LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à Mme B... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. X..., la SEM et la société Friedlander ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 4 avril 2012), que, par acte du 24 mai 2004, la société Devon stockage (société Devon), aux droits de laquelle se trouve la société Second Shurgard a confié à Mme B..., architecte, une mission de maîtrise d'oeuvre pour la réalisation de travaux de mise en conformité du réseau d'incendie armé (RIA) ; que les travaux ont été confiés à la société Parfeu ; que, par acte du 26 novembre 2004, Mme Y... a conclu avec la société Devon un contrat de mise à disposition d'un box pour y entreposer des meubles ; que, parallèlement, la société Devon a demandé la fourniture et la pose d'un ensemble clapet anti-retour incendie à la société des Eaux de Marseille (SEM), qui a fait intervenir son sous-traitant, la société Friedlander ; que le lundi 13 décembre 2004, la société Friedlander a, l'eau étant coupée, exécuté les travaux, puis remis l'eau alors que la société Parfeu était elle-même en train de travailler, ce qui a provoqué une inondation partielle des locaux et endommagé le contenu du box loué à Mme Y... ; que Mme Y... a assigné la société Devon, la société d'assurances Chubb Insurance, la société d'assurance Brit Insurance, la société Parfeu et Mme B... en indemnisation de ses préjudices ;
Attendu que pour la condamner, in solidum avec d'autres, à payer certaines sommes, l'arrêt retient que Mme B..., malgré sa mission complète, n'a pas pris les contacts nécessaires avec la société Parfeu et la SEM afin de les informer de leurs interventions respectives le même jour sur le même réseau d'eau et les mêmes RIA, et d'éviter une incohérence et/ ou une contradiction dans lesdites interventions ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de Mme B... faisant valoir qu'elle n'était pas tenue à une présence permanente devant son écran d'ordinateur et que la société Devon ne s'était pas assurée qu'elle avait bien pris connaissance en temps utile de l'information transmise par courriel le dernier jour ouvrable avant réalisation des travaux litigieux, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne Mme B..., l'arrêt rendu le 4 avril 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société Chubb Insurance et la société Brit Insurance aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit octobre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour Mme B....
Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Madame B..., in solidum avec la société SECOND SHURGARD FRANCE et les sociétés PARFEU et BRIT INSURANCE HOLDING PLC, à verser à Madame Y... les sommes de 11. 000 ¿ et de 3. 000 ¿, et d'avoir condamné Mme B..., in solidum avec la SARL PARFEU, à garantir la compagnie BRIT INSURANCE HOLDING PLC à hauteur des 2/ 3è de 228, 67 ¿ et à verser à la société CHUBB INSURANCE COMPAGNIE les sommes de 218. 947, 33 ¿ et de 6. 666, 85 ¿, outre intérêts capitalisés à compter du 19 février 2008,
Aux motifs que « le vendredi 10 décembre 2004, soit 3 jours avant le sinistre et à 9 heures 27 minutes 34 secondes précisément, la société DEVON STOCKAGE a envoyé le courrier suivant à son agent de MARSEILLE, ainsi qu'à Madame B... son architecte chargée d'une mission complète de maîtrise d'oeuvre, de conception et d'exécution : « *A..., *Lundi 13/ 12/ 04 la SEM interviendra sur les vannes sur le réseau de l'eau courante et installera le clapet anti-retour sur les réseau des RIA's. Veuillez préparer des feuilles d'information que tu installeras sur chaque RIA. (l'information concernant le non fonctionnement des RIA's) (¿). *Madame B..., *Veuillez informer par fax (¿) Somimac et surtout Parfeu de cette intervention ». Madame B... avait ainsi toute la journée du 10 décembre 2004 pour informer la société PARFEU de l'intervention prochaine de la SEM, et il importe peu que cette dernière ait en définitive été remplacée par son sous-traitant la société FRIEDLANDER. L'expert judiciaire a pu reconstituer les faits comme suit :- le matin du lundi 13 décembre 2004 la société PARFEU qui travaillait déjà depuis 2 jours dans les locaux de la société DEVON STOCKAGE aujourd'hui la société SECOND SHURGARD, a repris son intervention ;- Monsieur A... de la société FRIEDLANDER, après avoir fermé la vanne d'arrivée d'eau, a effectué les travaux sous-traités par la SEM, les a terminés vers 16 h 00, et après avoir demandé et obtenu l'autorisation de Monsieur Z... de cette seconde société a remis le réseau d'eau en route ;- Monsieur A... a eu la visite de 2 personnes de la société PARFEU mais n'a su qu'après cette remise en route qu'elles faisaient partie de celle-ci car elles ne lui ont pas parlé, ce qui fait que la société FRIEDLANDER ignorait l'intervention de cette société ;- il n'y avait pas de pancarte ni de panneau signalétique permettant à Monsieur Z... et donc à la SEM comme à son sous-traitant d'apprendre l'intervention de la société PARFEU ;- il n'est pas démontré que la société PARFEU connaissait l'intervention de la société FRIEDLANDER ;- la société DEVON STOCKAGE aujourd'hui la société SECOND SHURGARD n'a pas informé la société PARFEU de l'intervention de la SEM, ni l'inverse ;- Madame B..., informée en temps utile de l'intervention à venir de la SEM, n'en a pas informé la société PARFEU malgré la demande de la société DEVON STOCKAGE aujourd'hui la société SECOND SHURGARD. Les éléments précités justifient que le Tribunal de Grande Instance ait retenu la responsabilité de Madame B... pour, malgré sa mission complète précitée, ne pas avoir pris les contacts nécessaires avec la société PARFEU et la SEM afin de les informer de leur intervention respective le même jour sur le même réseau d'eau et les mêmes RIA, et d'éviter une incohérence et/ ou une contradiction dans lesdites interventions »,
Alors que, d'une part, la responsabilité de l'architecte ne peut être engagée qu'en cas de manquement de sa part à une obligation contractuelle ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel (p. 5), Mme B... a soutenu qu'elle n'avait été chargée d'aucune mission de coordination des travaux commandés directement par la société DEVON STOCKAGE à la Société des Eaux de Marseille, et que sa mission ne concernait que les travaux dont elle avait la charge ; qu'en retenant sa responsabilité sans répondre à ce moyen portant sur l'étendue de sa mission, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors que, d'autre part, Mme B... a également fait valoir qu'elle n'était pas tenue à une présence permanente devant son écran d'ordinateur et que la société DEVON STOCKAGE ne s'était pas assurée qu'elle avait bien pris connaissance en temps utile de l'information transmise par courriel le dernier jour ouvrable avant réalisation des travaux litigieux ; que ce moyen a été retenu par la Cour de Cassation pour rejeter un pourvoi contre un précédent arrêt, concernant le locataire d'un autre garage, qui avait prononcé la mise hors de cause de Mme B... ; qu'en retenant la responsabilité de cette dernière, sans répondre à ce moyen relatif aux conditions de délivrance de l'information, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.