LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :Vu les articles 712 de l'ancien code de procédure civile et 480 du code de procédure civile ;
Attendu que le jugement d'adjudication, qui ne statue sur aucun incident, n'a pas le caractère d'un jugement revêtu de l'autorité de la chose jugée ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que sur le fondement d'un jugement du 13 mars 2001, condamnant solidairement la société Cabinet Hardy - HRC Provençal (le Cabinet Hardy) et la SCP Widenlocher, à lui payer une somme de 1 600 000 francs (243 918,43 euros), outre les intérêts au taux légal du 24 mars 1987 jusqu'au jour du parfait paiement, la SCI Les Amandiers a poursuivi la saisie de biens immobiliers appartenant au Cabinet Hardy ; que l'adjudication a été prononcée par jugement du 5 avril 2007 au profit, pour une partie des biens, des sociétés Titan Invest, ST Conseils, Victoria et Guérin frères et, pour une autre, de la SCI Les Clefs de Saint-Pierre, bénéficiaire pour cette acquisition d'un prêt garanti par une hypothèque sur le bien, consentie par la Banque populaire de la Côte d'Azur ; que l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, confirmant le jugement du 13 mars 2001, ayant été ultérieurement cassé (1re civ., 28 février 2008, pourvoi n° 06-16.277), mais seulement en ce qu'il avait condamné le Cabinet Hardy à payer à la SCI Les Amandiers les intérêts au taux légal sur la somme de 243 918,43 euros à compter du 5 novembre 1987 et débouté le Cabinet Hardy de ses demandes indemnitaires dirigées contre la SCI Les Amandiers et contre la SCP Widenlocher, le Cabinet Hardy a saisi un tribunal de grande instance d'une demande d'annulation du jugement d'adjudication ;Attendu que pour déclarer irrecevable cette demande, la cour d'appel retient qu'en l'état de la cassation prononcée le 28 février 2008, le jugement du 13 mars 2001 est devenu définitif, si bien que la créance alléguée par la SCI Les Amandiers, telle que fixée par ledit jugement, ne saurait être contestée, de sorte que c'est à bon droit que le jugement déféré a retenu la force de chose jugée des décisions rendues au cours de la procédure de saisie immobilière, justifiant de débouter le Cabinet Hardy de l'ensemble de ses demandes ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le débiteur est recevable à solliciter l'annulation du jugement d'adjudication en raison de l'annulation du jugement servant de fondement aux poursuites, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; Et attendu que la cassation n'implique pas qu'il soit à nouveau statué, la poursuite aux fins de saisie immobilière ne pouvant être annulée sous prétexte que le créancier l'aurait commencée pour une somme plus forte que celle qui lui est due, de sorte que la cassation partielle du jugement du 13 mars 2001 est sans effet sur la validité du jugement d'adjudication ; qu'il y a lieu en conséquence de faire application de l'article 627, alinéa 1er, du code de procédure civile ;PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 février 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ;Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Grasse du 15 octobre 2010 en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action de la société Cabinet Hardy - HRC Provençal tendant à l'annulation du jugement d'adjudication du 5 avril 2007 ;
Rejette les demandes de la société Cabinet Hardy - HRC Provençal, ainsi que les demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive formées par les sociétés Titan Invest, ST Conseils, Victoria et Guérin frères et par la SCI Les Clefs de Saint-Pierre ; Confirme le jugement du 15 octobre 2010 en ses autres dispositions ;Condamne la société Cabinet Hardy - HRC Provençal aux dépens exposés devant la cour d'appel et la Cour de cassation ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile : Rejette les demandes présentées devant la cour d'appel ;Rejette les demandes de la société Cabinet Hardy - HRC Provençal et de la SCI Les Amandiers ; condamne la société Cabinet Hardy - HRC Provençal à payer, aux sociétés Titan Invest, ST Conseils, Victoria et Guérin frères, d'une part, et à la Banque populaire Côte d'Azur, d'autre part, chacune, la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour la société Cabinet Hardy - HRC ProvençalLa société Cabinet Hardy fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déclarée irrecevable en ses demandes d'annulation du jugement d'adjudication du 5 avril 2007 et d'annulation de l'inscription d'hypothèque prise au profit de la Banque populaire de la Côte d'Azur ; AUX MOTIFS QUE l'évolution du litige se caractérise par les données procédurales et les décisions suivantes ; que la SCI LES AMANDIERS a engagé, en vertu du jugement précité du tribunal de grande instance de Grasse du 13 mars 2001 et de l'arrêt confirmatif du chef de la condamnation en principal de la cour de céans du 24 janvier 2006, des poursuites de saisie immobilière à l'encontre de la SARL CABINET HARDY-HRC PROVENÇAL, partie saisie, laquelle, lors de l'audience éventuelle, a initié un incident de saisie immobilière en demandant au tribunal d'ordonner le sursis aux poursuites dans l'attente de l'issue de son