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11/12/2013 | FRANCE | N°12-27208

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 décembre 2013, 12-27208


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 4 septembre 2012), que M. X... a été employé par la société Sopad-Nestlé en qualité de prospecteur stagiaire à compter du 11 avril 1983 puis de voyageur-représentant placier (VRP) exclusif à compter du 1er novembre 1984 ; que son contrat de travail a été transféré à la société Nestlé Rowntree puis à la société Nestlé France où il exerce depuis le 1er janvier 1996 les fonctions de responsable de secteur dans le départ

ement « vente » ; que l'employeur a saisi la juridiction prud'homale ; que le salarié ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 4 septembre 2012), que M. X... a été employé par la société Sopad-Nestlé en qualité de prospecteur stagiaire à compter du 11 avril 1983 puis de voyageur-représentant placier (VRP) exclusif à compter du 1er novembre 1984 ; que son contrat de travail a été transféré à la société Nestlé Rowntree puis à la société Nestlé France où il exerce depuis le 1er janvier 1996 les fonctions de responsable de secteur dans le département « vente » ; que l'employeur a saisi la juridiction prud'homale ; que le salarié a formé diverses demandes reconventionnelles ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'accorder au salarié la qualification de VRP et de le condamner à la remise d'un bulletin de paie conforme pour la période commençant en février 1996, alors, selon le moyen :

1°/ que la qualification d'un salarié doit être appréciée par le juge en tenant compte des fonctions réellement exercées par ce dernier et non en considération des seules mentions portées sur son contrat de travail ou sur ses bulletins de paie ; qu'en se fondant exclusivement, pour juger que M. X... pouvait prétendre au statut de VRP, sur les mentions portées sur son contrat de travail et sur ses seuls bulletins de paie de décembre 1984 et mai 1989, sans rechercher les fonctions réellement exercées par le salarié qui établissaient qu'il occupait en réalité un poste de responsable de secteur n'impliquant de sa part ni de prospection de clientèle, ni de prises d'ordres de commandes, de sorte que le statut de VRP ne pouvait lui être reconnu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 et L. 7331-3 du code du travail et 1134 du code civil ;

2°/ que la délivrance d'une carte professionnelle et l'affiliation aux organismes de VRP sont indifférentes à la reconnaissance du statut de VRP ; qu'en se fondant néanmoins, pour déduire que M. X... disposait du statut de VRP, sur la circonstance selon laquelle il était titulaire d'une carte d'identité professionnelle de représentant et était affilié en qualité de VRP à la Caisse de retraite et de prévoyance des VRP et à l'Institution de prévoyance Nestlé, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard articles L. 1221-1 et L. 7331-3 du code du travail et 1134 du code civil ;

3°/ que la présomption d'exercice en qualité de VRP, au sens des articles L. 7313-1 à L. 7313-3 du code du travail, ne s'applique que si le salarié réunit les conditions définies par la loi pour bénéficier du statut légal de représentant ; que la société Nestlé France a versé aux débats de multiples pièces desquelles il ressortait que M. X... n'effectuait ni prospection de clientèle, ni prise d'ordres de vente et ne disposait pas d'un secteur fixe de prospection, en sorte qu'il ne réunissait pas les conditions définies par la loi pour bénéficier du statut légal de VRP ; qu'en se bornant à retenir que ces éléments versés par la société Nestlé France « ne sont susceptibles de faire la preuve que M. X..., embauché en qualité de représentant (¿) a exercé son activité dans des conditions de fait qui ne lui permettent pas de prétendre au statut de VRP » pour déduire que le salarié pouvait prétendre à ce statut, sans que la cour d'appel n'ait constaté que la salarié ait pour sa part apporter le moindre élément de nature à prouver qu'il ait réellement exercé en qualité de VRP, ni relevé qu'il réunissait les conditions légales requises pour prétendre au statut légal de VRP et bénéficier dès lors de la présomption instituée par les articles L. 7313-1 à 7313-3 du code du travail, la cour d'appel, qui a fait supporter intégralement la charge de la preuve sur la société Nestlé France, a violé les articles susvisés, ensemble l'article 1315 du code civil ;

