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25/09/2013 | FRANCE | N°12-15062

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 septembre 2013, 12-15062


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 janvier 2012), que la société Texas instruments France a engagé une procédure de licenciement collectif pour motif économique qui a donné lieu à l'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi ; que M. X..., licencié pour motif économique le 9 mars 2009, a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi ;
Sur le prem

ier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de déclarer nu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 janvier 2012), que la société Texas instruments France a engagé une procédure de licenciement collectif pour motif économique qui a donné lieu à l'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi ; que M. X..., licencié pour motif économique le 9 mars 2009, a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de déclarer nul le plan de sauvegarde de l'emploi et de le condamner à verser au salarié une somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que les possibilités de reclassement doivent être recherchées sur les emplois disponibles dans l'entreprise ou le groupe auquel elle appartient, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'il en résulte que les possibilités de reclassement identifiées dans le plan de sauvegarde de l'emploi doivent être appréciées au regard des emplois disponibles dans le groupe, et non en fonction de l'effectif total du groupe ou du nombre de ses implantations dans le monde ; qu'en l'espèce, la société Texas instruments France s'était engagée dans le plan de sauvegarde de l'emploi à rechercher des possibilités de reclassement dans toutes les entités du groupe, en France et à l'étranger, à mettre à jour régulièrement la liste de ces possibilités de reclassement et à proposer tout emploi qui viendrait à se libérer aux salariés dont les compétences étaient adaptées ; qu'elle avait précisé, dans ce plan, qu'en raison de la réorganisation mondiale de la Business Unit WTBU, qui conduisait à la suppression de plus de six cents emplois dans le monde, et de la dégradation générale du marché mondial des semi-conducteurs, les possibilités de reclassement dans le groupe étaient cependant très limitées et qu'à la date de l'adoption du plan, seuls trois postes avaient pu être identifiés comme disponibles ; que, devant les juges du fond, pour établir le sérieux et l'exhaustivité de ses recherches de reclassement, la société Texas instruments France faisait valoir qu'elle avait finalement proposé seize postes aux salariés licenciement et produisait toutes les correspondances adressées aux responsables des ressources humaines des différentes Business Units du groupe pour rechercher des possibilités de reclassement et les réponses reçues, ainsi que les offres de reclassement interne adressées à certains salariés ; qu'en se bornant à relever, pour dire que le plan de sauvegarde de l'emploi était insuffisant faute de réelles mesures de reclassement à l'intérieur du groupe, qu'il n'offrait que trois postes au titre du reclassement interne et que ce nombre était particulièrement réduit au regard de l'importance du groupe, sans se prononcer, comme elle y était pourtant invitée, sur l'incidence de l'ampleur mondiale de la réorganisation, sur les recherches effectuées par la société Texas instruments auprès de l'ensemble des entités du groupe pour recenser tous les emplois disponibles pour le reclassement et sur les offres de reclassement finalement dégagées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-61, L. 1233-62 et L. 1235-10 du code du travail ;
2°/ qu'en affirmant qu'aucun explication n'est avancée quant au nombre particulièrement réduit de possibilités de reclassement identifiées dans le plan de sauvegarde de l'emploi, après avoir relevé que la société Texas instruments France indique avoir procédé à une réelle recherche exhaustive de postes de reclassement au sein du groupe et avoir ainsi recensé 16 postes disponibles, nombre qu'elle estime satisfaisant compte tenu de l'ampleur mondiale de la réorganisation, la cour d'appel, qui a refusé de tenir compte de ce contexte de réorganisation mondiale du groupe, des recherches de reclassement mises en oeuvre par l'exposante et des possibilités de reclassement interne finalement proposées aux salariés menacés de licenciement, a violé les articles L. 1233-61, L. 1233-62 et L. 1235-10 du code du travail ;
