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05/03/2014 | FRANCE | N°12-29755

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 mars 2014, 12-29755


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à MM. X... et Y..., ès qualités, de leur reprise d'instance ;
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu que sous le couvert d'un grief non fondé de violation de la loi, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation par la cour d'appel, devant laquelle l'employeur se bornait à de simples allégations dépourvues d'offre de preuve quant à la cessation d'activité du précédent médecin du travail, des éléments de fait dont il résultait que cet employeur, qui n'avait pas exercÃ

© le recours prévu par l'article L. 4624-1 du code du travail, ni consulté plus ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à MM. X... et Y..., ès qualités, de leur reprise d'instance ;
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu que sous le couvert d'un grief non fondé de violation de la loi, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation par la cour d'appel, devant laquelle l'employeur se bornait à de simples allégations dépourvues d'offre de preuve quant à la cessation d'activité du précédent médecin du travail, des éléments de fait dont il résultait que cet employeur, qui n'avait pas exercé le recours prévu par l'article L. 4624-1 du code du travail, ni consulté plus précisément le médecin du travail sur la possibilité d'affecter la salariée à l'un des postes disponibles compatible avec son état de santé, n'avait pas exécuté loyalement ses obligations ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Métaltemple et MM. X... et Y..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à Mme Z... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mars deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils pour la société Métaltemple et MM. X... et Y..., ès qualités,
Le moyen reproche à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué d'avoir jugé que le licenciement de Mme Z... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, condamné la société Metaltemple à payer à l'intéressée une indemnité de 45.000 ¿, en dédommagement du préjudice occasionné par un licenciement sans cause réelle ni sérieuse et à rembourser à Pôle Emploi les allocations de chômage servies à la salariée dans la limite de six mois d'indemnités,
AUX MOTIFS PROPRES QUE
"L'article L 4624-1 du code du travail confère au médecin du travail le pouvoir de proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de poste, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de sante physique et mentale des travailleurs.
Le même texte impose à l'employeur de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite.
En cas de difficulté ou de désaccord, la possibilité est ouverte pour l'employeur comme pour le salarié, par les dispositions du troisième alinéa de cet article, d'exercer un recours devant l'inspecteur du travail, lequel prend sa décision après avis du médecin inspecteur du travail.
En l'espèce, à l'issue d'une visite à laquelle il a procédé le 26 octobre 2009 à la demande de l'employeur (case V.A.D.E cochée en tête de la fiche de visite) et non pas à la suite d'une période de suspension du contrat de travail de la salariée en raison d'un arrêt maladie ou d'une rechute de maladie professionnelle, le docteur A..., médecin du travail du service de santé au travail de l'unité de production de Saint-Michel-de-Maurienne de la SAS METALTEMPLE, a formulé les conclusions suivantes, après avoir examiné Zaïa Z..., toujours affectée à cette date au service Qualité U A de cette usine :
"Inapte aux postes proposés par la direction (usinage montage grappes Tri meulages)
lui proposer son ancien poste.
Inaptitude due à sa maladie professionnelle.
Inaptitude prononcée en une seule visite compte tenu du danger immédiat pour la santé du salarié au visa de l'article R-4624-31 du code du travail".
Dès le 27 octobre 2009, aux termes d'une lettre adressée au docteur Roger A..., le Directeur des Ressources Humaines de la SAS METALTEMPLE a manifesté son désaccord sur la formulation de cet avis d'inaptitude, tout en précisant que « le poste occupé actuellement n'est pas pour l'instant supprimé mais (qu')en prévision à moyen terme avant fin de cette année » il était demandé au médecin du travail « de dire pour quelles aptitudes ou caractéristiques de postes » devraient être entreprises des démarches « dans un souci d'anticiper la recherche de reclassement», en ce qui concerne Mme Z..., alors que les conclusions de ce médecin étaient « bloquantes pour nous et pour la salariée ».
Cette lettre était conclue par une demande tendant à obtenir du même médecin du travail qu'il veuille bien « reprogrammer rapidement une visite et nous donner la position médicale qui nous permette de répondre à nos obligations ».