pourvoi en cassation visant l'arrêt du 24 janvier 2006, tout en sollicitant la nullité du commandement aux fins de saisie immobilière au motif de l'irrégularité de sa signification ; que de ce chef, en l'état de l'arrêt de la Cour de cassation du 28 février 2008, ayant certes cassé et annulé l'arrêt de la présente cour du 24 janvier 2006, "mais seulement en ce qu'il a condamné la société CABINET HARDY à payer à la SCI LES AMANDIERS les intérêts au taux légal sur la somme de 243.918,43 ¿ à compter du 5 novembre 1987 et débouté ladite société de ses demandes indemnitaires", sans incidence sur la procédure de saisie immobilière en cause, le jugement du 13 mars 2001 est devenu définitif, si bien que la créance alléguée par la SCI LES AMANDIERS, telle que fixée par ledit jugement, ne saurait être contestée ainsi que l'a décidé à bon droit le jugement entrepris ; que d'ailleurs l'arrêt de la cour de céans du 19 janvier 2012, statuant sur renvoi de cassation suivant cet arrêt du 28 février 2008, a infirmé le jugement du 13 mars 2001 uniquement du chef des intérêts assortissant la créance de la SCI LES AMANDIERS, définitivement acquise à son profit à l'égard de la SARL CABINET HARDY-HRC PROVENÇAL ; qu'il s'avère par ailleurs que le tribunal de grande instance de Grasse a débouté la SARL CABINET HARDY-HRC PROVENÇAL, d'abord par jugement sur incident de saisie immobilière rendu en dernier ressort le 16 novembre 2006, de ses demandes consistant à voir ordonner la suspension de la procédure de saisie ou sa radiation, avec fixation de l'adjudication au 11 janvier 2007, puis, par jugement sur incident rendu en dernier ressort à cette date, de ses demandes tendant, selon deux dires déposés les 5 et 8 janvier 2007, à l'arrêt des poursuites de saisie immobilière et subsidiairement de sursis à statuer jusqu'au jugement devant prononcer son redressement judiciaire ou sa liquidation judiciaire, sinon le sursis aux poursuites en raison tant des appels relevés envers le jugement sur incident du 16 novembre 2006, jugés irrecevables par arrêt de la cour du 21 septembre 2007, que du pourvoi en cassation le concernant, voire la nullité des poursuites de saisie immobilière pour nullité de la publicité ; qu'après l'adjudication le 11 janvier 2007 de lots à la SCI LES CLEFS DE SAINT PIERRE et aux sociétés TITAN INVEST, ST CONSEILS, VICTORIA et GUERIN FRERES, les surenchères du 22 janvier 2007 ont été validées, avec fixation d'une nouvelle adjudication au 5 avril 2007, date d'un autre jugement sur incident rendu en premier ressort par le même tribunal de grande instance, qui, rejetant les demandes de la SARL CABINET HARDY-HRC PROVENÇAL relatives au constat de l'extinction de la créance du créancier poursuivant, a maintenu le principe de l'adjudication concrétisée par jugement de la même date, à l'encontre duquel le pourvoi en cassation de la SARL CABINET HARDY-HRC PROVENÇAL a été déclaré non admis par arrêt de la Cour de cassation du 11 décembre 2008 ; que c'est donc à bon droit que le jugement déféré a retenu la force de chose jugée des décisions susmentionnées quant aux moyens à nouveau développés par la société appelante, ce qui justifie de le confirmer en toutes ses dispositions comprenant le rejet des demandes de dommages et intérêts faute de preuve du prétendu caractère abusif de la procédure, et de débouter la SARL CABINET HARDY-HRC PROVENÇAL de l'ensemble de ses demandes ;ALORS QUE le jugement d'adjudication qui ne statue sur aucun incident n'a pas l'autorité de la chose jugée ; que la cour d'appel qui, pour déclarer irrecevable l'action de la société Cabinet Hardy en annulation du jugement d'adjudication du 5 avril 2007, qui n'avait statué sur aucun incident, a jugé que ce dernier avait acquis force de chose jugée, a violé les articles 712 de l'ancien code de procédure civile et 480 du code de procédure civile ;
ALORS QUE l'autorité de chose jugée acquise par les décisions qui ont déterminé la créance du saisissant et se sont prononcées sur les dires du débiteur saisi ne font pas obstacle à la recevabilité de l'action intentée par ce dernier en annulation du jugement d'adjudication ; que la cour d'appel qui, après avoir relaté les décisions qui ont déterminé la créance de la société Les Amandiers et se sont prononcées sur les dires de la société Cabinet Hardy, a jugé qu'à raison, notamment, de la force de chose jugée de ces décisions, l'action de la société Cabinet Hardy en annulation du jugement d'adjudication du 5 avril 2007 devait être déclarée irrecevable, a violé l'article 480 du code de procédure civile ; ALORS QUE, en tout état de cause, la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait constaté que par un arrêt du 28 février 2008 la Cour de cassation avait partiellement cassé et annulé l'arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence du 24 janvier 2006, qui constituait le titre fondant la saisie immobilière, ce dont il résultait que le jugement d'adjudication du 5 avril 2007, pris en exécution de l'arrêt partiellement cassé, devait, par voie de conséquence, être annulé, a néanmoins jugé irrecevable l'action introduite en ce sens par le débiteur saisi, a violé l'article 625 du code de procédure civile.