3°/ qu'en affirmant que le plan de sauvegarde de l'emploi n'évoquait aucune des mesures envisagées pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre et en tout état de cause n'indiquait pas la nature des emplois susceptibles d'être proposés à l'intérieur du groupe, après avoir constaté que le même plan de sauvegarde comportait un premier chapitre intitulé « mesures destinées à limiter le nombre des licenciements envisagés » dont le premier volet portait sur le reclassement interne et l'aide au départ volontaire, que l'annexe II du plan recensait trois postes de reclassement (deux aux Etats-Unis et un en Malaisie) et que sept pages du plan étaient consacrées à la question du reclassement interne et décrivaient les modalités de diffusion des postes, le calendrier, ainsi que les mesures d'accompagnement, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-4, L. 1233-62 et L. 1235-10 du code du travail ;
4°/ que le juge doit faire respecter et respecter lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, il résulte des conclusions du salarié et du rappel des prétentions des parties effectué par la cour d'appel que M. X... n'a invoqué ni le nombre d'heures supplémentaires accomplies, ni l'absence de mesures de réduction du temps de travail pour contester la suffisance du plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'en relevant, sans avoir même invité les parties à fournir leurs explications sur ce point, que le plan de sauvegarde de l'emploi ne tirait aucune conséquence du nombre d'heures supplémentaires comptabilisées par les salariés et n'envisageait aucune mesure de réduction du temps de travail, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
5°/ que l'employeur est tenu d'envisager, dans le plan de sauvegarde de l'emploi, des mesures de réduction du temps de travail lorsque celles-ci sont possibles et de nature à limiter le nombre de suppression de postes ; qu'en se bornant à reprocher à l'exposante de n'avoir tiré aucune conséquence du nombre d'heures de travail accomplies et de n'avoir pas envisagé des mesures de réduction du temps de travail, sans préciser le volume d'heures supplémentaires comptabilisé par les salariés, ni faire ressortir que la durée du travail pouvait être utilement réduite pour limiter le nombre de licenciements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-61 du code du travail ;
6°/ que pour satisfaire à son obligation de reclassement, l'employeur n'est pas tenu de mettre un terme à ses contrats de sous-traitance pour créer de nouveaux emplois au sein de l'entreprise, ni de proposer aux salariés menacés de licenciement les emplois occupés par des sous-traitants ; qu'en l'espèce, la société Texas instruments France faisait valoir qu'elle avait fortement réduit le recours à la sous-traitance en même temps qu'elle réduisait ses activités, et qu'ainsi, le nombre de sous-traitants était passé de trois cent cinquante et un en 2007 à cent soixante-huit au début de l'année 2009, puis à trente-neuf au mois de septembre 2009 et dix-neuf au mois de juin 2010 ; qu'en reprochant en l'espèce à la société Texas instruments France de ne pas avoir organisé, dans le plan de sauvegarde de l'emploi, le reclassement des salariés menacés de licenciement sur les postes des sous-traitants et d'avoir maintenu le recours à la sous-traitance, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles L. 1233-3, L. 1233-61 et L. 1233-62 du code du travail ;
7°/ qu'en reprochant encore à l'employeur de n'avoir pas envisagé, dans le plan de sauvegarde de l'emploi, la mise en place de formations susceptibles de permettre un renforcement technique des activités maintenues et des activités en développement, sans expliquer comment de telles mesures auraient permis d'éviter les licenciements envisagés ou d'en diminuer le nombre ou de favoriser le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, en violation des articles L. 1233-61, L. 1233-62 et L. 1235-10 du code du travail ;
Mais attendu que la pertinence d'un plan de sauvegarde de l'emploi s'apprécie en fonction des moyens dont dispose l'entreprise et doit comporter des mesures précises et concrètes susceptibles d'assurer le reclassement des salariés à l'intérieur du groupe auquel la société appartient et, à défaut de postes disponibles, de faciliter les départs à l'extérieur du groupe ;
Et attendu qu'ayant relevé que malgré l'importance et les moyens du groupe auquel elle appartenait, la société s'était bornée à proposer dans le plan de sauvegarde de l'emploi un nombre particulièrement réduit de postes en reclassement interne sans justifier avoir recherché toutes les mesures possibles pour éviter les licenciements ou en réduire le nombre, la cour d'appel a pu en déduire que ce plan, faute de réelles mesures de reclassement à l'intérieur du groupe, ne répondait pas aux exigences légales ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi privait le licenciement du salarié de cause réelle et sérieuse et de le condamner à lui verser la somme de 23 172,50 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en application de l'article L. 1235-11 du code du travail, l'absence ou