LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé, à compter du 18 mai 1987, par la société Glaenzer spicer, devenue GKN Driveline (la société), en qualité d'adjoint au directeur financier ; qu'en dernier lieu, il a été nommé "director special projects"; qu'après avoir été informé le 12 janvier 2009 que son rôle était en cours d'examen, il a été autorisé le 27 janvier 2009 à rester à son domicile à compter de cette date pour y exercer ses fonctions professionnelles ; que le 14 mai 2009, la société a informé le salarié de la mise en oeuvre d'un plan de réorganisation comportant la suppression de son poste et lui a proposé trois reclassements ; que le 18 mai 2009, l'intéressé a saisi la juridiction prud'homale de demandes de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de paiement de diverses sommes ; que le 20 mai, il a refusé les postes de reclassement proposés ; qu'il a été licencié pour motif économique le 26 mai 2009 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'accueillir les demandes du salarié, alors, selon le moyen :
1°/ que les parties au contrat de travail peuvent, d'un commun accord, prévoir une dispense d'activité avec maintien de la rémunération ; qu'en l'espèce, pour dire que l'employeur a manqué à son obligation de fournir du travail et prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, la cour d'appel se borne à considérer que le salarié n'avait pas pris l'initiative d'une demande de dispense ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les parties n'avaient pas d'un commun accord convenu d'une dispense d'activité avec maintien de la rémunération, peu important la partie ayant pris l'initiative, la cour d'appel ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1134 du code civil et de l'article L. 1221-1 du code du travail, tous deux violés ;
2°/ que les parties peuvent convenir d'une dispense d'activité avec maintien de rémunération afin de permettre au salarié d'effectuer ses propres recherches de reclassement dans l'attente de la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement pour motif économique dès lors que pendant cette période l'employeur remplit son obligation de recherche de reclassement ; qu'en l'espèce, pour dire que l'employeur a manqué à son obligation de fournir du travail et prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts, la cour d'appel se borne à considérer que le salarié n'avait pas pris l'initiative d'une demande de dispense ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher comme l'y invitaient pourtant les conclusions de la société GKN Driveline si les parties n'avaient pas convenu d'une dispense d'activité afin de permettre au salarié de procéder, parallèlement à celles de l'employeur, à ses propres recherches de reclassement au sein du groupe au sein duquel il avait noué des contacts privilégiés durant sa carrière, la cour d'appel prive son arrêt de base légale au regard de l'article 1134 du code civil et l'article L. 1221-1 du code du travail, derechef violés ;
Mais attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que la société avait invoqué l'existence d'un commun accord sur une dispense d'activité avec maintien de la rémunération ; que le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit, est irrecevable ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'ordonner le remboursement par la société à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage servies au salarié à la suite de ce licenciement, dans la limite de six mois d'indemnités, alors, selon le moyen, que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut au défaut de motifs ; qu'en l'espèce, après avoir décidé dans ses motifs que le remboursement des indemnités de chômage par l'employeur devait être limité à trois mois d'indemnités, la cour d'appel ordonne dans son dispositif le remboursement par la société GKN Driveline des indemnités chômage versées à M. X... dans la limite de six mois d'indemnités ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel entache sa décision d'une irréductible contradiction entre ses motifs et son dispositif et viole derechef l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la contradiction alléguée procède d'une omission purement matérielle dont la rectification sera ci-après ordonnée ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu l'article 29 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 ;
Attendu que pour condamner la société au paiement d'une indemnité conventionnelle de licenciement, l'arrêt retient qu'en l'absence de dispositions conventionnelles contraires, cette indemnité se calcule sur la base de la rémunération brute des douze derniers mois, sans qu'il y ait lieu d'exclure les indemnités compensatrices de congés payés et de jours de réduction du temps de travail pour l'année 2009, qui ont le caractère de salaires ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'indemnité compensatrice de congés payés et celle de jours de réduction du temps de travail ne constituent pas des éléments de salaire se rapportant à la période de référence, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Vu les articles 462 et 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, en ce qu'il condamne la société GKN Driveline à payer à M. X... un complément d'indemnité conventionnelle de licenciement, l'arrêt rendu le 16 mai 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
DIT que le dispositif de l'arrêt attaqué sera rectifié en ces termes :
