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14/01/2014 | FRANCE | N°11-27723

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 14 janvier 2014, 11-27723


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 13 octobre 2011), que la société civile immobilière Le Moulin Bunon (la SCI), assurée auprès de la société GAN, en responsabilité décennale et au titre de la garantie dommages-ouvrage, a fait édifier une maison d'habitation sur un terrain ; qu'elle a ensuite confié la réfection du mur, qui bordait ce terrain, aux sociétés Bexa, assurée en responsabilité décennale auprès de la société GAN et Tradit'Bat, assurée en responsabilité décennale auprÃ

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 13 octobre 2011), que la société civile immobilière Le Moulin Bunon (la SCI), assurée auprès de la société GAN, en responsabilité décennale et au titre de la garantie dommages-ouvrage, a fait édifier une maison d'habitation sur un terrain ; qu'elle a ensuite confié la réfection du mur, qui bordait ce terrain, aux sociétés Bexa, assurée en responsabilité décennale auprès de la société GAN et Tradit'Bat, assurée en responsabilité décennale auprès de la société AGF aux droits de laquelle vient la société Allianz ; que M. et Mme X... ont acquis la maison et la parcelle ; que se plaignant du basculement du mur, ils ont, après expertise, assigné la SCI, la société Bexa, et leur assureur en réparation de leurs préjudices ; que la société Tradit'Bat et son assureur ont été assignés en intervention forcée ;
Sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi principal, réunis et ci-après annexé :
Attendu qu'ayant retenu, par une interprétation souveraine du contrat d'assurance, d'une part, que la garantie, qui n'avait fait l'objet d'aucune résiliation ou mise en demeure, était en cours au moment de la construction du mur qui entrait dans le cadre des spécialités techniques et missions déclarées aux articles un et trois des conditions particulières de la police, et que les murs de soutènement entraient dans le champ de la garantie sauf s'ils supportaient un remblai de voie ferrée ou un soubassement routier, ce qui n' était pas le cas, et d'autre part, que le GAN devait réparer le préjudice né de la privation de la jouissance d'une partie du jardin, la cour d'appel, répondant aux conclusions et procédant aux recherches prétendument délaissées, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, réunis :
Vu les articles 1792 et 1382 du code civil ;
Attendu que pour dire que dans leurs rapports avec les sociétés Bexa, Tradit'Bat et leurs assureurs, la SCI et son assureur le GAN prendraient en charge 40 % des sommes allouées aux époux X..., l'arrêt retient que si la SCI est un constructeur non réalisateur, c'est elle qui a décidé de construire à moindre frais un mur de « clôture » dont elle savait parfaitement qu'il s'était effondré sous le poids de la terre et de la construction qu'elle y avait érigée, et alors qu'elle était entourée du personnel techniquement compétent nécessaire ;
Qu'en statuant ainsi, sans constater la compétence notoire de la SCI dans le domaine de construction concerné ou que son attention avait été appelée, par des professionnels de la construction, sur le caractère inadapté de l'ouvrage à son environnement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit qu'entre les co-responsables et leurs assureurs les appels en garantie pourront intervenir selon la répartition suivante : 40 % à la SCI Le Moulin Bunon, et son assureur, la société GAN assurances ; 30 % à la société Bexa et son assureur, la société GAN assurances ; 30 % à la société Tradit'Bat et son assureur la société Allianz IARD ; l'arrêt rendu le 13 octobre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Laisse à la société GAN et à la SCI Le Moulin Bunon la charge des dépens de leur propre pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société GAN assurances à payer 3 000 euros à M. et Mme X... ; rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par Me Rouvière, avocat aux Conseils, pour la société Gan assurances
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué
D'AVOIR, statuant sur les appels en garantie, dit que 40 % de l'entier préjudice resterait à la charge de la SCI Le Moulin Bunon (maître de l'ouvrage) et de son assureur, la société GAN
AUX MOTIFS QUE si la SCI était un constructeur non réalisateur, c'était elle qui avait décidé de construire à moindres frais un mur de « clôture » dont elle savait parfaitement qu'il s'était effondré sous le poids de la terre et de la construction qu'elle y avait érigée, et alors qu'elle était entourée du personnel techniquement compétent nécessaire ; que les deux sociétés de travaux (Bexa et Tradit'Bat) avaient certes commis une faute, mais sur demande de la SCI et à sa seule initiative (arrêt, page 10) ;
ALORS QUE le maître de l'ouvrage, constructeur non réalisateur, ne peut voir sa responsabilité retenue pour partie, dans les rapports avec les entreprises qui ont travaillé pour lui, que s'il était notoirement compétent et s'il s'est immiscé dans la construction, en prenant des risques en connaissance de cause ; que la Cour d'appel n'a pas constaté que la SCI Le Moulin Bunon était notoirement compétente en matière de construction ou qu'elle disposait d'un personnel propre, compétent en matière de construction, en-dehors de celui des entreprises dont elle demandait la garantie ; que la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil ;
ET ALORS QUE la Cour d'appel n'a pas le moins du monde expliqué de quel élément du dossier elle tenait que la SCI Le Moulin Bunon disposait d'un personnel techniquement compétent, en-dehors de celui des entreprises travaillant pour elle et dont elle demandait la garantie ; que la Cour d'appel a, de plus fort, privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué
D'AVOIR condamné la société GAN à payer diverses sommes aux époux X..., en retenant qu'elle devait sa garantie en tant qu'assureur de la responsabilité décennale de la société Bexa, condamnée à supporter 30 % de la charge définitive du préjudice

