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14/05/2014 | FRANCE | N°13-10624

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 mai 2014, 13-10624


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 15 août 2009, par la Mutuelle des Oeuvres sanitaires et sociales de Saint-Pierre-et-Miquelon (la mutuelle) en qualité de chirurgien-dentiste pour exercer ses fonctions dans un cabinet de cette mutuelle situé à Saint-Pierre-et-Miquelon, suivant un contrat de travail intermittent à durée indéterminée, prévoyant une activité durant six mois par an, soit du 15 août au 31 décembre et du 1er janvier au 15 février, en alternance avec un autre praticie

n sur le reste de l'année ; qu'ayant travaillé jusqu'au 15 février 2010,...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 15 août 2009, par la Mutuelle des Oeuvres sanitaires et sociales de Saint-Pierre-et-Miquelon (la mutuelle) en qualité de chirurgien-dentiste pour exercer ses fonctions dans un cabinet de cette mutuelle situé à Saint-Pierre-et-Miquelon, suivant un contrat de travail intermittent à durée indéterminée, prévoyant une activité durant six mois par an, soit du 15 août au 31 décembre et du 1er janvier au 15 février, en alternance avec un autre praticien sur le reste de l'année ; qu'ayant travaillé jusqu'au 15 février 2010, il est reparti en métropole ; que le 24 mai 2010, il a informé la mutuelle qu'il n'assurait pas « le prochain exercice » ; que n'ayant pas rejoint son poste le 1er septembre 2010, il a été licencié pour faute grave ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident du salarié :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que le licenciement est nécessairement dépourvu de tout caractère fautif lorsque les manquements reprochés au salarié résultent d'un comportement fautif imputable à l'employeur ; qu'en affirmant, pour juger que son absence à compter d'août 2010 « constitue une faute » que « le caractère irrégulier du contrat de travail intermittent qu'il avait signé ne permettait pas, pour autant, de considérer ledit contrat comme nul et de nul effet, mais seulement de le requalifier en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet » et que « le salarié ne peut donc se retrancher derrière cette irrégularité pour justifier son refus de regagner son poste à la date convenue », quand il résultait de ces constatations que la mutuelle avait commis une faute en lui imposant la signature d'un contrat de travail illégal, de sorte que le refus de ce dernier de reprendre son poste de travail en raison du manquement de l'employeur ne revêtait aucun caractère fautif et ne pouvait, dès lors, justifier son licenciement, le tribunal supérieur d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations, violant ainsi les articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail, ensemble les articles L. 1235-3, L. 1234-9 et L. 1234-5 du même code ;
2°/ que les juges ne peuvent dénaturer les conclusions déposées en cours d'instance par les parties ; qu'en relevant, pour juger que son refus de regagner son poste de travail à la date convenue constituait une faute, que « le caractère irrégulier du contrat de travail intermittent signé par lui ne permettait pas, pour autant, de considérer ledit contrat comme nul et de nul effet, mais seulement de le requalifier en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet », quand il résultait de ses conclusions d'appel qu'il avait justifié son refus de reprendre le travail par l'illégalité de son contrat de travail et non par la nullité de celui-ci, le tribunal supérieur d'appel a dénaturé les conclusions susvisées, violant en conséquence l'article 4 du code de procédure civile, ensemble le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ;
3°/ que, subsidiairement, la faute grave s'apprécie in concreto en fonction du contexte et des circonstances de l'espèce ; qu'en se bornant à énoncer, de manière générale et abstraite, que « l'abandon de son poste par le salarié, qui se trouvait au surplus en métropole, revêt bien le caractère d'une faute grave », sans cependant rechercher si, eu égard au manquement de la mutuelle qui l'avait engagé suivant un contrat de travail illégal, la faute reprochée au salarié ne constituait pas une faute légère ou sérieuse de licenciement, le tribunal supérieur d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
