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30/10/2013 | FRANCE | N°12-35013

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 octobre 2013, 12-35013


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué, que la Fédération nationale des transports et de la logistique Force Ouvrière a désigné par lettre du 21 octobre 2010 M. X... en qualité de délégué syndical région Nord BM Chimie ; que la société BM Chimie a « filialisé » ses établissements en procédant au transfert, avec effet au premier octobre 2012, du fonds de commerce de chacun de ses établissements vers des sociétés nouvelles, parmi lesquelles la société BM Chimie Villers Saint-Paul ; que, par lettre du 19

octobre 2012, la Fédération Force Ouvrière de l'Oise a désigné M. X... en qu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué, que la Fédération nationale des transports et de la logistique Force Ouvrière a désigné par lettre du 21 octobre 2010 M. X... en qualité de délégué syndical région Nord BM Chimie ; que la société BM Chimie a « filialisé » ses établissements en procédant au transfert, avec effet au premier octobre 2012, du fonds de commerce de chacun de ses établissements vers des sociétés nouvelles, parmi lesquelles la société BM Chimie Villers Saint-Paul ; que, par lettre du 19 octobre 2012, la Fédération Force Ouvrière de l'Oise a désigné M. X... en qualité de délégué syndical au sein de cette société ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Vu les articles L. 2121-1 5°, L. 2122-1, L. 2141-10, L. 2143-3, L.2231-3, L.2232-3, L.2232-16 et L. 2232-17 du code du travail ;
Attendu que pour débouter la société de sa demande d'annulation de la désignation en date du 19 octobre 2012, le jugement énonce que le cadre de la désignation d'un délégué syndical est l'établissement au sens de l'article L. 2143-3 du code du travail défini comme le regroupement d'au moins cinquante salariés constituant une communauté de travail ayant des intérêts propres et travaillant sous la direction d'un représentant de l'employeur, que si le périmètre de désignation du délégué syndical est en principe le même que celui retenu lors des dernières élections, pour la mise en place du comité d'entreprise ou d'établissement, un accord collectif même tacite peut en disposer autrement en prévoyant un périmètre plus restreint, qu'en l'espèce la désignation du 21 octobre 2010 de M. X..., qui n'a pas été contestée par la société BM Chimie a eu lieu dans le périmètre de la région Est, qui regroupe les sites de Lillebonne et Villers Saint-Paul, alors qu'aucun établissement distinct n'existait au sein de la société BM Chimie, mais seulement un comité d'entreprise, qu'il en découle l'existence d'un comité d'établissement, au sens de l'article L. 2143-3 du code du travail, établissement distinct composé des sites de Lillebonne et Villers Saint-Paul, au sein de l'entreprise démantelée, la société BM Chimie ;
Attendu cependant que, sauf accord collectif, lequel doit, à peine de nullité, être écrit, prévoyant un périmètre plus restreint, le périmètre de désignation des délégués syndicaux est le même que celui retenu, lors des dernières élections, pour la mise en place du comité d'entreprise ou d'établissement ;
Qu'en statuant comme il a fait, sans constater l'existence d'un tel accord, le tribunal a violé les textes susvisés ;
Et sur le moyen unique, pris en ses troisième et quatrième branches :
Vu les articles L. 2143-3 et L. 2143-10 du code du travail ;
Attendu que pour débouter la société de sa demande d'annulation de la désignation du 19 octobre 2012, le jugement retient que la scission de la société BM Chimie, intervenue le 1er octobre 2012, n'a pu avoir pour effet d'affecter l'autonomie consacrée de l'établissement constitué par les sites de Lillebonne et Villers Saint-Paul, mais a eu au contraire pour effet de renforcer l'autonomie de chacun des deux sites dès lors qu'ils constituent toujours, chacun, des regroupements d'au moins cinquante salariés constituant une communauté de travail ayant des intérêts propres et travaillant sous la direction d'un représentant de l'employeur, et que la scission de la société BM Chimie par « filialisation » de ses établissements, avec effet au 1er octobre 2012, en sociétés juridiquement autonomes à la suite du transfert du fonds de commerce de chacun de ses établissements vers des sociétés nouvelles, filiales du groupe Géodis BM, dont la société BM Chimie Villers Saint-Paul, n'a eu pour effet que de restreindre, et non d'anéantir, le périmètre de désignation de M. X..., qui ne pouvait dès lors exercer son activité de délégué syndical qu'au sein de la nouvelle entité, et donc du seul site de Villers Saint-Paul, à l'exclusion de celui de Lillebonne ;
Attendu, cependant, que dès lors que le transfert de contrats de travail en application de l'article L. 1224-1 du code du travail ne porte pas sur une entité susceptible d'emporter maintien des mandats représentatifs en cours, le score général obtenu par un salarié dans son entreprise d'origine ne permet pas sa désignation en qualité de délégué syndical au sein de sa nouvelle entreprise ;
