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15/01/2014 | FRANCE | N°12-24701

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 janvier 2014, 12-24701


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 10 octobre 2009 en qualité d'agent d'entretien par la société Arras poly services, a été victime, le 16 juillet 2010, d'un accident du travail ayant nécessité un arrêt de travail du 17 au 30 juillet 2010 ; qu'ayant repris son activité le 2 août 2010, il a pris acte le 1er mars 2011 de la rupture de son contrat de travail ; que par jugement du 20 juillet 2010, le tribunal de commerce a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société Arras poly services et nommé la société Z...-Y... prise en la

personne de M. Y... en qualité de commissaire à l'exécution et d'ad...

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 10 octobre 2009 en qualité d'agent d'entretien par la société Arras poly services, a été victime, le 16 juillet 2010, d'un accident du travail ayant nécessité un arrêt de travail du 17 au 30 juillet 2010 ; qu'ayant repris son activité le 2 août 2010, il a pris acte le 1er mars 2011 de la rupture de son contrat de travail ; que par jugement du 20 juillet 2010, le tribunal de commerce a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société Arras poly services et nommé la société Z...-Y... prise en la personne de M. Y... en qualité de commissaire à l'exécution et d'administrateur judiciaire et la société Ouizille-de Keating prise en la personne de M. A... en qualité de mandataire judiciaire ; que par jugement du 11 octobre 2012, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la société et a désigné la société Ouizille-de Keating prise en la personne de M. A... en qualité de liquidateur judiciaire ;
Sur les premier et second moyens du pourvoi principal de l'employeur :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié :
Vu l'article R. 4624-10 du code du travail ensemble l'article 1147 du code civil ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande à titre de dommages-et-intérêts pour absence de visite médicale d'embauche, l'arrêt retient que le salarié ne justifie d'aucun préjudice de ce chef ;
Attendu, cependant, que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat, doit en assurer l'effectivité ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que le manquement de l'employeur causait nécessairement au salarié un préjudice, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de M. X... tendant à obtenir des dommages-intérêts pour défaut de visite médicale d'embauche, l'arrêt rendu le 27 juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la société Ouizille-de Keating, prise en la personne de M. A... en qualité de liquidateur judiciaire de la société Arras Poly services, aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne M. A..., pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société Arras Poly services, à payer la somme de 1 500 euros à la SCP Didier et Pinet ; rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Arras Poly services, la société Z...-Y... et la société Ouizille-de-Keating
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par Monsieur X... était justifiée et produisait dès lors les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'AVOIR, en conséquence, fixé au passif de la société ARRAS POLY SERVICES, au profit du salarié, diverses sommes à titre d'indemnité de préavis (1. 407, 56 €), congés payés y afférents, indemnité de licenciement (304, 11 euros et dommages-et-intérêts pour licenciement injustifié (5 600 euros) ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur la prise d'acte de la rupture : c'est par des motifs pertinents que la cour fait siens que le conseil de prud'hommes a considéré que la société APS avait failli à son obligation de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise en n'organisant de visite médicale de reprise en méconnaissance des dispositions de l'article R. 624-21 du code du travail et que la prise d'acte de la rupture produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. La circonstance que M. X... ait attendu plus de 8 mois pour s'en plaindre est inopérante, le manquement de l'employeur à assurer l'effectivité de cette obligation de sécurité, qui est une obligation de résultat, est d'une gravité telle qu'il rend impossible la poursuite de la relation de travail. Le jugement sera en conséquence confirmé sur ce point ainsi que sur l'allocation de la somme de 5 600 euros de dommages-intérêts pour licenciement abusif, justement appréciée, cette rupture ayant