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18/03/2014 | FRANCE | N°12-28437

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 mars 2014, 12-28437


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 18 septembre 2012), que Mme X..., engagée à compter du 3 avril 2006 par la société THK Manufacturing of Europe en qualité d'opératrice, a fait l'objet le 17 février 2009 d'un avertissement prononcé pour des non-conformités de sa production, le 10 juin 2009 d'une mise à pied de trois jours pour non-conformités et le 16 novembre 2009 d'un avertissement pour divers manquements professionnels ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'ann

uler les sanctions des 17 février, 10 juin et 16 novembre 2009, alors, s...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 18 septembre 2012), que Mme X..., engagée à compter du 3 avril 2006 par la société THK Manufacturing of Europe en qualité d'opératrice, a fait l'objet le 17 février 2009 d'un avertissement prononcé pour des non-conformités de sa production, le 10 juin 2009 d'une mise à pied de trois jours pour non-conformités et le 16 novembre 2009 d'un avertissement pour divers manquements professionnels ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'annuler les sanctions des 17 février, 10 juin et 16 novembre 2009, alors, selon le moyen :
1°/ que s'agissant de l'avertissement du 17 février 2009, les négligences répétées d'un salarié dans l'exécution des tâches relevant de son contrat de travail ayant des conséquences préjudiciables pour son employeur constituent une faute ; qu'en l'espèce, pour annuler l'avertissement du 17 février 2009 faisant grief à la salariée de se montrer négligente dans la vérification des ordres de fabrication, qui devait être systématique, bien qu'il lui ait été déjà demandé, à la suite d'un entretien d'amélioration, notamment, « de faire preuve de plus de rigueur, d'attention et de concentration à (son) poste de travail, ainsi que de respecter les modes opératoires de contrôle », ce manque de rigueur dans les opérations de vérification ayant entraîné de nombreuses non-conformités, la cour d'appel a relevé que ces non-conformités résultaient des malfaçons des produits ; qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1333-1 et L. 1333-2 du code du travail ;
2°/ que s'agissant de la mise à pied du 10 juin 2009, les négligences répétées d'un salarié dans l'exécution des tâches relevant de son contrat de travail ayant des conséquences préjudiciables pour son employeur constituent une faute ; qu'en l'espèce, pour annuler la mise à pied du 10 juin 2009 faisant grief à la salariée d'avoir à nouveau fait montre de négligences dans la vérification des ordres de fabrication, ce manque de rigueur ayant entraîné de nombreuses non-conformités, la cour d'appel a relevé que ces non-conformités résultaient des malfaçons des produits ; qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant, après avoir constaté qu'alors que la société avait rappelé à la salariée à plusieurs reprises qu'il lui incombait de procéder à une vérification systématique des ordres de fabrication et l'avait déjà sanctionnée à ce titre par un avertissement du 17 février 2009 en raison de la perte de temps et du surcoût qu'elles représentaient pour l'entreprise, de nombreuses non-conformités concernant des ordres de fabrication avaient encore été constatées, la cour d'appel a derechef privé sa décision au regard des articles L. 1333-1 et L. 1333-2 du code du travail ;
3°/ que s'agissant de l'avertissement du 16 novembre 2009, les négligences répétées d'un salarié dans l'exécution des tâches relevant de son contrat de travail ayant des conséquences préjudiciables pour son employeur constituent une faute ; qu'en l'espèce, pour annuler l'avertissement du 16 novembre 2008 faisant grief à la salariée d'avoir une nouvelle fois fait montre de négligence dans la vérification des ordres de fabrication, ce manque de rigueur ayant entraîné de nombreuses non-conformités, la cour d'appel a relevé que le défaut de rigueur reproché à la salariée ne peut se déduire du seul constat qu'un objet fabriqué a été signalé comme non-conforme ; qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant, après avoir constaté qu'il n'était nullement contesté qu'alors que la salariée avait déjà été sanctionnée à deux reprises pour des négligences répétées dans le contrôle des ordres de fabrication, une non-conformité avait encore été relevée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1333-1 et L. 1333-2 du code du travail ;
