LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Joints les pourvois n° N 12-20.598 et n° N 12-21.771 ;
Donne acte à la société Meressan développement de son désistement en ce qu'il est dirigé contre la société Racine ;
Met hors de cause la société Racine ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 19 avril 2012), que le 18 juin 2007, la société Meressan développement (la société Meressan), aménageur de la zone d'aménagement concerté Nouvelle France, et la société Mureville ont conclu un accord-cadre et sept promesses de vente portant sur des lots de terrain appartenant à M. X..., associé unique de la société Meressan, cette société se portant fort de l'obtention de l'accord de M. X... qui lui avait consenti une promesse irrévocable de vente ; qu'après refus de M. X... de ratifier ces conventions et de la société Mureville d'y renoncer, la société Meressan a assigné celle-ci en annulation de l'accord-cadre et des promesses de vente et la société Mureville a appelé en garantie la société d'avocats Racine, rédactrice des actes litigieux ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° N 12-21.771 de la société Meressan, pris en ses deux premières branches :
Vu les articles 15, 16 et 455 du code de procédure civile ;
Attendu qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions de la société Meressan déposées le 7 février 2012 par lesquelles elle demandait le rejet des débats comme tardives des conclusions déposées et signifiées le 1er février 2012 par la société Mureville, malgré injonction de conclure avant le 31 janvier 2012, alors que la clôture était fixée au 7 février 2012, l'audience de plaidoiries au 8 février 2012, et ne respectant pas le principe de la contradiction, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les moyens du pourvoi n° N 12-20.598 :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 avril 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens, autrement composée ;
Condamne la société Mureville aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Mureville à verser la somme de 3 000 euros à la société Meressan et la somme de 3 000 euros à la société Racine ; rejette la demande de la société Mureville ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit octobre deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils, pour la société Mureville, demanderesse au pourvoi n° N 12-20.598.
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré nulles les promesses de vente du 18 juin 2007 passées entre la société Muréville et la société Meressan Développement portant sur les lots 21 à 27 de la ZAC « Nouvelle France » à Méru et d'avoir déclaré caduc l'accord cadre passé le 18 juin 2007 entre ces mêmes sociétés ;
Aux motifs que, « l'article 1120 du code civil dispose qu'on peut se porter fort pour un tiers, en promettant le fait de celui-ci ; sauf l'indemnité contre celui qui s'est porté fort ou qui a promis de faire ratifier, si le fiers refuse de tenir l'engagement » ; qu'en l'absence de ratification de l'acte par le tiers, l'acte est nul en son entier, promesse de porte-fort comprise ; que dès lors que dans chacune des promesses de vente, la société Meressan s'est portée fort d'obtenir l'accord de M. John X..., actuel propriétaire des 7 lots vendus, lequel a consenti une promesse irrévocable de vente au bénéfice de la société Meressan Développement et qu'il est acquis que M. John X..., en qualité de personne physique n'a pas donné son autorisation pour ces ventes, ces sept promesses de vente sont nulles ; que contrairement à ce que soutient la société Muréville et à ce qu'ont retenu les premiers juges, l'autorisation de M. X... ne pouvait pas être considérée comme étant intervenue antérieurement aux promesses de vente ou être devenue superfétatoire ; qu'en effet, à la date de passation des promesses le 18 juin 2007, M. X..., personne physique était toujours propriétaire vis-à-vis des tiers des lots en cause ; que si la réitération de la vente des terrains entre M. X... et la société Meressan qui avait été signée 10 janvier 2002 était prévue pour le 27 juin 2007 (cf rapport de cession de la gérance de cette société, approbation des comptes clos le 31 décembre 2006), aucune réitération par acte authentique n'est effectivement intervenue ; que dès lors, l'autorisation de M. X..., pour le transfert de propriété effectif des terrains en cause au profit de la société Muréville était indispensable, la promesse de vente contractée entre lui et la société Meressan le 10 janvier 2002 portant sur des biens immobiliers n'ayant d'effet qu'entre les co-contractants ; que l'accord-cadre du 18 juin 2007 en exécution de la clause "durée de la convention" est caduque, aucune réitération de la vente des différents lots n'étant possible ; que dans ces conditions, le jugement est infirmé, l'accord-cadre étant considéré comme caduque et les promesses de vente nulles » ;
Alors que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que la promesse de vente vaut vente quand il y a accord des parties sur la chose et sur le prix, indépendamment de toute régularisation de l'acte devant un officier ministériel ; qu'en retenant, pour juger nulles les promesses de vente du 18 juin 2007 consenties par la société Meressan à la société Muréville, que la précédente vente des terrains objets de ces promesses par M. X... à la société Meressan n'avait pas été réitérée par acte authentique, quand la réitération des promesses de vente devant notaire n'est toutefois pas une condition de validité de la vente, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1589 du code civil.Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la société Meressan développement, demanderesse au pourvoi n° N 12-21.771.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que la société Meressan développement, qui s'est portée fort pour le compte de M. X..., est responsable des conséquences dommageables subies par la société Muréville du fait de la défaillance dans l'exécution de cette promesse ;
AUX MOTIFS QUE dès lors que la société Meressan développement n'a pas exécuté sa promesse de porte-fort, elle doit indemniser, en application de l'article 1120 du code civil, la société Muréville des conséquences dommageables de la nullité des promesses de vente et de la caducité de l'accord-cadre consécutives à cette défaillance, étant relevé que les dommages sont constitués des dépenses avancées en pure perte par la société Muréville pour la réalisation de son projet et par la perte de chance d'obtenir les bénéfices escomptés de l'opération ;
ALORS, 1°), QUE les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense ; que le juge, tenu, en toutes circonstances, de faire observer le principe de la contradiction, ne peut statuer sur une demande formulée pour la première fois dans des écritures sans répondre à des conclusions ultérieures qui en sollicitaient le rejet, comme n'ayant pas été communiquées en temps utile, que les écritures litigieuses aient été déposée avant ou après l'ordonnance de clôture ; qu'en accueillant le la demande de dommages-intérêts formulée par la société Muréville, pour la première fois dans ses conclusions signifiées et déposées le 1er février 2012, sans répondre à la demande de la société Meressan développement qui sollicitait le rejet de ces écritures communiquées seulement quelques jours avant la clôture, la cour d'appel a violé les articles 15 et 16 du code de procédure civile ;
ALORS, 2°), QU'en laissant sans réponse le moyen tendant au rejet des conclusions de la société Muréville signifiées et déposées le 1er février 2012, quelques jours seulement avant la clôture de l'instruction, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, 3°), QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et le juge ne peut modifier le fondement juridique de leur demande ; qu'en relevant, pour accueillir la demande de dommages-intérêts formulée par la société Muréville, que la société Meressan développement devait être déclarée responsable des conséquences subies par la société Muréville à la suite de l'inexécution de la promesse de porte-fort, cependant qu'il résultait des conclusions d'appel de la société Muréville du 1er février 2012 que celle-ci fondait sa demande indemnitaire, non pas sur l'inexécution de la promesse de porte-fort mais sur l'inexécution des contrats signés le 18 juin 2007 qu'elle tenait pour valables, la cour d'appel a modifié l'objet du litige et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
ALORS, 4°) et en tout état de cause, QUE si le juge tient de l'article 12 du code de procédure civile, la faculté de modifier la dénomination ou le fondement juridique des demandes, il doit observer le principe de la contradiction et inviter préalablement les parties à présenter leurs observations ; qu'en modifiant le fondement juridique de la demande indemnitaire de la société Muréville sans avoir invité, au préalable, les parties à s'en expliquer, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 16 du code de procédure civile.