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15/01/2014 | FRANCE | N°11-24522

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 15 janvier 2014, 11-24522


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 17 février 2011), que, le 30 juin 2009, un aéronef, exploité par la société Yemenia Airways (le transporteur aérien), en provenance de Sanaa (Yemen) et à destination de Moroni (Comores), s'est abîmé en mer, causant la mort de 152 passagers ; que des ayants droit de victimes ont assigné en référé-provision le transporteur aérien sur le fondement de la Convention de Montréal ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les ayants droit des victimes font

grief à l'arrêt d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce que cette dernièr...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 17 février 2011), que, le 30 juin 2009, un aéronef, exploité par la société Yemenia Airways (le transporteur aérien), en provenance de Sanaa (Yemen) et à destination de Moroni (Comores), s'est abîmé en mer, causant la mort de 152 passagers ; que des ayants droit de victimes ont assigné en référé-provision le transporteur aérien sur le fondement de la Convention de Montréal ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les ayants droit des victimes font grief à l'arrêt d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce que cette dernière leur avait alloué des provisions supérieures à 100 000 DTS, soit la contre valeur en euros au 15 septembre 2010 de 117 000 euros et, statuant à nouveau de ce chef, de limiter le montant de ces provisions, alors, selon le moyen :
1°/ que l'article 21 de la Convention de Montréal pose une présomption de faute du transporteur et que seule la preuve positive par le transporteur de son absence de faute ou d'un fait exonératoire de responsabilité, permet d'écarter son obligation à réparation des dommages dépassant le seuil de 100 000 DTS par passager, seuil en deçà duquel le transporteur ne peut exclure ou limiter sa responsabilité ; qu'en l'espèce il est constant que la société Yemenia n'a pas apporté le moindre commencement de preuve de son absence de faute, ni de faits exonératoires de responsabilité ; qu'en se fondant sur la seule existence d'une enquête en cours afin de déterminer les circonstances et les causes de l'accident pour dire que l'obligation à réparation par la société Yemenia de l'entier dommage était sérieusement contestable, la cour d'appel a violé ensemble les articles 17, 21 de la Convention de Montréal du 28 mai 1999 pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international et l'article 809 du code de procédure civile ;
2°/ que l'article 21 de la Convention de Montréal pose une présomption de faute du transporteur et que seule la preuve positive par le transporteur de son absence de faute ou d'un fait exonératoire de responsabilité, permet d'écarter son obligation à réparation des dommages dépassant le seuil de 100 000 DTS par passager, seuil en deçà duquel le transporteur ne peut exclure ou limiter sa responsabilité ; qu'en l'espèce il est constant que la société Yemenia n'a pas apporté le moindre commencement de preuve de son absence de faute, ni de faits exonératoires de responsabilité ; qu'en disant qu'il y avait contestation sérieuse au seul motif de l'existence d'une enquête sans rechercher si des indices sérieux permettaient de laisser supposer l'absence de faute de la société Yemenia, la cour d'appel a manqué de base légale au regard ensemble des articles 17 et 21 de la Convention de Montréal du 28 mai 1999 pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international et de l'article 809 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir rappelé les termes de l'article 21, paragraphe 1, de la Convention de Montréal, l'arrêt relève que le transporteur aérien, qui conteste l'étendue de son obligation à réparation sur le fondement de ce texte, n'est pas, à ce jour, en mesure de rapporter la preuve des faits exonératoires de responsabilité y afférents, en l'état de l'enquête en cours destinée à déterminer les circonstances et les causes de l'accident ; qu'il indique qu'une enquête de sécurité a été ouverte par les Comores, à laquelle participent le Yémen, en tant qu'Etat d'immatriculation et d'exploitation de l'aéronef, ainsi que la France, en tant qu'Etat de conception et de construction de celui-ci, outre les Etats Unis, en tant qu'Etat de construction des moteurs de l'appareil ; qu'il précise l'état d'avancement de ces investigations et relève qu'une enquête judiciaire a été ouverte en France, parallèlement à cette enquête technique, et que celle-ci est toujours en cours ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, dont il résulte l'existence d'une contestation sérieuse sur l'étendue de l'obligation à réparation du transporteur aérien, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de limiter les provisions demandées au seuil de 100. 