4°/ que s'agissant de l'avertissement du 16 novembre 2009, le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, pour annuler l'avertissement du 16 novembre 2009 en ce qu'il faisait également grief à la salariée d'avoir manqué de respect vis-à-vis de son supérieur hiérarchique (team leader), la cour d'appel a relevé « que la société intimée produit l'attestation par laquelle sa salariée Sophie Y..., occupée aux fonctions de " team leader " sans autre précision, a rapporté qu'elle avait voulu faire constater à la salariée le manque d'une bille sur une pièce, que cette dernière en avait dégagé une autre et qu'elle avait refusé de la remettre ; mais cette seule attestation ne désigne pas Mme Sophie Y... comme ayant autorité sur la salariée appelante » ; qu'en se prononçant de la sorte, après avoir indiqué qu'« à l'audience, la salariée a fait oralement développer ses conclusions d'appel parvenues le 5 mai 2011 », et que celles-ci ne comportent aucun moyen selon lequel Mme Y... n'aurait pas eu autorité sur la salariée, la cour d'appel, qui a soulevé ce moyen d'office, sans avoir préalablement recueilli les observations des parties à cet égard, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
5°/ que s'agissant de l'avertissement du 16 novembre 2009, est fautive l'insubordination et le comportement irrespectueux d'un salarié à l'égard de son chef d'équipe ; qu'en l'espèce l'avertissement du 16 novembre 2009 a été prononcé aux motifs, notamment, que « en date du 15 octobre 2009, l'inspection finale a détecté un manque d'une bille sur un bloc HSR30. Il s'agit de l'ordre de fabrication M887961 que vous avez traité. Ayant constaté cette non-conformité, Mme Y..., team leader, vous a demandé d'ajouter la bille manquante. Plutôt que d'obtempérer, vous avez pris le bloc et vous avez forcé avec votre tourne-vis au niveau de la upper plate dans le but de retirer une bille. Mme Y... vous a demandé de remettre la bille que vous veniez d'enlever volontairement. Vous avez refusé et vous avez déclaré « comme ça il en manque une ». Il s'agit d'un grave manquement à votre contrat de travail qui stipule bien que vous exercez vos fonctions « sous l'autorité et dans le cadre des instructions données par votre supérieur hiérarchique ». En faisant exactement le contraire de la consigne de votre team leader, vous lui avez manqué de respect, ce que nous ne pouvons pas tolérer. Un tel comportement est inacceptable » ; que pour l'annuler, la cour d'appel a relevé « que la société intimée produit l'attestation par laquelle sa salariée Sophie Y..., occupée aux fonctions de " team leader " sans autre précision, a rapporté qu'elle avait voulu faire constater à la salariée le manque d'une bille sur une pièce, que cette dernière en avait dégagé une autre et qu'elle avait refusé de la remettre ; mais il ne s'en déduit ni manque de respect ni même manquement à une consigne claire » ; qu'en se déterminant de la sorte, cependant que dans cette attestation, comme dans la lettre d'avertissement, il était indiqué que la salariée, à laquelle il avait été demandé d'ajouter une bille manquante sur un bloc, à l'origine d'une non conformité de celui-ci, dont elle avait traité l'ordre de fabrication, non seulement n'avait pas obtempéré mais avait forcé de bloc avec un tournevis, retiré une bille de celui-ci et, refusant de l'y remettre, déclaré « comme ça il en manque une », sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, cet état de fait n'étant pas contesté, si ce comportement n'était pas fautif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1333-1 et L. 1333-2 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que la procédure prud'homale étant orale, les moyens retenus par les juges du fond sont présumés, sauf preuve contraire, non rapportée en l'espèce, avoir été débattus contradictoirement devant eux ;
Et attendu, ensuite, qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve produits, la cour d'appel a constaté d'une part qu'il n'était pas démontré que les malfaçons des pièces étaient imputables à la salariée et que le nombre de non-conformités excédait ce qui était habituellement observé sur un poste de travail similaire et, d'autre part, qu'il n'était établi, par la seule attestation d'une salariée exerçant les fonctions de " team leader ", aucun manque de respect ou refus de répondre à une consigne claire de la part de la salariée ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en ses première, seconde et troisième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer des dommages-intérêts pour exercice abusif de son pouvoir disciplinaire, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir du chef de l'arrêt attaqué ayant annulé les sanctions disciplinaires prononcées les 17 février, 10 juin et 16 novembre 2009 entraînera, par voie de conséquence nécessaire, la cassation de l'arrêt en ce qu'il a condamné la société à verser à la salariée la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exercice abusif de son pouvoir disciplinaire ;
