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25/09/2013 | FRANCE | N°12-23380

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 25 septembre 2013, 12-23380


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 15 mars 2012), que Mme X... et M. Y... se sont mariés au Portugal le 10 mai 1970, qu'un jugement a prononcé leur divorce et statué sur ses conséquences ;
Sur le premier moyen ci-après annexé :
Attendu que l'épouse fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a dit applicable au divorce la loi portugaise ;
Attendu qu'après avoir justement énoncé que l'ordre public international n'a pas pour exigence que toute législation étrangère d

oive adopter les termes exacts du code civil français et relevé que l'article ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 15 mars 2012), que Mme X... et M. Y... se sont mariés au Portugal le 10 mai 1970, qu'un jugement a prononcé leur divorce et statué sur ses conséquences ;
Sur le premier moyen ci-après annexé :
Attendu que l'épouse fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a dit applicable au divorce la loi portugaise ;
Attendu qu'après avoir justement énoncé que l'ordre public international n'a pas pour exigence que toute législation étrangère doive adopter les termes exacts du code civil français et relevé que l'article 2016 du code civil portugais, réglementant les modalités d'octroi de la pension alimentaire dont les termes sont expressément rappelés, organise un dispositif de nature à compenser la disparité dans les conditions de vie des époux qui résulte de la rupture du lien conjugal, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre le détail de l'argumentation des parties a légalement justifié sa décision de rejeter l'exception d'ordre public international invoquée par l'épouse et de lui accorder une pension alimentaire en capital dont elle a souverainement estimé le montant ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Et sur les deux derniers moyens :
Attendu que ces moyens ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Spinosi, avocat aux Conseils, pour Mme Maria X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit applicable au divorce la loi portugaise ;
Aux motifs que, « Au terme de l'article 309 du code civil, le divorce et la séparation de corps sont régis par la loi française :
. lorsque l'un et l'autre. des époux sont de nationalité française. lorsque les époux ont l'un et l'autre leur domicile sur le territoire français. lorsque aucune loi étrangère ne se reconnaît compétence, alors que les tribunaux français sont compétents pour connaître du divorce ou de la séparation de corps.

Ainsi, il incombe au juge français, s'agissent de droits dont les parties n'ont pas la libre disposition de mettre en oeuvre la règle de conflit de lois et de rechercher la teneur du droit étranger applicable. Les deux époux sont de nationalité portugaise. L'article 25 du code civil portugais stipule que l'état des individus, la capacité des personnes les relations de famille et les successions à cause de mort, sont réglés par la loi personnelle des intéressés ; l'article 52 du même code dispose que les relations entre les conjoints sont réglés par la loi nationale commune dès lors, la loi portugaise est applicable.
S'agissant de la conformité avec l'ordre public international, les articles 2016 et suivants du code civil portugais réglementent les modalités d'octroi de la pension alimentaire, lesquelles, si elles ne sont pas prévues dans les mêmes termes que les dispositions de l'article 270 du code civil français, organisent un dispositif de nature à compenser la disparité dans les conditions de vie des époux qui résulterait de la rupture du lien conjugal ; dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu l'applicabilité de la loi portugaise » ;
Et par motifs éventuellement adoptés des premiers juges : « L'épouse fait valoir la contrariété à l'ordre public international de la loi portugaise, en ce qu'elle ne prévoit pas une telle prestation dans les termes prévus par la loi française.
Il y a toutefois lieu de relever avec l'époux les dispositions de l'article 2016 du code civil portugais, aux termes duquel :
« en cas de divorce a droit à une pension alimentaire :
a) le conjoint non considéré comme fautif (...) ou non considéré comme principal fautif (...) Exceptionnellement (...) Au conjoint qui n'y aurait pas droit aux termes des dispositions précédentes, en considérant en particulier la durée du mariage et de la collaboration prêtée par le conjoint à l'économie du foyer.

