LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à M. X..., liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de Mme B..., de sa reprise d'instance ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que Mme Y..., gérante de la société Taanoa, et cette société, exploitant un fonds de commerce situé dans l'archipel des îles Gambier, ont assigné Mme B..., signataire du contrat, et la société Ragapu qu'elle représentait, devant un tribunal de commerce en nullité du contrat de location-gérance qui leur avait été consenti et requalification de ce contrat en bail commercial ; que le jugement ayant accueilli leurs demandes a été signifié à Mme B...et à la société Ragapu, après procès-verbal de recherches, selon les modalités prévues à l'article 400 du code de procédure civile de Polynésie française ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles 395 et 400 du code de procédure civile de Polynésie française ;
Attendu que, pour dire l'appel recevable, l'arrêt retient que la signification à personne, à domicile ou à résidence n'a été tentée par l'huissier de justice que dans l'île de Tahiti alors que les intéressées étaient domiciliées dans l'archipel des Gambier et que le délai pour interjeter appel n'a pas valablement couru à compter de la signification faite à tort à parquet ;
Qu'en statuant ainsi alors qu'elle avait relevé qu'il résultait de l'acte de signification que Mme B...demeurait à Tahiti et que le siège de la société Ragapu se trouvait à Rikitea-Gambier et du procès-verbal de recherches annexé que l'huissier de justice avait procédé à de vaines investigations menées auprès des habitants du quartier et de la gendarmerie de Rikitea, de sorte que Mme B...et la société Ragapu étaient sans domicile et siège connus, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 janvier 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Papeete ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Papeete, autrement composée ;
Condamne Mme B..., prise en la personne de son liquidateur judiciaire, et la société Ragapu aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Monod et Colin, avocat aux Conseils, pour Mme Z...épouse Y...et la société Taanoa.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré recevable l'appel interjeté par Mme Marie Josée
B...
épouse C..., personnellement et en qualité de représentant de la SARL RAGAPU, à l'encontre du jugement du tribunal mixte de commerce de PAPEETE du 9 mars 2009 ;
AUX MOTIFS QUE le contrat du 26 octobre 2001 a été stipulé par « Marie Josée
B...
, épouse C..., commerçante, demeurant à Rikitea GAMBIER » ; que le jugement du tribunal mixte de commerce du 9 mars 2009 a été rendu contradictoirement à l'égard de Marie Josée
B...
, épouse C..., demeurant 98755 Rikitea, et de la SARL RAGAPU inscrite au RCS de PAPEETE 5259 B, dont le siège social est situé à Rikitea (GAMBIER) BP 53 Rikitea, représentée par sa gérante Marie Josée
B...
, épouse C..., domiciliée en cette qualité audit siège ; que ce jugement leur a été signifié par exploit remis le 16 juillet 2009 au parquet du procureur de la République près le tribunal de première instance de PAPEETE ; que cet acte mentionne que Mme B...demeure à... à côté du magasin WEEK END, tél.... (TAHITI) et que le siège de la SARL RAGAPU est BP 53 Rikitea (GAMBIER) ; qu'un procès-verbal de recherches daté du 15 juillet 2009 y est annexé ; qu'il mentionne qu'il résulte de vaines investigations menées auprès des habitants du quartier et de la gendarmerie de Rikitea, auprès de la brigade de renseignements et d'investigations judiciaires de PAPEETE, que Mme B...est inconnue au... près le magasin WEEK END, que les deux numéros de téléphone indiqués... et 774 723 ont été réattribués, que, concernant la SARL RAGAPU, le téléphone 978 315 est non attribué et que l'intéressée et sa société sont sans domiciles connus ; que l'huissier a adressé le 17 juillet 2009 deux lettres recommandées avec accusé de réception notifiant le dépôt de l'acte au parquet ; que celle destinée à Mme B...a été adressée ...à côté du magasin WEEK END à ... et celle destinée à la SARL RAGAPU a été adressée à BP 53 à Rikitea GAMBIER ; qu'aucune n'a été réclamée ; que le présent appel a été interjeté par requête enregistrée le 22 décembre 2009 ; qu'il résulte de ces constatations que la signification à personne, à domicile ou à résidence n'a été tentée par l'huissier de justice que dans l'île de TAHITI alors que les intéressées étaient domiciliées dans l'archipel des GAMBIER ; que l'appel est donc recevable, le délai pour l'interjeter n'ayant pas valablement couru à compter de la signification faite à tort au parquet ;