000 DTS ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... et les autres ayants droit des victimes aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, avocat aux Conseils, pour M. X... et les 128 autres demandeurs.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé l'ordonnance de référé entreprise en ce qu'elle a alloué des provisions aux ayants-droits des passagers victimes : Hadidja Y..., Mrahati Y..., Hamidou Z..., Mariana Ibouroi A..., Nassabiat B..., Zalhata B..., Hamadi C..., Abdou D..., Moussa Youssouf E... supérieures à 100. 000 DTS, soit la contrevaleur en euros au 15 septembre 2010 de ¿, et statuant à nouveau, d'AVOIR limité le montant des différentes provisions allouées aux ayants droit des passagers victimes soumis à la Convention de Montréal ;
AUX MOTIFS QUE « sur l'application de la convention de Montréal de 1999 : il n'est pas contesté que cette Convention s'applique à tous les intimés hormis le cas de Adam F...; que la société Yéménia fait valoir qu'en application de l'article 21 de la Convention, pour les dommages ne dépassant pas 100. 000 DTS par passager, le transporteur ne peut exclure ou limiter sa responsabilité ; que le transporteur n'est pas responsable des dommages qui dépassent 100. 000 DTS par passager, s'il prouve que le dommage n'est pas dû à sa négligence, ou est dû à la négligence d'un tiers ; que l'appelante expose qu'en l'espèce l'enquête est en cours, qu'elle seule permettra d'établir les responsabilités de l'accident, que dans l'attente le juge des référés n'a pas le pouvoir de se prononcer sur le fond du litige et d'allouer des indemnités provisionnelles supérieures à 100. 000 DTS par passager (soit 117. 000 ¿ au 15 septembre 2010) ; qu'elle demande l'infirmation de la décision qui a accordé des sommes supérieures aux ayantsdroit des passagers 53, 52, 43, 46, 1, 110, 35, 58, 107, à titre subsidiaire du passager 81 (Brino Beurard) ; que les intimés s'opposent à la demande ; qu'ils font valoir pour l'essentiel que l'article 21 de la Convention édicte une présomption de responsabilité du transporteur au dessus de 100. 000 DTS, sauf preuve de faits exonératoires qu'il doit établir ; qu'à défaut, la responsabilité de plein droit du transporteur doit être retenue, sans plafond ou limite de garantie ; qu'ils soutiennent qu'en l'espèce, la société Yéménia ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de l'existence de faits exonératoires de sa garantie et qu'en conséquence la cour d'appel statuant en référé, peut allouer des provisions supérieures à 100. 000 DTS ; qu'ils demandent la confirmation de la décision ; qu'aux termes de l'article 17 de la Convention de Montréal, le transporteur est responsable du préjudice survenu en cas de mort ou de lésion corporelle subie par un passager, par cela seul que l'accident qui a causé la mort ou la lésion s'est produit à bord de l'aéronef ; que l'article 21 prévoit les conditions d'indemnisation en cas de mort ou de lésion du passager en ces termes : 1- Pour les dommages visés au paragraphe 1 de l'article 17 et ne dépassant pas 100. 000 droits de tirage spéciaux par passager, le transporteur ne peut exclure ou limiter sa responsabilité ; 2- le transporteur n'est pas responsable des dommages visés au paragraphe 1 de l'article 17 dans la mesure où ils dépassent 100. 