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18/12/2013 | FRANCE | N°12-23782

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 décembre 2013, 12-23782


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 8 juin 2012), rendu sur contredit, qu'un accord a été conclu le 31 octobre 1992 entre le syndicat des entreprises de manutention portuaire de Marseille et de Fos et la Caisse de compensation des congés payés du personnel des entreprises de manutention des ports de Marseille (la CCCP), d'une part, et le syndicat général CGT des ouvriers dockers et assimilés du port de Marseille ainsi que le syndicat général CGT des ouvriers dockers du Gol

fe de Fos, d'autre part, prévoyant dans le cadre de la réorganisatio...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 8 juin 2012), rendu sur contredit, qu'un accord a été conclu le 31 octobre 1992 entre le syndicat des entreprises de manutention portuaire de Marseille et de Fos et la Caisse de compensation des congés payés du personnel des entreprises de manutention des ports de Marseille (la CCCP), d'une part, et le syndicat général CGT des ouvriers dockers et assimilés du port de Marseille ainsi que le syndicat général CGT des ouvriers dockers du Golfe de Fos, d'autre part, prévoyant dans le cadre de la réorganisation de la profession de docker la mensualisation des salaires et la mise en oeuvre d'un plan social ; qu'une convention de congé de conversion du Fonds national de l'emploi a été signée le 19 avril 1993 entre la CCCP et l'Etat ; que M. X... et trente-cinq autres dockers, signataires de contrats de conversion le 3 mai 1993, ont saisi la juridiction prud'homale pour demander la condamnation de la CCCP à leur payer des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et non-respect de la priorité de réembauchage, certains d'entre eux demandant la réparation du préjudice économique né de la perte de revenus consécutive à l'attribution de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ;
Attendu que la CCCP fait grief à l'arrêt de dire que le conseil de prud'hommes d'Arles était compétent pour connaître du litige, et de renvoyer l'affaire devant ce conseil de prud'hommes pour qu'il examine le mérite de l'action, alors, selon le moyen :
1°/ que si les conseils de prud'hommes connaissent des différends qui peuvent s'élever à l'occasion du contrat de travail, ils ne sont compétents que si les litiges s'élèvent entre les employeurs ou leurs représentants et les salariés qu'ils emploient de sorte qu'en retenant la compétence de la juridiction prud'homale quand le litige n'opposait pas les salariés à leurs employeurs mais à la seule Caisse de compensation des congés payés qui ne disposait de la qualité de représentant des employeurs que dans le cadre des négociations collectives avec le préfet, la cour d'appel, qui ne pouvait pas retenir que la CCCP avait la qualité de représentant de l'employeur dans un litige relatif à une demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, a violé les articles L. 1411-1 et L. 1411-6 du code du travail ;
2°/ que la demande en dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse formée par un ancien salarié à l'encontre de la Caisse de compensation des congés payés, étant dirigée contre un tiers étranger au contrat de travail, n'ayant ni la qualité d'employeur, ni celle de commerçant, ne relève de la compétence d'aucune juridiction d'exception et doit en conséquence être renvoyée devant le tribunal de grande instance de sorte qu'en retenant la compétence de la juridiction prud'homale pour connaître du litige opposant d'anciens dockers à la Caisse de compensation des congés payés au seul motif qu'elle avait représenté les employeurs lors des négociations collectives avec l'autorité administrative, quand il résultait de ses constatations que la CCCP n'avait pas la qualité d'employeur des dockers et qu'elle ne se substituait pas habituellement aux obligations de l'employeur puisqu'elle n'avait agi en cette qualité qu'à l'occasion de la négociation des conventions collectives dans le cadre de l'incitation aux départs volontaires avec le préfet, la cour d'appel a violé les articles L. 211-3 du code de l'organisation judiciaire et L. 1411-1 du code du travail ;
3°/ que si le litige opposant un ancien docker aux entreprises portuaires qui l'employaient ou à la Caisse de compensation des congés payés qui les a représentés lors des négociations collectives avec l'autorité administrative relève de la compétence de la juridiction prud'homale, c'est à la condition que le litige porte sur l'exécution des conventions conclues dans le cadre de l'incitation aux départs volontaires, dès lors que, quoique survenu après la rupture du contrat de travail, il est en relation avec celui-ci ; qu'il en va nécessairement autrement du litige opposant un ancien docker à la seule Caisse de compensation des congés payés qui a représenté les employeurs lors des négociations collectives avec l'autorité administrative, et qui porte sur des demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour non-respect de la priorité de réembauchage ; qu'un tel litige ne relève pas de la compétence de la juridiction prud'homale de sorte qu'en énonçant que le conseil de prud'hommes d'Arles était compétent pour connaître du litige opposant d'anciens dockers à la Caisse de compensation des congés payés qui avait représenté les employeurs lors des négociations collectives avec l'autorité administrative et qui portait sur l'exécution des conventions collectives conclues dans le cadre de l'incitation aux départs volontaires avec le préfet dès lors que ce litige, quoique survenu après la rupture des contrats de travail, est en relation avec ceux-ci, quand elle avait constaté que le litige qui lui était soumis ne portait pas sur l'exécution des conventions collectives conclues dans le cadre de l'incitation aux départs volontaires, avec l'autorité administrative mais sur des demandes tendant à obtenir des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse dirigées uniquement à l'encontre de la Caisse de compensation des congés payés, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et a violé l'article L. 1411-1 du code du travail ;
Mais attendu que le litige opposant un ancien docker aux entreprises portuaires qui l'employaient ou à la CCCP qui les a représentés lors des négociations collectives avec l'autorité administrative, et qui porte sur l'exécution des conventions conclues dans le cadre de l'incitation aux départs volontaires, est un litige qui, quoique survenu après la rupture du contrat de travail, est en relation avec celui-ci ; que le conseil de prud'hommes est donc compétent pour en connaître ;
Et attendu qu'ayant constaté que la CCCP avait signé l'accord du 31 octobre 1992 ainsi que les contrats de conversion faisant référence à la convention de congé de conversion signée avec l'Etat le 19 avril 1993, que le litige opposant les anciens dockers à la CCCP portait sur l'exécution des conventions conclues dans le cadre de l'incitation aux départs volontaires et que ce litige était en relation avec les contrats de travail, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Caisse de compensation des congés payés du personnel des entreprises de manutention des ports aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Caisse de compensation des congés payés du personnel des entreprises de manutention des ports et condamne celle-ci à payer aux dockers la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour la Caisse de compensation des congés payés du personnel des entreprises de manutention des ports
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir réformé le jugement entrepris, et, statuant à nouveau, d'avoir dit que le conseil de prud'hommes d'Arles était compétent pour connaître du litige, et renvoyé l'affaire devant ce conseil de prud'hommes pour qu'il examine le mérite de l'action,
AUX MOTIFS QU'
"en application de l'article L. 1411-1 du code du travail, le conseil de prud'hommes est compétent pour connaître des litiges nés à l'occasion du contrat de travail ;
Que les 36 dockers susmentionnés ont dirigé leur action devant le conseil de prud'hommes d'Arles contre la seule Caisse de Compensation des Congés Payés du personnel des entreprises de manutention des ports de Marseille au motif qu'il leur était matériellement impossible d'attraire toutes les entreprises portuaires avec lesquelles ils avaient travaillé ;
Que l'article L. 1144-6 du code du travail n'a pas vocation à s'appliquer dans la mesure où l'action intentée n'était pas dirigée contre les employeurs mais contre la seule CCCP ;
Que les demandeurs n'ont jamais soutenu que la CCCP était leur employeur, ils l'ont fait citer en sa qualité de représentante des différentes entreprises de manutention du port de Marseille-Fos ;
Qu'il est constant que l'accord du 31 octobre 1992 qui exposait que l'amélioration de la productivité serait obtenue par la mensualisation et la mise en oeuvre d'un plan social en vue de réduire l'effectif global des dockers, a été signé entre le Syndicat des Entreprises de Manutention Portuaire de Marseille et de Fos, la Caisse de Compensation des Congés Payés du personnel des entreprises de manutention des ports de Marseille, d'une part et le Syndicat Général CGT des ouvriers dockers et assimilés du port de Marseille et le Syndicat Général CGT des ouvriers dockers du Golfe de Fos, d'autre part ;
Que les contrats de conversion signés le 3 mai 1993 entre la CCCP du personnel des entreprises de manutention des ports de Marseille et les dockers font référence à la convention de congé de conversion signée avec 1'Etat le avril 1993 ;
Que la juridiction prud'homale est compétente pour connaître du litige opposant d'anciens dockers à la CCCP qui les a représentés lors des négociations collectives avec l'autorité administrative et qui porte sur l'exécution des conventions collectives conclues dans le cadre de l'incitation aux départs volontaires dès lors que ce litige, quoique survenu après la rupture des contrats de travail, est en relation avec ceux-ci ;
