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11/12/2013 | FRANCE | N°12-23247

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 décembre 2013, 12-23247


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... épouse Y... a été engagée le 1er décembre 2001, en qualité d'employée administrative, par la société Gérard Z... et fils ; qu'elle a été licenciée le 23 août 2010 pour motif économique ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir l'annulation de son licenciement ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen :

Vu l'article L. 1235-4 du code du travail ;
Attendu qu'après avoir prononcé la nu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... épouse Y... a été engagée le 1er décembre 2001, en qualité d'employée administrative, par la société Gérard Z... et fils ; qu'elle a été licenciée le 23 août 2010 pour motif économique ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir l'annulation de son licenciement ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 1235-4 du code du travail ;
Attendu qu'après avoir prononcé la nullité du licenciement de la salariée, l'arrêt confirmatif a ordonné à la société Gérard Z... et fils de rembourser, aux organismes concernés, les indemnités de chômage perçues par Mme Y..., dans la limite d'un mois à compter du jour de son licenciement ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le remboursement des indemnités de chômage ne peut être ordonné en cas de nullité du licenciement hors le cas prévu par l'article L. 1235-11 du code du travail, la cour d'appel a violé, par fausse application, le texte susvisé ;
Et attendu qu'il y a lieu de condamner la société Gérard Z... et fils, qui succombe pour l'essentiel, aux dépens ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il ordonne le remboursement des indemnités de chômage payées à la salariée, l'arrêt rendu le 4 juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne la société Gérard Z... et fils aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, déboute la société Gérard Z... et fils de sa demande et condamne celle-ci à payer à Mme Y... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société Gérard Z... et fils
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la nullité du licenciement du 23 août 2010 et condamné la Société Gérard Z... et Fils à verser à Madame Y... les sommes de 10 089,95 € au titre des salaires de la période de protection et 11 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, ainsi qu'à rembourser aux organismes concernés les allocations de privation d'emploi éventuellement servies dans la limite de un mois ;
AUX MOTIFS propres QUE "aux termes de l'article L.1225-4 du code du travail, un employeur ne peut licencier une salariée lorsqu'elle est en état de grossesse ; que l'interdiction de licenciement est absolue pendant la période de suspension du contrat de travail résultant du congé de maternité ; qu'avant cette période, le licenciement est autorisé, à condition d'être notifié avant le début du congé de maternité, soit en cas de faute grave, soit en cas d'impossibilité de maintenir le contrat de travail ;
QU'en l'espèce, l'état de grossesse d'Angélique Y... était connu de son employeur la société Gérard Z... avant qu'il prenne sa décision de la licencier, au moins depuis la réception de la lettre recommandée de l'intéressée en date du 3 août 2010, qui précisait qu'elle était enceinte de 7 mois et que son congé maternité devait débuter le dimanche 8 août 2010 ; que son état de grossesse avancée a pu être constaté le 9 août 2010 par le fils du gérant, Jérôme Z..., directeur commercial de la société, auquel elle en a donné confirmation ; qu'en fait, son congé maternité a débuté le 20 août 2010, car elle bénéficiait auparavant d'un congé parental ; que malgré ses observations, Madame Y... a été licenciée pour motif économique par courrier recommandé daté du 23 août 2010 pour suppression pure et simple de son poste de comptable ; que par lettre du 27 août 2010, Angélique Y... a confirmé son état de grossesse et proposé à l'employeur de discuter ou de transiger avec lui en vue d'un règlement amiable du litige, qui n'a pas eu lieu, de sorte que la salariée a saisi le Conseil de prud'hommes ;