l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi entraîne la nullité de la procédure de licenciement collectif et des licenciements subséquents ; que, compte tenu du caractère autonome de ces deux obligations, l'employeur peut avoir manqué à son obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi répondant aux exigences des articles L. 1233-61 et suivants du code du travail, mais satisfait à son obligation individuelle de reclassement à l'égard d'un salarié ; qu'il en résulte que l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi n'a pas pour effet de priver les licenciements prononcés de cause réelle et sérieuse ; qu'en se bornant à relever que le plan de sauvegarde de l'emploi était insuffisant, pour dire que le licenciement de M. X... ne pouvait qu'être déclaré sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles L. 1233-4, L. 1233-61, L. 1233-62, L. 1235-10 et L. 1235-11 du code du travail ;
2°/ que le plan de sauvegarde de l'emploi qui ne répond pas aux exigences des articles L. 1233-61 et L. 1233-62 du code du travail est nul ; qu'il s'ensuit que les sommes perçues par les salariés en vertu du plan de sauvegarde de l'emploi n'ont plus de fondement juridique ; que la nullité du plan oblige les salariés à restituer les sommes perçues en exécution de ce plan, lesquelles viennent en déduction de la créance à titre de dommages et intérêts qui leur est allouée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que le salarié était fondé à se prévaloir de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi à l'appui de sa demande indemnitaire, ce dont il résultait que son licenciement était nul et l'obligeait à restituer les sommes perçues en exécution de ce plan ; qu'en déduisant de l'insuffisance du plan que le licenciement M. X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, pour refuser de déduire de la créance allouée au salarié à titre de dommages-intérêts l'indemnité supra-légale de licenciement perçue par le salarié en exécution du plan, comme il le lui était demandé, la cour d'appel a violé les articles L. 1235-10 et L. 1235-11 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, qu'après avoir retenu que le plan de sauvegarde de l'emploi était insuffisant faute de réelles mesures de reclassement à l'intérieur du groupe auquel la société appartenait, la cour d'appel a pu décider, en l'état de la demande qui lui était présentée, que le licenciement du salarié était nécessairement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Attendu, ensuite, qu'il ressort ni de l'arrêt ni des conclusions de la société Texas instruments France, reprises oralement à l'audience, que celle-ci a formulé une demande de restitution des sommes perçues par le salarié en exécution du plan de sauvegarde de l'emploi en cas d'annulation de celui-ci ;
D'où il suit que le moyen inopérant en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Texas instruments France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Texas instruments France à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Texas instruments France
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré nul le plan de sauvegarde de l'emploi établi par la société TEXAS INSTRUMENTS FRANCE et d'AVOIR, en conséquence, condamné la société TEXAS INSTRUMENTS FRANCE à verser à Monsieur X... la somme de 23.172,50 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QU' « Au cas d'espèce, il ressort du préambule du projet tel que produit au dossier, que le plan de sauvegarde de l'emploi porte sur la suppression de 305 postes, résultant d'un repositionnement stratégique de l'entreprise, impliquant l'abandon d'activités en perte au profit d'un recentrage sur les segments en croissance ; M. X... soutient qu'en considération des moyens dont dispose le groupe Texas Instruments, a réalisé en 2007 un chiffre d'affaires de 13,8 milliards de dollars et employait à cette date 30.000 salariés, le plan de sauvegarde de l'emploi est nul comme insuffisant en ce qui concerne les mesures de reclassement internes comme externes ; Il observe en ce sens qu'en février 2009, seuls trois postes ont été identifiés comme disponibles en interne, et ce, alors qu'aucune précision n'a été donnée quant aux postes occupés par des sous-traitants et intérimaires ; La société Texas Instruments France soutient que le plan de sauvegarde de l'emploi est conforme aux articles L. 1233-61 et suivants du code du travail ; elle fait valoir que le comité d'entreprise a rendu un avis favorable ; Elle indique avoir procédé à une réelle recherche exhaustive de postes de reclassement au sein du groupe et avoir ainsi recensé 16 postes disponibles, nombre qu'elle estime satisfaisant compte tenu de l'ampleur mondiale de la réorganisation ; Elle observe que 7 pages sont consacrées au reclassement interne et qu'ainsi, le plan contient une série de mesures précises et