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04/03/2014 | FRANCE | N°13-11698

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 04 mars 2014, 13-11698


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... et Mme Y... (les cautions) se sont rendus cautions des prêts consentis le 18 novembre 2004 par la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Pyrénées Gascogne (la caisse), respectivement à la SCI Cecilena (la SCI) et à la société Novaprod (la société) ; que cette dernière ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 24 juillet 2006 et 13 octobre 2008, la caisse, après avoir déclaré ses créances, a assigné en paiement les cautions qui

ont recherché sa responsabilité ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... et Mme Y... (les cautions) se sont rendus cautions des prêts consentis le 18 novembre 2004 par la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Pyrénées Gascogne (la caisse), respectivement à la SCI Cecilena (la SCI) et à la société Novaprod (la société) ; que cette dernière ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 24 juillet 2006 et 13 octobre 2008, la caisse, après avoir déclaré ses créances, a assigné en paiement les cautions qui ont recherché sa responsabilité ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen, pris en ses deuxième et quatrième branches :
Vu les articles 1147 du code civil et 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rejeter les demandes des cautions, l'arrêt, après avoir relevé qu'elles étaient propriétaires d'un bien estimé à 597 000 euros acquis au moyen d'un prêt venant à échéance en 2004, que les murs acquis par la SCI, dont elles étaient les seules associées, au prix de 274 000 euros, et affectés à la garantie du prêt de même montant, avaient été revendus pour un montant de 310 000 euros, et que les bénéfices commerciaux escomptés de la société, estimés à environ 46 000 euros par an permettaient le remboursement des charges supplémentaires d'emprunt, retient que les engagements souscrits étaient adaptés à leurs capacités financières et au risque d'endettement né de l'octroi des crédits, de sorte que la banque n'était pas tenue d'une obligation de mise en garde ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le prêt finançant la résidence principale avait été souscrit pour une durée de quinze ans à compter du 30 juillet 1999, de sorte qu'il venait à échéance le 30 juillet 2014, et que les mensualités des crédits litigieux s'élevaient respectivement à 2230 et 4 827 euros, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 mai 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Pau, autrement composée ;
Condamne la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Pyrénées Gascogne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mars deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour M. X... et Mme Y...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté M. X... et Mme Y... de toutes leurs demandes dirigées à l'encontre de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Pyrénées Gascogne ;
AUX MOTIFS QUE M. X... et Mme Y... soutiennent que la banque a failli à son obligation de mise en garde conformément aux motifs retenus par le tribunal de commerce, qui a prononcé de ce chef la nullité de leurs engagements de cautions des sociétés Novaprod et Cecilena ; que le jugement encourt la réformation d'ores et déjà sur ce dernier point, l'action en responsabilité pour violation à cette obligation n'étant sanctionnable que par l'octroi de dommages et intérêts correspondant au préjudice résultant de la perte de chance de ne pas contracter et en aucun cas par la nullité des actes d'engagement ; que contrairement aux prétentions de la banque, à qui incombe la charge de la preuve, le seul fait d'être associé dans une société et d'en être le gérant ne permet pas à lui seul de caractériser la qualité de caution avertie de celui qui s'engage ; qu'au demeurant, il est établi en l'espèce que les intimés n'avaient pas de formation, ni d'expérience professionnelle particulière les destinant à la gestion et à l'administration d'une activité commerciale d'une certaine importance, étant au moment de leur engagement pour Mme Y..., barmaid et pour M. X..., musicien, s'engageant tous deux via les deux sociétés constituées à cet effet dans l'achat des murs et d'un fonds de commerce de bar restaurant représentant, selon l'acte de cession, un chiffre d'affaires moyen annuel de 450.000 euros ; qu'étant des cautions profanes ils sont recevables à rechercher la responsabilité de la banque de ce chef ; qu'il ressort des pièces versées aux débats que s'ils n'avaient pas d'activité professionnelle au moment de leur engagement, bénéficiant seulement du RMI de couple représentant une somme mensuelle de 764 euros, ils étaient néanmoins propriétaires de leur résidence principale à Arcangues dont la valeur a été estimée en juin 2004, à leur demande et à dire d'expert, à 597.100 euros ; que contrairement aux affirmations de M. X... et Mme Y..., qui se bornent à produire un relevé de compte du mois de juin 2004, il