2°/ que l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties telles qu'elles sont énoncées dans l'acte introductif d'instance et dans leurs écritures ; qu'en l'espèce, la cour d'appel indique qu'« à l'audience, la salariée fait oralement développer ses conclusions d'appel parvenues le 5 mai 2011 » ; que ces conclusions sont rédigées dans les termes suivants : « sur les dommages-intérêts : compte tenu de l'attitude manifestement discriminatoire commise à l'encontre de la salariée, et notamment en raison de son appartenance syndicale, la société devra verser à la salariée la somme de 10 000 euros au titre de dommages-intérêts en raison de ses agissements illicites et manifestement abusifs » ; qu'au soutien de sa demande indemnitaire, la salariée invoquait ainsi exclusivement une discrimination à raison de son appartenance syndicale ; qu'en décidant, après avoir constaté qu'il ne pouvait être fait droit à sa prétention sur ce fondement, de lui allouer des dommages et intérêts pour exercice abusif du pouvoir disciplinaire, en ce que « les sanctions que la société intimée a multipliées, qui s'avèrent toutes injustifiées et qui doivent être annulées, révèlent un abus dans l'exercice du pouvoir disciplinaire de l'employeur qui engage sa responsabilité pour le préjudice que la salariée en a nécessairement éprouvé », la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
3°/ que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'à supposer que la cour d'appel ait disposé d'un tel pouvoir, en retenant, d'office, et sans provoquer préalablement les observations des parties à cet égard, que s'il ne pouvait être fait droit à sa prétention sur le fondement de la discrimination, il convenait, en revanche, de lui allouer des dommages et intérêts pour exercice abusif du pouvoir disciplinaire, en ce que « les sanctions que la société intimée a multipliées, qui s'avèrent toutes injustifiées et qui doivent être annulées, révèlent un abus dans l'exercice du pouvoir disciplinaire de l'employeur qui engage sa responsabilité pour le préjudice que la salariée en a nécessairement éprouvé », la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, que le rejet à intervenir du premier moyen rend sans objet le second moyen pris en sa première branche ;
Et attendu, ensuite, que la cour d'appel a, sans modifier l'objet du litige ni violer le principe de la contradiction, statué sur les demandes indemnitaires présentées par la salariée au titre d'une discrimination syndicale et des agissements abusifs de l'employeur dans l'exercice de son pouvoir disciplinaire ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société THK Manufacturing of Europe aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société THK Manufacturing of Europe

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR annulé les sanctions disciplinaires prononcées le 17 février, le 10 juin et le 16 novembre 2009 et d'AVOIR, en conséquence, condamné la Société THK MANUFACTURING à verser à Melle X... la somme de 202, 01 euros en rémunération de la mise à pied prononcée le 10 juin 2009, outre les congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE : « Sur les sanctions disciplinaires. En application de l'article L 1333-1 du code du travail, il revient à la Cour d'apprécier la validité des sanctions contestées en examinant si les faits reprochés les justifiaient, et ce au vu des éléments que l'employeur présente comme étant ceux retenus à l'appui de ses décisions d'une part, et au vu des éléments que la salariée produit au soutien de ses allégations d'autre part. En premier lieu, la salariée appelante conteste l'avertissement qui lui a été notifié par lettre recommandée du 17 février 2009 au motif énoncé de " nombreuses non-conformités concernant des ordres de fabrication (...) traités ". Dans la même lettre, la société intimée a commémoré une série de non-conformités constatées depuis le 20 novembre 2008. Elle a rappelé que des erreurs avaient déjà été reprochées lors d'un entretien d'amélioration, que la salariée était tenue de systématiquement procéder à une dernière vérification des ordres de fabrication, et que les retouches nécessaires occasionnent à l'entreprise une perte de temps