LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé à compter du 5 octobre 1998 par la société ADS Laminaire en qualité de monteur électro-mécanicien ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement de diverses sommes au titre de l'exécution de son contrat de travail ;
Sur le troisième moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'ancien article L. 212-4 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 et l'article L. 3121-4 du code du travail tel qu'issu de cette loi ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement de sommes à titre d'heures supplémentaires, l'arrêt retient que les fiches déclaratives produites par ce dernier ne sont pas seulement la base d'un décompte des heures travaillées mais également le relevé des frais exposés notamment pour les repas ; que par ailleurs, l'employeur ne produit pas le relevé des heures supplémentaires réellement effectuées par le salarié alors que celui-ci, sur le fondement des relevés de GPS qui ne sont pas établis systématiquement à partir de son domicile, démontre pour chaque jour le nombre d'heures de travail effectuées et qu'il s'en déduit qu'il a travaillé en heures supplémentaires ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors qu'elle avait constaté l'existence de trajets depuis le domicile du salarié, la cour d'appel qui n'a pas recherché, ainsi qu'il lui était demandé, si ces temps de trajet excédaient un temps normal de trajet d'un travailleur entre son domicile et son lieu de travail habituel, a privé sa décision de base légale ;
Et sur le deuxième moyen :
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement d'une somme à titre de dommages-intérêts pour défaut de communication des justificatifs des heures de travail effectuées en dehors des périodes faisant l'objet d'un rappel de salaire sur toute la période de septembre 2002 à août 2007, l'arrêt retient que le fait que pendant l'exécution du contrat de travail, l'employeur n'ait pas pris les mesures qui relevaient de son pouvoir d'organisation permettant de justifier des horaires effectués cause à celui-ci un préjudice certain ;
Attendu cependant qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'il en résulte que ces dispositions excluent la possibilité de réparer une perte de chance de prouver le nombre d'heures supplémentaires ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne l'employeur au paiement de sommes à titre d'heures supplémentaires, congés payés afférents et à titre de dommages-intérêts pour défaut de communication de justificatifs d'heures de travail, l'arrêt rendu le 4 avril 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf février deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour la société ADS Laminaire.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société ADS Laminaire à payer à M. X... les sommes de 6.143,48 ¿ et 614,34 ¿ au titre des congés payés afférents, à titre de rappel de salaires pour heures supplémentaires des mois de mars, avril, mai, juin, août et septembre 2005, janvier, février, mai, juin, juillet et septembre 2006,
AUX MOTIFS QUE M. X... expose que les relevés GPS de son véhicule de mars à juin 2005, d'août et septembre 2005, de janvier et février 2006, de mai à juillet 2006 et de septembre 2006 montrent qu'il effectuait des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été réglées ; que, pour étayer ses dires, outre les relevés GPS correspondant aux périodes ci-dessus citées, il produit le tableau des heures supplémentaires effectuées sur chacune de ces périodes et un tableau récapitulatif sur lequel sont déduites les sommes versées par l'employeur au titre des heures supplémentaires ; que la société ADS Laminaire expose que les heures supplémentaires ont été régulièrement payées puisqu'elles figurent sur les bulletins de paie ; que les décomptes présentés par M. X... sont en réalité des décomptes portant sur ses temps de déplacement sur des chantiers incluant le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail qui n'est pas un temps de travail effectif ; qu'en tout état de cause la contrepartie financière due en cas de dépassement du temps normal de trajet a été payée sous la forme d'une prime de rendement dont le calcul est effectué au mois le mois sur la base de déclarations sur l'honneur du salarié ; qu'elle produit des tableaux hebdomadaires pour les mois d'octobre 2005 et mai 2006 signés du salarié sur lesquels l'amplitude horaire travaillée quotidiennement est inscrite par le salarié de même que les frais exposés pour chaque journée, ainsi que les bulletins de paie correspondant à ces périodes qui mentionnent le paiement d'heures supplémentaires et le paiement d'une prime de rendement ; qu'il en résulte que les fiches déclaratives produites par l'employeur ne sont pas seulement la base d'un décompte des heures travaillées mais également le relevé des frais exposés notamment pour les repas ; que par ailleurs, l'employeur ne produit pas le relevé des heures supplémentaires réellement effectuées par M. X... alors que celui-ci, sur le fondement des relevés de GPS qui ne sont pas établis systématiquement à partir de son domicile, démontre pour chaque jour le nombre d'heures de travail effectuées et qu'il s'en déduit qu'il a travaillé en heures supplémentaires ; que le versement d'une prime exceptionnelle, quelle que soit sa qualification, ne pouvant tenir lieu de règlement des heures supplémentaires, ne serait-ce que pour partie de celles-ci, la cour, au vu des éléments produits de part et d'autre, a la conviction au sens de l'article L. 3171-4 du Code du travail que M. X... a bien effectué des heures supplémentaires non rémunérées ; que la société ADS Laminaire sera condamnée à payer à M. X..., à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires des mois de mars, avril, mai, juin, août et septembre 2005, janvier, février, mai juin, juillet et septembre 2006, les sommes de 6 143,48 ¿ et 624,34 ¿ au titre des congés payés afférents ;