Pour la fixation du montant de cette pension, le Tribunal doit prendre en considération l'âge et l'état de santé des conjoints, leurs qualifications professionnelles et possibilités d'emploi, le temps qu'ils devront dédier, éventuellement, à leurs enfants communs, leurs rendements et revenus et de façon générale toutes les circonstances qui influent sur les besoins du conjoint qui reçoit la pension alimentaire et les possibilité de celui qui la fournit ».
L'ordre public international n'a pas pour exigence que toute législation étrangère doive adopter les termes exacts du code civil français et il résulte des dispositions qui viennent d'être rappelées que la loi nationale des parties prévoit un dispositif équivalent à la prestation compensatoire en ce qu'elle permet de compenser la disparité dans les conditions de vie liée aux choix professionnels pendant la durée de la vie commune » (jugement, p. 5-6) ;
Alors que la loi étrangère peut être écartée par le juge français toutes les fois où elle apparait manifestement incompatible avec l'ordre public français en matière internationale ; qu'en l'espèce, Madame Maria X... SANTOS faisait régulièrement valoir dans ses conclusions d'appel que la loi portugaise prévoyant l'octroi d'une pension alimentaire en cas de divorce contrevenait à l'ordre public français en matière internationale en ce que cette pension s'exécute sous forme de rente, n'a donc pas un caractère forfaitaire, et se trouve limitée dans le temps, sa suppression pouvant résulter du remariage ou de l'inconduite notoire du créancier ; qu'en se bornant à juger que la loi portugaise, prévoyant un dispositif de nature à compenser la disparité dans les conditions de vie des époux qui résulterait du divorce, ne serait pas contraire à l'ordre public international, sans examiner si l'exécution de la pension sous forme de rente, et non d'une somme forfaitaire, tout comme son caractère limité dans le temps, sa suppression pouvant résulter du remariage ou de l'inconduite notoire du créancier, ne méconnaissait pas manifestement l'ordre public international français, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 309 du code civil et 13 de la Convention de La Haye du 23 novembre 2007.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que Monsieur Manuel Y... sera tenu de payer à Madame Maria X... une pension alimentaire sous la forme d'un capital de 50. 000 euros net de frais et de droit ;
Aux motifs que, « L'article 2016 du code civil portugais dispose que le conjoint non considéré fautif a droit à une pension alimentaire. Pour la fixation de la pension alimentaire, le tribunal doit prendre ne considération l'âge et l'état de santé des conjoints, leurs qualifications professionnelles et possibilités d'emploi, le temps qu'ils devront dédier éventuellement, à leurs enfants communs, leurs rendements et revenus et de façon générale toutes les circonstances qui influent sur les besoins du conjoint qui reçoit la pension alimentaire et les possibilités de celui qui la fournit.
Mme X... allègue qu'elle n'a aucune formation particulière et n'a occupé que des emplois non qualifiés, peu rémunérés et souvent à temps partiel, que sa pension de retraite sera minime, qu'elle a élevé deux enfants et a subi trois interventions chirurgicales et qu'elle n'a aucun patrimoine. Elle soutient que M. Y... a toujours travaillé et qu'il est gérant d'une entreprise de maçonnerie, qu'il dispose d'un patrimoine à la suite du règlement de la succession de ses parents et que sa retraite sera le double de la sienne.
M. Y... affirme qu'il a des problèmes de santé importants, que sa société a été mise en liquidation, qu'il a retrouvé un emploi moins rémunéré et que sa pension de retraite sera inférieure à celle de son épouse. Il soutient qu'elle a toujours travaillé à plein temps hormis deux années, qu'elle est propriétaire de biens immobiliers au Portugal ayant hérité de sa famille.
Mme X..., âgée de 61 ans, travaille depuis son mariage en qualité d'employée à domicile ; ses revenus s'élevaient à 31877 ¿ en 2009 soit 2656 ¿ par mois ; elle ne produit pas ses avis d'imposition pour les revenus 2010 et 2011 et indique dans sa déclaration sur l'honneur que ses ressources de l'année 2010 s'élevaient à 32597 ¿ soit 2716 ¿ mensuels. Elle a cessé de travailler entre le 1er janvier 1978 et le 31 décembre 1979. Si elle fait valoir ses droits à la retraite au cours de l'année 2012, sa pension de retraite sera de 1490 ¿ par mois selon une attestation de l'Assurance Retraite. Elle a subi trois interventions chirurgicales entre 1998 et 2011, relatives à la thyroïde et au genou.
Dans sa déclaration sur l'honneur, elle précise qu'elle dispose d'un patrimoine propre au Portugal composé d'une maison estimée à 35000 ¿ et de parcelles de bois et de prés évalués en mars 2011 à 154. 549 ¿.