AUX MOTIFS QUE la société GAN faisait valoir qu'elle ne pouvait garantir son assuré, dans la mesure où celui-ci n'avait pas déclaré le chantier ; que cependant, la garantie, qui avait pris effet le 25 octobre 1993, n'avait fait l'objet d'aucune résiliation ou mise en demeure ; qu'elle était donc en cours au moment de la construction du mur qui entrait dans le cadre des missions déclarées aux articles 1er et 3 des conditions particulières de la police par l'assurée ; que les murs de soutènement entraient dans le champ de la garantie, sauf s'ils supportaient un remblai de voie ferrée ou un soubassement routier, ce qui n'était pas le cas ;
ALORS QUE la Cour d'appel devait examiner, comme elle y était invitée, si le chantier litigieux avait été déclaré et si la réduction proportionnelle, opposable aux victimes, n'était pas en jeu ; qu'elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 113-9 du code des assurances.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société GAN ASSURANCE à payer diverses sommes aux époux X..., en considérant que la garantie de cet assureur est acquise à la SARL BEXA pour la réfection du mur litigieux, sous réserve de la franchise contractuelle
AUX MOTIFS QUE la responsabilité décennale de la SARL BEXA, intervenue en qualité de droit de constructeur du mur sinistré est sollicitée ; qu'il s'agit ici aussi d'une responsabilité de plein droit de l'article 1792-1 du Code civil ; que vis-à-vis du maître de l'ouvrage, ou de la personne subrogée dans ses droits, la SARL BEXA engage sa responsabilité et répond des fautes de son sous-traitant, sous réserve de son éventuel recours contractuel récursoire contre ce dernier ; que la Société GAN ASSURANCES fait valoir qu'elle ne peut garantir son assuré dans la mesure ou celui-ci n'a pas déclaré le chantier ; que cependant, la garantie, qui a pris effet le 25 octobre 1993, n'avait fait l'objet d'aucune résiliation ou mise en demeure ; qu'elle était donc en cours au moment de la construction du mur qui entrait dans le cadre des spécialités techniques et missions déclarées aux article 1 et 3 des conditions particulières de la police, par la SARL BEXA ; que les murs de soutènement entrent en effet dans le champ de la garantie sauf s'ils supportent un remblai de voie ferrée ou un soubassement routier ce qui n'est pas le cas ; que la SARL BEXA n'a plus d'existence mais la garantie de la Société GAN ASSURANCES est acquise pour la réfection du mur, sous réserve de la franchise contractuelle
1º/ ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel ne pouvait condamner la société GAN ASSURANCE en se bornant à affirmer que la réalisation du mur entrait dans le cadre des spécialités techniques et missions déclarées aux articles 1 et 3 des conditions particulières de la police, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la garantie comprenait la qualité d'entreprise de bâtiment titulaire d'un contrat de louage d'ouvrage pour l'édification d'un mur de soutènement ou de clôture, ce que niait l'assureur en soutenant que sa garantie ne couvrait que la qualité de maître d'oeuvre qui en l'espèce n'était pas celle en laquelle agissait la SARL BEXA ; qu'ainsi l'arrêt manque de base légale au regard des articles 1134 du Code civile, 2 des conditions générales de la police ;
2º/ ALORS QU'EN se bornant à affirmer que la réalisation du mur entrait dans le cadre des spécialités techniques et missions déclarées aux articles 1 et 3 des conditions particulières, de la police, la Cour d'appel qui n'a pas répondu aux conclusions de la société GAN ASSURANCE sur ce point, a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
3º/ ALORS QUE la Cour d'appel ne pouvait se limiter à affirmer que le mur litigieux entrait dans le champ de la garantie sauf s'il supporte un remblai de voie ferrée ou un soubassement routier, ce qui n'était pas le cas en l'espèce, sans rechercher si cet ouvrage était destiné à protéger l'immeuble ou à contribuer à la stabilité du sol d'assise des fondations, conditions pour que la garantie puisse être acquise comme le soutenait l'assureur ; qu'en l'absence d'une telle recherche, l'arrêt manque de base légale au regard des articles 1134 du Code civil, 1 des conditions générales et 6 de l'annexe 1 des conditions générales du contrat ;
4º/ ALORS QUE la Cour d'appel ne pouvait condamner la société GAN ASSURANCE à régler aux époux X... une indemnité au titre d'un préjudice de jouissance non compris dans la garantie accordée à la SARL BEXA ; qu'ainsi l'arrêt est entaché d'une violation de l'article 1134 du Code civil.Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour la société Le Moulin Bunon
