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30/04/2014 | FRANCE | N°13-13412

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 avril 2014, 13-13412


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 9 janvier 2013), que Mme X... a été engagée le 1er juillet 1995 par le Centre régional de lutte contre le cancer Val d'Aurelle Paul Lamarque ; que par avenant du 1er juillet 2004, elle a été nommée en qualité de radio pharmacienne, après avoir obtenu le 23 juin 2003 le diplôme correspondant ; que cet avenant prévoyait que pour tout litige d'ordre déontologique et portant sur l'exécution du contrat de travail, les parties devraient saisir

le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Hérault en vue d'...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 9 janvier 2013), que Mme X... a été engagée le 1er juillet 1995 par le Centre régional de lutte contre le cancer Val d'Aurelle Paul Lamarque ; que par avenant du 1er juillet 2004, elle a été nommée en qualité de radio pharmacienne, après avoir obtenu le 23 juin 2003 le diplôme correspondant ; que cet avenant prévoyait que pour tout litige d'ordre déontologique et portant sur l'exécution du contrat de travail, les parties devraient saisir le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Hérault en vue d'une tentative de conciliation ; que Mme X... a été licenciée le 21 avril 2009 sans qu'ait été saisi au préalable ce conseil ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que ne commet pas une faute d'ordre déontologique le salarié qui remet en cause les attributions de son supérieur hiérarchique et adopte un comportement agressif à l'encontre de ses collègues, de tels actes caractérisant une violation des obligations professionnelles découlant du contrat de travail ; qu'en l'espèce, il résultait de l'avenant du 1er juillet 2004 au contrat de travail que « pour tout litige éventuel d'ordre déontologique et portant sur l'exécution du présent contrat, les parties s'engagent à faire appel au conseil départemental de l'Ordre des médecins de l'Hérault pour une tentative de conciliation amiable », et la lettre de licenciement reprochait à Mme X... de ne pas avoir respecté les prérogatives de son responsable hiérarchique (le professeur A...), d'avoir organisé une réunion avec des fournisseurs d'activimètres, d'y avoir pris une décision qui relevait de la seule compétence du seul professeur A..., et d'avoir commis plusieurs agressions verbales à l'encontre de ses collègues qui avaient nui au bon fonctionnement de l'établissement ; qu'en attribuant à ces griefs un caractère déontologique en tant qu'ils concernaient « de près ou de loin » les rôles respectifs du radio pharmacien et du médecin chef de service, lorsqu'ils mettaient seulement en cause le bon fonctionnement interne de l'établissement et se rattachaient donc uniquement à l'exécution du contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1232-6, L. 1235-3 du code du travail, ensemble les articles L. 1331-1 et suivants du même code ;
2°/ que le grief pris de l'attitude agressive nuisible au bon fonctionnement du service ne pouvait en aucun cas relever de la compétence du conseil départemental de l'Ordre des médecins ; qu'en disant néanmoins que ces griefs devaient donner lieu à la consultation préalable de cet organisme, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1232-6, L. 1235-3 du code du travail, ensemble les articles L. 1331-1 et suivants du même code ;
3°/ que les juges du fond ne peuvent dénaturer les documents qui leur sont soumis ; qu'en l'espèce, l'avenant du 1er juillet 2004 au contrat de travail prévoyait que « pour tout litige éventuel d'ordre déontologique et portant sur l'exécution du présent contrat, les parties s'engagent à faire appel au conseil départemental de l'Ordre des médecins de l'Hérault pour une tentative de conciliation amiable » ; qu'il en résultait que seuls les litiges d'ordre déontologique, à condition qu'ils portent sur l'exécution du contrat de travail, nécessitaient une consultation préalable du conseil départemental de l'Ordre des médecins, les autres litiges disciplinaires mais dépourvus de tout caractère déontologique échappant à cette formalité ; qu'en affirmant que tout licenciement de nature « disciplinaire » et se rapportant à « l'exécution » du contrat de travail était soumis à l'obligation de consultation préalable du conseil départemental de l'Ordre des médecins, la cour d'appel a dénaturé les énonciations claires et précises de l'avenant précité, en méconnaissance de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, par une interprétation nécessaire de la clause contractuelle, a dit que le litige, qui concernait les rôles respectifs de radio pharmacien et de chef de service dans un service de médecine nucléaire, était d'ordre déontologique au sens des stipulations contractuelles et en a exactement déduit que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse faute pour l'employeur d'avoir saisi au préalable le conseil de l'ordre des médecins de l'Hérault ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le Centre régional de lutte contre le cancer Val d'Aurelle Paul Lamarque aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du Centre régional de lutte contre le cancer Val d'Aurelle Paul Lamarque et le condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente avril deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour le Centre régional de lutte contre le cancer Val d'Aurelle Paul Lamarque