000 DTS par passager, s'il prouve : a) que le dommage n'est pas dû à la négligence ou à un autre acte ou omission préjudiciable du transporteur, de ses préposés ou de ses mandataires, ou b) que ces dommages résultent uniquement de la négligence ou d'un autre acte ou omission préjudiciable d'un tiers ; qu'en l'espèce, la preuve de faits exonératoires de responsabilité dans les termes de ce texte n'est pas rapportée, pour l'heure, par la société Yéménia ; mais que cette dernière soutient à bon droit, qu'elle n'est pas en mesure de le faire en l'état de l'enquête en cours destinée à déterminer les circonstances et les causes de l'accident ; que les pièces du dossier révèlent qu'une enquête de sécurité a été ouverte par les Comores, à laquelle participent le Yémen (Etat d'immatriculation et d'exploitation de l'avion), la France (Etat de conception et de construction de l'avion) et les Etats-Unis (Etat de la construction des moteurs de l'avion) ; que les investigations menées dans ce cadre ont permis la récupération des enregistreurs de vol ainsi que leur lecture ; que selon le point d'information livré par le bureau d'enquête et d'analyses pour la sécurité de l'aviation (BEA) qui représente la France, du 30 juin 2010, la lecture des enregistreurs a permis de connaître les circonstances qui ont conduit à l'accident sans toutefois en déterminer les causes, ce que seule la poursuite de l'enquête pourra faire ; que de même l'enquête judiciaire ouverte par la justice française parallèlement à l'enquête technique, est toujours en cours ; qu'ainsi s'il n'est pas discutable que la charge de la preuve de faits exonératoires de sa responsabilité incombe à la société Yéménia pour les dommages excédant 100. 000 DTS par passager, dès lors que les causes de l'accident ne sont toujours pas connues, il y a lieu de retenir qu'en application de l'article 809 du code de procédure civile l'obligation du transporteur n'est pas sérieusement contestable à hauteur de la contre valeur en euros de 100. 00 droits de tirage spéciaux par passager ; que pour le surplus des demandes, l'obligation du transporteur se heurte en revanche à une contestation sérieuse ; que les demandes provisionnelles en réparation des préjudices subis présentées par les ayants-droits des passagers soumis à la Convention de Montréal doivent être en conséquence limitées à la somme de 117. 000 ¿ par passager (contre valeur en euros de 100. 000 DTS au 15 septembre 2010) ; que la décision est infirmée de ce chef »
ALORS QUE 1°) l'article 21 de la convention de Montréal pose une présomption de faute du transporteur et que seule la preuve positive par le transporteur de son absence de faute ou d'un fait exonératoire de responsabilité, permet d'écarter son obligation à réparation des dommages dépassant le seuil de 100. 000 DTS par passager, seuil en deçà duquel le transporteur ne peut exclure ou limiter sa responsabilité ; qu'en l'espèce il est constant que la Société YEMENIA n'a pas apporté le moindre commencement de preuve de son absence de faute, ni de faits exonératoires de responsabilité ; qu'en se fondant sur la seule existence d'une enquête en cours afin de déterminer les circonstances et les causes de l'accident pour dire que l'obligation à réparation par la Société YEMENIA de l'entier dommage était sérieusement contestable, la Cour d'appel a violé ensemble les articles 17, 21 de la convention de Montréal du 28 mai 1999 pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international et l'article 809 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE 2°) l'article 21 de la convention de Montréal pose une présomption de faute du transporteur et que seule la preuve positive par le transporteur de son absence de faute ou d'un fait exonératoire de responsabilité, permet d'écarter son obligation à réparation des dommages dépassant le seuil de 100. 000 DTS par passager, seuil en deçà duquel le transporteur ne peut exclure ou limiter sa responsabilité ; qu'en l'espèce il est constant que la Société YEMENIA n'a pas apporté le moindre commencement de preuve de son absence de faute, ni de faits exonératoires de responsabilité ; qu'en disant qu'il y avait contestation sérieuse au seul motif de l'existence d'une enquête sans rechercher si des indices sérieux permettaient de laisser supposer l'absence de faute de la Société YEMENIA, la Cour d'appel a manqué de base légale au regard ensemble des articles 17 et 21 de la convention de Montréal du 28 mai 1999 pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international et de l'article 809 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'AVOIR limité la condamnation de la Société YEMENIA au titre de la provision ad litem à payer à l'ensemble des ayants-droit de chaque victime 4. 000 euros, et au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel à payer à l'ensemble des ayants-droit de chaque victime la sommes de 2. 000 ¿ ;
