LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Pharmacie de la pierre percée a conclu avec la société Siemens Lease services un contrat de location financière portant sur un équipement, constitué d'un ensemble de matériels vidéos et informatiques, acquis par cette dernière société auprès de la société Novax ; qu'il était précisé au contrat que le montant du loyer comprenait 15 euros au titre des frais de maintenance assurée par la société Novax et perçus par le bailleur, pour le compte de cette société ; que la société Pharmacie de la pierre percée ayant cessé de payer les loyers au motif que la société Novax, qui avait été mise en liquidation judiciaire, avait arrêté d'assurer la maintenance, la société Siemens Lease services l'a fait assigner en résiliation du contrat de location à ses torts exclusifs et en paiement des sommes qu'elle estimait lui être dues ;
Attendu que, pour accueillir ces demandes, l'arrêt retient que le contrat de location financière comporte une clause excluant expressément toute indivisibilité avec le contrat de maintenance et qu'il importe peu que le bailleur ait accepté d'encaisser le prix de la prestation de maintenance pour le reverser ensuite à la société Novax dont il n'est pas démontré que le concours soit nécessaire pour utiliser le matériel loué ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants et que sont réputées non écrites les clauses des contrats inconciliables avec cette interdépendance, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 octobre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne la société Siemens Lease services aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Pharmacie de la pierre percée la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept janvier deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour la société Pharmacie de la pierre percée
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, après avoir prononcé la résiliation du contrat de maintenance conclu le 8 octobre 2008 entre la Société NOVAX et la Société PHARMACIE DE LA PIERRE PERCÉE, d'avoir constaté la résiliation, aux torts de la Société PHARMACIE DE LA PIERRE PERCÉE, du contrat de location conclu le 1er décembre 2009 avec la Société SIEMENS LEASE SERVICES, puis de l'avoir condamnée à restituer à cette dernière le matériel loué, ainsi qu'à lui payer les sommes de 570,36 euros TTC au titre du loyer impayé du 20 novembre 2009, avec intérêts au taux conventionnel de 1,5 % par mois à compter du 20 novembre 2009, 370,76 euros TTC par mois, à compter du 1er décembre 2009 jusqu'à la restitution effective du matériel loué, à titre d'indemnité de jouissance, et ce avec les intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 25 mars 2010 sur les indemnités mensuelles échues à cette date et à compter de leurs dates respectives sur les indemnités échues postérieurement au 1er décembre 2009, et 2.000 euros, avec intérêts au taux conventionnel de 1,5 % par mois à compter du 1er décembre 2009, à titre d'indemnité de résiliation ;
AUX MOTIFS QUE la Pharmacie de la Pierre Percée soutient que les contrats par elle conclus, d'une part, avec la Société Novax, d'autre part, avec la Société Siemens Lease Services, forment une opération économique globale de sorte que la résiliation du contrat de prestation de services, à compter de la date d'ouverture de la procédure collective, à partir de laquelle la Société Novax a été défaillante, entraîne la caducité du contrat de location ; qu'elle fait valoir que l'indivisibilité des contrats de location et de prestations peut être caractérisée par la commune intention des parties en dépit des clauses contraires et que tel doit être le cas, en l'espèce, où les conventions en cause ont été conclues simultanément, où le système "pop player", objet du contrat de location, composé d'écrans plats et d'un ordinateur hébergeant un logiciel, ne fonctionne pas sans les prestations de connexion à la base de données, de mise à jour de cette base et de mise à disposition d'une hot ligne qu'assurait la Société Novax ; qu'elle sollicite le prononcé de la résiliation du contrat de maintenance et la caducité du contrat de location au 8 octobre 2008, date de la cessation des prestations de la Société Novax, et le remboursement par le bailleur des loyers qu'elle lui a versés postérieurement à ladite date ; que le bailleur invoque le principe de la relativité des contrats et les différentes dispositions du contrat de location affirmant la divisibilité des contrats ; que la cessation par la Société Novax, à compter de l'ouverture, le 8 octobre 2008, de sa procédure collective, des prestations qu'elle s'était engagée à fournir à la Pharmacie de la Pierre Percée justifie le prononcé de la résiliation de cette convention à la date susmentionnée aux torts de la prestataire ; que si la Pharmacie de la Pierre Percée associe économiquement les contrats qu'elle a signés, le fournisseur du matériel, la Société Novax, lui ayant promis la fourniture régulière de prestations de mise à jour du logiciel et de maintenance, le contrat de location exclut expressément toute indivisibilité entre ces conventions ; que l'article 1-2 du contrat de location stipule que "Le présent contrat est indépendant de tout contrat de prestations, d'entretien ou de maintenance pouvant être conclu pour permettre ou faciliter l'utilisation de l'équipement loué. Dans l'hypothèse où le contrat de prestations, d'entretien ou de maintenance serait suspendu, résolu, résilié ou annulé, le locataire reconnaît qu'il peut toujours utiliser l'équipement loué et contracter s'il le souhaite, avec un autre prestataire, le présent contrat ne pouvant en aucune façon être affecté par le sort du contrat de prestation, d'entretien ou de maintenance" ; que l'article 13 prévoit que "Le locataire reconnaît l'indépendance juridique entre contrat de location et contrat de maintenance et/ou de prestations. Il s'interdit expressément en conséquence de suspendre ou refuser le paiement des loyers dus au titre du présent contrat pour une raison relative à l'exécution, l'inexécution, la fourniture de la maintenance et/ou des prestations" ; que l'intimée ne peut, dès lors, se référer à une "commune intention des parties", alors que, dans le contrat de location, la Société Siemens Lease Services a pris soin de préciser, dans des termes dépourvus de toute ambiguïté, qu'elle se portait acquéreur du matériel pour le financer et tirer profit de son investissement et non pour garantir le respect d'une utilisation convenue avec un autre prestataire dans le cadre d'un contrat auquel elle n'a pas participé ; que les clauses précitées s'imposent à la Pharmacie de la Pierre-Percée qui les a acceptées en signant le contrat de location ; que le fait que le bailleur ait accepté d'encaisser le prix de la prestation de maintenance avec le loyer pour le reverser ensuite à la Société Novax ne suffit pas à affecter la portée des clauses expresses de divisibilité ; qu'enfin, l'intimée ne démontre pas que le matériel loué serait d'une nature telle qu'il ne pouvait être utilisé que grâce au concours de la Société Novax et n'autoriserait pas l'installation d'un autre logiciel que celui fourni par celle-ci ; que la Cour rejettera en conséquence la demande de la pharmacie tendant à voir prononcer la caducité du contrat de location ensuite de la résiliation du contrat de maintenance et, infirmant le jugement déféré, constatera sa résiliation, aux torts de la locataire, à compter du 1er décembre 2009, pour non paiement des loyers ;
ALORS QU'en se bornant, pour décider que la résiliation du contrat de maintenance conclu entre la Société NOVAX et la Société PHARMACIE DE LA PIERRE PERCÉE ne pouvait entraîner la résiliation du contrat de location conclu entre cette dernière et la Société SIEMENS LEASE SERVICES, à relever que ce contrat de location stipulait qu'il était indépendant de tout contrat de prestations, d'entretien ou de maintenance pouvant être conclu pour permettre ou faciliter l'utilisation de l'équipement loué, et que la résiliation du contrat de prestations, d'entretien ou de maintenance ne pourrait affecter le contrat de location, sans rechercher, comme elle y était invitée, si nonobstant ces dispositions, les parties avaient, en réalité, eu la commune intention de rendre leurs accords indivisibles, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1218 du Code civil.