4°/ que les juges ne peuvent statuer par voie d'affirmation ; que l'activité de VRP est celle qui consiste à prospecter la clientèle à l'extérieur de l'entreprise en vue de prendre des ordres pour le compte de l'employeur ; que la société Nestlé France faisait valoir dans ses conclusions d'appel, au regard notamment du calendrier de visites de l'entreprise, de la liste des points de vente ainsi que de l'attestation de M. Y..., directeur commercial des forces de vente, que les conditions réelles d'exercice de M. X... ne lui permettaient pas de bénéficier du statut de VRP dans la mesure où il ne bénéficiait pas de l'autonomie nécessaire pour prospecter la clientèle lui-même, ne prenait pas d'ordre direct de vente, les négociations et la décision finale étant menées à un niveau supérieur, et ne disposait pas d'un secteur fixe de prospection ; qu'en se bornant encore à affirmer que ces éléments « ne sont susceptibles de faire la preuve que M. X..., embauché en qualité de représentant (¿) a exercé son activité dans des conditions de fait qui ne lui permettent pas de prétendre au statut de VRP », sans indiquer sur quels éléments elle se fondait pour en arriver à un tel constat, ni motiver sa décision sur ce point, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5°/ qu'enfin, à supposer ce motif adopté, qu'en retenant que « la SAS Nestlé France reconnaît le statut de VRP né du contrat à M. X... », quand l'exposante soutenait ouvertement le contraire dans ses conclusions d'appel reprises oralement à l'audience, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

Mais attendu que, quelles que soient ses attributions, un salarié peut se prévaloir de la qualification de représentant de commerce, dès l'instant qu'elle lui a été contractuellement reconnue ;

Et attendu que la cour d'appel a relevé que le salarié avait été engagé en qualité de VRP et qu'aucun avenant au contrat de travail n'avait remis en cause cette qualification ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en sa cinquième branche en ce qu'il critique des motifs du jugement que la cour d'appel n'a pas adoptés, celle-ci ayant confirmé le jugement par substitution de motifs, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Nestlé France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Nestlé France à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Nestlé France

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR accordé la qualification de V.R.P à Monsieur X..., d'AVOIR condamné la Société NESTLE FRANCE à remettre un seul bulletin de paie rectificatif à Monsieur X... en portant la qualification de V.R.P et la convention collective nationale de V.R.P à compter de février 1996 et d'AVOIR condamné la Société NESTLE FRANCE au paiement de la somme de 1.000 ¿ au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