concrètes de reclassement ; elle ajoute que les informations relatives au nombre de soustraitants ont été données au comité d'entreprise, que ce nombre a été ramené de 351 en 2007 à 168 au début de l'année 2009, 36 à la fin du mois de septembre 2009 et 19 au 30 juin 2010 ; enfin, elle indique que le taux de reclassement de 96 % a été considéré comme très positif par la direction du travail ; De fait, le plan de sauvegarde de l'emploi tel que produit au dossier, comporte en effet un premier chapitre intitulé « mesures destinées à limiter le nombre des licenciements envisagés » dont le premier volet porte sur le reclassement interne (pages 23 à 29) et l'aide au départ volontaire (pages 29 à 38) ; Toutefois, il ressort de l'annexe II, qu'en réalité, au 12 février 2009, seuls 3 postes (2 aux Etats-Unis et 1 en Malaisie) sont offerts au titre du reclassement interne, de sorte que les 7 pages consacrées à cette question (portant sur les modalités de diffusion des postes, le calendrier, ainsi que les mesures d'accompagnement) ne présentent qu'un caractère très théorique, et ce, sans qu'aucune explication ne soit avancée quant à ce nombre particulièrement réduit au regard tant de l'importance du groupe, que de l'obligation de reclassement incombant à l'employeur, prioritairement au sein de l'entreprise comme du groupe auquel elle appartient ; que par ailleurs, si ce plan décline les mesures destinées à faciliter le reclassement des salariés licenciés, il n'évoque aucune des mesures envisagées pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre et, en tout état de cause, n'indique pas la nature des emplois susceptibles d'être proposés à l'intérieur du groupe ; Aucune conséquence n'est tirée du nombre d'heures supplémentaires comptabilisées par les salariés, et aucune réduction du temps de travail n'est envisagée ; en outre, si la diminution des postes en sous-traitance a été évoquée à l'occasion des consultations du comité d'entreprise, aucune indication ne résulte du plan de sauvegarde de l'emploi alors cependant que le recours à cet emploi extérieur a été maintenu et que M. X... affirme sans être contredit que certains de ces salariés ont été récemment engagés par la société Texas Instruments France ; enfin, aucune formation susceptible de permettre un renforcement technique des activités maintenues et des activités en développement n'est envisagé ; Il s'ensuit qu'au regard des moyens de la société Texas Instruments France, filiale du groupe Texas Instruments International, présent dans de nombreux pays, laquelle employait en France au 3 novembre 2008, 974 salariés, dont 912 sur le site de Villeneuve-Loubet, (et 1.200 en ce compris les sous-traitants) M. X... est fondé à soutenir que le plan de sauvegarde de l'emploi, dont la pertinence s'apprécie en fonction des moyens dont dispose l'entreprise, est insuffisant notamment faute de réelles mesures de reclassement à l'intérieur du groupe auquel la société appartient, et qu'ainsi, il ne répond pas aux exigences de la loi » ;
1. ALORS, DE PREMIERE PART, QUE les possibilités de reclassement doivent être recherchées sur les emplois disponibles dans l'entreprise ou le groupe auquel elle appartient, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'il en résulte que les possibilités de reclassement identifiées dans le plan de sauvegarde de l'emploi doivent être appréciées au regard des emplois disponibles dans le groupe, et non en fonction de l'effectif total du groupe ou du nombre de ses implantations dans le monde ; qu'en l'espèce, la société TEXAS INSTRUMENTS FRANCE s'était engagée dans le plan de sauvegarde de l'emploi à rechercher des possibilités de reclassement dans toutes les entités du groupe, en France et à l'étranger, à mettre à jour régulièrement la liste de ces possibilités de reclassement et à proposer tout emploi qui viendrait à se libérer aux salariés dont les compétences étaient adaptées ; qu'elle avait précisé, dans ce plan, qu'en raison de la réorganisation mondiale de la Business Unit WTBU, qui conduisait à la suppression de plus de 600 emplois dans le monde, et de la dégradation générale du marché mondial des semi-conducteurs, les possibilités de reclassement dans le groupe étaient cependant très limitées et qu'à la date de l'adoption du plan, seuls trois postes avaient pu être identifiés comme disponibles ; que, devant les juges du fond, pour établir le sérieux et l'exhaustivité de ses recherches de reclassement, la société TEXAS INSTRUMENTS FRANCE faisait valoir qu'elle avait finalement proposé 16 postes aux salariés licenciement et produisait toutes les correspondances adressées aux responsables des Ressources Humaines des différentes Business Units du groupe pour rechercher des possibilités de reclassement et les réponses reçues, ainsi que les offres de reclassement interne adressées à certains salariés ; qu'en se bornant à relever, pour dire que le plan de sauvegarde de l'emploi était insuffisant faute de réelles mesures de reclassement à l'intérieur du groupe, qu'il n'offrait que trois postes au titre du reclassement interne et que ce nombre était particulièrement réduit au regard de l'importance du groupe, sans se prononcer, comme elle y était pourtant invitée, sur l'incidence de l'ampleur mondiale de la réorganisation, sur les recherches effectuées par la société TEXAS INSTRUMENTS auprès de l'ensemble des entités du groupe pour recenser tous les emplois disponibles pour le reclassement et sur les offres de reclassement finalement dégagées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-61, L. 1233-62 et L. 1235-10 du Code du travail ;
2. ALORS, PLUS ENCORE, QU' en affirmant qu'aucun explication n'est avancée quant au nombre particulièrement réduit de possibilités de reclassement identifiées dans le plan de sauvegarde de l'emploi, après avoir relevé que la société TEXAS INSTRUMENTS FRANCE indique avoir procédé à une réelle recherche exhaustive de postes de reclassement au sein du groupe et avoir ainsi recensé 16 postes disponibles, nombre qu'elle estime satisfaisant compte tenu de l'ampleur mondiale de la réorganisation, la cour d'appel, qui a refusé de tenir compte de ce contexte de réorganisation mondiale du groupe, des recherches de reclassement mises en oeuvre par l'exposante et des possibilités de reclassement interne finalement proposées aux salariés menacés de licenciement, a violé les articles L. 1233-61, L. 1233-62 et L. 1235-10 du Code du travail ;
3. ALORS, DE TROISIEME PART, QU'en affirmant que le plan de sauvegarde de l'emploi n'évoquait aucune des mesures envisagées pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre et en tout état de cause n'indiquait pas la nature des emplois susceptibles d'être proposés à l'intérieur du groupe, après avoir constaté que le même plan de sauvegarde comportait un premier chapitre intitulé « mesures destinées à limiter le nombre des licenciements envisagés » dont le premier volet portait sur le reclassement interne et l'aide au départ volontaire, que l'annexe II du plan recensait trois postes de reclassement (deux aux Etats-Unis et un en Malaisie) et que sept pages du plan étaient consacrées à la question du reclassement interne et décrivaient les modalités de diffusion des postes, le calendrier, ainsi que les mesures d'accompagnement, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles L.1233-4, L.1233-62 et L.1235-10 du Code du travail ;
4. ALORS, DE QUATRIEME PART, QUE le juge doit faire respecter et respecter lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, il résulte des conclusions du salarié et du rappel des prétentions des parties effectué par la cour d'appel que Monsieur X... n'a invoqué ni le nombre d'heures supplémentaires accomplies, ni l'absence de mesures de réduction du temps de travail pour contester la suffisance du plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'en relevant, sans avoir même invité les parties à fournir leurs explications sur ce point, que le plan de sauvegarde de l'emploi ne tirait aucune conséquence du nombre d'heures supplémentaires comptabilisées par les salariés et n'envisageait aucune mesure de réduction du temps de travail, la cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
4. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE l'employeur est tenu d'envisager, dans le plan de sauvegarde de l'emploi, des mesures de réduction du temps de travail lorsque celles-ci sont possibles et de nature à limiter le nombre de suppression de postes ; qu'en se bornant à reprocher à l'exposante de n'avoir tiré aucune conséquence du nombre d'heures de travail accomplies et de n'avoir pas envisagé des mesures de réduction du temps de travail, sans préciser le volume d'heures supplémentaires comptabilisé par les salariés, ni faire ressortir que la durée du travail pouvait être utilement réduite pour limiter le nombre de licenciements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-61 du code du travail ;
6. ALORS, DE SIXIEME PART, QUE pour satisfaire à son obligation de reclassement, l'employeur n'est pas tenu de mettre un terme à ses contrats de sous-traitance pour créer de nouveaux emplois au sein de l'entreprise, ni de proposer aux salariés menacés de licenciement les emplois occupés par des sous12 traitants ; qu'en l'espèce, la société TEXAS INSTRUMENTS FRANCE faisait valoir qu'elle avait fortement réduit le recours à la sous-traitance en même temps qu'elle réduisait ses activités, et qu'ainsi, le nombre de sous-traitants était passé de 351 en 2007 à 168 au début de l'année 2009, puis à 39 au mois de septembre 2009 et 19 au mois de juin 2010 ; qu'en reprochant en l'espèce à la société TEXAS INSTRUMENTS FRANCE de ne pas avoir organisé, dans le plan de sauvegarde de l'emploi, le reclassement des salariés menacés de licenciement sur les postes des sous-traitants et d'avoir maintenu le recours à la sous-traitance, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles L. 1233-3, L. 1233-61 et L. 1233-62 du Code du travail ;