"Ordonne le remboursement par l'employeur à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié à la suite du licenciement dans la limite de trois mois d' indemnités" ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour la société GKN Driveline
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur X... aux torts de la société GKN Driveline, d'avoir condamné cette dernière à verser au salarié la somme de 180 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'avoir ordonné le remboursement par l'employeur des indemnités de chômage servies au salarié à la suite de ce licenciement;
AUX MOTIFS QUE sur la demande de résiliation judiciaire, lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en restant à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour motif économique, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée ; que si tel est le cas, il fixe la date de la rupture à la date d'envoi de la lettre de licenciement ; que Monsieur X..., à qui incombe la charge de la preuve de manquements de l'employeur d'une gravité suffisante pour justifier la rupture, fait valoir que la société GKN Driveline a manqué gravement à son obligation de lui fournir le travail convenu pendant plus de quatre mois ; que la société invoque, d'une part, des considérations résultant du contexte économique et conjoncturel du secteur d'activité du groupe et constituant pour elle une situation contraignante, d'autre part, la demande de Monsieur X... à être dispensé d'activité ; que la fourniture du travail constitue, avec le versement de la rémunération, une obligation essentielle de l'employeur ; qu'il résulte suffisamment des débats et n'est d'ailleurs pas contesté qu'après une réduction progressive de sa charge de travail à compter du mois de novembre 2008, corroborée par plusieurs courriels adressés par Monsieur X... à sa hiérarchie pour solliciter instructions et missions, la société GKN Driveline n'a plus fourni à Monsieur X... aucun travail ; que d'abord, des difficultés économiques ne suffisent pas à caractériser une situation contraignante de nature à libérer l'employeur de son obligation de fournir du travail, avant même tout engagement de procédure de licenciement ; qu'ensuite, la société GKN Driveline ne rapporte pas la preuve de ce que Monsieur X..., qui le conteste, aurait été dispensé d'activité à son initiative ; en effet, les attestations établies par Monsieur Z... et Madame A..., respectivement directeur général et responsable des ressources humaines, qui ne font que rapporter des propos qui leur auraient été tenus par la signataire de l'autorisation de rester à son domicile, délivrée au salarié le 27 janvier 2009, sont sans valeur probante et qu'il importe peu qu'à cette date un départ négocié ait été, ou non, évoqué ou que le salarié ait, ou non, eu connaissance du plan de restructuration mis en oeuvre et de la suppression de son poste ; que l'inexécution, par l'employeur, de son obligation de fournir du travail au salarié pendant plusieurs mois, en le faisant, en outre, dans l'incertitude de sa position dans l'entreprise, présente un degré de gravité suffisant pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur ; que le jugement du conseil de prud'hommes doit, en conséquence, être infirmé et la résiliation judiciaire du contrat du travail prononcée, laquelle produira les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse à la date du 26 mai 2009, sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur la cause du licenciement économique ni sur le respect des critères d'ordre des licenciements ; qu'au moment de la rupture de son contrat de travail, Monsieur X... avait au moins deux années d'ancienneté et que la société GKN Driveline employait habituellement au moins 11 salariés ; qu'en application de l'article L.1235-3 du Code du travail, le salarié dont le licenciement est sans cause réelle et sérieuse peut prétendre à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires bruts perçus au cours des six derniers mois précédant son licenciement ; qu'au regard de son âge au moment du licenciement, 62 ans, de son ancienneté de 22 ans dans l'entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée et des justificatifs sur sa situation postérieure au licenciement produits par Monsieur X..., il convient de lui allouer, en réparation du préjudice matériel et moral qu'il a subi, la somme de 180 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en application de l'article L.1235-4, il convient d'ordonner d'office le remboursement, par l'employeur à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié à la suite de ce licenciement dans la limite de trois mois d'indemnités ;