et un surcoût. Mais la salariée appelante soutient que les non-conformités trouvent leur origine dans les malfaçons des pièces produites par les fournisseurs, et qu'elles ne lui sont pas imputables. En tout cas, il n'est pas rapporté que le nombre de non-conformités excédait sensiblement ce qui pouvait être habituellement observé sur un poste de travail similaire. Rien ne laisse apparaître la négligence que la société intimée a implicitement imputée à Mme Aurélie X.... Le seul constat de l'existence de non-conformités dans la production ne suffit pas à caractériser un comportement fautif de la salariée. En l'absence de faute, l'avertissement s'avère injustifié et il doit donc être annulé. En deuxième lieu, la salariée appelante conteste la " mise en garde " que son employeur lui a adressée par lettre recommandée du 24 avril 2009 pour n'avoir pas repris son poste de travail à l'issue de la réunion du comité d'entreprise du 21 avril 2009, en ajoutant : " nous considérons votre absence de 16h00 à 16H30 comme une absence non autorisée qui sera déduite de votre fiche de paie de mai 2009 ". La société intimée prétend vainement n'avoir pas voulu sanctionner la salariée. Dès lors que la mise en garde a été adressée par écrit à la suite d'un agissement de la salariée que l'employeur considérait comme fautif et qu'elle était de nature à affecter la rémunération, elle constitue une sanction disciplinaire par application de l'article L 1331-1 du code du travail, nonobstant la terminologie employée. La société intimée ne produit aux débats aucun élément à l'appui de la sanction qu'elle a ainsi prononcée, pas même le procès-verbal du comité d'entreprise, tandis que la salariée soutient que la réunion n'était pas terminée, même si l'employeur avait cru devoir la quitter, de sorte que rien ne caractérise l'absence reprochée. Au surplus, la société intimée a violé les dispositions de l'article L 1331-2 du code du travail qui interdisent toute sanction pécuniaire. En tout cas, la lettre de mise en garde du 24 avril 2009 doit aussi être annulée. En troisième lieu, la salariée conteste la mise à pied que son employeur lui a infligée par lettre recommandée du 10 juin 2009 au motif énoncé de " nombreuses non-conformités ". Dans la lettre de sanction, la société intimée a commémoré une série de non-conformités constatées depuis le 16 février 2009. Elle a rappelé que des erreurs avaient été précédemment reprochées et sanctionnées, que la salariée était tenue de procéder systématiquement à une dernière vérification des ordres de fabrication, et que les retouches nécessaires occasionnent à l'entreprise une perte de temps et un surcoût. Elle a conclu en ces termes : " vous auriez dû faire preuve de plus de rigueur dans votre travail, ces erreurs auraient ainsi été évitées ". Mais la salariée appelante maintient que la persistance des non-conformités était causée par les malfaçons des pièces produites par les fournisseurs, et qu'elles ne lui sont pas imputables. En tout cas, il n'est pas rapporté que les non-conformités relevées aient excédé, par leur gravité ou leur fréquence, ce qui est habituellement observé sur un poste de travail similaire. Du seul constat de l'existence de non-conformités dans la production, il ne peut se déduire le manque de rigueur que la société intimée a expressément imputé à la salariée. En l'absence de faute caractérisée, la sanction de mise à pied doit être également annulée. En quatrième et dernier lieu, la salariée appelante conteste l'avertissement que son employeur lui a encore notifié par lettre recommandée du 16 novembre 2009 aux motifs énoncés :- du non-respect des cadences de la production demandée, et de mauvaise volonté délibérée ;- du défaut de mention de l'écart de production sur les comptes-rendus journaliers ;- d'une non-conformité le 9 octobre 2009 ;- d'un manquement à la consigne et d'un manque de respect à l'égard du " team leader " Y... pour avoir refusé d'ajouter une bille à un bloc " HSR30 ", pour avoir volontairement retiré une bille et pour avoir déclaré : " comme ça, il en manque une " ;- d'un " comportement inadmissible " pour avoir, le 21 octobre 2009, volontairement caché un ordre de fabrication à la vue de la supérieure hiérarchique Z... qui devait contrôler sa production ;- d'un faux pour avoir, le même jour, écrit mensongèrement sur l'ordre de fabrication que le contrôle avait été effectué. Sur le premier grief de non-respect des cadences de production, la société intimée a relevé les écarts entre la production journalière de la salariée et les objectifs attendus. Mais alors qu'il