LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 29 juin 2012), que par jugement du 27 mars 2001, confirmé par arrêt du 27 mai 2003, le tribunal de grande instance de Marseille a constaté la vente de l'immeuble de M. X... à la société Les Ciseaux d'argent ; que l'acquéreur a consigné le prix de vente entre les mains du bâtonnier de l'ordre des avocats de Marseille désigné comme séquestre ; que la publication du jugement a fait apparaître une hypothèque conventionnelle au profit de la société Caixa bank, devenue la société Boursorama ; que plusieurs jugements portant sur les loyers versés par les locataires de l'immeuble vendu ont ordonné leur consignation entre les mains du bâtonnier ; que par arrêt du 8 septembre 2009, devenu irrévocable, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a débouté M. X... de sa demande de résolution de la vente ; que la société Les Ciseaux d'argent a assigné M. X... et la société Boursorama en distribution du prix de vente ; que, par ordonnance du 14 février 2008, confirmé par arrêt du 30 janvier 2009, le juge de la mise en état a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par M. X... au profit du juge de l'exécution ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que M. X... n'ayant pas soulevé devant la cour d'appel l'exception d'incompétence sur laquelle avait statué l'arrêt du 30 janvier 2009, le moyen, qui attaque un motif erroné mais surabondant de l'arrêt, est inopérant ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour autoriser la CARPA de Marseille à verser à la société Boursorama la somme de 157 036 euros avec intérêts au taux contractuel à compter de l'arrêt et désigner le bâtonnier de l'ordre des avocats de Marseille pour procéder à la distribution du prix, l'arrêt retient que les demandes relatives à la résolution de la vente se heurtent à l'autorité de chose jugée, le droit de propriété de la société Les Ciseaux d'argent ayant été définitivement reconnu par des décisions passées en force de chose jugée et que M. X... ne peut soutenir que l'arrêt du 8 septembre 2009 n'aurait pas statué sur la réticence de l'acquéreur qui n'avait pas l'intention de payer le prix avant plusieurs années, la cour d'appel ayant bien statué sur l'action en résolution de la vente pour défaut de paiement du prix ;
Qu'en statuant ainsi, alors que M. X... soulevait la nullité du contrat de vente pour erreur sur les obligations essentielles des parties, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il autorise la CARPA de Marseille à verser à la société Boursorama la somme de 157 036 euros avec intérêts au taux contractuel à compter de l'arrêt et désigne le bâtonnier de l'ordre des avocats de Marseille pour procéder à la distribution du prix, l'arrêt rendu le 29 juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société Les Ciseaux d'argent aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
M. X... fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, de l'avoir débouté de ses arguments tenant à l'incompétence du tribunal de grande instance de Marseille ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE M. X... est mal fondé à contester la compétence du tribunal de grande instance de Marseille en l'état de l'arrêt de cette cour du 30 janvier 2009, qui a reconnu la compétence de cette juridiction ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE M. X... conteste la compétence du tribunal de céans, arguant que l'arrêt du 30 janvier 2009 prononcé par la cour d'appel d'Aix-en-Provence qui a reconnu cette compétence n'a pas autorité de la chose jugée car il a statué sur appel d'un incident de mise en état ; que cet argument de M. X... n'est pas pertinent ; qu'en effet, ces décisions portent non pas sur une mesure provisoire dans l'attente d'une décision au fond, ce qui permettrait effectivement d'en limiter aujourd'hui la portée, mais sur le principe de la compétence du tribunal au regard de l'application de l'article 111 du décret 2006-936 du 27 juillet 2006 ; que ces décisions s'imposent à la juridiction de céans ;
