ; que la cour d'appel a relevé que le médecin de la société avait indiqué « qu'entre 1992 et 1997, le médecin ne peut certifier de façon absolue que le salarié n'a pas été exposé à des travaux avec des risques d'inhalation des fibres d'amiante » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les articles L. 461-1 et L. 461-2 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 455 du code de procédure civile ; Mais attendu que l'arrêt relève qu'au sein de la fonderie créée en 1974 étaient réalisées des pièces brutes en fonte à graphite sphéroïdale et en alliage d'aluminium destinées aux unités d'usinage ou d'assemblage de l'employeur ; qu'il résulte de divers témoignages de salariés que l'amiante était présente sous diverses formes : plaques d'amiante pour isoler les fours, cordelettes et bandelettes d'amiante pour isoler les bobines des fours et destinées à la soudure, travail dans les fours lors des remises en état avec utilisation de disqueuse ou de chalumeau qui faisaient beaucoup de poussières et port de gants en amiante contre la chaleur ; que selon le docteur Y... du service médical de l'employeur, M. X..., pour lequel n'est pas noté de risque d'exposition à l'amiante dans un autre secteur avant son arrivée en 1985 à un poste d'électricien en maintenance aluminium en fusion alu, a été exposé à l'amiante de 1984 à 1992 avec certitude ; que selon l'employeur, ce salarié a toujours été affecté au secteur fonderie alu et ce jusqu'en 2002 ; que l'arrêt retient que l'employeur, qui n'avait pas contesté avoir eu recours à des matériaux composés d'amiante dans un dossier l'opposant à un autre salarié sur le site et produit aux débats, est mal fondé à soutenir que ses ateliers ne contenaient pas d'amiante ; qu'il ne justifie pas la suppression totale de l'amiante de ses ateliers ni en 1992, ni en 1996 ; que l'utilisation de ce matériau a persisté jusqu'en 1996-1997 au sein de l'entreprise ; Que de ces constatations et énonciations relevant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve soumis aux débats, la cour d'appel a pu, sans inverser la charge de la preuve, abstraction faite du motif surabondant critiqué par le moyen, déduire que l'exposition au risque s'est poursuivie une dizaine d'années de sorte que, la condition du tableau étant remplie, le lien de causalité était établi, ce qui excluait la saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ;D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Peugeot Citroën automobiles aux dépens ;Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Peugeot Citroën automobiles et la condamne à payer au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante et à M. X..., chacun, la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf juin deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Peugeot Citroën automobiles.
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré opposables à la société PEUGEOT CITROEN AUTOMOBILES les conséquences financières de la reconnaissance de sa faute inexcusable ; AUX MOTIFS QUE l'article R. 441-11, alinéa 1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction de l'époque, dispose : " Hors les cas de reconnaissance implicite, et en l'absence de réserves de l'employeur, la caisse primaire assure l'information de la victime, de ses ayant droits et de l'employeur, préalablement à sa décision sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de leur faire grief " ; que le texte alors applicable ne définit pas le délai qui doit être laissé par la caisse aux parties précitées pour leur consultation et leurs possibles observations, mais s'agissant de permettre la contradiction, ce délai doit être, évidemment, un délai suffisant et, par là-même, ne doivent être pris en considération que les jours pouvant permettre les dites consultations et éventuelles observations qui seront dénommés jours utiles ; qu'il ressort des éléments produits que le délai pour consulter le dossier a été notifié à la société PEUGEOT par lettre du 27 juin, la Caisse indiquant que la prise de décision interviendrait le 6 juillet 2006 soit un délai de 6 jours francs ou de 5 jours utiles, la société PEUGEOT ne démontrant pas que la lettre datée du 27 juin 2006 n'a pas été reçue le lendemain ; que ce délai pour une société comme PEUGEOT disposant de personnel pour l'examen de ce recours et proche du lieu de consultation du dossier est un délai suffisant, et ce d'autant que depuis, l'employeur n'a émis aucune contestation sur ce délai et son caractère utile ; que cette demande sera rejetée ;1. ¿ ALORS QU'un délai de 5 jours utiles ne peut être retenu comme un délai suffisant pour permettre à l'employeur de consulter les pièces du dossier de l'instruction et assurer le caractère contradictoire de la procédure ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale ;
2. ¿ ALORS en tout état de cause QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que pour juger que la société avait disposé de 5 jours utiles, la Cour d'appel a retenu qu'elle ne démontrait pas ne pas avoir reçu la lettre du 27 juin 2006 dès le lendemain, soit le 28 juin 2006 ; qu'en statuant ainsi quand l'employeur indiquait n'avoir reçu cette lettre que le 29 juin 2006 et que la CPAM des Ardennes n'avait pas contesté ce point, se contentant de conclure à l'irrecevabilité de la demande d'inopposabilité formulée par l'employeur, la Cour d'appel a méconnu l'objet du litige et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ; ET AUX MOTIFS QUE concernant la saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, celle-ci n'était pas nécessaire dans la mesure où il est clairement indiqué par le médecin de la société PEUGEOT le 13 janvier 2006 que monsieur X... a été exposé à l'amiante de 1984 à 1992 avec certitude et qu'entre 1992 et 1997, le médecin ne peut certifier de façon absolue qu'il n'a pas été exposé à des travaux avec des risques d'inhalation des fibres d'amiante, peu important le certificat médical initial du 13 décembre 2005 qui note « carcinome bronchopulmonaire non à petites cellules LS Dt (maladie professionnelle n° 30 bis), patient ayant été exposé à l'amiante de 1986 à 1992 (-10 ans ?) » soit une interrogation sur la période d'exposition inférieure à 10 ans ; que l'employeur n'ayant pas justifié que sur la période de 1992 à 1997, monsieur X... ne pouvait être exposé à ce risque, le délai d'exposition au risque de l'amiante est supérieure à 10 ans, ce qui ne requérait pas l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ; 3. ¿ ALORS QUE la charge de la preuve que les conditions posées par un tableau de maladie professionnelle sont réunies incombe au salarié ; que pour juger que le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles n'avait pas à être saisi, la Cour d'appel a affirmé que l'employeur ne rapportait pas la preuve qu'entre 1992 et 1997, le salarié n'avait pu être exposé au risque ; qu'en statuant ainsi, quand il appartenait au salarié d'apporter la preuve qu'il avait été exposé au risque pendant plus de dix ans, condition posée par le tableau n° 30 bis, et non à l'employeur qu'il n'y avait pas été exposé, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;4. ¿ ALORS QUE la simple éventualité d'une durée d'exposition au risque conforme au tableau ne saurait être retenue ; que la Cour d'appel a relevé que le médecin de la société avait indiqué « qu'entre 1992 et 1997, le médecin ne peut certifier de façon absolue que le salarié n'a pas été exposé à des travaux avec des risques d'inhalation des fibres d'amiante » ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a méconnu les articles L. 461-1 et L. 461-2 du Code de la sécurité sociale, ensemble l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 13-17130
Date de la décision : 19/06/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 06 mars 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 19 jui. 2014, pourvoi n°13-17130


Composition du Tribunal
Président : M. Héderer (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Didier et Pinet, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.17130
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