Qu'en statuant comme il a fait, alors qu'il constatait que l'établissement était constitué de deux sites, qui avaient été cédés à deux sociétés distinctes de sorte que l'établissement ne pouvait être considéré comme ayant conservé son identité, le tribunal, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 10 décembre 2012, entre les parties, par le tribunal d'instance de Senlis ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Beauvais ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente octobre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société BM Chimie Villers Saint-Paul
IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'AVOIR rejeté la demande d'annulation de la désignation en date du 19 octobre 2012 de Monsieur André X... en qualité de délégué syndical FO au sein de la société BM CHIMIE VILLERS SAINT PAUL,
AUX MOTIFS QUE « aux termes de l'article L.2143-10 du Code du Travail, une modification dans la situation juridique de l'employeur, dans le cadre de l'article L.1224-1 du Code du Travail, n'affecte pas le mandat du délégué syndical lorsque que l'entreprise est démantelée, et que la partie de l'activité cédée, qui constitue un établissement distinct au sens de l'article L.2143-3 du Code du Travail, conserve son autonomie dans l'entreprise d'accueil. Le cadre de la désignation du délégué syndical est l'établissement au sens de l'article L.2143-3 du Code du Travail défini comme le regroupement d'au moins 50 salariés constituant une communauté de travail ayant des intérêts propres et travaillant sous la direction d'un représentant de l'employeur. Si le périmètre de désignation est en principe le même que celui retenu lors des dernières élections, pour la mise en place du comité d'entreprise ou d'établissement, un accord collectif même tacite peut en disposer autrement en prévoyant un périmètre plus restreint. En l'espèce, la désignation du 21 octobre 2010 de Monsieur André X..., qui n'a pas été contestée par la société BM CHIMIE, a eu lieu dans le périmètre de la région EST, qui regroupe les sites de Lillebonne (76) et Villers Saint Paul (60), alors qu'aucun comité d'établissement distinct n'existait au sein de la société BM CHIMIE, mais seulement un comité d'entreprise. Il en découle l'existence d'un comité d'établissement, au sens de l'article L.2143-3 du Code du Travail, établissement distinct composé des sites de Lillebonne (76) et Villers Saint Paul (60), au sein de l'entreprise démantelée, la société BM CHIMIE. La scission de la société BM CHIMIE intervenue le 1er octobre 2012 n'a pu avoir pour effet d'affecter l'autonomie consacrée de l'établissement constitué par les sites de Lillebonne (76) et Villers Saint Paul (60), mais a eu au contraire pour effet de renforcer l'autonomie de chacun des deux sites dès lors qu'ils constituent toujours, chacun, des regroupements d'au moins 50 salariés constituant une communauté de travail ayant des intérêts propres et travaillant sous la direction d'un représentant de l'employeur. La scission de la société BM CHIMIE par filialisation de ses établissements, avec effet au 1 er octobre 2012, en sociétés juridiquement autonomes à la suite du transfert du fonds de commerce de chacun de ses établissements vers des sociétés nouvelles, filiales de groupe GEODIS BM, dont la société BM CHIMIE VILLERS SAINT PAUL, n'a eu pour effet que de restreindre, et non de d'anéantir, le périmètre de désignation de Monsieur André X..., qui ne pouvait dès lors exercer son activité de délégué syndical Force Ouvrière qu'au sein de la nouvelle entité, et donc du seul site de VILLERS SAINT PAUL, à l'exclusion de celui de Lillebonne. C'est ce qu'a rappelé l'Union Départementale FORCE OUVRIERE de l'OISE en procédant le 19 octobre 2012 à la désignation de Monsieur André X... en qualité de délégué syndical au sein de la société BM CHIMIE VILLERS SAINT PAUL. De plus, s'agissant du transfert d'une entité économique conservant son identité, le salarié peut se prévaloir du score de 10% des suffrages exprimés qu'il a obtenu dans l'ancienne entreprise pour être désigné comme délégué syndical dans la nouvelle entité (Cass. Soc. 14 décembre 2011, n010-27.441, LS Jurispr. N°253/2011 du 27/12/11, Or. Soc. 2012, p.211 et s., obs. L. Pécaut-Rivollier). En l'espèce, sur le site de VILLERS SAINT PAUL, Monsieur André X... comme le syndicat FO peuvent se prévaloir des scores qu'ils ont obtenus, supérieurs à 10% des suffrages exprimés, dans la société BM CHIMIE aux élections des délégués du personnel au sein de l'établissement de VILLERS SAINT PAUL en date du 17 novembre 2010, et remplissent donc les conditions de représentativité exigées par l'article L.2143-3 du Code du Travail. Il convient donc de rejeter la demande d'annulation de la désignation de Monsieur André X... en qualité de délégué syndical FO au sein de la société BM CHIMIE VILLERS SAINT PAUL »
1. ALORS QUE le périmètre de désignation des délégués syndicaux est en principe le même que celui retenu, lors des dernières élections pour la mise en place du comité d'entreprise ou d'établissement, sauf à ce qu'un accord collectif en dispose autrement en prévoyant un périmètre plus restreint ; qu'un accord collectif est, à peine de nullité, un acte écrit et ne peut donc être tacite ; qu'en jugeant qu'un « accord collectif même tacite » peut prévoir un périmètre de désignation des délégués syndicaux plus restreint que celui retenu pour l'élection du comité d'entreprise, le tribunal d'instance a violé les articles L. 2121-1-5°, L. 2122-1, L. 2141-10, L. 2143-3, L. 2231-3, L. 2232-16 et L. 2232-17 du Code du travail ;