Cependant, il est constant que le docteur A... lui-même n'a pas déféré à cette injonction, avant que le Directeur des Ressources Humaines de la SAS METALTEMPLE n'invite Zaïa Z..., par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 20 novembre 2009, à se présenter le 11 décembre 2009, à l'infirmerie de la société, « afin que le docteur B... puisse se prononcer sur vos aptitudes et nous permettre de nous positionner objectivement », de manière à permettre à l'employeur « de remplir nos obligations de recherche de postes avec éventuellement aménagements possibles », alors que la position adoptée par le docteur A... était « déplacée et abusive par rapport à ses responsabilités » ;
il n'en demeure pas moins qu'en introduction à cette lettre, le Directeur des Ressources Humaines, après avoir rappelé l'affectation de Zaïa Z... un poste de travail « contrôle UA » à la suite de restrictions apportées à son aptitude lors d'une visite médicale du 9 janvier 2006, avait annoncé que « certains postes avec activité similaire peuvent être disponibles dans l'entreprise même si ce n'est pas durablement ».
Dans un tel contexte, il s'avère objectivement incohérent pour l'employeur de ne pas s'être déterminé sur un choix qui pouvait s'opérer suivant une alternative à deux branches :
- soit examiner plus attentivement, avant l'échéance de fin d'année envisagée pour décider du sort de Zaïa Z..., une affectation de cette dernière à « certains postes avec activité similaire pouvant être disponibles dans l'entreprise », en consultant plus précisément le médecin du travail sur ces solutions à partir de fiches de description de postes susceptibles d'être étudiées de manière concrète, ce que l'appelante ne justifie nullement avoir entrepris mais qui laissait encore ouvertes toutes les perspectives de la conservation de l'intéressée dans les effectifs de l'entreprise, sans recourir à une sorte de subterfuge pour paraître contourner un avis médical considéré comme exagérément restrictif mais sans fournir aucun effort pour tenter de sortir d'une sorte de quiproquo résultant des modalités d'engagement de la procédure,
- soit exercer le recours ouvert par les dispositions du troisième alinéa de l'article L 4124-1 du code du travail, dans l'hypothèse où l'employeur préférait se ménager de plus larges possibilités que celles dont il a fait état dans la correspondance adressée à Zaïa Z... le 20 novembre 2009.
En revanche, la décision d'imposer à Zaïa Z... une nouvelle visite auprès d'un autre médecin du travail ne pouvait participer d'une exécution loyale des obligations de l'employeur, telle que pouvait être ébauchée l'orientation de la procédure de reclassement de cette salariée et que l'imposait le respect des dispositions légales précitées. Le prétexte d'une visite de reprise à la suite de la dernière période d'arrêt maladie de la salariée ne s'avère pas plus convaincant, dans la mesure où, conformément aux prescriptions de l'article R 4624-22 du code du travail, l'objet de l'examen de reprise était d'apprécier l'aptitude médicale de la salariée à reprendre son ancien emploi, la nécessité d'une adaptation des conditions de travail ou d'une réadaptation de la salariée ou éventuellement de l'une et de l'autre de ces mesures et où la poursuite de bonne foi d'une recherche de solutions impliquait nécessairement l'examen de tout poste préservé sur une activité similaire à celle de « contrôle UA » précédemment exercée par Zaïa Z....
C'est pourquoi, faute pour la SAS METALTEMPLE de justifier sa décision par une constatation de l'inaptitude de Zaïa Z... à partir d'éléments réunis de manière sincère avec la volonté constante de préserver l'emploi de celle-ci dans un poste adapté et de pouvoir s'appuyer sur de nouveaux avis d'inaptitude totalement contradictoires avec les conclusions formelles du médecin du travail en date du 26 octobre 2009, dont l'annulation n'avait pu être obtenue suivant une procédure régulière, la cause de licenciement invoquée par cet employeur est dépourvue de caractère réel et sérieux, de telle sorte que la décision de la juridiction prud'homale doit être confirmée sur ce point.
Sur l'indemnisation du préjudice occasionné par le licenciement.
