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26/03/2014 | FRANCE | N°13-20513

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 mars 2014, 13-20513


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué, que la Fédération générale Force ouvrière construction a saisi le 6 février 2013 le tribunal d'instance d'une demande d'annulation de la désignation de M. X... en qualité de délégué syndical effectuée le 19 décembre 2012 par le syndicat départemental Force ouvrière BTP 13 au sein de la société Eiffage énergie Méditerranée ;
Sur le moyen unique pris en sa deuxième branche :
Vu les articles L. 2143-8 et R. 2143-5 du code du travail ;
Attendu que pour décla

rer cette demande irrecevable, le tribunal énonce qu'il est constant que le requérant,...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué, que la Fédération générale Force ouvrière construction a saisi le 6 février 2013 le tribunal d'instance d'une demande d'annulation de la désignation de M. X... en qualité de délégué syndical effectuée le 19 décembre 2012 par le syndicat départemental Force ouvrière BTP 13 au sein de la société Eiffage énergie Méditerranée ;
Sur le moyen unique pris en sa deuxième branche :
Vu les articles L. 2143-8 et R. 2143-5 du code du travail ;
Attendu que pour déclarer cette demande irrecevable, le tribunal énonce qu'il est constant que le requérant, ni dans sa requête, ni postérieurement, n'a demandé que la société Eiffage énergie Méditerranée soit convoquée à la présente instance, alors que s'agissant d'un contentieux relatif à la désignation d'un délégué syndical au sein de cette société, celle-ci était nécessairement une partie intéressée, même si le contentieux oppose un syndicat départemental à la fédération à laquelle il est affilié, qu'en conséquence l'irrecevabilité de la requête est encourue de ce chef, la société Eiffage énergie Méditerranée n'ayant pas été convoquée et n'ayant pas comparu mais s'étant contentée d'adresser au tribunal un courrier daté du 5 juin 2013 dans lequel elle indiquait s'en rapporter à sa décision ;
Qu'en statuant ainsi, alors même qu'il constatait que la société avait été informée de la présente procédure, le tribunal a violé les textes susvisés ;
Et sur le moyen unique pris en sa troisième branche :
Vu l'article L. 2143-8 du code du travail ;
Attendu que pour déclarer (irrecevable comme) forclose la demande, le tribunal retient qu'il ne saurait résulter de l'article L. 2143-8 du code du travail que le point de départ du délai de forclusion concernant la Fédération pour contester la désignation d'un délégué syndical effectuée par un syndicat qui lui est affilié, à supposer l'existence d'un intérêt à agir en ce qui la concerne, serait l'affichage de la désignation dans les conditions de l'article L. 2143-7 du code du travail, alors que l'affichage sur le panneau réservé aux communications syndicales, qui ne comporte que le nom du délégué, a pour finalité de constituer un mode d'information interne à l'entreprise destiné à ses salariés et aux syndicats qui y sont représentés, que, dans ces conditions, à supposer la Fédération recevable à agir à l'encontre de la désignation d'un délégué syndical par un des syndicats qui lui est affilié, le point de départ du délai de forclusion la concernant ne peut être différent de celui de l'employeur, alors qu'il s'agit d'un acteur extérieur à l'entreprise dont l'information, à ce titre, n'est prévue par aucun texte et que le courrier reçu par l'employeur comporte tant la mention du périmètre de la désignation que la fonction exacte du délégué, et qu'en conséquence, la société Eiffage énergie Méditerranée ayant été informée de la désignation le 27 décembre 2012, la requête déposée au greffe le 6 février 2013 est atteinte de forclusion ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il retenait que la preuve de l'affichage de la désignation litigieuse n'était pas rapportée et sans constater que la Fédération avait été informée de cette désignation à la même date que l'employeur, le tribunal a violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen unique pris ses quatrième et cinquième branches :
Vu les articles L. 2132-1, L. 2132-3 et L. 2133-3 du code du travail ;