1°- ALORS QU'aux termes de l'article L. 3121-4 du Code du travail, dans sa rédaction issue de la loi du 18 janvier 2005 applicable au litige, le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif ; qu'il peut seulement, s'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, faire l'objet d'une contrepartie, soit sous forme de repos, soit financière ; que les motifs ci-dessus, qui se fondent sur les heures indiquées sur les relevés GPS, sans distinguer celles concernant les temps de déplacements professionnels et celles concernant les temps de travail effectif, ne permettent pas à la Cour de cassation de contrôler si la cour d'appel n'a pas qualifié d'heures supplémentaires, des temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail ;
2°- ALORS QUE ne peut faire l'objet d'une contrepartie, soit sous forme de repos, soit financière, que la part du déplacement professionnel qui excède le temps normal de trajet domicile ¿ lieu habituel d'exécution du travail ; que le salarié reconnaissait lui-même, en page 9 de ses conclusions d'appel, que le décompte des heures supplémentaires dont il réclamait le paiement était établi « par rapport aux heures de démarrage et aux heures d'arrêt indiquées sur les relevés de GPS produits » et qu'il arrivait que le lieu de démarrage soit son domicile ; qu'en allouant au salarié l'intégralité de la somme qu'il réclamait, sans constater que tous ses déplacements résultant des relevés GPS dépassaient le temps normal de trajet entre son domicile et son lieu habituel de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3121-4 du Code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société ADS Laminaire à payer à M. X... la somme de 10 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour défaut de communication des justificatifs des heures de travail effectuées en dehors des périodes faisant l'objet d'un rappel de salaire sur toute la période de septembre 2002 à août 2007 ;
AUX MOTIFS QUE les fiches déclaratives produites par l'employeur ne sont pas seulement la base d'un décompte des heures travaillées mais également le relevé des frais exposés, notamment pour les repas (¿) ; que par ailleurs, l'employeur ne produit pas le relevé d'heures supplémentaires réellement effectuées par M. X... alors que celui-ci, sur le fondement des relevés de GPS qui ne sont pas établis systématiquement à partir de son domicile, démontre pour chaque jour le nombre d'heures de travail effectuées et qu'il s'en déduit qu'il a travaillé en heures supplémentaires ; que le fait que pendant l'exécution du contrat de travail l'employeur n'ait pas pris les mesures qui relevaient de son pouvoir d'organisation permettant de justifier des horaires effectués par le salarié sur la période de septembre 2002 à août 2007 cause à celui-ci un préjudice certain que la cour estime suffisamment réparé par l'allocation de la somme de 10 000 ¿ à titre de dommages et intérêts ;
1° ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que ces dispositions excluent la possibilité de réparer une perte de chance de prouver le nombre d'heures supplémentaires effectuées ; qu'en allouant au salarié des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par celui-ci du fait que la carence de son employeur l'avait privé de la possibilité de justifier des horaires qu'il avait effectués, la cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du Code du travail ;
2° ALORS au surplus QUE la cour d'appel a elle-même constaté que l'employeur produisait des fiches déclaratives dont il était constant qu'il s'agissait en fait de déclarations sur l'honneur faites chaque mois par le salarié ; qu'en privant de toute portée possible ces fiches déclaratives, au motif inopérant qu'elles ne portent pas « seulement » sur les heures travaillées, et en affirmant péremptoirement que l'employeur est fautif pour n'avoir pas pris les dispositions permettant de justifier de l'horaire accompli par le salarié, la cour d'appel a derechef violé l'article L. 3171-4 du Code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société ADS Laminaire à payer à M. Willy X... la somme de 5 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail,
AUX MOTIFS QUE depuis son embauche, M. X... exerçait son activité auprès de la clientèle à l'extérieur et effectuait de nombreux déplacements à l'étranger pour accomplir des missions de contrôle, d'installation et de réception de matériel sans que la qualité de son travail soit remise en cause par l'employeur qui n'hésitait pas à lui confier la formation sur le terrain de techniciens plus diplômés que lui et reconnaissait ainsi son expérience ; qu'en huit ans, l'affectation en atelier, certes prévue par le contrat de travail, n'avait été effective que le temps d'une période de six mois correspondant à un retrait de permis de conduire pour défaut de points ; que le fait de cantonner le salarié après une ancienneté de huit années à une activité répétitive en atelier, sans aucun contact avec la clientèle, qui a eu pour effet de le priver des responsabilités que lui donnait son autonomie et de lui faire perdre des avantages de rémunération liés au versement des primes de grand déplacement et de rendement, constitue une modification du contrat de travail que l'employeur n'était pas en droit d'imposer ; que le manquement à l'exécution de bonne foi du contrat de travail commis par l'employeur a causé un préjudice établi par les documents médicaux versés aux débats par le salarié à qui il convient d'allouer une somme de 5 000 ¿ à titre de dommages et intérêts ;
ALORS QUE l'intimée faisait valoir qu'elle avait remporté en août 2006 un important marché auprès de l'AP-HP, nécessitant la livraison d'un très grand nombre de hottes certifiées, ce qui impliquait la présence en atelier de monteurs électromécaniciens habilités à effectuer les contrôles, ce pourquoi elle avait demandé à Monsieur X..., référencé à ce titre depuis un an, d'exercer ses fonctions en atelier, temporairement et pour la durée d'exécution de ce marché ; qu'en décidant, après avoir elle-même constaté que le contrat de travail prévoyait l'affectation en atelier et que la classification du salarié était celle d'un ouvrier exécutant des tâches caractérisées par leur simplicité ou leur répétitivité, que la société aurait fautivement modifié le contrat de travail en affectant celui-ci à de telles tâches en atelier, sans rechercher si cette affectation ne présentait pas un caractère temporaire et n'était pas justifiée par l'obligation de satisfaire à un important marché exceptionnel, de sorte qu'elle ne présentait pas un caractère abusif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;