Que c'est à tort que le conseil de prud'hommes s'est déclaré incompétent en raison de la matière du litige ;
Que la CCCP ne soulève plus l'incompétence territoriale du conseil de prud'hommes d'Arles ; qu'elle se borne à demander comme en première instance de renvoyer les demandeurs à mieux se pourvoir devant de Tribunal de Grande Instance de Marseille sans s'en expliquer ;
Qu'il s'avère que l'embauche des dockers intermittents était effectuée tous les matins au BCMO à Port Saint-Louis-du-Rhône et que c'est dans cette ville que les engagements étaient contractés ; que de plus les salariés sont tous domiciliés dans le ressort du conseil de prud'hommes d'Arles ;
Que le conseil de prud'hommes d'Arles est en conséquence compétent territorialement",
ALORS D'UNE PART QUE si les conseils de prud'hommes connaissent des différends qui peuvent s'élever à l'occasion du contrat de travail, ils ne sont compétents que si les litiges s'élèvent entre les employeurs ou leurs représentants et les salariés qu'ils emploient de sorte qu'en retenant la compétence de la juridiction prud'homale quand le litige n'opposait pas les salariés à leurs employeurs mais à la seule Caisse de compensation des congés payés qui ne disposait de la qualité de représentant des employeurs que dans le cadre des négociations collectives avec le Préfet, la Cour d'appel, qui ne pouvait pas retenir que la CCCP avait la qualité de représentant de l'employeur dans un litige relatif à une demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, a violé les articles L. 1411-1 et L. 1411-6 du code du travail,
ALORS D'AUTRE PART QUE la demande en dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse formée par un ancien salarié à l'encontre de la Caisse de compensation des congés payés, étant dirigée contre un tiers étranger au contrat de travail, n'ayant ni la qualité d'employeur, ni celle de commerçant, ne relève de la compétence d'aucune juridiction d'exception et doit en conséquence être renvoyée devant le tribunal de grande instance de sorte qu'en retenant la compétence de la juridiction prud'homale pour connaître du litige opposant d'anciens dockers à la Caisse de compensation des congés payés au seul motif qu'elle avait représenté les employeurs lors des négociations collectives avec l'autorité administrative, quand il résultait de ses constatations que la CCCP n'avait pas la qualité d'employeur des dockers et qu'elle ne se substituait pas habituellement aux obligations de l'employeur puisqu'elle n'avait agi en cette qualité qu'à l'occasion de la négociation des conventions collectives dans le cadre de l'incitation aux départs volontaires avec le Préfet, la cour d'appel a violé les articles L. 211-3 du code de l'organisation judiciaire et L. 1411-1 du code du travail,
ALORS ENFIN, SUBSIDIAIREMENT, QUE si le litige opposant un ancien docker aux entreprises portuaires qui l'employaient ou à la Caisse de compensation des congés payés qui les a représentés lors des négociations collectives avec l'autorité administrative relève de la compétence de la juridiction prud'homale, c'est à la condition que le litige porte sur l'exécution des conventions conclues dans le cadre de l'incitation aux départs volontaires, dès lors que, quoique survenu après la rupture du contrat de travail, il est en relation avec celui-ci ; qu'il en va nécessairement autrement du litige opposant un ancien docker à la seule Caisse de compensation des congés payés qui a représenté les employeurs lors des négociations collectives avec l'autorité administrative, et qui porte sur des demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour non-respect de la priorité de réembauchage ; qu'un tel litige ne relève pas de la compétence de la juridiction prud'homale de sorte qu'en énonçant que le conseil de prud'hommes d'Arles était compétent pour connaître du litige opposant d'anciens dockers à la Caisse de compensation des congés payés qui avait représenté les employeurs lors des négociations collectives avec l'autorité administrative et qui portait sur l'exécution des conventions collectives conclues dans le cadre de l'incitation aux départs volontaires avec le Préfet dès lors que ce litige, quoique survenu après la rupture des contrats de travail, est en relation avec ceux-ci, quand elle avait constaté que le litige qui lui était soumis ne portait pas sur l'exécution des conventions collectives conclues dans le cadre de l'incitation aux départs volontaires, avec l'autorité administrative mais sur des demandes tendant à obtenir des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse dirigées uniquement à l'encontre de la Caisse de compensation des congés payés, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et a violé l'article L. 1411-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-23782
Date de la décision : 18/12/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 08 juin 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 déc. 2013, pourvoi n°12-23782


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.23782
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