ALORS QUE c'est seulement lorsque, statuant sur une exception de procédure, elle met fin à l'instance que l'ordonnance du juge de la mise en état a, au principal, l'autorité de la chose jugée ; que la cour, en retenant, pour juger M. X... mal fondé à contester la compétence du tribunal de grande instance de Marseille pour statuer sur la demande de distribution du prix de vente de l'immeuble litigieux, que l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 30 janvier 2009, ayant confirmé l'ordonnance d'incident du juge de la mise en état près du tribunal de grande instance de Marseille, a ainsi conféré autorité de chose jugée à cette décision, qui avait pourtant rejeté l'exception de compétence et n'avait donc pas mis fin au litige, et a ainsi violé l'article 775 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)M. X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir autorisé la CARPA de Marseille à verser à la société Boursorama la somme de 157 036 ¿ avec intérêts au taux contractuel à compter de l'arrêt, somme séquestrée sous le n° 05004370, et d'avoir désigné M. Le Bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Marseille, avec faculté de délégation, pour procéder à la distribution du prix de vente de l'immeuble lui ayant appartenu, sis à Marseille,..., 13008 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE M. X... est mal fondé à contester la compétence du tribunal de grande instance de Marseille en l'état de l'arrêt de cette cour du 30 janvier 2009, qui a reconnu la compétence de cette juridiction ; que se heurtent également à l'autorité de chose jugée ses demandes relatives à la résolution de la vente, le droit de propriété de la société Les Ciseaux d'Argent ayant été définitivement reconnu par des décisions passées en force de chose jugée, le dernier pourvoi en cassation ayant été rejeté le 11 janvier 2011 ; que Monsieur X... ne peut soutenir que l'arrêt de cette cour du 8 septembre 2009 n'aurait pas statué sur la réticence de la société Les Ciseaux d'Argent qui n'avait pas l'intention de payer le prix avant plusieurs années, la cour ayant bien statué sur l'action en résolution de la vente pour défaut de paiement du prix ; que contrairement à ce que soutient Monsieur X..., la société Les Ciseaux d'Argent est recevable à participer, et même à provoquer, la distribution du prix de vente de l'immeuble, car elle est créancière des loyers que ce dernier a continué à encaisser depuis le 17 juin 1999, date à laquelle la vente a été considérée comme parfaite, ainsi que l'a rappelé cette cour dans son arrêt du 30 janvier 2009, devenu définitif ; que c'est en vain que M. X... prétend que ce droit d'agir se heurterait aux dispositions des articles 2214 et 2475 du code civil, l'action de la société Les Ciseaux d'Argent tendant à la distribution du prix d'un immeuble vendu en dehors de toute procédure d'exécution et l'article 2475, qui traite de l'accord du débiteur avec tous les créanciers inscrits, étant inapplicable à l'espèce ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le tribunal est saisi par la société Les Ciseaux d'Argent à la suite d'une vente prononcée par jugement depuis le 27 mars 2001, d'un immeuble sis... à Marseille, 8e ; que cette vente et ses conséquences ont donné lieu à un contentieux abondant, et un pourvoi est encore pendant devant la Cour de cassation pour trancher la question de la résolution de la vente, M. X... invoquant la tardif et de la consignation du prix ; qu'en tout état de cause, deux questions sont aujourd'hui soumises au tribunal, dont le principe a déjà été tranché par des décisions définitives, qui sont relatives à la mobilisation du prix de vente, consigné depuis 2005 ; qu'ainsi, et notamment en exécution de l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 9 (sic) septembre 2009, la société Boursorama, seul créancier inscrit sur l'immeuble, doit être payé de sa créance sur le montant consigné ; que la société Les Ciseaux d'Argent demande que M. le bâtonnier de l'ordre des avocats de Marseille soit désigné, avec faculté de délégation, pour procéder à la distribution du prix de vente de l'immeuble ayant appartenu à M. X... sis ... à Marseille, que soit fixé le délai dans lequel les créanciers feront connaître le montant de leur créance au mandataire chargé de la répartition ; que M. X... conteste la compétence du tribunal de céans, arguant que l'arrêt du 30 janvier 2009 prononcé par la cour d'appel d'Aix-en-Provence qui a reconnu cette compétence n'a pas autorité de la