apparaît que le 18 novembre 2004, date de leur engagement, le prêt contracté pour l'acquisition de ce bien était nécessairement soldé et en tout état de cause allait l'être, ayant été en effet consenti suivant une offre acceptée le 30 juillet 1999 et pour une durée de 15 ans ; que par ailleurs les murs acquis au prix de 274.000 euros par la SCI Cecilena, dont ils étaient les seuls associés, ont été affectés à la garantie de la banque pour le remboursement du prêt de même montant ; qu'il a été vendu 310.000 euros en novembre 2009 à la barre du tribunal de grande instance de Bayonne, soit un prix supérieur à celui de son acquisition ; que le patrimoine de M. X... et Mme Y... était donc manifestement suffisant pour couvrir les engagements souscrits pour la garantie des prêts de 400.000 euros et de 274.000 euros, et donc adapté au regard de leurs capacités financières et du risque d'endettement né de leur octroi, ce d'autant qu'ils investissaient dans l'acquisition JR/18.530 d'un fonds de commerce offrant toute garantie de stabilité et de rentabilité au regard des exercices comptables (chiffre d'affaires moyen d'environ 450.000 euros et bénéfices commerciaux d'environ 46.000 euros) permettant d'envisager conformément à leur prévisionnel le remboursement des charges supplémentaires d'emprunt ; qu'il s¿ensuit que la banque n'était pas tenue à leur égard d'une obligation de mise en garde ; que la banque ne saurait non plus être recherchée du fait de la déconfiture de la société Novaprod et du fonctionnement de ses comptes, alors que sa créance a été admise définitivement et qu'il s'agit d'une exception personnelle au débiteur principal que la caution ne peut opposer au créancier, et ce conformément à l'article 2313 du code civil, et qu'en tout état de cause la banque est étrangère à la baisse du chiffre d'affaires enregistrée par cette société, ainsi qu'il s'évince de son bilan clos le 31 décembre 2005, l'ayant empêché de faire face aux engagements prévus et à son passif exigible ; que dès lors, le jugement sera réformé et M. X... et Mme Y... déboutés de leurs demandes ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le banquier est tenu d'une obligation de mise en garde à l'égard de l'emprunteur comme de la caution non avertie ; qu'en exécution de cette obligation, il doit l'alerter sur les risques que comporte l'opération financée par le crédit qu'il lui accorde et vérifier que ses capacités financières sont suffisantes à exécuter ses engagements ; que la cour d'appel qui s'est bornée à constater que le patrimoine immobilier de M. X... et de Mme Y..., lors de la conclusion des contrats de prêt et de cautionnement, était suffisant pour couvrir la garantie consentie à la banque, a violé l'article 1147 du code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le banquier est tenu d'une obligation de mise en garde à l'égard de l'emprunteur comme de la caution non avertie ; qu'après avoir relevé qu'au moment de leur engagement M. X... et Mme Y... étaient bénéficiaires du RMI de couple représentant une somme mensuelle de 764 euros et constaté que le montant des échéances des prêts souscrits par le débiteur principal s'élevaient aux sommes de 2.230 euros et 4.827 euros par mois, soit un total mensuel de 7.057 euros, pour un revenu prévisionnel annuel de 46.000 euros, soit 3.833 euros mensuel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article 1147 du code civil ;
ALORS, ENCORE, QUE dans leurs conclusions d'appel, M. X... et Mme Y... faisaient valoir qu'outre les fautes qu'elle avait commises dès l'octroi des prêts et la signature des cautionnements, dans le cadre du fonctionnement des comptes de l'entreprise, la banque avait aussi largement manqué à ses obligations par la suite ; qu'à cet égard, M. X... et Mme Y... soulignaient, en particulier, que le Crédit agricole avait procédé, le 1er avril 2005, à un virement au profit de la SIAGI, de manière unilatérale et sans les en avertir, ce qui avait eu pour conséquence que les capacités de financement de l'entreprise s'étaient immédiatement retrouvées réduites à néant ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef pertinent de leurs conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, ENFIN, QUE la cour d'appel a décidé par un motif totalement inopérant que le patrimoine immobilier de M. X... et Mme Y... était suffisant à garantir leurs engagements de caution en relevant que leur prêt immobilier serait soldé en 2004, tout en indiquant qu'il avait été souscrit en 1999 pour une durée de 15 ans ; que ce prêt, dont le terme était donc fixé en 2014, était en cours lors des engagements de caution, de sorte que la cour d'appel a violé l'article 455 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-11698
Date de la décision : 04/03/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 21 mai 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 04 mar. 2014, pourvoi n°13-11698


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : Me Brouchot, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.11698
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