2. ALORS QUE le périmètre de désignation des délégués syndicaux est en principe le même que celui retenu, lors des dernières élections pour la mise en place du comité d'entreprise ou d'établissement, sauf à ce qu'un accord collectif en dispose autrement en prévoyant un périmètre plus restreint ; qu'une dérogation au principe d'identité des périmètres de désignation des délégués syndicaux et d'élection du comité d'entreprise ne peut se déduire de l'existence d'une désignation d'un délégué syndical non contestée dans un périmètre plus restreint que celui retenu pour la mise en place du comité d'entreprise ; qu'en l'espèce, le tribunal d'instance a constaté qu'il n'existait qu'un comité d'entreprise au sein de la société BM CHIMIE ; qu'en déduisant de la désignation du 21 octobre 2010 de Monsieur X... au sein de la société BM CHIMIE dans un périmètre regroupant les sites de Lillebonne (76) et Villers Saint Paul (60), l'existence au sein de cette société d'un établissement distinct composé de ces deux sites pour la désignation des délégués syndicaux, le tribunal d'instance a derechef violé les articles L. 2121-1-5°, L. 2122-1, L. 2141-10, L. 2143-3, L. 2231-3, L. 2232-16 et L. 2232-17 du Code du travail ;
3. ALORS en tout état de cause QU'un établissement composé de plusieurs sites ne conserve pas son autonomie lorsque chacun de ces sites est cédé à une société distincte ; qu'il en résulte que les mandats des représentants du personnel antérieurement désignés dans le cadre de l'établissement ne sont pas maintenus après la scission des deux sites le constituant ; qu'en jugeant que la cession par la société BM CHIMIE intervenue le 1er octobre 2012, de chacun des sites qu'elle exploitait à une filiale différente, n'avait pu avoir pour effet d'affecter l'autonomie de l'établissement distinct constitué selon lui par les sites de Lillebonne et Villers Saint Paul mais seulement de restreindre le périmètre de désignation de Monsieur X... au site de Villers Saint Paul, et en concluant pour cette raison au maintien du mandat de ce dernier au sein de la nouvelle entité BM CHIMIE VILLERS SAINT PAUL, le tribunal d'instance a violé les articles L. 2143-3 et L. 2143-10 du Code du travail ;
4. ALORS en outre QU'un établissement composé de plusieurs sites ne conserve pas son autonomie lorsque chacun de ces sites est cédé à une société distincte ; qu'il en résulte que l'audience recueillie par un syndicat et/ou un salarié lors d'élections organisées dans l'ancienne entreprise ne peut être invoquée pour effectuer une désignation de délégué syndical dans la nouvelle entreprise ; qu'en jugeant que la cession par la société BM CHIMIE intervenue le 1er octobre 2012, de chacun des sites qu'elle exploitait à une filiale différente, n'avait pu avoir pour effet d'affecter l'autonomie de l'établissement distinct constitué selon lui par les sites de Lillebonne et Villers Saint Paul mais seulement de restreindre le périmètre de désignation de Monsieur X... au site de Villers Saint Paul, pour en déduire la possibilité pour le salarié et le syndicat de se prévaloir des scores obtenus aux élections des délégués du personnel de l'établissement de Villers Saint Paul dans l'ancienne entreprise pour une désignation de délégué syndical dans la nouvelle entité, le tribunal d'instance a violé les articles L. 2121-1-5°, L. 2122-1 et L. 2143-3 du Code du travail ;
5. ALORS QUE selon l'article L. 2143-3 du Code du travail, chaque organisation syndicale représentative dans l'entreprise ou l'établissement de cinquante salariés ou plus, qui constitue une section syndicale, désigne un ou plusieurs délégués syndicaux pour la représenter auprès de l'employeur ; qu'aux termes de l'article L. 2122-1 du même Code, dans l'entreprise ou l'établissement, sont représentatives les organisations syndicales qui satisfont aux critères de l'article L. 2121-1 et qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants ; que l'audience recueillie par les organisations syndicales aux élections des délégués du personnel ne peut être prise en compte, pour apprécier leur représentativité que s'il ne s'est pas tenu dans l'entreprise d'élections au comité d'entreprise ou d'établissement ; qu'en l'espèce, il était constant que des élections au comité d'entreprise s'étaient tenues au sein de la société BM CHIMIE ; qu'en affirmant que le syndicat FO pouvait se prévaloir du score obtenu, supérieur à 10% des suffrages exprimés, dans la société BM CHIMIE lors des élections des délégués du personnel au sein de l'établissement de VILLERS SAINT PAUL en date du 17 novembre 2010, pour désigner un délégué syndical au sein de la société BM CHIMIE VILLERS SAINT PAUL créée pour reprendre cet établissement, le tribunal d'instance a violé les textes susvisés.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-35013
Date de la décision : 30/10/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Senlis, 10 décembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 oct. 2013, pourvoi n°12-35013


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.35013
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