AUX MOTIFS QUE « le premier juge a condamné la société Yéménia à payer à chaque demandeur une provision pour le procès de 1. 000 ¿ et au titre des frais irrépétibles, 600 ¿ ; l'appelante demande à la Cour d'appel d'infirmer la décision et de débouter les intimés de leurs demandes de provision pour le procès ; elle demande une réduction des sommes allouées au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; les intimés, formant un appel incident, demandent à la Cour d'appel de porter à 5. 000 ¿ le montant de la provision ad litem ; ils demandent au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d'appel 3. 200 ; c'est à bon droit que le premier juge a admis dans son principe la demande de provision ad litem formée par les ayants droit des victimes de l'accident pour leur permettre d'assurer la défense de leurs droits dans le cadre d'un procès civil ou pénal équitable au fond pour obtenir la réparation de leur entier préjudice, au-delà des sommes provisionnelles accordées en référé, nonobstant leur situation de ressources, sans que puisse valablement leur être opposé le recours possible à l'aide juridictionnelle, alors que l'allocation d'une provision pour le procès sur le fondement de l'article 809 du Code de procédure civile n'est pas subordonnée à la preuve de l'impécuniosité de la partie qui la sollicite ; cette provision peut être mise à la charge de la société Yéménia dès lors que l'obligation pour cette dernière d'indemniser au moins en partie, en application des Conventions internationales les ayants droit des victimes de l'accident n'est pas sérieusement contestable ; le montant de la provision sera fixé par famille pour tenir compte de l'identité du travail documentaire, procédural, d'informations notamment, des conseils des parties au sein d'une même famille ; la société Yéménia, débitrice de provisions envers les ayants droit des victimes de l'accident est condamnée aux dépens ; les intimés ont exposé des frais non compris dans les dépens qui, selon l'équité, sont fixés à 2. 000 ¿ par famille et non par demandeur pour tenir compte du travail en grande partie commun réalisé par les conseils pour le compte d'une même famille. »
ALORS QUE 1°) l'action des ayants droit des victimes d'un accident aérien est une actions personnelle ; que la provision ad litem a pour but d'accorder à chacun des demandeurs le pouvoir de faire face aux frais du procès ; que le critère utilisé par la Cour d'appel pour limiter le montant des provisions ad litem « par famille de victimes » constitue une atteinte au droit personnel de chacun des ayants-droit d'agir indépendamment les uns des autres ; qu'en considérant que la provision ad litem serait « fixée par famille pour tenir compte de l'identité du travail documentaire, procédural, d'informations notamment, des conseils des parties au sein d'une même famille », la Cour d'appel a violé l'article 809 du Code de procédure civile, l'article 17 de la Convention de Montréal ensemble l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
ALORS QUE 2°) l'action des ayants droit des victimes d'un accident aérien est une actions personnelle ; que l'octroi d'une somme au titre des frais irrépétibles a pour but de couvrir pour chaque partie non perdantes les frais exposés et non compris dans les dépens ; que le critère utilisé par la Cour d'appel pour limiter le montant de la somme allouée au titre des frais irrépétibles « par famille de victimes » constitue une atteinte au droit personnel de chacun des ayants-droit d'agir indépendamment les uns des autres ; qu'en considérant que la somme allouée au titre des frais irrépétibles serait fixée « par famille et non par demandeur pour tenir compte du travail en grande partie commun réalisé par les conseils pour le compte d'une même famille », la Cour d'appel a violé l'article 700 du Code de procédure civile ensemble l'article 17 de la Convention de Montréal et l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 11-24522
Date de la décision : 15/01/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17 février 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 15 jan. 2014, pourvoi n°11-24522


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:11.24522
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