LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à Mme X... de ce qu'elle se désiste de son pourvoi dirigé contre la caisse régionale du régime social des indépendants et la caisse primaire d'assurance maladie de Villefranche-sur-Saône ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 30 août 2012), que Mme X..., gérante et associée unique de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée L'Azerguoise Taxi (l'EURL) sous la forme de laquelle elle exerce son activité de chauffeur de taxi, a été victime le 5 juillet 2004 d'un accident de la circulation impliquant le véhicule automobile conduit par M. Y... assuré par la société Groupama Rhône-Alpes Auvergne (l'assureur) ; que Mme X... et l'EURL ont assigné en indemnisation de leurs préjudices respectifs M. Y... et son assureur ;
Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de fixer à la somme de 15 000 euros le montant de l'indemnité réparant "l'incidence professionnelle du déficit fonctionnel ( perte de gains professionnels futurs)" subie par Mme X..., et, en conséquence, de le condamner à lui payer cette somme après déduction des provisions déjà versées, alors, selon le moyen, qu'en lui allouant une indemnité au titre de l'incidence professionnelle de son déficit fonctionnel, après avoir constaté que cette incidence était déjà prise en compte dans le cadre de l'indemnisation du préjudice subi par l'EURL, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, et a violé le principe de réparation intégrale du préjudice ;
Mais attendu que, contrairement aux énonciations du moyen, la cour d'appel a accordé à Mme X... une indemnité d'un montant de 15 000 euros non pas pour la perte de ses gains professionnels futurs mais, comme l'énonce son dispositif, au titre de "l'incidence professionnelle" de son incapacité caractérisée, par motifs adoptés, par une pénibilité accrue dans l'exercice de son travail ; que c'est sans violer le principe de la réparation intégrale du préjudice que la cour d'appel a indemnisé l'EURL pour le préjudice économique distinct subi du fait des conséquences sur sa propre activité des dommages corporels occasionnés à Mme X... par l'accident du 5 juillet 2004 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le moyen unique du pourvoi principal et le second moyen du pourvoi incident ne sont pas de nature à permettre l'admission des pourvois ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne Mme X... et la société Groupama Rhône-Alpes Auvergne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize janvier deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Blanc et Rousseau, avocat aux Conseils, pour Mme X...
Il est reproché à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir limité à 15 000 euros la perte de gains professionnels futurs subie par Mme X... qui exerçait l'activité d'artisan chauffeur de taxi,
Aux motifs qu'au vu du rapport médical, il s'agit d'indemniser l'incidence professionnelle sur la rémunération de Dominique X... de son déficit fonctionnel, l'expert ayant justement estimé que celui-ci était responsable à 33 % de l'incidence sur son activité professionnelle, en observant que Dominique X... ne donne aucune information sur sa situation professionnelle actuelle, Groupama Rhône-Alpes Auvergne justifiant au demeurant de la poursuite de l'activité de l'EURL en novembre 2011, sans observations de l'appelante,
Alors que 1°) Mme X... avait produit et invoqué une fiche d'inaptitude du bureau de la circulation de la préfecture de la région Rhône-Alpes et du département du Rhône du 26 janvier 2011 la déclarant inapte à la conduite des véhicules automobiles (pièce n° 35) et un certificat médical des membres de la commission médicale du permis de conduire de la même date la déclarant inapte à la conduite automobile (pièce n° 36) ; qu'en ayant énoncé que Mme X... « ne donne aucune information sur sa situation professionnelle actuelle », la cour d'appel a dénaturé par omission ces deux documents et a violé l'article 4 du code de procédure civile,
Alors que 2°) la cour d'appel n'a pas indiqué sur quel élément de preuve qui aurait été produit par la société Groupama, elle s'est fondée pour retenir que Mme X..., déclarée inapte à la conduite d'un véhicule automobile et privée de permis de conduire au mois de janvier 2011, aurait néanmoins pu en novembre 2011 conduire un taxi, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile.
Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la société Groupama Rhône-Alpes Auvergne,
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fixé à un montant de 15.000 euros l'incidence professionnelle de son déficit fonctionnel (perte de gains professionnels futurs) subie par madame X..., et d'avoir, en conséquence, condamné la compagnie Groupama Rhône-Alpes Auvergne à lui payer la somme de 1.091,88 ¿ après déduction des provisions déjà versées et des sommes versées au titre de l'exécution provisoire ;
AUX MOTIFS QU'au vu du rapport médical, il s'agit là d'indemniser l'incidence professionnelle sur la rémunération de Dominique X... de son déficit fonctionnel, l'expert ayant justement estimé que celui-ci était responsable de 33% de l'incidence sur son activité professionnelle, en observant d'une part, que cette incidence sera prise en compte sur la situation financière de l'EURL et donc sur le préjudice subi par cette société, d'autre part que Dominique X... ne donne aucune information sur sa situation professionnelle actuelle, Groupama Rhône Alpes Auvergne justifiant au demeurant de la poursuite de l'activité de l'EURL au novembre 2011, sans observation de l'appelante ; que cette incidence a été justement évaluée par le premier juge, en notant au surplus que la création de l'EURL était assez récente à la date de l'accident de juillet 2004, les statuts ayant été établis le 28 décembre 2001 et que l'on ne sait rien sur la situation professionnelle antérieure de Dominique X... et sur sa formation professionnelle ;
ALORS QU'en allouant à madame X... une indemnité au titre de l'incidence professionnelle de son déficit fonctionnel, après avoir constaté que cette incidence était déjà prise en compte dans le cadre de l'indemnisation du préjudice subi par l'EURL L'Azerguoise taxi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, et a violé le principe de réparation intégrale du préjudice.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fixé le préjudice subi par l'EURL L'Azerguoise taxi à la somme de 98.706 euros, et d'avoir, en conséquence, condamné la compagnie Groupama Rhône-Alpes Auvergne à lui payer la somme de 46.977 euros après déduction de la provision déjà versée et des sommes réglées au titre de l'exécution provisoire ;
AUX MOTIFS QU'au vu du rapport médical, il s'agit là d'indemniser l'incidence professionnelle sur la rémunération de Dominique X... de son déficit fonctionnel, l'expert ayant justement estimé que celui-ci était responsable de 33% de l'incidence sur son activité professionnelle, en observant d'une part, que cette incidence sera prise en compte sur la situation financière de l'EURL et donc sur le préjudice subi par cette société, d'autre part que Dominique X... ne donne aucune information sur sa situation professionnelle actuelle, Groupama Rhône Alpes Auvergne justifiant au demeurant de la poursuite de l'activité de l'EURL au novembre 2011, sans observation de l'appelante ; que cette incidence a été justement évaluée par le premier juge, en notant au surplus que la création de l'EURL était assez récente à la date de l'accident de juillet 2004, les statuts ayant été établis le 28 décembre 2001 et que l'on ne sait rien sur la situation professionnelle antérieure de Dominique X... et sur sa formation professionnelle (préjudice de madame X...) ; que sur l'évaluation du préjudice de l'Azerguoise taxi, la cour dispose, pour l'appréciation de ce préjudice du rapport de l'expert-comptable, Jean Bachelet, désigné par ordonnance de référé du 2 mai 2007, réalisé le 26 mai 2008, en rappelant qu'il était notamment demandé à l'expert de donner tous éléments techniques et comptables permettant d'apprécier le préjudice patrimonial, financier, matériel et économique de toute nature subi par l'EURL et par Dominique X..., tant du fait de l'indisponibilité de cette dernière que du fait de la nécessité pour celle-ci de réorganiser son activité en raison des séquelles de l'accident du 5 juillet 2004 ; que l'expert a notamment relevé que Dominique X... a le statut de gérant associé unique, et les charges de personnel de l'EURL sont constituées par la seule rémunération du travail de l'exploitante de 2002 à 2005 et que les charges du personnel en 2006 se composent de salaires versés au cours du dernier trimestre 2006 ainsi que de la rémunération de l'exploitant ; qu'après avoir précisé que le préjudice de l'EURL et celui de Dominique X... sont confondus compte tenu du régime d'imposition de cette société et des fonctions de Dominique X..., il a retenu un chiffre d'affaires annuel de référence de 53.900 euros avec un revenu fiscal « normal » de 18.162 euros environ et a fait le récapitulatif suivant :