QU'il résulte du courrier de la société Gérard Z... en date du 10 août 2010 que la grossesse n'est pas contestée par l'employeur ; que celui-ci fait grief à la salariée de ne pas lui avoir transmis une attestation d'une caisse de sécurité sociale indiquant les dates de son congé de maternité ; qu'aucun texte ne prévoit l'obligation pour la salariée de fournir un tel document et que Madame Y... a indiqué en temps voulu son état de grossesse avec la date présumée de son accouchement, ce qui permettait de calculer son congé de maternité ; que même si, comme elle le prétend, la société Gérard Z... n'a pas reçu en avril 2010 la copie destinée à l'employeur du premier examen prénatal indiquant une date présumée de début de grossesse au 15 janvier 2010 et donc une date d'accouchement présumée au 15 octobre 2010, il n'en demeure pas moins que Madame Y... a indiqué dans son courrier du 3 août qu'elle était enceinte de 7 mois et qu'au vu de l'article L.1225-19 du code du travail, l'employeur était donc avisé que pour cette troisième naissance, le congé de maternité débuterait 8 semaines avant la date prévue de l'accouchement, soit courant août ;
ET AUX MOTIFS QUE quand la salariée a adressé à l'employeur le 27 août 2010 un certificat médical attestant son état de grossesse le 15 janvier 2010, celui-ci savait que le congé de maternité commençait le 20 août, soit 8 semaines avant le 15 octobre, date présumée de l'accouchement ; que la société Gérard Z... a licencié en toute connaissance de cause Madame Y... pendant son congé de maternité le 23 août 2010, en violation des articles L.1225-4 et suivants, étant observé par ailleurs que le motif économique de licenciement ne constitue pas en soi une impossibilité de maintenir le contrat de travail d'une salariée en état de grossesse et qu'à défaut de justification de cette impossibilité par l'employeur, ce qui est le cas en l'espèce, le licenciement est nul ; qu'il y a lieu par conséquent de confirmer le jugement entrepris, qui a ainsi statué et a condamné l'employeur à verser à la salariée, en application des articles L.1225-71 et L.1226-4 du code du travail, le montant des salaires qui aurait été perçu pendant la période couverte par la nullité, à savoir le congé de maternité et les quatre semaines suivantes, l'indemnité de licenciement et des dommages-intérêts en réparation de son préjudice, dont le montant, équitablement fixé par le premier juges, n'a pas lieu d'être revu à la hausse" (arrêt p.3 et 4) ;
ET AUX MOTIFS adoptés QUE "l'état de grossesse est connu de l'employeur avant qu'il prenne la décision de licencier (au moins depuis la réception de la lettre recommandée de Madame Y... du 3 août 2010 avec confirmation par l'état visible de grossesse le 9 août ; qu'il résulte d'ailleurs du courrier de la Société Gérard Z... et Fils en date du 10 août 2010 que la grossesse n'est pas contestée par l'employeur ; que la situation particulière de Madame Z... (congé parental pour le deuxième enfant) fait qu'elle n'était pas en mesure de justifier d'une attestation d'une caisse de sécurité sociale indiquant les dates de son congé de maternité mais qu'aucun texte ne prévoit l'obligation pour la salariée de verser un tel document ; qu'ainsi il suffit que Madame Y... ait indiqué son état de grossesse avec la date présumée de son accouchement pour que le congé de maternité puisse être calculé ;
QU'en l'espèce, la Société Gérard Z... et Fils a dû recevoir dès avril 2010 la copie destinée à l'employeur du premier examen médical prénatal indiquant une date présumée de début de grossesse au 15/01/2010 (et donc une date présumée d'accouchement au 15/10/2010) ; qu'au pire, si ce document ne lui était pas parvenu comme la Société Gérard Z... et Fils le soutient, Madame Y... a indiqué dans son courrier du 3 août qu'elle était enceinte de 7 mois et que la Société Gérard Z... et Fils, grâce à l'article L.1225-19 du Code du travail, était donc avisée que le congé de maternité débuterait courant août (8 semaines avant la date prévue de l'accouchement) ; que par conséquent, quand bien même la Société Gérard Z... et Fils n'aurait pas reçu de certificat médical en avril 2010, (elle) savait l'état de grossesse avancé de Madame Y... avant même sa décision de licencier et savait, dès le 27 août, que le licenciement du 23 août avait été prononcé en cours de congé de maternité ; qu'il convient en effet de rappeler que l'interdiction absolue de notifier un licenciement à une femme enceinte pendant son congé de maternité vaut, que la femme use ou non de son droit au titre du congé de maternité (article L.1225-4) ; qu'il y a lieu de rappeler également que cette législation protectrice a pour objectif de préserver une femme fragilisée par sa grossesse avec une protection absolue pendant la période critique qui précède ou suit juste l'accouchement ; que l'employeur, dans sa manière d'agir puis de s'arc-bouter sans fondement juridique sur la production d'un certificat justifiant des dates précises du congé de maternité, a sciemment violé cette législation ;