n'est imputé à Mme X... ni indolence ni nonchalance, il ne se déduit ni la manifestation de la " mauvaise volonté délibérée " que l'employeur lui a reprochée, ni l'existence d'aucun autre comportement fautif de la salariée, du seul constat qu'elle n'a pas atteint les objectifs de production qui lui étaient fixés. Sur le deuxième grief relatif aux comptes-rendus journaliers, la société intimée se garde de justifier d'une obligation de consigner les écarts de production alors que la salariée appelante lui a répondu par lettre du 23 novembre 2009, sans être contestée, que les écarts étaient calculés en temps réel et affichés sur écran géant. Sur le troisième grief relatif à un fait du 9 octobre 2009, le défaut de rigueur reproché à la salariée ne peut se déduire du seul constat qu'un objet fabriqué a été signalé comme non-conforme. Sur le quatrième grief relatif au 15 octobre 2009, la société intimée produit l'attestation par laquelle sa salariée Sophie Y..., occupée aux fonctions de " team leader " sans autre précision, a rapporté qu'elle avait voulu faire constater à Mme Aurélie X... le manque d'une bille sur une pièce, que cette dernière en avait dégagé une autre et qu'elle avait refusé de la remettre. Mais cette seule attestation ne désigne pas Mme Sophie Y... comme ayant autorité sur la salariée appelante, et il ne s'en déduit ni manque de respect ni même manquement à une consigne claire. Sur le cinquième grief relatif à la dissimulation d'un document le 21 octobre 2009, la société intimée produit l'attestation par laquelle sa salariée Isabelle Z... épouse B..., occupée aux fonctions de " team leader suppléante ", a rapporté qu'elle n'avait pas trouvé un ordre de fabrication qu'elle voulait contrôler pendant la pause-déjeuner de Mme Aurélie X... et que cette dernière, de retour à son poste de travail, avait sorti le document qui se trouvait sous un bac de billes. Mais rien ne caractérise la volonté délibérée de cacher le document, en vue de perturber le bon fonctionnement du secteur de production, que l'employeur a expressément prêtée à la salariée appelante. Sur le sixième et dernier grief, la société intimée se réfère à la même attestation de Mme Isabelle Z... épouse B... qui a précisément écrit : " l'inspection finale m'appelle car X... Aurélie n'a pas lancé ni clôturé son OF et écrit sur l'OF contrôler par moi alors que je n'ai pas contrôler cet OF " (sic). Mais dès lors que la société intimée se garde de produire le document qu'elle argue de faux, il persiste un doute qui doit profiter à la salariée. Il en résulte qu'en définitive, aucun des griefs énoncés ne peut être retenu. La sanction prononcée s'en trouve injustifiée et elle doit donc être annulée. Sur les rappels de rémunération : Au premier chef, la salariée appelante réclame le paiement de la prime de treizième mois au titre de l'année 2006/ 2007. Mais la convention collective de la métallurgie du Haut-Rhin, qui régit la relation de travail, réserve le bénéfice du treizième mois, selon son article 10, aux salariés ayant au moins un an d'ancienneté au moment de son versement. La salariée ayant été embauchée le 3 avril 2006, elle est mal fondée en sa prétention à une prime de treizième mois antérieurement au 3 avril 2007. Quant à la période postérieure, la société intimée justifie avoir versé la somme de 576, 69 € en juin 2007 et la somme de 625, 12 € en décembre 2007, de sorte que la salariée appelante doit être déboutée. Au deuxième chef, la salariée appelante réclame la rémunération de brèves périodes d'absence pour maladie qu'elle a observées en septembre et décembre 2009. La société intimée fait valoir que son obligation de maintien du salaire pendant les suspensions du contrat de travail, lorsqu'elles interviennent pour une cause personnelle indépendante de la volonté de la salariée et pour des durées relativement sans importance, vaut sous déduction des indemnités versées par un régime d'assurances sociales obligatoire, comme il est dit à l'article L. 1226-23 du code du travail. Mais elle ne justifie pas pour autant des déductions qu'elle a opérées sur les salaires de Mme X... alors qu'elle était subrogée dans les droits de cette dernière pour encaisser les indemnités journalières de sécurité sociale, et en définitive elle renonce à former incidemment appel de sa condamnation. Il doit donc être fait droit à la prétention de la salariée appelante, comme l'ont dit les premiers juges. Au troisième chef, la salariée appelante est fondée à obtenir la rémunération afférente à la mise à pied disciplinaire qui, comme il est cidessus, doit être annulée ».