ALORS, D'UNE PART, QU'il résulte des articles 395 et 400 du code de procédure civile de Polynésie française que lorsque le destinataire n'a ni domicile ni résidence connus, l'huissier dresse un procès-verbal de recherches infructueuses puis signifie à parquet ; que dans cette hypothèse, le délai d'appel court de la signification à parquet ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué a constaté que le siège social de la société RAGAPU était situé à RIKITEA (Gambier) BP 53 Rikitea (p. 6 § 3) ; qu'il a ensuite constaté que l'exploit d'huissier remis le 16 juillet 2009 au procureur de la République près le tribunal de première instance de Papeete mentionnait que le siège de la société RAGAPU était situé BP 53 Rikitea ¿ Gambier ; qu'en jugeant que la signification à personne, à domicile ou à résidence n'avait été tentée par l'huissier que dans l'île de Tahiti alors que les intéressées étaient domiciliées dans l'archipel des îles Gambier, pour en déduire que le délai d'appel n'avait pas couru contre la société RAGAPU, cependant qu'il résultait de ses propres constatations que la signification à parquet avait été opérée après que l'huissier eut tenté de signifier le jugement à la société RAGAPU à son siège social, à Gambier, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 395 et 400 du code de procédure civile de Polynésie française ;
ALORS, D'AUTRE PART QU'il résulte des constatations de l'arrêt que l'huissier de justice a, en l'absence de Mme B...à l'adresse mentionnée sur le procès-verbal de signification à parquet, à Tahiti, mené des investigations non seulement auprès des habitants du quartier de PANAAUIA à TAHITI mais également auprès de la gendarmerie de RIKITEA ; qu'en retenant que la signification à personne, à domicile ou à résidence n'avait été faite que dans l'île de Tahiti, pour en déduire que le délai d'appel n'avait pas valablement couru, cependant qu'elle avait constaté que l'huissier avait procédé, sans succès, à des recherches dans les îles GAMBIER, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 395 et 400 du code de procédure civile de Polynésie française.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, après avoir requalifié le contrat conclu le 26 octobre 2001 entre la SARL RAGAPU et Mme Z...en bail commercial, d'avoir dit n'y avoir lieu à annulation de ce contrat, d'avoir constaté que le bail avait été résilié à compter du 25 août 2007 en application de la clause résolutoire mise en oeuvre par sommation de payer du 24 août 2007, d'avoir ordonné l'expulsion de Mme Z...et de tout occupant de son chef des lieux loués, sous astreinte, d'avoir enjoint à Mme Z...de restituer le matériel et le mobilier décrits dans l'état des lieux et l'inventaire prévus par le contrat du 26 octobre 2001 et d'avoir condamné Mme Z...à payer à Mme B..., prise tant personnellement que pour le compte de son associé Ernest B...ou des ayants droit de celui-ci, une indemnité d'occupation à compter du 1er octobre 2007 et jusqu'à la libération des lieux, ainsi que l'arriéré des loyers ;
AUX MOTIFS QUE si les appelantes établissent que le fonds de commerce a bien été exploité pendant au moins deux ans entre octobre 1994 et octobre 2001, c'est néanmoins de manière exacte que le premier juge a retenu qu'à l'issue d'une fermeture du magasin pendant plus de deux années, la présence d'une clientèle, composante essentielle du fonds, ne pouvait sérieusement être constatée ; qu'était rappelé que c'est au loueur de prouver l'existence du fonds de commerce au moment de la signature du contrat de location gérance, il est en effet constant que l'importance de la durée de fermeture du commerce équivalait, non à une interruption, mais à la cessation de l'exploitation ; que ce magasin d'alimentation ne pouvait d'ailleurs prétendre à aucune pérennité pour ce qui est de son achalandage ; que le courrier précité motivait en effet précisément son refus de transfert de licence au nouvel exploitant, Mme Y..., par la nécessité de limiter la consommation d'alcool des jeunes par « un plafonnement du nombre des points de vente déjà existants » ; qu'en cet état, et à défaut de production de tout élément sur les résultats de l'exploitation au moment de la conclusion du contrat, ni la clause par laquelle le preneur s'engageait à prendre le fonds en l'état, ni la circonstance qu'il n'ait engagé la présente instance qu'en 2006, ne contredisent le constat de la disparition de la clientèle et de l'achalandage, éléments essentiels du fonds de commerce, au moment de la conclusion du contrat du 26 octobre 2001 ; qu'en application de l'article L. 144-10 du code de commerce, la nullité du contrat de location-gérance est encourue lorsque le propriétaire ou l'exploitant ne remplit pas les conditions légales ; que, cependant, selon l'article L. 144-1 du même code, ces dispositions ne s'appliquent qu'en cas de concession de l'exploitation d'un fonds de commerce toujours existant, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; qu'il y a donc matière non pas à annulation du contrat mais à requalification ; que le tribunal a exactement observé que la convention litigieuse n'avait porté que sur la mise à disposition d'un local commercial en contrepartie d'une redevance mensuelle, d'ailleurs qualifiée de loyer dans l'acte, d'un montant de 125. 