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que 40 % de l'entier préjudice resterait à la charge de la SCI LE MOULIN BUNON ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur les appels en garantie ; que la contribution de chaque co-responsable a été déterminée ainsi par le Tribunal ¿ 20% la SCI LE MOULIN BUNON ¿ 40% la SARL BEXA ¿ 40% la société TRADIT BAT ; qu'il convient cependant d'observer que si la SCI est un constructeur non réalisateur, c'est elle qui a décidé de construire à moindre frais un mur de « clôture » dont elle savait parfaitement qu'il s'était effondré sous le poids de la terre et de la construction qu'elle y avait érigé et alors qu'elle était entourée du personnel techniquement compétent nécessaire ; que les deux sociétés sont de exécutants qui ont certes commis une faute, mais sur demande de la SCI et à sa seule initiative ; qu'ainsi, 40% de l'entier préjudice restera à la charge de la SCI LE MOULIN BENON et de son assureur, la société GAN ASSURANCES ; 30% à la charge de la société BEXA et de son assureur, la société GAN ASSURANCES ; 30% à la charge de la société TRADIT'BAT et de son assureur, la SA ALLIANZ IARD ; que les recours entre les parties pourront s'effectuer sur ce seul fondement ; que les parties seront déboutées de tout autre recours ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la responsabilité de la X... en réalité LE MOULIN BUNON , certes mineure sur le plan technique selon le rapport d'expertise, est néanmoins engagée à hauteur de 20% des condamnations prononcées, en ce qu'elle a donné son approbation à la solution mise en oeuvre par les sociétés BEXA et TRADIT'BAT ; que ces deux dernières, la première en qualité de concepteur-réalisateur, la seconde en qualité d'entreprise réalisatrice ont contribué à part égale à la réalisation du dommage, soit 40% chacune ;
1° ALORS QUE l'entrepreneur professionnel doit attirer l'attention de son client et le conseiller sur les contraintes imposées par l'environnement de l'ouvrage et les adaptations qui s'imposent ; qu'en jugeant que la société LE MOULIN BUNON avait commis une faute en faisant réaliser un « mur de clôture » et qu'elle avait donné son approbation à la solution mise en oeuvre, sans rechercher, ainsi que cela lui était demandé (conclusions d'appel de l'exposante, p.7-8), si l'emploi de cet intitulé pour désigner le mur à reconstruire n'avait pas été que de pure convenance et dépourvu de toute signification technique pour l'exposante profane, et si, en réalité, elle n'avait pas fait appel à la société BEXA, entrepreneur professionnel, pour qu'elle construise un mur adapté à l'environnement de l'ouvrage projeté, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
2° ALORS QUE l'entrepreneur professionnel doit attirer l'attention de son client et le conseiller sur les contraintes imposées par l'environnement de l'ouvrage et les adaptations qui s'imposent ; qu'en jugeant que la société LE MOULIN BUNON avait commis une faute en faisant réaliser un « mur de clôture » et en donnant son approbation à la solution mise en oeuvre, sans rechercher, ainsi que cela lui était demandé (conclusions d'appel de l'exposante, p.7-8), si l'emploi de l'intitulé « mur de clôture » pour désigner le mur à reconstruire n'avait pas été que de pure convenance et dépourvu de toute signification technique pour l'exposante profane, et si la société TRADIT'BAT n'était pas tenue de requalifier l'ouvrage projeté et de l'adapter à son environnement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
3° ALORS QUE le maître de l'ouvrage, constructeur non réalisateur, ne peut voir sa responsabilité retenue pour partie, dans les rapports avec les entreprises qui ont travaillé pour lui, que s'il était notoirement compétent et s'il s'est immiscé dans la construction, en prenant des risques en connaissance de cause ; qu'en condamnant l'exposante à supporter 40% de la charge définitive de la condamnation, sans constater que la SCI LE MOULIN BUNON était notoirement compétente en matière de construction ou qu'elle disposait d'un personnel propre, compétent en matière de construction, en-dehors de celui des entreprises dont elle demandait la garantie, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du Code civil ;
4° ALORS QU'en toute hypothèse, les juges du fond ont l'obligation de préciser les éléments de preuve sur lesquels ils se fondent pour considérer qu'un fait est établi ; qu'en jugeant que la SCI LE MOULIN BUNON disposait d'un personnel techniquement compétent, en dehors de celui des entreprises auxquelles elle avait fait appel et dont elle demandait la garantie, sans préciser les éléments de preuve sur lesquels elle se fondait pour retenir un tel élément de fait, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 11-27723
Date de la décision : 14/01/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 13 octobre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 14 jan. 2014, pourvoi n°11-27723


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : Me Occhipinti, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Roger, Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:11.27723
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