LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à Paris, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité formulée par mémoires spéciaux reçus les 20 et 27 novembre 2013 et présentés par :
- M. Cyrille X...,
à l'occasion du pourvoi, enregistré le 2 décembre 2013, formé par lui contre l'arrêt de la cour d'appel de SAINT-DENIS DE LA REUNION, chambre correctionnelle, en date du 14 novembre 2013, qui, pour détournement de fonds publics, l'a condamné à dix mois d'emprisonnement avec sursis, trois ans d'interdiction des droits civiques, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 14 janvier 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel, président, M. Maziau, conseiller rapporteur, Mme Guirimand, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire MAZIAU et les conclusions de M. le premier avocat général BOCCON-GIBOD ;
Sur la contestation du refus de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel :
Attendu que M. X... entend contester le refus, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion qui s'est prononcée par arrêt distinct, en date du 3 octobre 2013, de la transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison des articles 23-2, alinéa 6, et 23-5, alinéa premier, de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée, portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, que le refus de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité ne peut faire l'objet que d'une contestation, laquelle doit être présentée à l'occasion du pourvoi contre la décision réglant tout ou partie du litige, sous forme d'un écrit distinct et motivé posant de nouveau la question ;
Sur la question prioritaire de constitutionnalité ainsi formulée par le demandeur :
"Les articles 40, alinéa 1er, 40-1, 75, alinéa 1er, 79 et 80, alinéa 1er, du code de procédure pénale sont-ils ensemble contraire à la Constitution au regard des articles 6, 7, 8, 9 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ainsi qu'au principe du droit à une procédure juste et équitable, d'égalité devant la loi et d'égalité devant la justice, en ce qu'ils confèrent au procureur de la République le pouvoir discrétionnaire de choisir le mode de poursuite : enquête préliminaire ou information judiciaire, choix duquel résulte pour la personne mise en cause la faculté ou non d'exercer au cours de cette phase préalable au procès pénal les droits premiers de la défense que sont le droit d'être assisté par un avocat, le droit de prendre connaissance du dossier de la procédure, le droit de contester la légalité des poursuites et le droit de solliciter des actes d'investigations et des expertises techniques, autant de droits qu'une personne mise en examen dans le cadre d'une information judiciaire est en mesure d'exercer, à la différence d'une personne mise en cause dans le cadre d'une enquête préliminaire qui en est privée jusqu'à sa comparution en qualitée de prévenue devant le tribunal correctionnel ?" ;
Attendu que les dispositions contestées sont applicables à la procédure et n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans une décision du Conseil constitutionnel ;
Mais attendu que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;
Et attendu que la question posée ne présente pas, à l'évidence, un caractère sérieux en ce que les dispositions légales critiquées, qui permettent au procureur de la République, lorsqu'il estime que les faits portés à sa connaissance constituent un délit, de décider que la poursuite se fera, après enquête préliminaire, par la voie de la citation directe devant le tribunal, sans ouverture d'information, ne modifient pas le déroulement du procès pénal, et ne privent pas la personne d'un procès juste et équitable, celle-ci quant au respect des droits de la défense ayant, devant la juridiction, des garanties équivalentes à celles dont elle aurait bénéficié si l'affaire avait fait l'objet d'une information ;
D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel ;
Par ces motifs :
DIT IRRECEVABLE le moyen contestant le refus de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité opposé par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ;
DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze février deux mille quatorze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;