LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 5 juin 2012), que M. et Mme X... (les époux X...), pour financer l'achat de matériel à la société Enzeau, ont contracté, par l'intermédiaire de cette dernière, un emprunt auprès de la société Groupe Sofemo (la société Sofemo) ; que, souhaitant rembourser cet emprunt par anticipation, ils ont remis un chèque à la société Enzeau qui l'a encaissé et qui a adressé à la société Sofemo un chèque qui a été rejeté pour défaut de provision; que la société Enzeau ayant été mise en liquidation judiciaire, la société Sofemo a poursuivi les époux X... pour obtenir le remboursement de la somme restant due au titre de l'emprunt ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué de condamner solidairement les époux X... à payer à la société Sofemo la somme de 6 774,10 euros, assortie des intérêts au taux de 6,56 % à compter du 29 juillet 2010, outre 10 euros représentant l'indemnité de 8 % augmentée des intérêts au taux légal à compter du jugement, alors, selon le moyen, que la novation par substitution d'un nouveau débiteur s'opère lorsque le créancier a accepté le paiement par un nouveau débiteur et a apuré les comptes du premier débiteur ; que dans ses conclusions d'appel, les époux X... ont fait valoir que la société Groupe Sofemo avait accepté sans réserve l'encaissement d'un chèque émis par la société Enzeau et qu'elle avait en conséquence mis un terme aux prélèvements qu'elle effectuait sur le compte de M. et Mme X... qu'elle a laissés dans l'ignorance du défaut de paiement du chèque émis par la société Enzeau pendant presque deux ans ; qu'en se bornant à énoncer que le fait que le groupe Sofemo ait arrêté les prélèvements sur le compte à partir du mois de novembre 2008 après avoir reçu le chèque de la société Enzeau et ne les avait pas repris malgré le défaut de paiement de ce chèque n'était pas suffisant pour caractériser une volonté non équivoque de substituer aux emprunteurs la société Enzeau, sans s'expliquer sur le fait qu'au surplus, elle n'avait en aucune façon informé M. et Mme X... de la carence de la société Enzeau pendant presque deux ans , la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1271-2° du code civil ;
Mais attendu qu'une novation par substitution de débiteur ne se présume point ; qu'elle ne saurait résulter d'une attitude passive du créancier et de son acceptation du paiement fait par un tiers ; que l'arrêt attaqué relève à bon droit que l'acceptation sans réserve du chèque remis par la société Enzeau et la cessation des prélèvements sur le compte de ses débiteurs en dépit du rejet de ce chèque ne permettent pas de caractériser l'intention alléguée de la société Sofemo d'agréer la société Enzeau comme seule débitrice en déchargeant les époux X... de leurs obligations ; que le défaut d'information donné à ceux-ci sur le rejet du chèque n'étant pas davantage opérant, il suit que le moyen n'est pas fondé et ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné solidairement les époux X... à payer à la société Sofemo la somme de 6 774,10 euros, assortie des intérêts au taux de 6,56 % à compter du 29 juillet 2010, outre 10 euros représentant l'indemnité de 8 % augmentée des intérêts au taux légal à compter du jugement, alors, selon le moyen :
1°/ que l'existence d'un mandat tacite entre l'organisme de crédit et l'intermédiaire est établie lorsque cet établissement de crédit a accepté sans réserve le versement du solde d'un prêt effectué par l'intermédiaire mandaté par lui pour parvenir à la conclusion du contrat de prêt ; que la cour d'appel qui n'a pas recherché, au regard de la convention définissant les modalités de collaboration entre la SA Sofemo et la société Enzeau, si cette dernière n'avait pas servi d'intermédiaire pour le conclusion du prêt, et si en conséquence il n'existait pas également un mandat tacite pour recevoir par son intermédiaire, le remboursement du prêt souscrit par M. et Mme X..., n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1985 du code civil ;
2°/ que lorsque des emprunteurs ont contracté un emprunt pour acquérir un bien et que le vendeur a servi d'intermédiaire auprès de l'établissement de crédit en vertu d'une convention conclue entre eux, le remboursement du solde de ce prêt par un chèque remis à cet intermédiaire qui ne l'a pas transmis au prêteur, est libératoire dès lors que les emprunteurs avaient légitimement pu croire que l'intermédiaire était habilité pour recevoir le paiement ; que la cour d'appel qui s'est bornée à relever que la société Enzeau qui avait fait souscrire la convention de crédit à M. et Mme X... n'était pas intervenue dans le remboursement du crédit, sans rechercher si les époux X... qui avaient acheté un matériel à la société Enzeau, laquelle leur avait procuré un financement auprès de la société Sofemo en vertu d'une convention conclue entre elles, ne pouvaient pas légitimement croire que la société Enzeau était habilitée pour recevoir le paiement n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1198 du code civil ;
