LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office après avis donné aux parties, en application de l'article 1015 du code de procédure civile : Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... et Mme Y... se sont mariés le 23 août 1997 sous le régime conventionnel de la communauté réduite aux acquêts ; que leur contrat de mariage contenait une clause suivant laquelle Mme Y... avait fait apport d'une maison d'habitation à la communauté, à charge pour celle-ci d'acquitter le solde d'un emprunt ayant financé l'acquisition du bien ; Attendu que l'arrêt, après avoir confirmé le jugement ayant prononcé le divorce des époux, retient à juste titre que l'apport en communauté de Mme Y..., qualifié de donation par les parties, constitue un avantage matrimonial prenant effet au cours du mariage et régi par la loi du 26 mai 2004 et en déduit qu'en application de l'article 265 du code civil, il n'est pas affecté par le prononcé du divorce aux torts du mari et n'est donc pas susceptible de révocation ; Qu'en statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur la requalification envisagée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à révocation de l'avantage matrimonial consenti par Mme Y... par acte notarié du 29 juillet 1997, l'arrêt rendu le 7 février 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ; Condamne M. X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mai deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour Mme Y.... Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir, infirmant le jugement entrepris, dit n'y avoir lieu à révocation de l'avantage matrimonial consenti par Madame Désirée Y... par acte notarié du 29 juillet 1997 ; AUX MOTIFS QUE « l'apport en communauté par Madame Désirée Y... d'un bien propre, qu'elle avait acquis le 21 décembre 1995, à charge pour la communauté de rembourser le prêt immobilier afférant à ce bien et ce, par une convention matrimoniale reçue par acte notarié en date du 29 juillet 1997, constitue par nature un avantage matrimonial au sens de l'article 1527 alinéa 1er du code civil, prenant effet au cours du mariage ; qu'à la différence des donations qui, lorsqu'elles sont antérieures au 1er janvier 2005, restent révocables dans les conditions prévues par l'article 1096 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 mai 2004 en application des dispositions interprétatives de cette loi énoncées par la loi du 06 août 2006, le sort des avantages matrimoniaux au moment du divorce est régi par la loi du divorce ; que la loi du 24 mai 2004 est applicable aux procédures en divorce introduites avant son entrée en vigueur sauf lorsque l'assignation a été délivrée avant le 1er janvier 2005 ; qu'en l'espèce l'assignation a été délivrée le 18 août 2010 ; qu'il s'en suit que l'avantage matrimonial susvisé est régi par la loi nouvelle ; que c'est donc par erreur que le premier juge a fait application de l'article 267 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 24 mai 2004, aux termes duquel « quand le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l'un et de l'autre des époux, celui-ci perd de plein droit toutes les donations et tous les avantages matrimoniaux que son conjoint lui avait consentis, soit lors du mariage, soit après » ; qu'en vertu de l'article 265 du code civil tel qu'il résulte de la loi du 26 mai 2004, applicable à l'espèce, « le divorce est sans incidence sur les avantages matrimoniaux qui prennent effet au cours du mariage ¿ Toutefois si le contrat de mariage le prévoit, les époux pourront toujours reprendre les biens qu'ils auront apportés à la communauté » ; qu'il s'ensuit que l'avantage matrimonial consenti par Madame Désirée Y... et qui a pris effet au cours du mariage n'est pas affecté par le prononcé du divorce aux torts du mari et n'est donc pas susceptible de révocation ; qu'en l'espèce, la convention notariée en date du 29 juillet 1997 ne comporte aucune clause assurant la reprise par l'épouse du bien qu'elle a apporté, en cas de divorce ; que le jugement déféré sera, en conséquence, réformé en ce qu'il a dit que Monsieur Jean Claude X... perdrait de plein droit les donations et avantages matrimoniaux que son conjoint lui avait consentis lors du mariage au titre desquels l'apport en communauté de la maison d'habitation sise ... à