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19/02/2014 | FRANCE | N°12-23504

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 19 février 2014, 12-23504


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche, après délibération de la deuxième chambre civile :
Vu les articles 135 et 906 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Ponssé a vendu un engin de débardage porteur forestier à la société d'Exploitation forestière morvandaise (la société EFM), qui l'a assuré auprès de la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Grand Est dite Groupama (l'assureur) ; que, cet engin ayant été accidentellement dÃ

©truit par un incendie, l'assureur, après avoir indemnisé la société EFM a assigné...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche, après délibération de la deuxième chambre civile :
Vu les articles 135 et 906 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Ponssé a vendu un engin de débardage porteur forestier à la société d'Exploitation forestière morvandaise (la société EFM), qui l'a assuré auprès de la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Grand Est dite Groupama (l'assureur) ; que, cet engin ayant été accidentellement détruit par un incendie, l'assureur, après avoir indemnisé la société EFM a assigné la société Ponssé en garantie des vices cachés devant un tribunal de grande instance ;
Attendu que pour débouter la société de ses demandes et confirmer le jugement condamnant la société Ponssé, sauf à réduire le montant de la condamnation, l'arrêt retient qu'aucun élément nouveau n'est apporté susceptible de mettre en cause les constatations et conclusions de l'expert judiciaire, au demeurant non contredites par les premières constatations du laboratoire Lavoue ni par les appréciations portées postérieurement par M. X..., et donc de justifier la demande de contre-expertise ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société qui demandait que soit écarté des débats le rapport de M. X...dont l'assureur s'était prévalu dans ses conclusions du 9 janvier 2012 qui n'en comportaient pas la communication simultanée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 mai 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;
Condamne la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Grand Est dite Groupama aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf février deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Ponsse.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué :
D'avoir confirmé le jugement condamnant la société Ponssé en paiement au profit du Groupama, sauf à ramener le montant de l'indemnisation à la somme de 237. 500 ¿ ;
Aux motifs que « pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision entreprise et aux conclusions déposées. II sera seulement rappelé que le 16 décembre 2007 la SARL E. F. M. a acquis auprès de la société SAS PONSSE un engin de chantier porteur forestier pour la somme de 240. 500 ¿ HT, mis en service en janvier 2008 ; que le 5 mars 2009 alors qu'il était conduit par un chauffeur de l'entreprise EFM cet engin a été intégralement détruit par un incendie ; qu'en sa qualité d'assureur de la société E. F. M., la Caisse Régionale d'Assurances Mutuelles Agricole du Grand Est, dite compagnie GROUPAMA, missionna un expert incendie du cabinet Lavoue, qui dans un rapport du 20 mai 2009, concluait à l'origine accidentelle de l'incendie à raison de la survenance d'un incident électrique sous la cabine du véhicule ; que GROUPAMA, qui avait versé une somme de 240. 500 ¿ à son assuré, suivant quittance subrogative du 24 juin 2009, ordonnait une expertise judiciaire et désignait pour y procéder Monsieur Y... qui déposait son rapport le 29 mars 2010. La Cour rejettera dans ces conditions la demande d'expertise formulée par la société PONSSE et confirmera le jugement entrepris sur l'existence d'un vice caché, dont la garantie est due par l'appelante, sous sa seule responsabilité du sinistre incendie. S'agissant du montant des dommages et intérêts dus à la compagnie GROUPAMA c'est à juste titre que la société PONSSE, à titre subsidiaire, fait valoir que doit être déduit le montant de la valeur résiduelle des équipements du tracteur forestier non détruits par l'incendie, le montant de l'indemnité devant revenir à lu compagnie GROUPAMA étant de 237. 500 ¿ » ;