Mais attendu que le mandant n'est engagé par les actes de son mandataire que dans la mesure où celui-ci a agi conformément au pouvoir qui lui a été donné d'agir en son nom ; qu'après avoir constaté, par motifs propres et adoptés, que la convention signée par les sociétés Sofemo et Enzeau avait permis à celle-ci de faire souscrire aux époux X... leur demande de crédit, mais qu'elle ne prouvait pas l'existence d'un mandat donné, même tacitement, par la première société à la seconde de recevoir le paiement de la créance, alors qu'à aucun moment le vendeur ne s'était immiscé à un titre quelconque dans le remboursement du crédit, circonstance de nature à exclure par ailleurs la croyance légitime des emprunteurs en un mandat apparent donné à cette fin au vendeur, la cour d'appel a exactement déduit de ces constatations qu'était dépourvu de caractère libératoire le paiement effectué à l'ordre de la société Enzeau, qui n'avait pas qualité pour le recevoir ;
Que le moyen ne peut donc être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize mai deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné solidairement Monsieur Marcel X... et Madame Françoise Y... épouse X... à payer à la SA Groupe Sofemo la somme de 6.774,10¿ au titre du solde du crédit assortie des intérêts au taux de 6,56¿ à compter du 29 juillet 2010, outre la somme de 10¿ représentant l'indemnité de 8% augmentée des intérêts au taux légal à compter du jugement
Aux motifs propres que les appelants soutiennent qu'en présentant le chèque émis par la société Enzeau et en arrêtant concomitamment les prélèvements effectués sur le compte de Monsieur et Madame X... alors même que le chèque n'avait pas été payé, la société Groupe Sofemo a entendu substituer la société Enzeau aux époux X..., les déchargeant de leur engagement à son égard ; que la novation par changement de débiteur qui est invoquée ne se présume pas ; qu'elle doit être certaine et résulter clairement des faits et actes intervenus entre les parties ; que le fait que le Groupe Sofemo ait arrêté les prélèvements effectués sur le compte des emprunteurs à partir du mois de novembre 2008 après avoir reçu le chèque de la société Enzeau et ne les ait pas repris malgré le défaut de paiement du chèque n'est pas suffisant pour caractériser une volonté non équivoque du prêteur de substituer aux emprunteurs la société Enzeau vendeur alors que le prêteur n'a pas déclaré sa créance à la liquidation judiciaire de cette société ; que par ailleurs l'existence de la « convention de crédit vendeur » signée le 13 décembre 2006 entre le Groupe Sofemo et la société Enzeau qui met à la charge de cette société les conséquences financières susceptibles de découler de la mauvaise exécution de ses obligations dans le cadre du contrat de vente, n'implique pas comme le soutiennent Monsieur et Madame X..., que le Groupe Sofemo aurait nécessairement été réglé par imputation au compte de la société du montant du chèque impayé, la convention visant le seul cas d'un litige opposant le vendeur à l'acquéreur et portant sur le bien ou la prestation financée ; que l'affirmation de Monsieur et Madame X... n'est pas établie ;
Et aux motifs à les supposer adoptés que les époux X... n'établissent pas l'existence d'un mandat conféré par la SA groupe Sofemo à la SARL Enzeau afin de recevoir le remboursement de sa créance , les défendeurs ne peuvent pas non plus invoquer un mandat apparent, le seul fait qu'ils aient été mis en contact avec la SA Groupe Sofemo avec laquelle la SARL Enzeau était en relation d'affaires ne pouvant être constitutif d'un tel mandat ; que la SARL Enzeau ne s'est pas immiscée à un titre quelconque dans le remboursement du prêt qui s'est opéré par prélèvement sur le compte des époux X... ; il apparaît donc que le versement effectué par Monsieur et Madame X... à la SARL Enzeau afin de rembourser la SA Groupe Sofemo, n'avait aucun fondement sinon un mandat implicite de payer pour leur compte cette société ; si ce mandat n'a pas été exécuté, la seule conséquence est que les époux X... sont en droit de rechercher la responsabilité de la SARL Enzeau qui a été mise en cause sur le plan pénal mais non sur le plan civil, les défendeurs n'ayant pas jugé utile de l'appeler en la cause ; le tribunal ne peut donc que constater que le paiement a été effectué à une personne qui n'avait pas qualité pour le recevoir ;