Attendu que pour déclarer la demande de la Fédération irrecevable, le tribunal énonce que l'intérêt à agir d'une union de syndicats se confond avec celui du syndicat membre, que dans le cas présent, la Fédération a engagé une action pour faire annuler la désignation d'un délégué syndical par un syndicat membre sur le fondement de la violation du périmètre de désignation, motif dont la mise en oeuvre procédurale relève essentiellement de l'appréciation de l'employeur qui a renoncé, en l'espèce, à le faire valoir, qu'il est d'évidence que, par cette action le requérant n'a pas agi en vue de la défense de l'intérêt collectif de son adhérent, mais a recherché un autre but qui ne peut être justifié par ses statuts, puisqu'il est manifestement contraire à la finalité d'une union de syndicats ;
Qu'en statuant ainsi, alors, d'abord, que l'intérêt à agir d'une union de syndicats ne se confond pas avec l'intérêt à agir des syndicats qui y sont affiliés, et, ensuite, que la régularité de la désignation d'un représentant syndical mettant en jeu l'intérêt collectif de la profession, tout syndicat ou union de syndicats peut agir en annulation de cette désignation, le tribunal a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 20 juin 2013, entre les parties, par le tribunal d'instance de Marseille ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance d'Aubagne ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mars deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la Fédération générale Force ouvrière construction.
LE MOYEN FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR déclaré irrecevable la requête déposée par la Fédération Générale Force Ouvrière Construction aux fins d'annulation de la désignation de Monsieur Ferdinand X... en qualité de délégué syndical par le syndicat départemental FO BTP 13 ;
AUX MOTIFS QUE « l'irrecevabilité de la requête est encourue à plusieurs titres. En premier lieu il résulte, notamment de l'article R. 2143-5 du Code du travail, que toutes les parties intéressées à l'instance de contestation relative à la désignation d'un délégué syndical doivent faire l'objet d'un avertissement donné trois jours avant l'audience. Il appartient au requérant de fournir au greffe la liste des parties à convoquer. Il est constant que le requérant, ni dans sa requête, ni postérieurement n'a demandé que la société EIFFAGE ENERGIE MEDITERRANEE ne soit convoquée à la présente instance, alors que s'agissant d'un contentieux relatif à la désignation d'un délégué syndical au sein de cette société, celle-ci était nécessairement une partie intéressée, même si le contentieux oppose un syndicat départemental à la fédération à laquelle il est affilié. En conséquence, l'irrecevabilité de la requête est encourue de ce seul chef, la société EIFFAGE ENERGIE MEDITERRANEE n'ayant pas été convoquée et n'ayant pas comparu mais s'étant contentée d'adresser au tribunal un courrier daté du 5 juin 2013 dans lequel elle indiquait s'en rapporter à sa décision. En deuxième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 2143-8 du code du travail que le recours à l'encontre de la désignation des délégués syndicaux n'est recevable que s'il est introduit dans les quinze jours suivant l'accomplissement des formalités prévues au premier alinéa de l'article L. 2143-7. L'affichage, sur le panneau réservé aux communications syndicales, du nom du délégué syndical désigné constitue le point de départ du délai de forclusion tant à l'égard des salariés qu'à l'égard des syndicats. Dans le cas présent, la preuve de cet affichage et de sa date n'est pas rapportée par les défendeurs qui soulèvent la forclusion du demandeur. Ils établissent seulement la date de la communication à l'employeur de cette désignation, soit le 27 décembre 2012, et la convocation de Monsieur X... à une négociation relative à un accord de participation par la société EIFFAGE ENERGIE MEDITERRANEE, selon courrier daté du 21 janvier 2013 doublé d'un courriel, lequel n'est pas produit mais seulement mentionné sur la lettre produite. Il ne saurait cependant résulter des dispositions susvisées, comme le soutient la Fédération Générale Force Ouvrière Construction, que le point de