AUX MOTIFS QUE « - sur la rectification des bulletins de paie, Il est stipulé au contrat de travail qu'à compter du 1er novembre 1984, Monsieur X... « est engagé par SOPAD-NESTLE à titre de représentant dans les termes des articles L. 751-1 et suivants du code du travail », que dans les limites du secteur géographique qui lui est assigné, couvrant partiellement la ville de Lyon et ses environs, il « devra visiter tous les commerçants et, d'une façon générale, toute personne physique ou morale de droit privé ou de droit public susceptible d'acheter les produits offerts par la SOPAD-NESTLE et qui lui seront désignés par la société », qu'il « a pour tâche essentielle de vendre pour le compte de SOPAD-NESTLE les produits alimentaires dont ladite société lui fournira la liste tenue à jour de façon permanente » et qu'il « devra consacrer tout son temps et tous ses soins à la représentation des dits articles », qu'il pourra être chargé accessoirement « de toute mission ou activité en liaison directe ou indirecte avec ses fonctions de représentant », qu'il « adressera, tous les jours, à SOPAD NESTLE les ordres pris au cours de sa tournée ainsi qu'un rapport journalier d'après un formulaire spécial », que « les ordres devront être enregistrés aux conditions de tarifs qui (lui) seront remis », qu'il « ne devra traiter qu'avec des clients notoirement solvables, SOPAD NESTLE se réservant de ne pas donner suite aux ordres transmis pour des clients sur lesquels les renseignements obtenus ne lui donneraient pas satisfaction », qu'il percevra une rémunération composée d'une partie fixe et d'une partie variable, et qu'en vertu « de l'avenant n° 1 du 13 octobre 1952 à la convention collective du 14 mars 1947 instituant le régime de prévoyance des V.R.P », il « sera affilié à la Caisse de Retraite et de Prévoyance des V.R.P (I.R.P. -V.R.P.) ». Alors que le salarié produit ses bulletins de paie des mois de décembre 1984 et de mai 1989 mentionnant un emploi de « voyageur », qu'il justifie être titulaire d'une carte d'identité professionnelle de représentant de la société NESTLE FRANCE valable jusqu'au 31 octobre 2012, et que ses bulletins de paie mentionnent son affiliation à la Caisse de Retraite et de Prévoyance des V.R.P et à l'Institution de Prévoyance Nestlé en qualité de V.R.P, ni la clause contractuelle selon laquelle l'employeur « se réserve la faculté de modifier ce secteur au fur et à mesure des exigences du marché ou de muter (le salarié) dans une région ou une autre fonction pour répondre aux nécessités de l'organisation commerciale de SOPAD-NESTLE ou dans le cadre de la carrière de Monsieur Bernard X... », ni la lettre de la société NESTLE FRANCE, datée du 22 janvier 1996, nommant Monsieur X... au poste de responsable de secteur à compter du 1er janvier 1996, présentée comme un « avenant à (son) contrat de travail », mais non revêtue de sa signature, ni la fiche de poste de responsable de secteur, ni l'indication fournie par la société appelante selon laquelle Monsieur X... exerce désormais ses fonctions dans le département du Var, ni l'attestation de Monsieur Y..., directeur commercial, déclarant « (qu') un responsable de secteur NESTLE-FRANCE ne prend pas d'ordre auprès des clients », qu'il « visite les magasins de son secteur selon une liste, un plan de charge et une fréquence définis par l'entreprise » et que « les secteurs évoluent sur décision de l'entreprise pour s'adapter à l'évolution de l'environnement client », ne sont susceptibles de faire la preuve que Monsieur X..., embauché en qualité de représentant au visa de l'ancien article L. 751-1 devenu L. 7311-3 du code du travail, a exercé son activité dans des conditions de fait qui ne lui permettent pas de prétendre au statut de V.R.P. Les bulletins de paie délivrés à Monsieur X... à compter de février 1996 mentionnant qu'il exerce un emploi de « responsable de secteur statut AM » et la prescription quinquennale édictée par les articles L. 3245-1 du code du travail et 2224 du code civil s'appliquant à l'action en paiement ou en répétition du salaire, mais non à celle tendant à obtenir la délivrance de bulletins de paie conformes aux dispositions de l'article R. 3243-1 du code du travail, le jugement sera confirmé en ce qu'il a fait droit à la demande de rectification » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « la SAS NESTLE FRANCE reconnaît le statut de V.R.P né du contrat à Monsieur X... ; qu'il convient donc d'ordonner la rectification des bulletins de salaires en portant la qualification V.R.P et la convention collective nationale de V.R.P à compter de février 1996 » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE la qualification d'un salarié doit être appréciée par le juge en tenant compte des fonctions réellement exercées par ce dernier et non en considération des seules mentions portées sur son contrat de travail ou sur ses bulletins de paie ; qu'en se fondant exclusivement, pour juger que Monsieur X... pouvait prétendre au statut de V.R.P, sur les mentions portées sur son contrat de travail et sur ses seuls bulletins de paie de décembre 1984 et mai 1989, sans rechercher les fonctions réellement exercées par le salarié qui établissaient qu'il occupait en réalité un poste de responsable de secteur n'impliquant de sa part ni de prospection de clientèle, ni de prises d'ordres de commandes, de sorte que le statut de VRP ne pouvait lui être reconnu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 et L. 7331-3 du code du travail et 1134 du code civil ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE la délivrance d'une carte professionnelle et l'affiliation aux organismes de V.R.P sont indifférentes à la reconnaissance du statut de V.R.P ; qu'en se fondant néanmoins, pour déduire que Monsieur X... disposait du statut de V.R.P, sur la circonstance selon laquelle il était titulaire d'une carte d'identité professionnelle de représentant et était affilié en qualité de V.R.P à la Caisse de Retraite et de Prévoyance des V.R.P et à l'Institution de Prévoyance Nestlé, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard articles L. 1221-1 et L. 7331-3 du code du travail et 1134 du code civil ;