Alors que la novation par substitution d'un nouveau débiteur s'opère lorsque le créancier a accepté le paiement par un nouveau débiteur et a apuré les comptes du premier débiteur ; que dans ses conclusions d'appel, les exposants ont fait valoir que la société Groupe Sofemo avait accepté sans réserve l'encaissement d'un chèque émis par la société Enzeau et qu'elle avait en conséquence mis un terme aux prélèvements qu'elle effectuait sur le compte de Monsieur et Madame X... qu'elle a laissés dans l'ignorance du défaut de paiement du chèque émis par la société Enzeau pendant presque deux ans ; qu'en se bornant à énoncer que le fait que le groupe Sofemo ait arrêté les prélèvements sur le compte à partir du mois de novembre 2008 après avoir reçu le chèque de la société Enzeau et ne les avait pas repris malgré le défaut de paiement de ce chèque n'était pas suffisant pour caractériser une volonté non équivoque de substituer aux emprunteurs la société Enzeau , sans s'expliquer sur le fait qu'au surplus, elle n'avait en aucune façon informé les exposants de la carence de la société Enzeau pendant presque deux ans , la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1271-2° du code civil ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné solidairement Monsieur Marcel X... et Madame Françoise Y... épouse X... à payer à la SA Groupe Sofemo la somme de 6.774,10¿ au titre du solde du crédit assortie des intérêts au taux de 6,56¿ à compter du 29 juillet 2010, outre la somme de 10¿ représentant l'indemnité de 8% augmentée des intérêts au taux légal à compter du jugement
Aux motifs propres que si c'est bien la société Enzeau qui a fait souscrire à Monsieur et Madame X... la convention de crédit, les échéances de remboursement ont été prélevées jusqu'en octobre 2008 inclus par la société Groupe Sofemo ; que le premier juge a justement retenu que les emprunteurs n'établissaient pas l'existence d'un mandat donné par le prêteur au vendeur afin de recevoir le remboursement de sa créance et relevé qu'à aucun moment après la mise en relation avec le prêteur, le vendeur ne s'était immiscé à un titre quelconque dans le remboursement du crédit ; qu'en l'absence de tout mandat effectif ou apparent, il ne peut qu'être constaté que le paiement effectué à l'ordre du vendeur qui n'avait pas qualité pour le recevoir était dépourvu de caractère libératoire ; que la société Groupe Sofemo est donc fondée en sa demande en paiement du solde impayé de crédit ;
Et aux motifs à les supposer adoptés que les époux X... n'établissent pas l'existence d'un mandat conféré par la SA Groupe Sofemo à la SARL Enzeau afin de recevoir le remboursement de sa créance , les défendeurs ne peuvent pas non plus invoquer un mandat apparent, le seul fait qu'ils aient été mis en contact avec la SA Groupe Sofemo avec laquelle la SARL Enzeau était en relation d'affaires ne pouvant être constitutif d'un tel mandat ; que la SARL Enzeau ne s'est pas immiscée à un titre quelconque dans le remboursement du prêt qui s'est opéré par prélèvement sur le compte des époux X... ; il apparaît donc que le versement effectué par Monsieur et Madame X... à la SARL Enzeau afin de rembourser la SA Groupe Sofemo, n'avait aucun fondement sinon un mandat implicite de payer pour leur compte cette société ; si ce mandat n'a pas été exécuté, la seule conséquence est que les époux X... sont en droit de rechercher la responsabilité de la SARL Enzeau qui a été mise en cause sur le plan pénal mais non sur le plan civil, les défendeurs n'ayant pas jugé utile de l'appeler en la cause ; le tribunal ne peut donc que constater que le paiement a été effectué à une personne qui n'avait pas qualité pour le recevoir ;
1°/ Alors que l'existence d'un mandat tacite entre l'organisme de crédit et l'intermédiaire est établie lorsque cet établissement de crédit a accepté sans réserve le versement du solde d'un prêt effectué par l'intermédiaire mandaté par lui pour parvenir à la conclusion du contrat de prêt ; que la cour d'appel qui n'a pas recherché, au regard de la convention définissant les modalités de collaboration entre la SA Sofemo et la société Enzeau, si cette dernière n'avait pas servi d'intermédiaire pour le conclusion du prêt, et si en conséquence il n'existait pas également un mandat tacite pour recevoir par son intermédiaire, le remboursement du prêt souscrit par les exposants, n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1985 du code civil ;
2°/ Alors que lorsque des emprunteurs ont contracté un emprunt pour acquérir un bien et que le vendeur a servi d'intermédiaire auprès de l'établissement de crédit en vertu d'une convention conclue entre eux, le remboursement du solde de ce prêt par un chèque remis à cet intermédiaire qui ne l'a pas transmis au prêteur, est libératoire dès lors que les emprunteurs avaient légitimement pu croire que l'intermédiaire était habilité pour recevoir le paiement ; que la cour d'appel qui s'est bornée à relever que la société Enzeau qui avait fait souscrire la convention de crédit à Monsieur et Madame X... n'était pas intervenue dans le remboursement du crédit, sans rechercher si les époux X... qui avaient acheté un matériel à la société Enzeau, laquelle leur avait procuré un financement auprès de la société Sofemo en vertu d'une convention conclue entre elles, ne pouvaient pas légitimement croire que la société Enzeau était habilitée pour recevoir le paiement n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1198 du code civil.