Et aux motifs du jugement partiellement confirmé que « 1) sur l'origine du sinistre et les responsabilités encourues : vu l'article 1641 du Code civil : puisque l'article 753 du Code de procédure civile dispose que le Tribunal ne statue que sur les dernières conclusions déposées, la société PONSSE ne peut faire grief à GROUPAMA d'avoir évoqué dans son acte introductif d'instance à la fois l'hypothèse retenue par le cabinet LAVOUE et celle retenue par l'expert judicaire car dans ses dernières conclusions la demanderesse fonde ses prétentions uniquement sur les conclusions du rapport d'expertise. Monsieur Y..., après avoir accédé à différentes parties du porteur et démonté les importantes de l'engin, a estimé que l'incendie avait trouvé son origine à l'avant-droit du compartiment moteur du porteur, dans l'environnement d'un radiateur de préchauffage d'un support de fusibles et de faisceaux électriques et que la ventilation mécanique avait très vite propagé l'incendie sous, puis dans la cabine du conducteur. Ces constatations lui ont permis d'avancer dans un premier temps deux hypothèses ; celle d'un desserrage d'une borne de radiateur qui a généré un échauffement important et celle d'une usure prématurée (frottement par vibrations) des protections des faisceaux électriques soutenus par un collier mécanique. Après avoir considéré que les gaz chauds détruisaient les isolants électriques et produisaient un amorçage électrique, l'expert a retenu une seule cause : celle d'un contact résistif au droit du radiateur de préchauffage, en précisant que les amorçages sur les conducteurs électriques étaient la conséquence du développement de l'incendie. Il privilégiait ainsi comme thèse celle d'un desserrage d'une connexion mise en oeuvre par le fabricant du porteur, ce desserrage ayant généré un contact résistif irréversible jusqu'à la mise à feu du moteur. Par voie de dire du 17 mars 2010, la société PONSSÉ a fait part à Monsieur Y... des mêmes réserves que celles qu'elle développe dans le cadre de la présente instance, à savoir que la borne desserrée se situait sur le système de pré/ post chauffage de l'air admis dans le moteur alors que, compte tenu de la température ambiante et de l'utilisation de l'engin le matin du sinistre, ce système n'a pas pu s'être mis en oeuvre, ou pendant un temps limité. L'expert a apporté ses réponses dans son rapport final en rappelant qu'il avait constaté une borne desserrée par rapport à l'autre, qu'il n'avait aucune certitude que le contacteur commandant le préchauffage ne soit pas resté collé, que l'analyse de la société PONSSE était purement théorique sans être appuyée d'aucune constatation technique et avec de nombreuses inconnues (températures très variables dans la forêt du Morvan, des temps théoriques données par le constructeur...), et que l'on pouvait aussi penser que le système de commande a maintenu le préchauffage. Surtout, en réponse à l'objection de la société PONSSÉ selon laquelle le simple fait d'une borne desserrée ne semblait pas pouvoir avoir engendré le sinistre, l'expert a fait valoir que la zone de départ de l'incendie avait été étayée par de nombreux indices, en précisant que dans cette zone de départ un seul élément présentait des stigmates évidents d'un contact résistif. Il apparaît ainsi que l'expert a apporté de façon argumentée des réponses à l'ensemble des réserves formulées par voie de dire. Dans le cadre de cette instance, la société PONSSÉ n'allègue aucun élément nouveau susceptible de remettre en cause efficacement l'analyse précise et étayée de l'expert sur les causes du sinistre. Il existe donc des présomptions graves, précises et concordantes selon lesquelles l'incendie trouve son origine dans le desserrage d'une connexion, lequel a généré un contact résistif irréversible jusqu'à la mise à feu du moteur. Le sinistre étant survenu à l'occasion d'une utilisation normale de l'engin, ce défaut, en ce qu'il a compromis l'usage de la chose, est constitutif d'un vice caché. Dans la mesure où l'expert a relevé que la connexion avait été mise en oeuvre par le constructeur et qu'aucun élément ne permettait de supposer que des modifications sont intervenues depuis la livraison du porteur forestier (laquelle datait de 14 mois environ), il est donc établi, en l'absence de preuve d'un défaut d'entretien, que ce vice existait antérieurement à la vente ou à la livraison de l'engin, ou encore qu'il existait déjà à l'état de germe. La société PONSSÉ doit donc sa garantie » ;