ALORS, DE TROISIEME PART, QUE la présomption d'exercice en qualité de V.R.P, au sens des articles L. 7313-1 à L. 7313-3 du code du travail, ne s'applique que si le salarié réunit les conditions définies par la loi pour bénéficier du statut légal de représentant ; que la Société NESTLE FRANCE a versé aux débats de multiples pièces desquelles il ressortait que Monsieur X... n'effectuait ni prospection de clientèle, ni prise d'ordres de vente et ne disposait pas d'un secteur fixe de prospection, en sorte qu'il ne réunissait pas les conditions définies par la loi pour bénéficier du statut légal de V.R.P ; qu'en se bornant à retenir que ces éléments versés par la Société NESTLE FRANCE « ne sont susceptibles de faire la preuve que Monsieur X..., embauché en qualité de représentant (¿) a exercé son activité dans des conditions de fait qui ne lui permettent pas de prétendre au statut de V.R.P » pour déduire que le salarié pouvait prétendre à ce statut, sans que la cour n'ait constaté que la salarié ait pour sa part apporter le moindre élément de nature à prouver qu'il ait réellement exercé en qualité de V.R.P, ni relevé qu'il réunissait les conditions légales requises pour prétendre au statut légal de V.R.P et bénéficier dès lors de la présomption instituée par les articles L. 7313-1 à 7313-3 du code du travail, la cour d'appel, qui a fait supporter intégralement la charge de la preuve sur la Société NESTLE FRANCE, a violé les articles susvisés, ensemble l'article 1315 du code civil ;

ALORS, DE QUATRIEME PART, QUE les juges ne peuvent statuer par voie d'affirmation ; que l'activité de V.R.P est celle qui consiste à prospecter la clientèle à l'extérieur de l'entreprise en vue de prendre des ordres pour le compte de l'employeur ; que la Société NESTLE FRANCE faisait valoir dans ses conclusions d'appel, au regard notamment du calendrier de visites de l'entreprise, de la liste des points de vente ainsi que de l'attestation de Monsieur Y..., Directeur commercial des forces de vente, que les conditions réelles d'exercice de Monsieur X... ne lui permettaient pas de bénéficier du statut de V.R.P dans la mesure où il ne bénéficiait pas de l'autonomie nécessaire pour prospecter la clientèle lui-même, ne prenait pas d'ordre direct de vente, les négociations et la décision finale étant menées à un niveau supérieur, et ne disposait pas d'un secteur fixe de prospection ;
qu'en se bornant encore à affirmer que ces éléments « ne sont susceptibles de faire la preuve que Monsieur X..., embauché en qualité de représentant (¿) a exercé son activité dans des conditions de fait qui ne lui permettent pas de prétendre au statut de V.R.P », sans indiquer sur quels éléments elle se fondait pour en arriver à un tel constat, ni motiver sa décision sur ce point, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, DE CINQUIEME PART, QU'enfin, à supposer ce motif adopté, en retenant que « la SAS NESTLE FRANCE reconnaît le statut de V.R.P né du contrat à Monsieur X... » (jugement p. 3 § 3), quand l'exposante soutenait ouvertement le contraire dans ses conclusions d'appel reprises oralement à l'audience (conclusions p 14 à 20), la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-27208
Date de la décision : 11/12/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 04 septembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 déc. 2013, pourvoi n°12-27208


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.27208
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