1°) ALORS, s'agissant de l'avertissement du 17 février 2009, QUE les négligences répétées d'un salarié dans l'exécution des tâches relevant de son contrat de travail ayant des conséquences préjudiciables pour son employeur constituent une faute ; qu'en l'espèce, pour annuler l'avertissement du 17 février 2009 faisant grief à Melle X... de se montrer négligente dans la vérification des ordres de fabrication, qui devait être systématique, bien qu'il lui ait été déjà demandé, à la suite d'un entretien d'amélioration, notamment, « de faire preuve de plus de rigueur, d'attention et de concentration à (son) poste de travail, ainsi que de respecter les modes opératoires de contrôle », ce manque de rigueur dans les opérations de vérification ayant entraîné de nombreuses non-conformités, la cour d'appel a relevé que ces non-conformités résultaient des malfaçons des produits ; qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1333-1 et L. 1333-2 du Code du travail ;
2°) ALORS, s'agissant de la mise à pied du 10 juin 2009, QUE les négligences répétées d'un salarié dans l'exécution des tâches relevant de son contrat de travail ayant des conséquences préjudiciables pour son employeur constituent une faute ; qu'en l'espèce, pour annuler la mise à pied du 10 juin 2009 faisant grief à Melle X... d'avoir à nouveau fait montre de négligences dans la vérification des ordres de fabrication, ce manque de rigueur ayant entraîné de nombreuses non-conformités, la cour d'appel a relevé que ces nonconformités résultaient des malfaçons des produits ; qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant, après avoir constaté qu'alors que la Société THK MANUFACTURING avait rappelé à Melle X... à plusieurs reprises qu'il lui incombait de procéder à une vérification systématique des ordres de fabrication et l'avait déjà sanctionnée à ce titre par un avertissement du 17 février 2009 en raison de la perte de temps et du surcoût qu'elles représentaient pour l'entreprise, de nombreuses non-conformités concernant des ordres de fabrication avaient encore été constatées, la cour d'appel a derechef privé sa décision au regard des articles L. 1333-1 et L. 1333-2 du Code du travail ;
3°) ALORS, s'agissant de l'avertissement du 16 novembre 2009, QUE les négligences répétées d'un salarié dans l'exécution des tâches relevant de son contrat de travail ayant des conséquences préjudiciables pour son employeur constituent une faute ; qu'en l'espèce, pour annuler l'avertissement du 16 novembre 2008 faisant grief à Melle X... d'avoir une nouvelle fois fait montre de négligence dans la vérification des ordres de fabrication, ce manque de rigueur ayant entraîné de nombreuses non-conformités, la Cour d'appel a relevé que le défaut de rigueur reproché à la salariée ne peut se déduire du seul constat qu'un objet fabriqué a été signalé comme non-conforme ; qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant, après avoir constaté qu'il n'était nullement contesté qu'alors que Melle X... avait déjà été sanctionnée à deux reprises pour des négligences répétées dans le contrôle des ordres de fabrication, une non-conformité avait encore été relevée, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1333-1 et L. 1333-2 du Code du travail ;
4°) ALORS, s'agissant de l'avertissement du 16 novembre 2009, QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, pour annuler l'avertissement du 16 novembre 2009 en ce qu'il faisait également grief à Melle X... d'avoir manqué de respect vis-à-vis de son supérieur hiérarchique (team leader) Mme Y..., la cour d'appel a relevé « que la société intimée produit l'attestation par laquelle sa salariée Sophie Y..., occupée aux fonctions de " team leader " sans autre précision, a rapporté qu'elle avait voulu faire constater à Mme Aurélie X... le manque d'une bille sur une pièce, que cette dernière en avait dégagé une