1) Alors que doivent être écartées les pièces, invoquées au soutien des prétentions, qui ne sont pas communiquées simultanément à la notification des conclusions ; que la Cour d'appel, qui a condamné la société Ponssé à verser la somme de 237. 500 ¿ à la compagnie Groupama, en visant les conclusions de la société Ponssé du 1er février 2012 et les conclusions du Groupama du 9 janvier 2012, sans s'expliquer, comme elle y était invitée (conclusions de la société Ponssé, p. 6 et 7 et dispositif, p. 7) sur la recevabilité du rapport de Monsieur X..., pièce n° 7 invoquée et mentionnée par les dernières conclusions du Groupama, mais non communiquée simultanément à la notification de ces conclusions, et sur laquelle elle s'est fondée, a privé sa décision de base légale au regard des articles 132 et 906 du Code de procédure civile ;
2) Alors que le demandeur en garantie des vices cachés doit prouver l'existence d'un vice, existant au moins en germe, antérieur à la vente ; que la Cour d'appel, pour condamner la société Ponssé en garantie, a retenu, par motifs propres, que l'expert concluait qu'un desserrage d'une connexion mise en oeuvre par le fabricant avait généré un contact résistif irréversible (échauffement) jusqu'à la mise à feu du moteur et, par motifs du jugement partiellement confirmé, que le sinistre était survenu à l'occasion d'une utilisation normale de l'engin, qu'aucun élément ne permettait de supposer que des modifications sont intervenues depuis la livraison du porteur forestier, et qu'il était donc établi, en l'absence de preuve d'un défaut d'entretien, que ce vice existait antérieurement à la vente ou à la livraison de l'engin, ou encore qu'il existait déjà à l'état de germe ; qu'en statuant ainsi, en mettant à la charge de la société défenderesse la preuve de ce que la connexion s'était desserrée après la vente, la Cour d'appel a violé les articles 1641 et 1315 du Code civil ;
3) Alors que la société Ponssé a fait valoir qu'il convenait de prendre en compte le fait du préposé de la société EFM, en exposant que lors du sinistre, le conducteur n'avait pu maîtriser le feu du fait du manque de puissance de l'extincteur de cabine, et en soulignant qu'il était établi et retenu que le deuxième extincteur fourni par le fabricant n'était plus présent (conclusions, p. 6), et que cette circonstance relevait d'une faute de l'acquéreur et avait un lien de causalité certain avec la destruction totale de l'engin puisque c'était l'absence dudit extincteur qui n'avait pu permettre d'éteindre l'incendie et de limiter les dommages (ibid.) ; que la Cour d'appel, qui a condamné la société Ponssé à verser la somme de 237. 500 ¿ à la compagnie Groupama, sans s'expliquer sur la faute de nature à engager la responsabilité de la société EFM, acquéreur, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
4) Alors que la faute du demandeur ayant contribué à la réalisation du dommage ou à son aggravation est de nature à en limite l'indemnisation ; que la Cour d'appel, qui a condamné la société Ponssé à verser la somme de 237. 500 ¿ à la compagnie Groupama, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions de la société Ponssé, p. 6), si l'absence du second extincteur fourni par le fabricant n'avait pas empêché le conducteur de l'engin de maîtriser le feu, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1341, 1645 et 1382 du Code civil ;
5) Alors que tout jugement doit, à peine de nullité, être motivé ; que la société Ponssé a fait valoir que si le tracteur du porteur s'était trouvé détruit, les pièces du bras de la grue et de la remorque avaient été récupérées, ainsi que la pince, et que ces éléments avaient une valeur certaine (p. 6), qu'il convenait que Groupama justifie de leur affectation, ces sommes étant à déduire d'une éventuelle indemnisation qui ne saurait aller au-delà du préjudice réellement subi (ibid.), pour demander (dispositif, p. 7) à la Cour d'appel, à titre subsidiaire, de réduire l'indemnité à revenir Groupama au prorata de la valeur résiduelle du matériel ; que la Cour d'appel, pour condamner la société Ponssé à verser la somme de 237. 500 ¿ à la compagnie Groupama, a retenu que devait être déduit du montant de la valeur résiduelle des équipements du tracteur forestier non détruits par l'incendie, le montant de l'indemnité devant revenir à la compagnie Groupama étant de 237. 500 ¿ ; qu'en statuant ainsi, en reprenant l'évaluation invoquée par Groupama de l'épave du tracteur, suivant l'avis de son expert, sans s'expliquer sur cette valeur et celle distincte des équipements récupérés, ni analyser, au moins sommairement, les éléments de preuve sur lesquels elle se fondait, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12-23504
Date de la décision : 19/02/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges, 24 mai 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 19 fév. 2014, pourvoi n°12-23504


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.23504
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