nécessairement causé un préjudice au salarié. Il sera également confirmé, tant en principe qu'en quantum, des chefs de l'indemnité de préavis, des congés payés y afférents, et de l'indemnité pour violation des dispositions de l'article R. 624-21 du code du travail, peu important que M. X... ait eu une visite médicale à une date d'ailleurs non précisée par la société APS et, de ce fait, ne soit pas resté sans suivi médical et ait également commis des erreurs dans ses déclarations d'accident transmises à la CPAM et, enfin, que l'employeur n'ait pas été destinataire des versements effectués par la sécurité sociale au profit du salarié durant l'arrêt de travail dont s'agit, ces circonstances n'étant pas de nature à faire disparaître le préjudice résultant nécessairement de l'absence de visite de reprise. Ajoutant au jugement, il sera fait droit à la demande bien fondée de M. X... tendant à l'allocation de l'indemnité légale de licenciement à hauteur de 304, 11 euros ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTÉS DES PREMIERS JUGES, QUE « sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif : vu l'article L. 1231-1 du code du travail, le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié « ou d'un commun accord » dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre. Ces dispositions ne sont pas applicables pendant la période d'essai. Lorsque le salarié prend acte de la rupture en raison des faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués le justifient, soit d'une émission dans le cas contraire ; vu l'article L. 1237-2 du code du travail, la rupture d'un contrat de travail à durée indéterminée à l'initiative du salarié ouvre droit, si elle est abusive, à des dommages-et-intérêts pour l'employeur. En cas de litige, le juge se prononcer conformément aux dispositions de l'article L. 1235-1 ; vu l'article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié. Vu l'article R. 624-21 du code du travail, le salarié bénéficie d'un examen de reprise du travail par le médecin du travail : 1. Après un congé de maternité ; 2. Après une absence pour cause de maladie professionnelle ; 3. Après une absence d'au moins huit jours pour cause d'accident du travail ; 4. Après une absence d'au moins vingt et un jours pour cause de maladie ou d'accident non professionnel ; 5. En cas d'absence répétées pour raisons de santé ; qu'en droit, l'employeur, tenue d'une obligation de sécurité et de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, doit en assurer l'effectivité ; il ne peut dès lors laisser un salarié reprendre son travail après une période d'absence d'au moins huit jours pour cause d'accident du travail sans le faire bénéficier lors de la reprise du travail ou au plus tard dans les huit jours de celle-ci, d'un examen par le médecin du travail destiné à apprécier son aptitude à reprendre son ancien emploi - le non respect par l'employeur de ses obligations relatives à la visite médicale de reprise cause nécessairement un préjudice au salarié ; qu'en l'espèce, M. Boubacary X... a eu un accident du travail le 16 juillet 2010 et qu'il a été en arrêt de travail du 17 au 30 juillet 2010, soit une durée supérieure à huit jours ; qu'il a repris son travail le 2 août 2010 et que son employeur la SARL ARRAS POLY SERVICES ne lui a pas fait passer de visite médicale de reprise et cela jusqu'au 2 mars 2011, date à laquelle M. Boubakary X... prend acte de la rupture de son contrat de travail aux torts exclusifs de son employeur pour ce motif précis ; qu'en l'espèce, la SARL ARRAS POLY SERVICES a failli à son obligation en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise ; qu'en l'espèce, le grief reproché à la SARL ARRAS POLY SERVICES justifie la rupture du contrat par Monsieur Boubakary X... et la prise d'acte produit en conséquence les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; en conséquence le Conseil fait droit à la demande de M. Boubakary X... de dommages-et-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse pour la somme de 5 600 euros. Sur la demande d'indemnité compensatrice de préavis et de congés y afférents : vu l'article L. 1234-5, lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice ; que ce qui précède, la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, M. Boubakary X... a droit à l'indemnité compensatrice de préavis et à l'indemnité de congés payés sur préavis ; en conséquence le Conseil fait droit à la demande de Monsieur Boubakary X... d'indemnité de préavis pour la somme de 1 407, 56 euros et des congés payés afférents pour la somme de 140, 75 euros » ;