départ du délai de forclusion la concernant pour contester la désignation d'un délégué syndical effectuée par un syndicat qui lui est affilié, à supposer l'existence d'un intérêt à agir en ce qui la concerne, serait l'affichage sur le panneau réservé aux communications syndicales, qui ne comporte que le nom du délégué, a pour finalité de constituer un mode d'information interne à l'entreprise destiné à ses salariés et aux syndicats qui y sont représentés. Dans ces conditions, à supposer la fédération recevable à agir à l'encontre de la désignation d'un délégué syndical par un des syndicats qui lui est affilié, le point de départ du délai de forclusion la concernant ne peut être différent de celui de l'employeur, alors qu'il s'agit d'un acteur extérieur à l'entreprise dont l'information, à ce titre, n'est prévue par aucun texte et que le courrier reçu par l'employeur comporte tant la mention du périmètre de désignation que la fonction exacte du délégué. En conséquence, la société EIFFAGE ENERGIE MEDITERRANEE ayant été informée de la désignation le 27 décembre 2012, la requête déposée au greffe le 6 février 2013 est atteinte de forclusion. Il résulte, en troisième lieu, des dispositions de l'article L. 2133-3 du code du travail que les unions de syndicats jouissent de tous les droits conférés aux syndicats professionnels, ce qui leur permet, notamment, d'introduire une action en justice pour défendre l'intérêt collectif de l'un des groupes professionnels qu'elles représentent, conformément à leurs statuts. Dès lors, l'intérêt à agir de l'union se confond avec celui du syndicat membre. Dans le cas présent, la Fédération Générale Force Ouvrière Construction a engagé une action pour faire annuler la désignation d'un délégué syndical par un syndicat membre sur le fondement de la violation du périmètre de désignation, motif dont la mise en oeuvre procédurale relève essentiellement de l'appréciation de l'employeur qui a renoncé, en l'espèce, à le faire valoir. Il est d'évidence que par cette action le requérant n'a pas agi en vue de la défense de l'intérêt collectif de son adhérent, mais en recherchant un autre but qui ne peut être justifié par ses statuts, qu'il n'a du reste pas produits, puisqu'il est manifestement contraire à la finalité d'une union de syndicats. Dans ces conditions, la Fédération Générale Force Ouvrière Construction est dépourvue d'un intérêt légitime à agir à l'encontre du syndicat départemental FO BTP 13. Elle est par conséquent irrecevable.» ;
ALORS d'une part QUE l'obligation d'avertir les parties intéressées à un litige relatif à la désignation d'un délégué syndical appartient au Tribunal par l'intermédiaire de son greffe ; qu'il en découle qu'en l'espèce, constatant que la société EIFFAGE ENERGIE MEDITERRANEE, partie intéressée au litige, n'avait pas été convoquée, il appartenait au juge de renvoyer la cause à une audience ultérieure afin de régulariser la procédure à l'égard de cette société ; que dès lors, en jugeant irrecevable la requête de la Fédération Générale Force Ouvrière Construction au motif qu'elle ne mentionnait pas la société EIFFAGE ENERGIE MEDITERRANEE au titre des personnes à convoquer, le Tribunal a violé les articles L. 2143-8 et R. 2143-5 du Code du travail ;
ALORS d'autre part QUE l'intervention volontaire d'une partie intéressée à un litige relatif à la désignation d'un délégué syndical qui n'avait pas été convoquée emporte régularisation de la procédure à son égard ; que, dès lors, en jugeant irrecevable la requête déposée par la Fédération Générale Force Ouvrière Construction au motif qu'elle ne mentionnait pas la société EIFFAGE ENERGIE MEDITERRANEE au nombre des personnes à convoquer alors qu'il constatait que la société était intervenue volontairement à l'instance en adressant un courrier au Tribunal par lequel elle indiquait s'en rapporter à sa décision, le Tribunal a à nouveau violé les articles L. 2143-8 et R. 2143-5 du Code du travail ensemble les articles 66 et 126 du Code de procédure civile ;