« - indemnité pour perte sur résultat sur la période de 2004 à 2006 :35.565 euros ;- indemnité pour reconstitution de clientèle période 2007 à 2009 : 9.664 euros ;- indemnité pour obligation d'emploi d'un salarié période 2007 à 2014 :53.477 euros ;- au total indemnisation suite à accident de madame X... : 98.706 euros ;- cette somme est actualisée au 1er janvier 2008. » ;
que ces conclusions ont été déposées au terme d'une analyse sérieuse et après avoir pris connaissance des dires des parties ; qu'en ce qui concerne l'indemnité pour perte sur résultat sur la période de 2004 à 2006 à hauteur de 35.565 euros et l'indemnité pour reconstitution de clientèle période 2007 à 2009 à hauteur de 9.664 euros, le premier juge a relevé que les parties n'étaient pas en opposition sur le paiement de ces sommes ; qu'il convient donc de les entériner en l'absence de tout élément nouveau à ce sujet ; que concernant l'indemnité pour obligation d'emploi d'un salarié période 2007 à 2014 d'un montant de 53.477 euros, l'expert a estimé que l'incapacité permanente partielle de 12% de Dominique X... justifiait suffisamment l'emploi d'un salarié, étant observé d'une part, que la dernière expertise retient que ce déficit fonctionnel permanent de Dominique X... est responsable de 33% de l'incidence sur l'activité professionnelle, ce qui, compte tenu de la spécificité de l'emploi de Dominique X... dont personne ne conteste qu'elle assurait notamment des transports d'enfants pour le compte du Conseil général, justifie d'autant plus l'embauche d'un salarié comme retenu par l'expert comptable, et d'autre part, que les sommes ainsi retenues n'interfèrent pas avec les incidences de l'accident sur la rémunération de Dominique X... précédemment retenues ; que le préjudice de l'EURL sera donc fixé à la somme globale telle qu'évaluée par l'expert, soit à la somme de 98.606 euros, en notant que la cour, rejetant les prétentions de Dominique X... sur l'inaptitude qu'elle invoque, peut retenir la somme susvisée dans la mesure où l'indemnisation totale accordée est bien inférieure à la demande globale ;
1°) ALORS QU' en allouant à l'EURL L'Azerguoise taxi l'intégralité des sommes retenues par l'expert-comptable dans son rapport du 26 mai 2008, après avoir pourtant adopté les conclusions de l'expertise médicale du docteur Z... du 16 août 2011 selon lesquelles le déficit fonctionnel permanent n'était responsable que de 33% de l'incidence sur l'activité professionnelle de l'EURL, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, et a violé le principe de réparation intégrale du préjudice ;
2°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU' en allouant à l'EURL L'Azerguoise taxi l'intégralité des sommes retenues par l'expert-comptable dans son rapport du 26 mai 2008, sans répondre aux conclusions d'appel de la compagnie Groupama du 29 novembre 2011 (pp. 17-18), faisant valoir qu'il résultait de l'expertise médicale du docteur Z... du 16 août 2011 que le déficit fonctionnel permanent n'était responsable que de 33% de l'incidence sur l'activité professionnelle de l'EURL, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QU' en retenant que les parties n'étaient pas en opposition sur le paiement de la somme de 35.365 euros au titre de l'indemnité pour perte de résultat de 2004 à 2006 et de la somme de 9.664 euros au titre de l'indemnité pour reconstitution de clientèle de 2007 à 2009, quand la compagnie Groupama demandait, dans ses conclusions d'appel du 29 novembre 2011 (pp. 17-18), l'application d'un taux de 33% sur ces sommes à la suite des conclusions de l'expertise du docteur Z..., la cour d'appel a dénaturé les conclusions précitées, et a violé l'article 4 du code de procédure civile.