ALORS, D'UNE PART, QU'il appartient aux juges du fond d'apprécier concrètement, au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce si le manquement de l'employeur invoqué par le salarié à l'appui de sa prise d'acte de la rupture du contrat de travail, présente un degré de gravité suffisant pour la justifier ; qu'en se bornant à affirmer, abstraitement, que le défaut de visite médicale de reprise dans le délai prévu par l'article R. 624-21 du code du travail justifiait nécessairement la prise d'acte, sans exercer son pouvoir d'appréciation sur les faits de l'espèce, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a violé les articles L. 1231-1, L. 1237-1 et L. 1221-1 du code du travail, ensemble l'article 1184 du code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la société ARRAS POLY SERVICES avait fait valoir (en page 9 de ses conclusions), sans être contredite, que M. X... avait fait l'objet, postérieurement à la reprise de son travail, d'une visite médicale de telle sorte qu'il n'était pas resté sans suivi médical même si les dispositions de l'article R. 624-21 du code du travail n'avaient pas été respectées ; qu'en s'abstenant de rechercher si le manquement reproché à l'employeur n'avait pas été réparé au jour où le salarié avait pris acte de la rupture du contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1231-1, L. 1237-1 et L. 1221-1 du code du travail, ensemble l'article 1184 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fixé au passif de la société ARRAS POLY SERVICES les sommes de 609, 13 euros à titre de rappel de salaire pour la période comprise entre les mois d'août 2010 et janvier 2011 et 60, 19 euros au titre des congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE « sur le rappel de salaires et de congés payés y afférents : le jugement sera confirmé en ce qu'il a alloué à M. X... de ces chefs, diverses sommes justement calculées. M. X... n'ayant pas signé l'avenant à son contrat de travail en date du 1er août 2010, n'a pas donné son accord express à la modification des éléments substantiels de son contrat de travail relatifs à la diminution du temps hebdomadaire et de la rémunération en résultant. La société APS qui a passé outre, ne peut valablement prétendre que le salarié n'en a subi aucun préjudice alors qu'elle admet qu'il a subi une perte de rémunération entre août et décembre 2010, ni qu'il en a tiré bénéfice à compter de janvier 2011 suite au paiement d'heures complémentaires, aucune compensation n'étant prévue » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTÉS DES PREMIERS JUGES QUE « sur la demande de rappel de salaires d'août 2010 à janvier 2011 et des congés payés afférents : Monsieur Boubakary X... a été engagé par un contrat de travail à durée déterminée du 10 octobre 2009 au 9 janvier 2011, l'article 3 du contrat de travail « durée et horaires de travail » stipulant une durée mensuelle de travail de 151 h 55 soit 35 heures hebdomadaires, du lundi au samedi de 6 h à 12 h ; que le contrat de travail à durée indéterminée conclu au terme du contrat à durée déterminée le 11 janvier 2010, en son article 3, stipule que « les horaires de travail restent inchangés ¿ la durée hebdomadaire de travail sera de 35 heures soit 151 h 55 mensuelles » ; qu'en l'espèce un avenant au contrat de travail de M. Boubakary X... a été établi le 1er août 2010, modifiant la durée hebdomadaire de travail, qui passe ainsi de 35 heures par semaine à 32 h 50 soit 140 h 73 mensuelles, au lieu de 151 h 55, les horaires de travail étant désormais de 6 h à 12 h 30 du lundi au vendredi ; qu'en l'espèce, M. Boubakary X... n'a pas signé cet avenant réduisant son temps de travail de 2 h 50 par semaine soit 10 h 82 par mois et réduisant en conséquence sa rémunération brute de 95, 87 euros par mois ; qu'en l'espèce Monsieur Boubakary X... n'a pas donné son accord express sur la modification des éléments substantiels de son contrat de travail ; qu'en l'espèce la SARL ARRAS POLY SERVICES ne pouvait modifier unilatéralement ces éléments ; en conséquence, le Conseil fait droit à la demande de Monsieur Boubakary X... de rappel de salaires du 1er août 2010 au 11 janvier 2011 pour la somme de 609, 13 euros et des congés payés afférents pour la somme de 60, 19 euros » ;
ALORS QUE la société ARRAS POLY SERVICES faisait valoir dans ses conclusions (pages 6-7) que compte tenu des heures complémentaires effectuées, Monsieur X... avait effectué un travail, et perçu une rémunération au moins égale au salaire correspondant à 35 heures par semaine, de sorte que l'application erronée, dans les bulletins de paie, de l'avenant non signé prévoyant une réduction de la durée du travail de 35 à 32, 5 heures par semaine ne s'était en définitive traduite pas aucune perte de salaire sur la période considérée ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen de défense décisif, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de sa demande de dommages-et-intérêts pour défaut de visite médicale d'embauche.
AUX MOTIFS PROPRES QUE le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. X... de ce chef de demande, le salarié ne justifiant d'aucun élément à ce sujet et ce d'autant qu'il ne s'en était jamais plaint auparavant ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE M. X... n'apporte aucun élément probant quant au préjudice subi ;
ALORS QUE l'employeur étant tenu d'une obligation de sécurité de résultat dont il doit assurer l'effectivité, l'absence de visite médicale d'embauche cause nécessairement un préjudice au salarié dont il doit être indemnisé ; que pour débouter M. X... de sa demande de dommages-et-intérêts pour absence de visite d'embauche la cour d'appel retient que le salarié ne justifie d'aucun préjudice de ce chef ; qu'en statuant ainsi la cour d'appel a violé l'article R. 624-10 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-24701
Date de la décision : 15/01/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 27 juin 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 jan. 2014, pourvoi n°12-24701


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.24701
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