MARSEILLE ; que les avantages matrimoniaux, à la différence des donations, ne sont pas révocables pour ingratitude ; que, de plus, l'action en retranchement dont se prévaut Madame Désirée Y... sur le fondement de l'article 1527 alinéa 2 du code civil ne peut être formée par les héritiers du parent ayant consenti l'avantage matrimonial, qu'après le décès de celui-ci ; que la demande formée de ces chefs par l'intimée ne saurait donc prospérer et le jugement entrepris sera infirmé sur ce point » (arrêt p. 5 et 6) ;ALORS, DE PREMIÈRE PART, QUE le juge est lié par l'objet du litige, tel qu'il résulte des conclusions déposées par les parties ; que Madame Y... et Monsieur X... ont admis que la stipulation du contrat de mariage prévoyant l'apport d'un immeuble présent à la communauté par Madame Y... constituait une donation au profit de Monsieur X... ; qu'en qualifiant néanmoins cet apport d'avantage matrimonial, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et, partant, a violé l'article 4 du code de procédure civile ; ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE les donations entre époux par contrat de mariage échappent à la règle édictée à l'article 959 du code civil excluant la révocation pour cause d'ingratitude des donations faites en faveur de mariage ; que dès lors, en ne recherchant pas, comme elle y était invitée par Mme X... (concl. p. 13), si les violences physiques et verbales commises par son époux, retenues pour prononcer le divorce à ses torts exclusifs, ainsi que le refus de paiement des échéances des crédits mis à sa charge par l'ordonnance de non-conciliation, ne constituaient pas des causes de révocation de la donation à lui consentie par contrat de mariage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 955 du code civil ; ALORS, DE TROISIÈME PART ET À TITRE SUBSIDIAIRE, QU'en présence d'enfants qui ne sont pas issus des deux époux, les avantages que l'un ou l'autre d'entre eux peuvent retirer des clauses d'une communauté conventionnelle sont révocables pour cause d'ingratitude ; que retenant la solution contraire, la cour d'appel a violé les articles 1527 et 955 du code civil ; ALORS, DE QUATRIÈME PART ET À TITRE SUBSIDIAIRE, QU'en l'absence de disposition transitoire expresse contraire de la loi nouvelle prévoyant son application immédiate et à défaut de considérations d'ordre public particulièrement impératives, les contrats demeurent soumis à la loi ancienne en vigueur à la date de leur conclusion ; que la loi du 26 mai 2004 ne contient aucune disposition transitoire expresse prévoyant que les avantages matrimoniaux ne seront plus soumis à la loi en vigueur à la date de leur stipulation ; qu'il n'existe aucun motif impérieux de priver l'époux ayant stipulé un avantage matrimonial sous l'empire de la règle de sa révocation de plein droit en cas de divorce aux torts exclusifs du conjoint bénéficiaire (article 267 ancien du code civil, issu de la loi de 1975), du bénéfice de cette règle ; qu'en déclarant irrévocable l'avantage matrimonial résultant de la stipulation d'apport à la communauté d'un bien présent par Madame Y... et en refusant d'en constater la perte au détriment de Monsieur X... par suite du prononcé du divorce aux torts exclusifs de ce dernier, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 2 du code civil, l'article 265 du code civil, issu de la loi du 26 mai 2004, les articles 33- I et 33- II de cette loi et, par refus d'application, l'ancien article 267 du code civil, ainsi que le principe de la survie de la loi ancienne en matière contractuelle, ensemble l'article 1er du 1er protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; ALORS, DE CINQUIÈME PART, QUE toute décision de justice doit, à peine de nullité, être motivée ; que Madame Y... soutenait dans ses écritures d'appel que quelle que soit la qualification de la clause d'apport en communauté, celle-ci était nulle en application des articles 1389, 1099 et 1527 alinéa 2 du code civil, pour conférer à Monsieur un avantage excédant la fraction dont Madame pouvait librement disposer en présence d'enfants issus de précédentes unions ; qu'en se considérant à tort saisie d'une action en retranchement et en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a méconnu les exigences des articles 455 et 458 du code de procédure civile.