La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/03/2014 | FRANCE | N°12-28427

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 mars 2014, 12-28427


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., salarié de la société Paprec réseau, a été licencié pour faute grave le 15 juin 2010, après autorisation de l'inspecteur du travail sollicitée en raison de sa qualité de membre suppléant du comité d'entreprise ; que contestant son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que pour dire le licenciement j

ustifié par une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que si M. X... reconna...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., salarié de la société Paprec réseau, a été licencié pour faute grave le 15 juin 2010, après autorisation de l'inspecteur du travail sollicitée en raison de sa qualité de membre suppléant du comité d'entreprise ; que contestant son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que pour dire le licenciement justifié par une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que si M. X... reconnaît avoir accepté que le canapé dont il a fait l'acquisition soit financé par l'un de ses fournisseurs, les éléments produits par l'employeur ne permettent pas d'acquérir la certitude d'une contrepartie, qu'en définitive, le fait d'accepter personnellement un cadeau d'un montant non négligeable d'un fournisseur constitue une faute justifiant le licenciement du salarié bénéficiaire d'une subdélégation de pouvoir lui permettant notamment d'engager les dépenses d'entretien et de maintenance jusqu'à 5 000 euros annuels, en ce que les règles présidant au choix du fournisseur ne pouvaient qu'être perturbées par ce type de pratique, et ce nécessairement au préjudice de son employeur dont l'image est en outre ternie, que néanmoins, au regard du caractère unique du fait reproché, de l'absence de démonstration d'un chantage ou d'une extorsion et de la longue carrière du salarié sanctionnée par deux promotions significatives, il n'apparaît pas que son maintien dans l'entreprise était impossible ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'inspecteur du travail avait autorisé le licenciement du salarié après avoir constaté que la matérialité des faits reprochés par l'employeur, consistant non à avoir accepté un cadeau mais à avoir sollicité un fournisseur pour obtenir un cadeau, était établie et que, s'il lui appartenait d'en apprécier la gravité, la faute retenue par l'autorité administrative s'imposait à elle, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 octobre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne M. X... au dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mars deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils, pour la société Paprec réseau.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. Patrice X... était justifié par une cause réelle et sérieuse, mais non par la commission d'une faute grave et d'avoir, en conséquence, condamné la société Paprec Réseau à lui payer les sommes de 10.174,98 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 9.496,32 € au titre de l'indemnité de licenciement ;
ALORS QUE l'article L. 1232-1 du code du travail dispose notamment que tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse. En droit, la faute grave telle que visée par l'article L. 1234-1 du code du travail est cette qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. La charge de sa preuve pèse sur l'employeur. En l'espèce, M. X... reconnaît avoir accepté que le canapé dont il a fait l'acquisition soit financé par l'un de ses fournisseurs. Le fait que ce financement soit intervenu a priori afin qu'il soit en mesure de régler la société But de son achat, ou a posteriori par le financement du crédit personnel souscrit à cette fin est, sur ce point, parfaitement indifférent. Pour démontrer que la société Multi Services du Cailly a également financé l'achat d'un GPS et d'un détecteur de radar, la société Paprec Réseau ne produit pas d'autre document que le courrier de M. Y.... Or, en premier lieu, cette lettre ne mentionne pas que son auteur a connaissance de sa possible production en justice et des sanctions qu'il encourt en cas de fausse déclaration, et ne revêt donc pas la même force probante que les attestations conformes aux prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile. Ensuite, M. Y... indique, dans une syntaxe hésitante et de manière imprécise « Ensuite il à suivi 1 Coyot¿ 1 GPS ». Cette mention est donc insuffisante pour accabler avec certitude M. X... s'agissant de ces deux objets. De même, le seul élément accréditant la thèse de la société Paprec Réseau quant à la sollicitation par M. X... de cadeaux en échange de commandes réside dans la phrase suivante dans le même courrier de M. Y... : « Cette personne me fait comprendre indirectement que pour du travail il fallait donner suite. Outre les réserves déjà exprimées ci-avant, le terme « indirectement » ne permet pas d'acquérir la certitude que cette contrepartie a été énoncée clairement et expressément. En définitive, le fait d'accepter personnellement un cadeau d'un montant non négligeable d'un fournisseur constitue une faute justifiant le licenciement du salarié bénéficiaire d'une subdélégation de pouvoir lui permettant notamment d'engager les dépenses d'entretien et de maintenance jusqu'à 5.000 € annuels, en ce que les règles présidant au choix du fournisseur ne pouvaient qu'être perturbées par ce type de pratique, et ce nécessairement au préjudice de son employeur dont l'image est en outre ternie. M. X... ne démontre pas qu'il s'agirait d'une pratique tolérée au sein de la société Paprec Réseau, aucune conséquence ne pouvant être tirée de l'ordre de réparation de la société Super Pneus au nom de la société Paprec Normandie. Néanmoins, au regard du caractère unique du fait reproché, de l'absence de démonstration d'un chantage ou d'une extorsion et de la longue carrière de M. X... sanctionnée par deux promotions significatives, il n'apparaît pas que son maintien dans l'entreprise était impossible. Le jugement déféré sera donc réformé en ce qu'il a validé le licenciement de M. X... pour faute grave. Il sera fait droit aux demandes qu'il a formées aux titres de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité de licenciement, qui ne sont pas contestées en leur montant ;
1) ALORS QUE le juge judiciaire doit se fonder sur les fautes retenues par l'autorité administrative, qui a autorisé le licenciement disciplinaire d'un représentant du personnel, pour apprécier si le salarié protégé a commis une faute grave ; qu'en l'espèce, dans sa décision du 8 juin 2010, l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de M. Patrice X..., membre suppléant du comité d'entreprise, en retenant « qu'il est reproché à M. X... de s'être fait offrir un canapé d'une valeur de 868 euros par un fournisseur de la société Paprec », que « la matérialité de ce fait est établie » et que « ce fait fautif présente un degré de gravité suffisant pour justifier un licenciement » ; que l'inspecteur du travail a donc estimé que M. Patrice X... avait sollicité un fournisseur pour obtenir un cadeau, et non pas que c'était le fournisseur qui avait proposé un cadeau au salarié ; qu'il s'ensuit qu'en retenant que le salarié avait seulement accepté un cadeau de la part d'un fournisseur, pour considérer qu'il n'avait pas commis de faute grave, sans tenir compte de la décision de l'inspecteur du travail et, dès lors, sans examiner la faute tenue par l'autorité administrative, la cour d'appel a violé l'article L. 2411-8 du code du travail, ainsi que le articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du même code.
2) ALORS QU'en tout état de cause, le fait pour M. Patrice X... d'avoir accepté personnellement un cadeau d'un montant non négligeable d'un fournisseur constituait une faute grave, quelle que soit son ancienneté, compte tenu de la nature de la faute commise, des fonctions exercées par le salarié et de l'incidence de son comportement sur le fonctionnement de l'entreprise et son image, la cour d'appel ayant constaté que le salarié bénéficiait d'une subdélégation de pouvoirs lui permettant notamment d'engager les dépenses d'entretien et de maintenance jusqu'à 5.000 ¿ annuels et que « les règles présidant au choix du fournisseur ne pouvaient qu'être perturbées par ce type de pratique, et ce nécessairement au préjudice de son employeur dont l'image est en outre ternie » ; qu'en considérant pourtant que le salarié n'avait pas commis de faute grave, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquence légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-28427
Date de la décision : 26/03/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 02 octobre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 mar. 2014, pourvoi n°12-28427


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.28427
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award