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04/12/2013 | FRANCE | N°13-10530

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 04 décembre 2013, 13-10530


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses diverses branches, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 octobre 2012), que la société Cevede, qui exploitait une grande surface de distribution sous l'enseigne « Intermarché », dans des murs et sur des terrains appartenant pour partie à la société Jacmar, a, au mois de juin 2002, déposé l'enseigne et lui a substitué celle de « Super U » ; qu'à l'occasion de cette opération, M. Bernard X... et son épouse, actionnaires majoritaires e

t dirigeants de la société Cevede, ont souscrit au profit de la société Systèm...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses diverses branches, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 octobre 2012), que la société Cevede, qui exploitait une grande surface de distribution sous l'enseigne « Intermarché », dans des murs et sur des terrains appartenant pour partie à la société Jacmar, a, au mois de juin 2002, déposé l'enseigne et lui a substitué celle de « Super U » ; qu'à l'occasion de cette opération, M. Bernard X... et son épouse, actionnaires majoritaires et dirigeants de la société Cevede, ont souscrit au profit de la société Système U centrale régionale Est des offres préalables de vente portant sur les droits sociaux et sur le fonds de commerce de la société ; qu'après avoir acquis les actions de la société Bauval exploitant une autre grande surface sous l'enseigne « Intermarché », les époux X... et la société Bauval ont, lors de l'adhésion de la société aux statuts de la société Système U centrale régionale Est et de la substitution d'enseigne, souscrit également des offres préalables de vente au profit de celle-ci ; que, parallèlement, la société Yabe contrôlée par le fils des époux X..., Yann, a acquis 50 % des actions de la société Cevede, et la société Moberd 49,9 %, qu'enfin à la suite d'une réduction de capital, les actions détenues par celle-ci dans le capital de la société Bauval ont été transférées aux époux X... pour être à nouveau transmises par voie de cession à la société Moberd ; que les sociétés Cevede et Bauval ont, en décembre 2007 et avril 2008, déposé l'enseigne « Super U » pour lui substituer la première l'enseigne « Carrefour » et la seconde celle de « Carrefour Market » ; que la société Système U centrale régionale Est a mis en oeuvre la procédure d'arbitrage en application de ses statuts, du règlement intérieur et des conventions d'offres préalables de vente ; que, par sentence du 6 décembre 2010, le tribunal arbitral, statuant en amiable composition, a notamment annulé l'apport effectué par M. Bernard X... au bénéfice de la société Moberd des 7 986 actions qu'il détenait dans la société Cevede et substitué la société Système U centrale régionale Est dans les droits et obligations de la société Moberd, à égalité de prix et conditions, ordonné en conséquence la cession de ces 7 986 actions de la société Cevede, condamné solidairement la société Moberd et les époux X... à payer à la société Système U centrale régionale Est une certaine somme au titre de la clause pénale prévue à l'article 9 de l'offre préalable de vente ainsi qu'une autre somme au titre de l'indemnité contractuelle prévue à l'article 19-14 du règlement intérieur en cas de violation du droit de préemption, et, au même titre, condamné solidairement les sociétés Cevede et Jacmar à payer à la société Système U centrale régionale Est une autre somme ;
Attendu que les sociétés Cevede, Bauval, Yabe, Moberd, les époux X..., leur fils Yann et la SCI Jacmar font grief à l'arrêt de rejeter leur recours en annulation de la sentence arbitrale ;
Attendu que, de première part, l'arrêt retient à bon droit que le grief pris d'une contradiction de motifs de la sentence arbitrale constitue nécessairement une critique de la sentence au fond qui échappe au juge de l'annulation ; que, de seconde part, en relevant que la société Moberd et les époux X... ont été condamnés solidairement au paiement d'une certaine somme au titre de l'indemnité prévue à l'article 19-14 du règlement intérieur en cas de violation du droit de préemption, la cour d'appel en a justement déduit que le grief tiré de l'absence de motivation de la sentence devait être rejeté ;
Et attendu qu'en retenant que les arbitres avaient ordonné la cession des 7 986 actions de la société Cevede, en conséquence de l'annulation de l'apport par M. X... à la société Moberd des actions qu'il détenait dans le capital de la société Cevede et par l'effet de la substitution, décidée par le tribunal arbitral, de la société Système U centrale régionale Est dans les droits de la société Moberd, la cour d'appel en a exactement déduit que, sous couvert du grief fait aux arbitres d'avoir statué au-delà des demandes dont ils étaient saisis, les recourants tentaient d'obtenir une révision au fond de la sentence ;
D'où il suit que le moyen, qui, en sa quatrième branche, n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi, ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés Cevede, Bauval, Yabe, Moberd Jacmar, M. Bernard X... et son épouse, ainsi que M. Yann X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Systeme U centrale régionale Est la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre décembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Bernard X..., M. Yann X... et les sociétés Cevede, Bauval, Yabe, Moberd et Jacmar.