4°/ qu'en tout état de cause, la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; qu'en se bornant à affirmer que « l'abandon de son poste par le salarié, qui se trouvait au surplus en métropole, revêt bien le caractère d'une faute grave », sans cependant caractériser l'impossibilité pour la mutuelle de le maintenir dans l'entreprise pendant la durée de son préavis, le tribunal supérieur d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Mais attendu que le tribunal supérieur d'appel, après avoir requalifié le contrat de travail en contrat à durée indéterminée à temps complet, a, par motifs propres et adoptés, sans dénaturer les conclusions du salarié, retenu que celui-ci était reparti en métropole à l'issue de la première période de travail, que le motif invoqué, pour expliquer son refus de reprendre son travail à la date convenue du 1er septembre 2010 était d'ordre familial, qu'à compter de cette date il s'est volontairement abstenu, bien qu'y ayant été invité par l'employeur, de se présenter au cabinet dentaire et d'y accomplir son travail, et que l'irrégularité de son contrat de travail ne saurait justifier son comportement ; qu'il a pu en déduire que ces faits rendaient impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et constituaient une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi incident du salarié, ci-après annexé :
Attendu que le moyen, qui critique une omission de statuer qui peut être corrigée selon la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile, n'est pas recevable ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche du pourvoi principal de l'employeur :
Attendu que la mutuelle fait grief à l'arrêt de la condamner à payer au salarié une somme à titre de rappel de salaire pour la période du 16 février au 31 août 2010, outre les congés payés afférents alors, selon le moyen, que le salaire n'est dû que pour les périodes pendant lesquelles le salarié a travaillé ou s'est tenu à disposition de l'employeur ; qu'en présence d'un contrat de travail intermittent requalifié en contrat à temps complet, le salarié ne peut en conséquence prétendre à des rappels de salaire à temps plein au titre des périodes intermittentes s'il ressort des propres constations des juges du fond que l'intéressé n'a pas travaillé et ne s'est pas tenu à la disposition de l'employeur pour effectuer un travail pendant les périodes d'intermittence en cause ; qu'en condamnant la mutuelle à verser des rappels de salaire au salarié pour la période d'intermittence du 16 février au 31 août 2010, tout en constatant « qu'ayant regagné la métropole à l'issue de la première période d'activité, il ne peut davantage soutenir qu'il se serait tenu en permanence à la disposition de son employeur », le tribunal supérieur d'appel n'a pas tiré les conséquence légales de ses constatations et a violé les articles 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;
Mais attendu que la requalification du contrat de travail intermittent à durée indéterminée comportant une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées en un contrat à temps complet, en raison de l'absence de convention ou d'accord collectif autorisant le recours à cette catégorie de contrats, ouvre droit au paiement de l'intégralité des salaires, y compris pour la période pendant laquelle le salarié n'a pas travaillé, peu important qu'il n'ait pas été à la disposition de l'employeur pour effectuer un travail ; que le tribunal supérieur d'appel, qui a retenu que le contrat de travail à durée indéterminée intermittent du salarié avait été conclu de manière illicite en l'absence de convention ou d'accord collectif autorisant le recours à cette catégorie de contrat et qu'il devait être requalifié en contrat à temps complet, a exactement décidé que ce salarié était en droit de percevoir les salaires correspondant à ce temps complet, y compris pour la période du 16 février au 31 août 2010, antérieure à la rupture du contrat de travail ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le même moyen, pris en ses deuxième et troisième branches :
Attendu qu'il n'y a lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le troisième moyen du pourvoi incident du salarié :
Vu les articles 1147 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts au titre de la nullité de la clause de non-concurrence, l'arrêt retient que cette clause ne comporte aucune contrepartie financière et doit être déclarée illicite, que cependant, étant limitée à un rayon de soixante kilomètres soit au territoire de l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon et l'intéressé ne souhaitant pas y poursuivre dans l'immédiat son activité, cette clause ne l'a donc pas empêché de s'installer en métropole et d'y exercer son activité professionnelle, et n'a donc pu lui porter un préjudice entravant l'exercice de sa profession ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la stipulation dans le contrat de travail d'une clause de non-concurrence nulle cause nécessairement un préjudice au salarié, le tribunal supérieur d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts au titre de la nullité de la clause de non-concurrence, l'arrêt rendu le 21 novembre 2012, entre les parties, par le tribunal supérieur d'appel de Saint-Pierre-et-Miquelon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la Mutuelle des Oeuvres sanitaires et sociales de Saint-Pierre-et-Miquelon aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de cette mutuelle et la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mai deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la Mutuelle des Oeuvres sanitaires et sociales de Saint-Pierre- et-Miquelon (demanderesse au pourvoi principal).