000 CFP ; que le tribunal a justement fixé à cette somme le montant du loyer qui était dû par le preneur à compter du 1er novembre 2001 ; que le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte, de plein droit, à partir de sa date dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens et que ses droits et actions concernant son patrimoine sont exercés par le liquidateur pendant toute la durée de la procédure ; que le débiteur peut, néanmoins, comme en l'espèce, accomplir des actes conservatoires tels qu'une sommation à un débiteur ; que le commandement délivré le 9 novembre 2005 doit être annulé pour n'avoir pas inclus la mention du délai d'un mois avant la résiliation de plein droit qui est requise par l'article L. 145-41 du code de commerce ; que la créance du bailleur s'élevait à la somme de 1. 075. 000 CFP pour la période de janvier 2004 à mars 2007 ; que la clause résolutoire insérée au contrat du 26 octobre 2001 a, par conséquent, été valablement mise en oeuvre par le commandement de payer signifié le 24 août 2007 à Monique Y...; qu'il en résulte que le bail a été résilié à compter du 25 septembre 2007 ; que l'expulsion du preneur sera donc ordonnée dans les termes du dispositif ci-après, ainsi que la restitution du matériel et du mobilier décrits dans l'état des lieux et l'inventaire prévus par l'article 1er du contrat du 26 octobre 2001 ; que la société RAGAPU a été dissoute par l'effet du jugement du 9 février 2004 ordonnant sa liquidation judiciaire même si la procédure a été clôturée pour extinction du passif par jugement du 10 septembre 2007 ; que la publication de cette décision a fait disparaître la personnalité morale de la société qui ne subsistait que pour les besoins de la liquidation ; que le partage entre les associés des éléments d'actif non réalisés par le liquidateur judiciaire se fait suivant les règles posées par l'article 1844-9 du code civil ; qu'il en résulte que les condamnations à l'égard de Mme Y...seront prononcées au bénéfice de Mme B...pour le compte de celle-ci et pour celui de son associé Ernest B..., ou des ayants droit de ce dernier ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le contrat de location gérance d'un fonds de commerce dont la clientèle avait disparu antérieurement à la conclusion du contrat est nul ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué a constaté qu'en raison de la fermeture du magasin pendant plus de deux années, l'existence d'une clientèle ne pouvait être constatée (arrêt, p. 8 § 2) ; qu'en jugeant qu'il n'y avait pas lieu d'annuler le contrat de location gérance du 26 octobre 2001, mais uniquement de le requalifier en bail commercial, pour en déduire que la clause résolutoire prévue par ce contrat avait été valablement mise en oeuvre par le commandement de payer signifié le 24 août 2007 et ordonner l'expulsion du locataire et le paiement de l'arriéré de loyers, la cour d'appel a violé l'article 1108 du code civil, ensemble les articles L. 144-1 et suivants du code de commerce ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens et que les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur ; qu'en l'espèce, la société RAGAPU a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire ouverte le 9 février 2004, Me D...étant désigné en qualité de liquidateur judiciaire ; que cette procédure a été clôturée le 10 septembre 2007 pour extinction du passif ; qu'en jugeant que le commandement de payer visant la clause résolutoire délivré le 24 août 2007 par la société RAGAPU représentée par sa gérante était valable, cependant qu'à la date de ce commandement, seul le liquidateur judiciaire de la société RAGAPU disposait du pouvoir de délivrer un tel acte, la cour d'appel a violé l'article L. 622-9 du code de commerce ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE Mme B...et la société RAGAPU, représentée par Mme B..., n'avaient formulé dans leur requête d'appel du 22 décembre 2009 et dans leurs conclusions déposées le 29 avril 2011 (cf. prod.) aucune demande de condamnation au bénéfice de M. Ernest B...ou de Mme B...en qualité de représentante de M. Ernest B...; qu'en condamnant Mme Z...et la société TAANOA à payer diverses sommes à Mme B...prise tant personnellement que pour le compte de son associé Ernest B...ou de ses ayants droit, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige et violé l'article 3 du code de procédure civile de Polynésie française.