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait condamné le CRLC à payer à Madame X... la somme de 65.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et D'AVOIR condamné le CRCL à rembourser à Pôle Emploi les allocations-chômage perçues par la salariée dans la limite de six mois, soit 12.323,04 euros en application de l'article L. 1235-4 du Code du travail,
AUX MOTIFS QUE Mme Monique X... a travaillé au service du Centre régional de lutte contre le cancer Val D'Aurelle Paul LAMARQUE (le Crlc Val d'Aurelle) ; * En qualité d' « ingénieur biologiste 1er grade, niveau IX» à temps partiel pour une durée déterminée de 12 mois du 01/07/1995 au 30/06/1996 avec reprise d'ancienneté à compter du 01/03/1992" ; *En qualité d' « ingénieur biologiste 1er grade niveau IX» à temps partiel pour une durée déterminée de six mois du 01/07/1996 au 31/12/1996 ; * En qualité d' « ingénieur biologiste statut cadre, niveau XII, indice 591 » pour une durée indéterminée à temps partiel à compter du 01/01/1997 avec reprise d'ancienneté au 01/03/1992" ; * En qualité de «praticien des CLCC avec une ancienneté débutant le 1er juillet 1986 » à partir du 1er janvier 2004 par un avenant du 1er juillet 2004 constatant qu'elle est « en possession de tous les certificats nécessaires à l'exercice de son activité » et qu'elle est « inscrite au tableau de l'ordre des pharmaciens (...) en qualité de radio pharmacienne » après qu'elle ait obtenu le diplôme correspondant le 23/06/2003 ; que cet avenant stipule notamment dans un article 9 «conditions d'exécution du contrat » : Mme Monique X... s'engage à observer toutes les instructions et consignes particulières de travail qui lui seront données et à respecter les dispositions du règlement intérieur du centre Val d'Aurelle dont elle a pris connaissance. Elle devra également les transmettre à ses subordonnés et sera responsable de leur bonne application.( ....) Pour tous litiges éventuels d'ordre déontologique et portant sur l'exécution du présent contrat, les parties s'engagent à faire appel au conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Hérault pour une tentative de conciliation amiable...' ; que convoquée par lettre recommandée AR du 31 mars 2009 à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour cause réelle et sérieuse' fixée au 8 avril 2009, Mme X... était licenciée par lettre recommandée AR du 21 avril 2009 rédigée en ces termes : .../... Le 3 février 2009, lors d'une réunion avec Monsieur le professeur A... au cours de laquelle nous avons abordé vos interventions inadaptées au sein du service et votre refus de respecter les responsabilités du chef de service, détenteur de l'autorisation de l'autorité de sûreté nucléaire concernant les produits radioactifs, nous avons été amenés à constater qu'au-delà de ces faits vous aviez non seulement organisé une réunion à son insu avec des fournisseurs d'activimètres mais également que malgré sa demande de ne plus engager de rencontre avec ces fournisseurs vous aviez malgré tout maintenu cette rencontre en engageant ainsi le service. Le lendemain, 4 février 2009, nous avons été saisi au travers une fiche de signalement d'événements indésirables d'un nouvel incident concernant votre relation avec le manipulateur M. Bernard B... au sujet de l'organisation de la prise en charge des patients (mise à disposition de couches). À cette occasion ladite fiche faisait ressortir votre mauvaise relation avec l'équipe du service (attitude moqueuse sarcastique et ce devant les patients). L'affiche en conclusion mentionne « les conséquences pouvaient être déplorables pour les patients présents car les membres de l'équipe ne sont pas de marbre et pouvaient réagir face à ce harcèlement ». Face à cette situation nous avons bien entendu diligenté une enquête qui devait révéler que cette attitude ne constituait en rien un fait isolé mais un fait permanent et continu à l'encontre de l'ensemble du personnel du service de médecine nucléaire. Les très nombreux témoignages recueillis attestent d'une attitude agressive, insultante, de violence verbale et même de menaces. Vous comprendrez qu'après un tel comportement vous nous avez placé dans l'impossibilité de vous maintenir dans vos fonctions au sein du service de médecine nucléaire comme au sein du CRLC Val d'Aurelle et ce dans l'intérêt des patients et des salariés de votre service. La première présentation de ce courrier formera la date de départ de votre préavis de six mois que nous vous dispensons d'effectuer mais qui sera rémunéré à échéance normale..../....' ; que la consultation d'un organisme chargé, en vertu d'une disposition conventionnelle ou du règlement intérieur de donner un avis sur la mesure disciplinaire envisagée par l'employeur constitue pour le salarié une garantie de fond dont l'absence prive le licenciement de cause réelle et sérieuse ; que le contrat de travail est particulièrement clair en ce qu'il prévoit la saisine préalable à toute sanction disciplinaire du conseil départemental de l'ordre des médecins « pour tout litige éventuel d'ordre déontologique et portant sur l'exécution du présent contrat », afin d'engager « une tentative de conciliation amiable » ; que nonobstant l'absence de précision dans la lettre de convocation à l'entretien préalable sur la nature du licenciement envisagé, les termes de la lettre du 21 avril 2009 ne laisse aucun doute sur le caractère disciplinaire de la rupture à l'initiative de l'employeur ni sur le fait que les griefs se rapportent à « l'exécution » du contrat de travail ; que contrairement à la thèse soutenue par l'employeur, les