L'âge et la dégradation de l'état de santé de Zaïa Z... constituent indéniablement un sérieux handicap pour un retour à l'emploi : cette salariée, qui percevait une rémunération mensuelle brute moyenne de 1 747,80 ¿, au cours de l'année 2009, au vu des bulletins de paye versés à son dossier, a subi dès le mois de mars 2010 une réduction de ses revenus aux allocations d'Aide au Retour à l'Emploi, qui n'excédaient pas une moyenne de 1 048 ¿ par mois, et ce, y compris en 2011 (en travaillant six jours en octobre et un jour en novembre), et encore en 2012 : ce manque à gagner dont il y a lieu de redouter qu'il ne se prolonge durablement pour une personne dont la capacité de travail est obérée et qu'il s'aggrave au risque du terme de son indemnisation chômage et du passage au régime de solidarité, ainsi que le préjudice moral ressenti dans les circonstances qui ont caractérisé son éviction, justifient que lui soit allouée une indemnité arbitrée à la somme de 45 000 ¿",
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE
"Il convient au préalable de rappeler au visa de l'article L. 451-1 du code de la sécurité sociale que le Conseil de Prud'hommes n'est pas compétent pour statuer sur le manquement à l'obligation de sécurité de l'employeur consécutive à une maladie professionnelle.
Selon l'article L 4624-1 du code du travail, le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à 1'âge, à la résistance physique ou à 1'état de santé physique et mentale des travailleurs.
L'employeur est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu¿il y soit donné suite.
En cas de difficulté ou de désaccord, l'employeur ou le salarié peut exercer un recours devant l'inspecteur du travail. Ce dernier prend sa décision après avis du médecin inspecteur du travail.
En l'espèce, il est constant et non contesté que le poste de Madame Zaïa Z... a été aménagé au contrôle UA et non plus au Tri, à compter du 9 janvier 2006 ainsi que cela résulte de la fiche de visite de reprise à cette date.
Il est non moins certain que l'employeur peut organiser à tout moment une visite médicale comme il l'a fait le 23 juin 2009 ou lorsqu'il envisage de réorganiser son entreprise.
Il a fait connaître à sa salarié le 20 novembre 2009 les motifs de son refus de suivre l'avis du Docteur A... qui concluait le 26 octobre 2009 "inapte aux postes proposés par la Direction (usinage, montage grappes, tri : meulage), lui proposer son ancien poste".
Madame Zaïa Z... n'a pas contesté l'avis médical puisqu'il convenait à sa situation. Il appartenait à l'employeur de formuler un recours devant l'inspecteur du travail puisqu'il estimait, à propos de ce médecin que "sa position est déplacée et abusive par rapport à ses responsabilités".
A compter du 9 novembre 2009, la salariée est en arrêt maladie et l'employeur la convie donc à une visite de reprise.
Cependant, le 2 décembre comme le 19 décembre 2009, l'intitulé de son poste est erroné: agent Tri et non contrôle UA. L'avis du Docteur B... est donc inopérant puisqu'il se prononce sur un poste qui n'est plus celui de Madame Zaïa Z....
La cause de ce licenciement ne tient pas à la personne de la salariée (apte à son poste de contrôle UA) mais résulte d'une suppression d'emploi en lien avec les difficultés économiques que connaît la SAS METALTEMPLE.
Le licenciement de Madame Zaïa Z... ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse",
ALORS QUE confronté à un avis d'inaptitude physique et à l'obligation de chercher à reclasser le salarié concerné, l'employeur, qui est tenu de prendre en considération les propositions du médecin du travail, doit au besoin les solliciter ; que l'employeur, pour justifier du respect de ses obligations, faisait valoir dans ses conclusions (p. 12) qu'il avait écrit au docteur A... afin d'obtenir des précisions sur l'avis du 26 octobre 2009, dès le lendemain, mais que celui-ci avait cessé d'exercer pour prendre sa retraite, et la salariée ayant, de nouveau, été placée en arrêt maladie, la société exposante n'avait eu d'autre possibilité que de recourir à un nouveau médecin du travail, le docteur B..., pour soumettre l'intéressée à une nouvelle visite médicale, ce dont il résultait qu'il avait rempli son obligation avec sérieux et loyauté de sorte qu'en reprochant à l'employeur de ne pas avoir consulté plus précisément l'auteur de l'avis d'inaptitude en date du 26 octobre 2009 et en estimant que la décision d'imposer à la salariée une nouvelle visite auprès d'un autre médecin du travail ne pouvait participer d'une exécution loyale de ses obligations, la Cour d'appel a violé les articles L 4624-1, R 4624-22, R-4624-31, L 1226-12 et L 1226-15 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-29755
Date de la décision : 05/03/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 18 octobre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 mar. 2014, pourvoi n°12-29755


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.29755
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