QU'il résulte de l'ensemble de ces observations que le licenciement de Madame Y..., prononcé au cours de son congé de maternité, doit être annulé ; que contrairement à la demande formulée par la Société Gérard Z... et Fils, il n'y a aucune possibilité de régularisation ; que les sanctions attachées à la nullité d'un licenciement s'appliquent" ;
1°) ALORS QUE la protection absolue contre le licenciement dont bénéficie la salariée enceinte ou accouchée pendant le congé de maternité ne lui est due que pour autant que l'employeur a été exactement informé, avant le licenciement, des dates réelles ou présumées de ce congé, soit, à tout le moins, de la date du début de la grossesse ou de celle de l'accouchement ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations des juges du fond que ce n'est que le 27 août 2010, soit postérieurement à son licenciement notifié le 23 août précédent, que la Société Gérard Z... et Fils a été informée de la date présumée du début de grossesse de Madame Y... laquelle, avant cette date, ne lui avait communiqué que des informations incomplètes et/ou erronées ; qu'en déclarant cependant nul le licenciement ainsi prononcé par un employeur placé dans l'impossibilité de savoir, en dépit de ses demandes, les dates du congé de maternité de la salariée aux termes de motifs inopérants pris de ce qu'il connaissait, à cette date, "son état de grossesse avancé" la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L.1225-4 et R.1225-1 du Code du travail ;
2°) ALORS QUE la fraude corrompt tout ; que la protection absolue contre le licenciement de la salariée pendant son congé de maternité ne saurait lui bénéficier lorsqu'elle a délibérément et dans une intention frauduleuse refusé d'informer son employeur de la date de ce congé ou du début de sa grossesse voire même délivré sur ce point de fausses informations ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de la Cour d'appel que Madame Y... qui savait, depuis l'établissement du premier certificat d'examen prénatal le 3 avril 2010, que la date de début de sa grossesse était fixée au 15 janvier 2010 de telle sorte que son congé de maternité commencerait le 20 août 2010, avait non seulement dissimulé cette date mais faussement indiqué la date du 8 août à l'employeur en réponse à la convocation à l'entretien préalable, puis refusé de lui communiquer, avant la notification du licenciement, la date de son début de grossesse mettant ainsi obstacle, avant le début de son congé de maternité, à son licenciement pour impossibilité de maintenir son contrat de travail ; qu'en prononçant cependant la nullité de ce licenciement, la Cour d'appel a méconnu le principe susvisé ;
3°) ALORS enfin QUE constitue une impossibilité de maintenir le contrat de travail justifiant le licenciement de la salariée enceinte la suppression de son poste de travail pour un motif économique et l'impossibilité de procéder à son reclassement dans l'entreprise ou le groupe ; qu'en l'espèce, une telle impossibilité était invoquée par l'employeur dans la lettre de licenciement ; qu'en déclarant nul le licenciement de Madame Y... aux termes de motifs péremptoires selon lesquels "¿ que le motif économique de licenciement ne constitue pas en soi une impossibilité de maintenir le contrat de travail d'une salariée en état de grossesse et qu'à défaut de justification de cette impossibilité par l'employeur, ce qui est le cas en l'espèce, le licenciement est nul ¿" sans rechercher, comme l'y invitait l'employeur, si les difficultés économiques rencontrées, la suppression du poste de travail de Madame Y... et l'impossibilité de reclassement, justifiées par la production de divers éléments objectifs ne caractérisaient pas une impossibilité de maintenir le contrat de travail de cette salariée, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1225-4 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR "ordonné, conformément aux dispositions du second alinéa de l'article L.1235-4 du Code du travail, à la Société Gérard Z... et Fils...de rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage que Madame Y... pourrait avoir perçues dans la limite d'un mois à compter du jour de son licenciement" ;
ALORS QUE le remboursement des indemnités de chômage ne peut être ordonné en cas de nullité du licenciement ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article L.1235-4 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-23247
Date de la décision : 11/12/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges, 04 juin 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 déc. 2013, pourvoi n°12-23247


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Boré et Salve de Bruneton

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.23247
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