ALORS QUE, D'UNE PART, les parties au contrat de travail peuvent, d'un commun accord, prévoir une dispense d'activité avec maintien de la rémunération ; qu'en l'espèce, pour dire que l'employeur a manqué à son obligation de fournir du travail et prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, la Cour se borne à considérer que le salarié n'avait pas pris l'initiative d'une demande de dispense ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les parties n'avaient pas d'un commun accord convenu d'une dispense d'activité avec maintien de la rémunération, peu important la partie ayant pris l'initiative, la Cour ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1134 du Code civil et de l'article L.1221-1 du Code du travail, tous deux violés ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, les parties peuvent convenir d'une dispense d'activité avec maintien de rémunération afin de permettre au salarié d'effectuer ses propres recherches de reclassement dans l'attente de la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement pour motif économique dès lors que pendant cette période l'employeur remplit son obligation de recherche de reclassement ; qu'en l'espèce, pour dire que l'employeur a manqué à son obligation de fournir du travail et prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts, la Cour se borne à considérer que le salarié n'avait pas pris l'initiative d'une demande de dispense ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher comme l'y invitaient pourtant les conclusions de la société GKN Driveline (pages 12 à 14) si les parties n'avaient pas convenu d'une dispense d'activité afin de permettre au salarié de procéder, parallèlement à celles de l'employeur, à ses propres recherches de reclassement au sein du groupe au sein duquel il avait noué des contacts privilégiés durant sa carrière, la Cour prive son arrêt de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil et l'article L.1221-1 du Code du travail, derechef violés.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire au premier moyen)Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné le remboursement par la société GKN Driveline à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage servies au salarié à la suite de ce licenciement dans la limite de six mois d'indemnités ;
AUX MOTIFS QU'en application de l'article L.1235-4, il convient d'ordonner d'office le remboursement, par l'employeur à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié à la suite de ce licenciement dans la limite de trois mois d'indemnités ;
ALORS QUE la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut au défaut de motifs; qu'en l'espèce, après avoir décidé dans ses motifs que le remboursement des indemnités de chômage par l'employeur devait être limité à trois mois d'indemnités, la Cour ordonne dans son dispositif le remboursement par la société GKN Driveline des indemnités chômage versées à Monsieur X... dans la limite de six mois d'indemnités ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel entache sa décision d'une irréductible contradiction entre ses motifs et son dispositif et viole derechef l'article 455 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société GKN Driveline à verser à Monsieur Jean-Pierre X... la somme de 19 925,84 euros à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article 29 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie, applicable en l'espèce, l'indemnité de congédiement est calculée sur la moyenne mensuelle des appointements ainsi que des avantages et gratifications contractuels dont l'ingénieur ou cadre a bénéficié au cours de ses 12 derniers mois de présence dans l'établissement, à hauteur de 1/5ème de mois de salaire pour la tranche de 1 à 7 ans d'ancienneté et de 3/5ème pour la tranche au-delà de 7 ans d'ancienneté ; qu'en l'absence de dispositions conventionnelles contraires, l'indemnité se calcule sur la base de la rémunération brute des douze derniers mois, sans qu'il y ait lieu d'exclure les indemnités compensatrices de congés payés et de jours RTT qui ont le caractère de salaires ; qu'à la rémunération brute des douze derniers mois de 148 890,32 euros retenue par la société GKN Driveline, il convient donc d'ajouter la somme de 5 372,35 euros versée à titre d'indemnité compensatrice de jours de RTT pour l'année 2009 ainsi que celle de 18 226, 48 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés, soit une rémunération brute de 172 489,15 euros et une rémunération mensuelle brute moyenne de 14 374,10 euros ; qu'il s'ensuit qu'eu égard à son ancienneté, l'indemnité conventionnelle de licenciement due à Monsieur X... s'établit à : (14 374, 10 x1/5) x 7 + 14 374,10 x 15,5 = 20 123, 74 + 133 679, 13 = 153 802,87euros ; que Monsieur X... ayant reçu à ce titre une somme de 133 877, 03 euros, la société GKN Driveline lui doit encore la somme de 19 925,84 euros ;
ALORS QUE, D'UNE PART, selon l'article 29 de la Convention collective des ingénieurs et cadres de la Métallurgie du 13 mars 1972, l'indemnité de licenciement est calculée sur la moyenne mensuelle des appointements ainsi que des avantages et gratifications contractuels, dont l'ingénieur ou cadre a bénéficié au cours de ses 12 derniers mois précédant la notification du licenciement ; qu'en l'espèce, pour condamner la société GKN Driveline à verser un rappel d'indemnité conventionnelle de licenciement, la Cour juge qu'en l'absence de dispositions conventionnelles contraires, l'indemnité se calcule sur la base de la rémunération brute des douze derniers mois, sans qu'il y ait lieu d'exclure l'indemnité compensatrice de congés payés qui a le caractère de salaire ; qu'en statuant ainsi, bien que l'indemnité compensatrice de congés payés ne constitue pas un élément de salaire se rapportant à la période de référence, la Cour viole le texte susvisé ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, et pour les mêmes motifs, en incluant dans la base de calcul de l'indemnité conventionnelle de licenciement, l'indemnité compensatrice de réduction du temps de travail bien que cette somme ne constitue pas un élément de salaire se rapportant à la période de référence, la Cour viole également l'article 29 de la Convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la Métallurgie du 13 mars 1972.