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la Mutuelle des Oeuvres Sanitaires et Sociales de Saint-Pierre et Miquelon à payer à Monsieur X... la somme de 71.172,98 € à titre de rappel de salaire pour la période du 16 février au 31 août 2010, outre les congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE « sur les demandes d'indemnisation : 1) rappel de salaire : que Monsieur Eric X... réclame une indemnité de requalificationsanction s'élevant à un mois de salaire, soit la somme de 11.035,36 ¿ ; qu'il réclame également, à titre de rattrapage de salaire, la somme de 88.282,88 ¿, calculée sur la base du salaire brut perçu au cours des six précédents mois d'activité comprenant le salaire fixe ainsi que les commissions et ce jusqu'au 20 octobre 2010, date de son licenciement ; qu'après avoir exercé au cours de la période courant du 15 août 2009 au 15 février 2010, il avait été prévu que Monsieur Eric X... soit présent à son poste le 1er septembre 2010 ; que celui-ci adressait, cependant, un mail à son employeur, le 24 mai 2010, dans lequel il lui précisait, notamment : « je suis au regret de confirmer que je ne pourrai assurer le prochain exercice. Ceci pour des raisons personnelles, ne pouvant m'éloigner de ma compagne dans l'immédiat » ; que, n'ayant pas assuré son service à la date prévue, Monsieur X... était convoqué à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement, auquel il ne déférait pas et faisait l'objet d'un licenciement pour faute grave, le 20 octobre 2010 ; que Monsieur Eric X... s'étant lui-même, volontairement abstenu de se présenter au cabinet dentaire à compter du 1er septembre 2010 et d'y accomplir son travail ne saurait prétendre au paiement d'un salaire à compter de cette date ; qu'au surplus, ayant regagné la métropole à l'issue de sa première période d'activité, il ne peut davantage soutenir qu'il se serait tenu en permanence à la disposition de son employeur ; qu'il ressort de tout ce qui précède que Monsieur X... est seulement fondé à prétendre à une somme de 71.729,84 ¿ à titre de rattrapage de salaire, courant du 16 février au 31 août 2010, ainsi qu'à la somme de 7.172,98 € au titre des congés payés y afférents qui lui seront alloués ; qu'il convient d'assortir cette condamnation des intérêts au taux légal depuis la saisine du conseil de prud'hommes » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le salaire n'est dû que pour les périodes pendant lesquelles le salarié a travaillé ou s'est tenu à disposition de l'employeur ; qu'en présence d'un contrat de travail intermittent requalifié en contrat à temps complet, le salarié ne peut en conséquence prétendre à des rappels de salaire à temps plein au titre des périodes intermittentes s'il ressort des propres constations des juges du fond que l'intéressé n'a pas travaillé et ne s'est pas tenu à la disposition de l'employeur pour effectuer un travail pendant les périodes d'intermittence en cause ; qu'en condamnant la Mutuelle des OEuvres Sanitaires et Sociales de Saint-Pierre et Miquelon à verser des rappels de salaire à Monsieur X... pour la période d'intermittence du 16 février au 31 août 2010, tout en constatant « qu'ayant regagné la Métropole à l'issue de la première période d'activité, il ne peut davantage soutenir qu'il se serait tenu en permanence à la disposition de son employeur », le Tribunal Supérieur d'Appel n'a pas tiré les conséquence légales de ses constatations et a violé les articles 1134 du code civil et L.1221-1 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE selon l'article 12 du contrat de travail Monsieur X... bénéficiait d'une rémunération à l'acte correspondant à 30 % du tarif des soins et à 27 % du tarif des prothèses ; qu'il était prévu au même article un «salaire brut minimum garanti» de 3.800 ¿ correspondant à une rémunération dite « plancher » qui n'avait vocation à être versée au salarié que de manière différentielle dans l'hypothèse dans laquelle sa rémunération variable à l'acte ne dépasserait pas le seuil de 3.800 € ; que ce salaire minimum garanti n'avait donc pas vocation à se cumuler avec la rémunération à l'acte en cas de dépassement du seuil de 3.800 € ; qu'en fixant néanmoins le salaire moyen mensuel de Monsieur X... à 11.035,36 € « sur la base du salaire brut perçu au cours des six précédents mois d'activité comprenant le salaire fixe ainsi que les commissions », le Tribunal Supérieur d'Appel a dénaturé le contrat de travail de Monsieur X... et a violé l'article 1134 du code civil ;
QU'à tout le moins, en fixant le salaire moyen mensuel de Monsieur X... à 11.035,36 €, en incluant dans ce calcul la somme de 3.800 € qui ne constituait qu'un seuil de garantie de rémunération minimale, le Tribunal Supérieur d'Appel de SAINT-PIERRE ET MIQUELON a méconnu la loi des parties et violé l'article L.1221-1 du Code du travail.