II est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté le recours en annulation de la sentence rendue entre les parties le 6 décembre 2010
AUX MOTIFS QUE, sur le moyen tiré du défaut de motivation de la sentence (article 1492, alinéa 6 du code de procédure civile), les demandeurs au recours soutenaient, en premier lieu, que la sentence était empreinte de contradiction et, partant, dépourvue de motivation, dans la mesure où, tout en ne condamnant dans le dispositif de sa sentence que la SA CEVEDE au paiement d'une somme de 1.000.000 € au titre de l'indemnité contractuelle prévue à l'article 19-14 du règlement intérieur, le tribunal arbitral, après avoir retenu dans les motifs de sa décision que la SCI JACMAR n'était pas liée par le droit de préemption, avait fait état, dans ces mêmes motifs (p. 49), de la condamnation solidaire des sociétés CEVEDE et JACMAR au paiement de l'indemnité contractuelle ; que, toutefois, aucune disposition réglementaire n'impose que la sentence soit énoncée sous forme de dispositif en sorte que, formant un tout, elle est revêtue de l'autorité de chose jugée relativement à l'ensemble des chefs de demande sur lesquels elle statue, fussent-ils évoqués dans les seuls motifs, le tribunal arbitral s'étant expliqué sur les raisons de la condamnation solidaire de la SCI JACMAR avec la société CEVEDE au paiement de l'indemnité contractuelle prévue à l'article 19-14 du règlement intérieur et l'ayant expressément prononcée en page 49 de sa décision ; que, par ailleurs, les demandeurs au recours qui relevaient que les arbitres ne pouvaient tout à la fois affirmer que la SCI JACMAR n'était pas liée par le droit de préemption et la condamner néanmoins au paiement de la pénalité contractuelle prévue à l'article 19-14 du règlement intérieur stipulée en cas de violation de ce même droit, entendaient, en réalité, sous couvert du grief de contradiction de motifs, obtenir la révision au fond de la sentence, alors que le recours en annulation est exclusif d'une telle révision ; qu'enfin, les demandeurs faisaient valoir de manière inopérante, pour le motif qui venait d'être énoncé que, pour condamner solidairement la société civile de placements MOBERD et les consorts X... à payer la somme de 100.000 € au titre de l'indemnité contractuelle prévue à l'article 19-14 du règlement intérieur en cas de violation du droit de préemption, les arbitres ne faisaient état que de la violation de l'offre préalable de vente ; que, sur le moyen tiré de ce que le tribunal arbitral avait statué sans se conformer à la mission qui lui avait été confiée (article 1492 3° du code de procédure civile), les demandeurs au recours soutenaient, d'une part, que la société SYSTEME U ayant prononcé l'annulation de l'apport d'actions effectué par M. Bernard X... au profit de la société civile de placement MOBERD et demandé à être substituée dans les droits de cette dernière concernant les actions détenues irrégulièrement, les arbitres, en ordonnant la cession des titres CEVEDE au profit de la société coopérative SYSTEME U, avaient statué ultrapetita, excédant ainsi les termes de leur mission, d'autre part, que les arbitres ne s'étaient pas expliqués, alors qu'ils avaient mission de statuer en qualité d'amiables compositeurs ; que, sur la première branche du moyen, les demandeurs entendaient en réalité, sous couvert du grief articulé, obtenir la révision au fond de la sentence ; qu'en effet, c'était en conséquence de l'annulation qu'ils avaient prononcée, de l'apport par M. Bernard X... au profit de la société civile de placements MOBERD des 7986 actions qu'il détenait dans le capital de la SA CEVEDE et par l'effet de la substitution, qu'ils avaient décidée, de la coopérative SYSTEME U dans les droits et obligations de la société civile de placement MOBERD à égalité de prix et conditions, que les arbitres, tirant des éléments de fait et de droit du débat, les conséquences juridiques qu'ils estimaient fondées, avaient ordonné la cession des 7986 actions de la SA CEVEDE et donné acte à la coopérative SYSTEME U-EST de son engagement de payer la somme de 4.492.000 ¿ représentant le prix des actions ; que, sur la seconde branche du moyen, les arbitres qui, après avoir repris les termes de la clause compromissoire qui leur avait imparti de statuer (p. 9) en tant qu'amiables compositeurs, avaient pris soin d'énoncer liminairement dans leur sentence (p. 20), puis en tête du dispositif de celle-ci (p. 67), que le tribunal arbitral statuait en amiable composition ; que, par ailleurs, après avoir constaté la violation de l'offre préalable de vente, les arbitres avaient, dans la motivation de leur sentence, tenu compte, pour la fixation