chose jugée car il a statué sur appel d'un incident de mise en état ; que cet argument de M. X... n'est pas pertinent ; qu'en effet, ces décisions portent non pas sur une mesure provisoire dans l'attente d'une décision au fond, ce qui permettrait effectivement d'en limiter aujourd'hui la portée, mais sur le principe de la compétence du tribunal au regard de l'application de l'article 111 du décret 2006-936 du 27 juillet 2006 ; que ces décisions s'imposent à la juridiction de céans ; qu'il sera donc fait droit à la demande de la société Les Ciseaux d'Argent et M. le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Marseille désigné pour procéder à la distribution du prix ;
1°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel signifiées le 3 avril 2012 (pp. 31, 32, 34 et 57), M. X... faisait valoir qu'il ressortait de l'arrêt du 8 septembre 2009 que la société Les Ciseaux d'Argent n'avait aucune obligation de payer le prix de vente, et demandait, que soit prononcée la nullité du contrat pour erreur sur les obligations essentielles des parties ; que dès lors en énonçant, pour rejeter cette demande, qu'elle se heurtait à l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 8 septembre 2009 ayant statué sur l'action en résolution de la vente pour défaut de paiement du prix, action qui était pourtant distincte de l'action en nullité soulevée dans la présente instance, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et ainsi violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
2°) ALORS, subsidiairement, QUE M. X... faisait valoir, dans ses conclusions d'appel (pp. 20, 21, 28, 58, 59) que la demande de la société Les Ciseaux d'Argent tendant à obtenir le paiement des loyers perçus par le vendeur entre 1999 et 2005, qui n'avait fait l'objet d'aucune décision de justice, se heurtait à l'inexécution de la propre obligation de paiement du prix de l'acquéreur, en application de l'article 1612 du code civil ; que dès lors, en se bornant à affirmer, pour considérer que la société Les Ciseaux d'Argent était recevable à provoquer la procédure de distribution du prix prévue par l'article 111 du décret du 27 juillet 2006, qu'elle était créancière des loyers que M. X... avait encaissés depuis le 17 juin 1999, sans répondre au moyen précité pourtant de nature à exclure l'existence de toute créance, la cour d'appel a privé sa décision de motivation et ainsi violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS, en outre, QUE dans son arrêt rendu le 30 janvier 2009 (p. 5-6), la cour d'appel d'Aix-en-Provence avait seulement constaté dans ses motifs que la société Les Ciseaux d'Argent se disait créancière de loyers perçus par M. X..., et que cette somme était susceptible de venir en déduction du prix de vente sans toutefois statuer sur la réalité de cette créance ; que dès lors, en affirmant, pour juger que la société Les Ciseaux d'Argent était recevable à provoquer la procédure de distribution du prix, qu'elle était créancière des loyers que M. X... avait encaissés depuis le 17 juin 1999, ainsi que cela avait été rappelé par la cour d'appel dans son arrêt du 30 janvier 2009 devenu définitif, la cour d'appel a dénaturé les termes de cette décision et ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile.
4°) ALORS, en tout état de cause, QU'en application de l'article 2475 du code civil, lorsqu'à l'occasion de la vente d'un immeuble hypothéqué tous les créanciers inscrits conviennent avec le débiteur que le prix sera affecté au paiement de leurs créances, ils peuvent directement exercer leur droit de préférence sur ce prix et l'opposer à tout autre créancier ; qu'en se bornant à affirmer que l'article 2475 du code civil, qui traite de l'accord du débiteur avec tous les créanciers inscrits était inapplicable à l'espèce, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la société Boursorama, seul créancier hypothécaire inscrit, et M. X..., débiteur, n'étaient pas d'accord pour affecter le prix de vente au paiement total de la créance hypothécaire, permettant ainsi à la Carsam, séquestre de prix, de désintéresser directement la société Boursorama, sans avoir recours à la procédure prévue par l'article 111 du décret du 27 juillet 2006, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2475 du code civil.