M. Y..., âgé de 65 ans, était gérant d'une entreprise de bâtiment, la sari TRICA mise en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Nanterre prononcé le 13 juillet 2010 ; il est actuellement gérant d'une autre entreprise depuis septembre 2010 et son revenu net imposable était de 13635 ¿ pour la période du 1er janvier au novembre 2011, soit 1230 ¿ par mois ; selon une estimation établie le 28 décembre 2011 par l'Assurance Retraite, sa pension de retraite mensuelle brute s'élèvera à 1060, 11 ¿ à compter du 1er janvier 2012 ; Mme X... verse au débat des pièces justifiant de ce qu'il a également cotisé au titre de la retraite complémentaire à l'ARRCO et à l'AGIRC, ce qui porterait sa pension de retraite à 2300 ¿ par mois au total.
Il possède des biens au Portugal estimés à 76694 ¿ et à 37037 ¿ dans sa déclaration sur l'honneur. M. Y... a un état de santé fragile dû à plusieurs pathologies, dont un cancer traité depuis plusieurs années.
Les parties sont propriétaires en commun d'une maison et d'un terrain évalués par Mme X... à 500000 ¿, et par une agence immobilière en mars 2011 entre 600000 ¿ et 650000 ¿, la cour retiendra 600000 ¿ ; en outre, ils possèdent en commun des parcelles de terre au Portugal évaluées à 262000 ¿ par un expert en mars 2011.
Compte tenu de la durée du mariage, de l'âge des parties, de leurs ressources et de leur patrimoine, de leurs pensions de retraite respective, la rupture du lien conjugal va entraîner une disparité dans les conditions de vie des parties au détriment de l'épouse, qui justifie l'octroi d'une pension alimentaire ; toutefois elle sera réduite à la somme de 50000 ¿, payable au prononcé de l'arrêt » ;
Alors que, il n'est pas permis aux juges de méconnaitre le sens clair et précis d'une déclaration sur l'honneur établie par un époux dans le cadre d'un divorce ; qu'en l'espèce, dans sa déclaration sur l'honneur établie le 30 décembre 2011, Madame Maria X... SANTOS indiquait très clairement que figuraient au titre du patrimoine immobilier commun, une maison sise à VALE DO OLHEIRO, au Portugal, estimée 35. 000 euros, et des parcelles de bois et prés, estimés 150. 000 euros ; qu'en jugeant néanmoins que dans sa déclaration sur l'honneur, Madame Maria X... précise qu'elle dispose d'un patrimoine propre au Portugal composé d'une maison estimée à 35000 ¿ et de parcelles de bois et de prés évalués en mars 2011 à 154549 ¿, la Cour d'appel a ouvertement dénaturé les termes clairs et précis de la déclaration sur l'honneur de l'épouse, en violation de l'article 1134 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame Maria X... SANTOS de ses demandes de dommages-intérêts ;
Aux motifs que « Au terme de l'article 1792 du code civil, le conjoint déclaré unique ou principal fautif doit réparer les dommages non patrimoniaux causés à l'autre conjoint par la dissolution du mariage.
Le divorcé étant prononcé aux torts de l'époux, ce dernier sera débouté de sa demande de dommages-intérêts.
La demande formée par Mme X... sera rejetée, dans la mesure où la faute qui justifie le prononcé du divorce est fondée sur les violences commises par M. Y..., faits pour lesquels la cour d'appel de Versailles lui a octroyé la somme de 2000 ¿ en réparation du préjudice subi ; en conséquence le jugement sera confirmé » ;
Et par adoption éventuelle des motifs non contraires des premiers juges :
« Compte tenu de l'imputation des torts, l'époux doit réparation du dommage non patrimonial causé à l'épouse par la dissolution du mariage.
Il y a toutefois lieu de relever que de Madame Maria X... s'est vue allouer par la cour d'appel, des dommages-intérêts à hauteur de 2000 euros en réparation du préjudice causé par les faits réprimés et qui fondent la demande de divorce aux torts de Monsieur Y....
Elle ne saurait être indemnisée plus d'une fois du même préjudice et sera déboutée de cette demande » (jugement, p. 5) ;
Alors que le conjoint déclaré unique ou principal fautif dans le divorce doit réparer les dommages non patrimoniaux causés à l'autre conjoint par la dissolution du mariage ; que pour débouter Madame Maria X... de sa demande de dommages-intérêts, la Cour d'appel a jugé qu'avait déjà été réparé le préjudice subi par elle en raison des violences commises par son mari ; qu'en statuant ainsi, quand Maria X... réclamait pourtant réparation non pas du fait des actes de violence commises par son époux, mais du préjudice subi en raison de la dissolution du mariage, la Cour d'appel a violé l'article 1792 du code civil portugais.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12-23380
Date de la décision : 25/09/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 15 mars 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 25 sep. 2013, pourvoi n°12-23380


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.23380
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