griefs invoqués se réfèrent bien à « des litiges d'ordre déontologique » dès lors qu'ils concernent de près ou de loin le rôle respectif du radio-pharmacien et du médecin chef de service dans un service de médecine nucléaire et l'intimée est fondée à soutenir que l'ordre des médecins pouvait utilement apprécier l'autonomie et l'indépendance du premier par rapport au second au regard des obligations qui lui sont propres ainsi que leur incidence sur l'organisation et le fonctionnement du service commun ; qu'il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que les premiers juges ont fait une exacte appréciation du préjudice lié à la perte injustifiée de l'emploi en résultant pour la salariée compte tenu de son âge et de son ancienneté (14 ans) dans l'entreprise sur le fondement des dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail et leur décision doit également être confirmée de ce chef ; que Mme X... ne justifie pas du caractère brutal et vexatoire de « la procédure employée lors de son départ » par l'employeur et concentre ses critiques sur la médecine du travail ; qu'il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les dommages intérêts complémentaires réclamés de ce chef ; qu'il y a lieu également de condamner l'employeur à rembourser aux organismes intéressés les allocations chômage éventuellement perçues par le salarié dans la limite de six mois, en application de l'article L 1235-4 du code du travail ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE vu l'article 9 du contrat de travail du 1er juillet 2004 : « pour tout litige d'ordre déontologique et portant sur l'exécution du présent contrat, les parties s'engagent à faire appel au conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Hérault pour une tentative de conciliation amiable ; qu'en l'espèce, aucune tentative de conciliation n'a été demandée, le CRCLC n'a pas respecté les termes du contrat de travail ; que le CRLC a violé les articles 1134 et 1142 du code civil, rendant son licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
1°) ALORS QUE ne commet pas une faute d'ordre déontologique le salarié qui remet en cause les attributions de son supérieur hiérarchique et adopte un comportement agressif à l'encontre de ses collègues, de tels actes caractérisant une violation des obligations professionnelles découlant du contrat de travail ; qu'en l'espèce, il résultait de l'avenant du 1er juillet 2004 au contrat de travail que « pour tout litige éventuel d'ordre déontologique et portant sur l'exécution du présent contrat, les parties s'engagent à faire appel au Conseil départemental de l'Ordre des médecins de l'Hérault pour une tentative de conciliation amiable » (production n° 6), et la lettre de licenciement reprochait à Madame X... de ne pas avoir respecté les prérogatives de son responsable hiérarchique (le Professeur A...), d'avoir organisé une réunion avec des fournisseurs d'activimètres, d'y avoir pris une décision qui relevait de la seule compétence du seul Professeur A..., et d'avoir commis plusieurs agressions verbales à l'encontre de ses collègues qui avaient nui au bon fonctionnement de l'établissement ; qu'en attribuant à ces griefs un caractère déontologique en tant qu'ils concernaient « de près ou de loin » les rôles respectifs du radiopharmacien et du médecin chef de service, lorsqu'ils mettaient seulement en cause le bon fonctionnement interne de l'établissement et se rattachaient donc uniquement à l'exécution du contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1232-6, L. 1235-3 du Code du travail, ensemble les articles L. 1331-1 et suivants du même code ;
2°) ALORS à tout le moins QUE le grief pris de l'attitude agressive nuisible au bon fonctionnement du service ne pouvait en aucun cas relever de la compétence du conseil départemental de l'Ordre des médecins ; qu'en disant néanmoins que ces griefs devaient donner lieu à la consultation préalable de cet organisme, la cour d'appel a violé les articles L.1232-1, L. 1232-6, L. 1235-3 du Code du travail, ensemble les articles L. 1331-1 et suivants du même code ;
3°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les documents qui leur sont soumis ; qu'en l'espèce, l'avenant du 1er juillet 2004 au contrat de travail prévoyait que « pour tout litige éventuel d'ordre déontologique et portant sur l'exécution du présent contrat, les parties s'engagent à faire appel au Conseil départemental de l'Ordre des médecins de l'Hérault pour une tentative de conciliation amiable » (production n° 6) ; qu'il en résultait que seuls les litiges d'ordre déontologique, à condition qu'ils portent sur l'exécution du contrat de travail, nécessitaient une consultation préalable du conseil départemental de l'Ordre des médecins, les autres litiges disciplinaires mais dépourvus de tout caractère déontologique échappant à cette formalité ; qu'en affirmant que tout licenciement de nature « disciplinaire » et se rapportant à « l'exécution » du contrat de travail était soumis à l'obligation de consultation préalable du conseil départemental de l'Ordre des médecins, la cour d'appel a dénaturé les énonciations claires et précises de l'avenant précité, en méconnaissance de l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-13412
Date de la décision : 30/04/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 09 janvier 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 avr. 2014, pourvoi n°13-13412


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.13412
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