autre et qu'elle avait refusé de la remettre ; mais cette seule attestation ne désigne pas Mme Sophie Y... comme ayant autorité sur la salariée appelante » ; qu'en se prononçant de la sorte, après avoir indiqué qu'« à l'audience, Madame Aurélie X... fait oralement développer ses conclusions d'appel parvenues le 5 mai 2011 », et que celles-ci ne comportent aucun moyen selon lequel Mme Y... n'aurait pas eu autorité sur Melle X..., la cour d'appel, qui a soulevé ce moyen d'office, sans avoir préalablement recueilli les observations des parties à cet égard, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
5°) ALORS, s'agissant de l'avertissement du 16 novembre 2009, QU'est fautive l'insubordination et le comportement irrespectueux d'un salarié à l'égard de son chef d'équipe ; qu'en l'espèce l'avertissement du 16 novembre 2009 a été prononcé aux motifs, notamment, que « en date du 15 octobre 2009, l'inspection finale a détecté un manque d'une bille sur un bloc HSR30. Il s'agit de l'ordre de fabrication M887961 que vous avez traité. Ayant constaté cette non-conformité, Mme Y..., team leader, vous a demandé d'ajouter la bille manquante. Plutôt que d'obtempérer, vous avez pris le bloc et vous avez forcé avec votre tourne-vis au niveau de la upper plate dans le but de retirer une bille. Mme Y... vous a demandé de remettre la bille que vous veniez d'enlever volontairement. Vous avez refusé et vous avez déclaré « comme ça il en manque une ». Il s'agit d'un grave manquement à votre contrat de travail qui stipule bien que vous exercez vos fonctions « sous l'autorité et dans le cadre des instructions données par votre supérieur hiérarchique ». En faisant exactement le contraire de la consigne de votre team leader, vous lui avez manqué de respect, ce que nous ne pouvons pas tolérer. Un tel comportement est inacceptable » ; que pour l'annuler, la Cour d'appel a relevé « que la société intimée produit l'attestation par laquelle sa salariée Sophie Y..., occupée aux fonctions de " team leader " sans autre précision, a rapporté qu'elle avait voulu faire constater à Mme Aurélie X... le manque d'une bille sur une pièce, que cette dernière en avait dégagé une autre et qu'elle avait refusé de la remettre ; mais il ne s'en déduit ni manque de respect ni même manquement à une consigne claire » ; qu'en se déterminant de la sorte, cependant que dans cette attestation, comme dans la lettre d'avertissement, il était indiqué que Mlle X..., à laquelle il avait été demandé d'ajouter une bille manquante sur un bloc, à l'origine d'une non-conformité de celui-ci, dont elle avait traité l'ordre de fabrication, non seulement n'avait pas obtempéré mais avait forcé de bloc avec un tournevis, retiré une bille de celui-ci et, refusant de l'y remettre, déclaré « comme ça il en manque une », sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, cet état de fait n'étant pas contesté, si ce comportement n'était pas fautif, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1333-1 et L. 1333-2 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la Société THK MANUFACTURING à verser Melle Aurélie X... la somme de 2. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exercice abusif du pouvoir disciplinaire ;
AUX MOTIFS QUE : « Sur la demande en dommages-intérêts : Au premier soutien de sa demande indemnitaire, la salariée appelante invoque une discrimination salariale à raison de son appartenance syndicale. Elle produit le procès-verbal du 6 février 2009 au terme duquel l'inspecteur du travail a conclu qu'un faisceau d'indices concordait pour indiquer l'existence de pratiques de discrimination syndicale de nature salariale à l'encontre de divers délégués élus ou désignés. Mais si l'inspecteur du travail a effectivement examiné l'évolution de la rémunération d'une série de salariés de l'entreprise en fonction de leurs engagements syndicaux, son