ALORS encore QUE le délai de quinze jours ouvert par l'article L. 2143-8 du Code du travail pour contester la désignation d'un délégué syndical ne court, s'agissant des syndicats et des salariés de l'entreprise, qu'à compter du jour où le nom du délégué syndical a été porté à leur connaissance par voie d'affichage sur les panneaux réservés aux communications syndicales ou par tout autre moyen ; qu'en décidant en l'espèce que le point de départ de ce délai à l'égard de la Fédération Générale Force Ouvrière Construction courait à compter du jour où la société EIFFAGE ENERGIE MEDITERRANEE avait été informée de la désignation de Monsieur X... en qualité de délégué syndical sans constater que la Fédération avait pu avoir connaissance de cette désignation à cette date, le Tribunal a violé les dispositions de l'article L. 2143-8 du Code du travail ;
ALORS par ailleurs QUE les unions de syndicats jouissent d'une personnalité civile qui leur est propre, distincte de celle de chacun des syndicats qui les composent ; que, jouissant de tous les droits conférés aux syndicats professionnels par le Code du travail, elles disposent d'un intérêt à agir en justice, distinct de celui de leurs syndicats membres ; qu'en jugeant, en l'espèce, que l'intérêt à agir en justice d'une union de syndicats se confondait avec celui de ses membres pour en déduire que la Fédération Générale Force Ouvrière Construction était dépourvue d'intérêt légitime à agir à l'encontre du syndicat départemental FO BTP 13, adhérent de la Fédération, le Tribunal a violé les dispositions des articles L. 2132-1, L. 2132-3 et L. 2133-3 du Code du travail ;
ALORS en outre QUE la régularité de la désignation d'un délégué syndical met en jeu l'intérêt collectif de la profession si bien que tout syndicat peut agir en annulation de cette désignation ; que cette prérogative appartient également aux unions de syndicats, lesquelles jouissent de tous les droits conférés aux syndicats professionnels par le Code du travail ; qu'en l'espèce, la Fédération Générale Force Ouvrière Construction avait donc intérêt à solliciter l'annulation de la désignation de Monsieur X... en qualité de délégué syndical au motif que cette désignation n'était pas conforme aux dispositions légales applicables ; qu'en jugeant néanmoins cette action irrecevable au motif que la fédération n'avait pas agi en vue de la défense de l'intérêt collectif mais en recherchant un but autre manifestement contraire à la finalité d'une union de syndicats, le Tribunal a violé les dispositions des articles L. 2132-3 et L. 2133-3 du Code du travail ;
ALORS encore QUE les juges sont tenus de ne pas dénaturer les éléments de la cause ; qu'en l'espèce, le bordereau de communication de pièces numéro 2 de la Fédération Générale Force Ouvrière Construction annexé à ses conclusions mentionnait au titre des pièces communiquées ses statuts en date du 31 mai 2012 lesquels étaient effectivement produits sous le numéro 19 ; qu'en relevant néanmoins que la Fédération n'avait pas produit ses statuts, le Tribunal a dénaturé le bordereau de communication de pièces susvisé ainsi que lesdits statuts en violation des dispositions de l'article 1134 du Code civil ensemble du principe selon lequel les juges sont tenus de ne pas dénaturer les éléments de la cause ;
ALORS enfin et en toute hypothèse QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il en découle que, s'il constate l'absence au dossier de l'une des parties d'une pièce qui figure au bordereau de communication de pièces annexé à ses dernières conclusions et dont la communication n'a pas été contestée, il lui appartient d'inviter les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de cette pièce ; qu'en l'espèce, le Tribunal qui a constaté que la Fédération Générale Force Ouvrière Construction ne produisait pas ses statuts qui figuraient pourtant sur le bordereau de communication de pièces annexé à ses dernières conclusions sans pour autant inviter les parties à s'expliquer sur cette absence, a violé les dispositions de l'article 16 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-20513
Date de la décision : 26/03/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Marseille, 20 juin 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 mar. 2014, pourvoi n°13-20513


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.20513
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