de l'indemnité contractuelle, du fait que la société SYSTEME U-EST n'avait subi qu'un préjudice très réduit (p. 48), que de la même manière, pour sanctionner la méconnaissance du droit de préemption, ils avaient réduit dans de notables proportions le montant de l'indemnité contractuelle réclamée en application de l'article 19-4 du règlement intérieur (p. 49), que pour déterminer la réparation du préjudice consécutif aux faits constitutifs de concurrence déloyale, ils avaient, par référence à leurs « pouvoirs d'amiables compositeurs », tenu compte de la part prise par la société CEVEDE dans le développement de la clientèle (p. 55), que, par ailleurs, statuant en « équité », ils avaient rejeté comme non fondée la demande de la coopérative SYSTEME U-Est tendant au remboursement de la subvention d'exploitation (p. 58), que, d'autre part, faisant usage tant des pouvoirs de modération de l'article 1150 du code civil, que de leurs pouvoirs « d'amiable composition », ils avaient fixé à 5% le taux d'intérêt appliqué à la créance de remboursement de la subvention d'ouverture versée à la société CEVEDE (p. 63) ; qu'enfin, usant de leurs «pouvoirs d'amiable composition», ils avaient avancé à la date de la sentence, la date d'exigibilité du remboursement à l'associé du solde du fonds de garantie (p. 65) et décidé de laisser à la charge de la coopérative SYSTEME U EST les frais exposés par celle-ci dans le cadre dans le cadre des mesures d'instruction autorisées par décision de justice ; qu'il résultait de ce qui précédait que le tribunal avait fait ressortir dans sa sentence qu'il avait pris en compte l'équité ; qu'en conséquence le moyen pris en ses deux branches doit être écarté ;
1° ALORS QUE la contradiction de motifs qui entache une sentence arbitrale entraîne son annulation ; qu'en l'espèce, la cour, qui a refusé d'annuler la sentence arbitrale, alors qu'elle était entachée d'une contradiction irréductible, tirée de ce que le tribunal arbitral, après avoir relevé que la SCI JACMAR n'avait pas violé le droit de préemption, l'avait ensuite condamnée solidairement avec la société CEVEDE à régler une somme d'un million d'euros au titre de l'article 19-14 du règlement intérieur, a violé l'article 1492 6° du code de procédure civile ;
2° ALORS QUE le défaut de motivation d'une sentence arbitrale constitue une cause d'annulation de celle-ci ; qu'en l'espèce, la cour, qui a écarté, comme inopérant, le grief tiré du défaut de motivation de la sentence arbitrale, tandis que les arbitres avaient condamné la société MOBERD et les époux X... pour violation du droit de préemption, sans motivation et sans même constater une violation de ce droit de préemption par les défendeurs, de sorte que les juges de l'annulation devaient vérifier si la sentence était motivée sur ce point, a violé l'article 1492 6° du code de procédure civile ;
3° ALORS QUE les arbitres ne peuvent statuer au-delà de leur mission ; qu'en l'espèce, la cour, qui a écarté le grief tiré de l'ultra petita commis par les arbitres, tandis que ceux-ci, seulement saisis par la société COOPERATIVE SYSTEME U-EST de l'annulation de l'apport d'actions effectué par M. Bernard X... au profit de la société MOBERD et de la substitution de la Coopérative dans les droits de cette dernière, avaient ordonné la cession, au profit de l'intimée, de 7987 actions de la société CEVEDE, a violé l'article 1492 3° du code de procédure civile ;
4° ALORS QUE les arbitres, investis des pouvoirs d'amiables compositeurs, doivent confronter tous les points de leur décision à l'équité ; qu'en l'espèce, la cour, qui a estimé que les arbitres avaient statué en équité sur tous les points de leur sentence, quand, sur la question des sanctions à appliquer (sentence, pp. 44-51), le tribunal arbitral avait observé un complet silence sur la prise en compte de l'équité, tant concernant sa décision d'annuler l'apport de M. X... et d'ordonner la substitution de la société SYSTÈME U-EST dans les droits et obligations de la société MOBERD, à égalité de prix et de conditions, que sur sa décision de condamner les sociétés CEVEDE et JACMAR à payer la somme de 1.000.000 € au titre de l'indemnité contractuelle prévue à l'article 19-14 du règlement intérieur, a violé l'article 1492 3° du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 13-10530
Date de la décision : 04/12/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 02 octobre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 04 déc. 2013, pourvoi n°13-10530


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : SCP Odent et Poulet, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:13.10530
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