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X... (demandeur au pourvoi incident).

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande tendant à voir déclarer son licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et d'avoir, en conséquence, rejeté les demandes de Monsieur X... en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et de congés payés y afférents, d'une indemnité légale de licenciement ainsi que des dommages et intérêts pour licenciement injustifié ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur Eric X... a fait l'objet d'une mesure de licenciement qui lui a été notifiée par lettre recommandée, datée du 20 octobre 2010, ainsi rédigée : « nous vous signifions, par la présente, votre licenciement pour faute grave au motif suivant : vous avez été engagé le 15 août 2009 en qualité de chirurgien-dentiste au sein de notre Mutuelle. Vous êtes absent sans autorisation, ni justification valable, depuis le 1er septembre 2010 (et à tout le moins depuis le 15 août 2010), date à laquelle vous deviez reprendre vos fonctions. Vous comprendrez que nous ne pouvons tolérer plus longtemps un tel comportement. Votre licenciement prendra effet au jour de la présentation de cette lettre, sans préavis ni indemnité de rupture » ; que l'appelant fait valoir que la Mutuelle MO3SPM est mal fondée à lui reprocher un abandon de poste alors même que le contrat qui le liait à elle était illégal ; que Monsieur Eric X... informait son employeur, par mail daté du 24 mai 2010, de son intention de ne pas assurer sa mission au cours du prochain exercice devant débuter le 1er septembre 2010 ; qu'il invoquait alors des raisons personnelles ; que invité par son employeur à présenter sa démission, il s'y refusait mais ne se présentait pas à son travail ; que le caractère irrégulier du contrat de travail intermittent signé par Monsieur X... ne permettait pas, pour autant, de considérer ledit contrat comme nul et de nul effet, mais seulement de le requalifier en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet ; que le salarié ne peut donc se retrancher derrière cette irrégularité pour justifier son refus de regagner son poste à la date convenue ; que la carence intervenue dans de telles conditions constitue une faute ; qu'est constitutif d'une faute grave, un fait imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; que l'abandon de son poste par le salarié, qui se trouvait au surplus en métropole, revêt bien le caractère d'une faute grave ; que le licenciement prononcé de ce chef était donc régulier ; que la demande de Monsieur X... tendant à voir déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse sera rejetée et le jugement de première instance confirmé sur ce point ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DU JUGEMENT ENTREPRIS QUE « Monsieur Eric X... licencié pour abandon de poste le 20 octobre 2010, prétend que son licenciement est abusif puisque fondé sur l'exécution d'un contrat de travail illégal ; que s'il est bien constaté que le contrat de travail conclu le 15 août 2009 avec la Mutuelle était entaché d'illégalité, il n'en reste pas moins que ce contrat de travail n'était pas nul et de nul effet mais demeurait un contrat à durée indéterminé liant les parties et permettant toujours à l'employeur d'imposer à son salarié diverses sujétions, et notamment des dates de reprise impératives, ce que le salarié ne semble pas avoir compris lors de ses tentatives réitérées de contraindre son employeur à signer une rupture conventionnelle ; que son refus de regagner son poste de travail malgré les nombreuses invectives de la Mutuelle sera jugé comme constitutif d'une faute grave et le licenciement opéré par la Mutuelle parfaitement justifié ; qu'il y a lieu en conséquence de débouter Monsieur X... de tous les chefs de sa demande se rapportant à l'indemnisation de la rupture abusive de son contrat de travail dont il se prétend victime » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le licenciement est nécessairement dépourvu de tout caractère fautif lorsque les manquements reprochés au salarié résultent d'un comportement fautif imputable à l'employeur ; qu'en affirmant, pour juger que l'absence de Monsieur X... à compter d'août 2010 « constitue une faute » que « le caractère irrégulier du contrat de travail intermittent signé par Monsieur X... ne permettait pas, pour autant, de considérer ledit contrat comme nul et de nul effet, mais seulement de le requalifier en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet » et que « le salarié ne peut donc se retrancher derrière cette irrégularité pour justifier son refus de regagner son poste à la date convenue », quand il résultait de ces constatations que la Mutuelle avait commis une faute en imposant à Monsieur X... la signature d'un contrat de travail