procès-verbal ne concerne aucunement Mme Aurélie X.... Faute pour la salariée appelante de présenter des éléments de fait laissant au moins supposer l'existence de la discrimination qu'elle allègue, conformément à l'article L 1134-1 du code du travail, il ne peut être fait droit à sa prétention sur ce fondement. Au second soutien de sa demande, la salariée appelante invoque avec plus de pertinence des agissements abusifs. Les sanctions que la société intimée a multipliées, qui s'avèrent toutes injustifiées et qui doivent être annulées, révèlent un abus dans l'exercice du pouvoir disciplinaire de l'employeur qui engage sa responsabilité pour le préjudice que la salariée en a nécessairement éprouvé. Au vu des éléments lacunaires que Mme Aurélie X... produit sur l'étendue de son préjudice, une exacte appréciation conduit la Cour à fixer à 2000 ¿ le montant des dommages-intérêts qui doivent lui revenir ».
1°) ALORS QU'en application de l'article 624 du Code de procédure civile, la cassation à intervenir du chef de l'arrêt attaqué ayant annulé les sanctions disciplinaires prononcées les 17 février, 10 juin et 16 novembre 2009 entraînera par voie de conséquence nécessaire la cassation de l'arrêt en ce qu'il a condamné la Société THK MANUFACTURING à verser à Melle X... la somme de 2. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exercice abusif de son pouvoir disciplinaire ;
2°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties telles qu'elles sont énoncées dans l'acte introductif d'instance et dans leurs écritures ; qu'en l'espèce, la cour d'appel indique qu'« à l'audience, Madame Aurélie X... fait oralement développer ses conclusions d'appel parvenues le 5 mai 2011 » ; que ces conclusions sont rédigées dans les termes suivants : « sur les dommages-intérêts : compte-tenu de l'attitude manifestement discriminatoire commise à l'encontre de Mademoiselle X..., et notamment en raison de son appartenance syndicale, la société THK devra verser à Mademoiselle X...la somme de 10. 000 euros au titre de dommages-intérêts en raison de ses agissements illicites et manifestement abusifs » ; qu'au soutien de sa demande indemnitaire, Melle X... invoquait ainsi exclusivement une discrimination à raison de son appartenance syndicale ; qu'en décidant, après avoir constaté qu'il ne pouvait être fait droit à sa prétention sur ce fondement, de lui allouer des dommages et intérêts pour exercice abusif du pouvoir disciplinaire, en ce que « les sanctions que la société intimée a multipliées, qui s'avèrent toutes injustifiées et qui doivent être annulées, révèlent un abus dans l'exercice du pouvoir disciplinaire de l'employeur qui engage sa responsabilité pour le préjudice que la salariée en a nécessairement éprouvé », la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
3°) ET ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'à supposer que la cour d'appel ait disposé d'un tel pouvoir, en retenant, d'office, et sans provoquer préalablement les observations des parties à cet égard, que s'il ne pouvait être fait droit à sa prétention sur le fondement de la discrimination, il convenait, en revanche, de lui allouer des dommages et intérêts pour exercice abusif du pouvoir disciplinaire, en ce que « les sanctions que la société intimée a multipliées, qui s'avèrent toutes injustifiées et qui doivent être annulées, révèlent un abus dans l'exercice du pouvoir disciplinaire de l'employeur qui engage sa responsabilité pour le préjudice que la salariée en a nécessairement éprouvé », la cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-28437
Date de la décision : 18/03/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 18 septembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 mar. 2014, pourvoi n°12-28437


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.28437
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