illégal, de sorte que le refus de ce dernier de reprendre son poste de travail en raison du manquement de l'employeur ne revêtait aucun caractère fautif et ne pouvait dès lors justifier son licenciement, le Tribunal supérieur d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations, violant ainsi les articles L1232-1 et L 1235-1 du Code du travail, ensemble les articles L1235-3, L 1234-9 et L 1234-5 du même code ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE les juges ne peuvent dénaturer les conclusions déposées en cours d'instance par les parties; qu'en relevant, pour juger que le refus de Monsieur X... de regagner son poste de travail à la date convenue constituait une faute, que « le caractère irrégulier du contrat de travail intermittent signé par Monsieur X... ne permettait pas, pour autant, de considérer ledit contrat comme nul et de nul effet, mais seulement de le requalifier en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet », quand il résultait des conclusions d'appel de l'exposant que celui-ci avait justifié son refus de reprendre le travail par l'illégalité de son contrat de travail et non par la nullité de celui-ci, le Tribunal supérieur d'appel a dénaturé les conclusions susvisées, violant en conséquence l'article 4 du Code de procédure civile, ensemble le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ;
ALORS, ENSUITE et subsidiairement, QUE la faute grave s'apprécie in concreto en fonction du contexte et des circonstances de l'espèce; qu'en se bornant à énoncer, de manière générale et abstraite, que « l'abandon de son poste par le salarié, qui se trouvait au surplus en métropole, revêt bien le caractère d'une faute grave », sans cependant rechercher si, eu égard au manquement de la Mutuelle qui avait engagé Monsieur X... suivant un contrat de travail illégal, la faute reprochée au salarié ne constituait pas une faute légère ou sérieuse de licenciement, le Tribunal supérieur d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 1234-1, L 1234-5 et L 1234-9 du Code du travail ;
ALORS, ENFIN et en tout état de cause, QUE la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; qu'en se bornant à affirmer que « l'abandon de son poste par le salarié, qui se trouvait au surplus en métropole, revêt bien le caractère d'une faute grave », sans cependant caractériser l'impossibilité pour la Mutuelle de maintenir Monsieur X... dans l'entreprise pendant la durée de son préavis, le Tribunal supérieur d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 1234-1, L 1234-5 et L 1234-9 du Code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande en paiement d'une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur Eric X... a fait l'objet d'une mesure de licenciement qui lui a été notifiée par lettre recommandée, datée du 20 octobre 2010, ainsi rédigée : « nous vous signifions, par la présente, votre licenciement pour faute grave au motif suivant : vous avez été engagé le 15 août 2009 en qualité de chirurgien-dentiste au sein de notre Mutuelle. Vous êtes absent sans autorisation, ni justification valable, depuis le 1er septembre 2010 (et à tout le moins depuis le 15 août 2010), date à laquelle vous deviez reprendre vos fonctions. Vous comprendrez que nous ne pouvons tolérer plus longtemps un tel comportement. Votre licenciement prendra effet au jour de la présentation de cette lettre, sans préavis ni indemnité de rupture » ; que l'appelant fait valoir que la Mutuelle MO3SPM est mal fondée à lui reprocher un abandon de poste alors même que le contrat qui le liait à elle était illégal ; que Monsieur Eric X... informait son employeur, par mail daté du 24 mai 2010, de son intention de ne pas assurer sa mission au cours du prochain exercice devant débuter le 1er septembre 2010 ; qu'il invoquait alors des raisons personnelles ; que invité par son employeur à présenter sa démission, il s'y refusait mais ne se présentait pas à son travail ; que le caractère irrégulier du contrat de travail intermittent signé par Monsieur X... ne permettait pas, pour autant, de considérer ledit contrat comme nul et de nul effet, mais seulement de le requalifier en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet ; que le salarié ne peut donc se retrancher derrière cette irrégularité pour justifier son refus de regagner son poste à la date convenue ; que la carence intervenue dans de telles conditions constitue une faute ; qu'est constitutif d'une faute grave, un fait imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; que l'abandon de son poste par le salarié, qui se trouvait au surplus en métropole, revêt bien le caractère d'une faute grave ; que le licenciement prononcé de ce chef était donc régulier ; que la demande de Monsieur X... tendant à voir déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse sera rejetée et le jugement de première instance confirmé sur ce point ; que Monsieur X... sera également débouté de sa demande tendant à obtenir une indemnité de licenciement ;
ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en déboutant Monsieur X... de sa demande en paiement d'une indemnité pour nonrespect de la procédure de licenciement, sans cependant assortir sa décision d'aucune motivation, le Tribunal supérieur d'appel a violé l'articles 455 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré nulle la clause de nonconcurrence figurant dans le contrat de travail signé par Monsieur X... mais débouté celui-ci de sa demande en paiement de dommages et intérêts de ce chef ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur X..., faisant valoir qu'il a respecté une clause illicite, réclame la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts ; que cependant, la clause de non-concurrence était limitée à un rayon de 60 km et couvrait donc, en fait, le territoire de l'archipel de Saint-Pierre et Miquelon ; qu'il se déduit des termes du mail adressé par Monsieur X... à son employeur, le 24 mai 2010, que l'appelant ne souhaitait pas, pour des raisons personnelles, poursuivre dans l'immédiat son activité dans l'archipel ; que la clause de non-concurrence ne l'a donc pas empêché de s'installer, notamment en métropole, soit à son compte, soit pour le compte d'un autre employeur et n'a donc pu, à ce titre, lui porter préjudice en entravant l'exercice de sa profession ; que la consultation du site « dentissime.com » à la date du 9 juin 2011, soit moins d'un an après la date de cessation de son activité à Saint-Pierre, dont une extraction est versée à la procédure par l'intimée, enseigne que Monsieur X... exerçait à Nice, région dans laquelle il s'était retiré après avoir quitté l'archipel ; que la clause de non-concurrence dont l'irrégularité est soulevée n'a donc constitué aucune entrave à l'exercice de sa profession par Monsieur X... et ne lui a causé aucun préjudice ; qu'il se trouve dans ces conditions mal fondé à en réclamer réparation ; qu'il sera débouté de ce chef de demande et le jugement de première instance confirmé sur ce point ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DU JUGEMENT ENTREPRIS QUE « le contrat de travail signé le 15 août 2009 entre la Mutuelle et Monsieur Eric X... stipule en son article 16 que : « Pendant la durée du contrat, le chirurgien dentiste s'interdit sous quelque forme que ce soit, d'attirer les patients fréquentant le centre de santé dentaire de la mutuelle dans un autre cabinet dentaire. En cas de rupture du contrat de travail, pour quelque motif que ce soit, M. X... Eric s'engage pendant l'année qui suivra la cessation de ses fonctions, à ne pas créer, reprendre ou s'intéresser, sous quelque forme que ce soit, à un cabinet dentaire situé dans un rayon de 60 Km. Cette interdiction s'appliquera à compter du jour du départ effectif du cabinet dentaire. » ; que Monsieur Eric X... soutient que cette clause de nonconcurrence doit être déclarée nulle puisque de toute évidence, elle ne comprenait aucune contrepartie financière ; que l'ayant respecté néanmoins il aurait subi un préjudice financier qu'il estime à 10.000 € ; que la clause de nonconcurrence figurant au contrat de travail du demandeur ne comporte pas l'obligation de verser au salarié une contrepartie déclarée nulle ; que cependant, Monsieur Eric X... qui ne rapporte pas le preuve de son éventuelle intention de créer son propre cabinet à Saint-Pierre et Miquelon alors qu'il travaillait pour le compte de la mutuelle ou encore dès après son licenciement, ne peut faire état d'un préjudice que lui aurait causé ladite clause de non-concurrence ; qu'il sera débouté également de ce chef de sa demande » ;
ALORS QUE la stipulation dans le contrat de travail d'une clause de nonconcurrence nulle cause nécessairement un préjudice au salarié ; qu'après avoir justement déclaré illicite la clause de non-concurrence de Monsieur X... pour absence d'une contrepartie financière, le Tribunal supérieur d'appel a énoncé que « la clause de non-concurrence dont l'irrégularité est soulevée n'a constitué aucune entrave à l'exercice de sa profession par Monsieur X... et ne lui a causé aucun préjudice, de sorte qu'il se trouve dans ces conditions mal fondé à en réclamer réparation » ; qu'ainsi le Tribunal supérieur d'appel a violé les articles 1147 du Code civil et L 1121-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-10624
Date de la décision : 14/05/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal supérieur d'appel de Saint-Pierre-et-Miquelon, 21 novembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 mai. 2014, pourvoi n°13-10624


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.10624
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