7. ALORS, ENFIN, QU' en reprochant encore à l'exposante de n'avoir pas envisagé, dans le plan de sauvegarde de l'emploi, la mise en place de formations susceptibles de permettre un renforcement technique des activités maintenues et des activités en développement, sans expliquer comment de telles mesures auraient permis d'éviter les licenciements envisagés ou d'en diminuer le nombre ou de favoriser le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, en violation des articles L.1233-61, L. 1233-62 et L. 1235-10 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
, SUBSIDIAIRE
ll est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi privait le licenciement de Monsieur X... de cause réelle et sérieuse, et d'AVOIR, en conséquence, condamné la société TEXAS INSTRUMENTS FRANCE à lui verser une indemnité de 23.172,50 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QU'« au regard des moyens de la société Texas Instruments France, filiale du groupe Texas Instruments international, présent dans de nombreux pays, laquelle employait en France au 3 novembre 2008, 974 salariés, dont 912 sur le site de Villeneuve-Loubet, (et 1.200 en ce compris les sous-traitants) M. X... est fondé à soutenir que le plan de sauvegarde de l'emploi, dont la pertinence s'apprécie en fonction des moyens dont dispose l'entreprise, est insuffisant notamment faute de réelles mesures de reclassement à l'intérieur du groupe auquel la société appartient, et qu'ainsi, il ne répond pas aux exigences de la loi ; Il suit de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d¿examiner les autres moyens invoqués par l'appelant, que le licenciement de M. X... ne peut qu'être déclaré sans cause réelle et sérieuse et que le jugement déféré sera infirmé » ;
ET QU'« en application de l'article L. 1235-3 du code du travail : « Si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, (...) le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur, en peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9 » ; Pour s'opposer à la demande en paiement, la société Texas Instruments France fait valoir que M. X... ne justifie d'aucun préjudice, qu'il a perçu une somme de 31.574 euros à titre d'indemnité de licenciement (dont 29.423 euros à titre d'indemnité complémentaire prévue par le plan de sauvegarde de l'emploi) outre une indemnité de congé de reclassement d'un montant de 2.500 euros durant 2 mois et qu'il a retrouvé un emploi sous contrat à durée indéterminée ; De fait M. X... justifie avoir retrouvé un emploi en qualité de cadre à compter du 29 juillet 2009, moyennant paiement d'une rémunération brute de 4.250 euros ; Par suite, et compte tenu de son salaire mensuel moyen de 46.345 euros, il convient de condamner la société Texas Instruments France au paiement de la somme de 23.172,50 euros » ;
1. ALORS QU'en application de l'article L. 1235-11 du Code du travail, l'absence ou l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi entraîne la nullité de la procédure de licenciement collectif et des licenciements subséquents ; que, compte tenu du caractère autonome de ces deux obligations, l'employeur peut avoir manqué à son obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi répondant aux exigences des articles L.1233-61 et suivants du Code du travail, mais satisfait à son obligation individuelle de reclassement à l'égard d'un salarié ; qu'il en résulte que l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi n'a pas pour effet de priver les licenciements prononcés de cause réelle et sérieuse ; qu'en se bornant à relever que le plan de sauvegarde de l'emploi était insuffisant, pour dire que le licenciement de Monsieur X... ne pouvait qu'être déclaré sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles L.1233-4, L. 1233-61, L. 1233-62, L. 1235-10 et L. 1235-11 du Code du travail ;
2. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE le plan de sauvegarde de l'emploi qui ne répond pas aux exigences des articles L. 1233-61 et L. 1233-62 du Code du travail est nul ; qu'il s'ensuit que les sommes perçues par les salariés en vertu du plan de sauvegarde de l'emploi n'ont plus de fondement juridique ; que la nullité du plan oblige les salariés à restituer les sommes perçues en exécution de ce plan, lesquelles viennent en déduction de la créance à titre de dommages et intérêts qui leur est allouée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que Monsieur X... était fondé à se prévaloir de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi à l'appui de sa demande indemnitaire, ce dont il résultait que son licenciement était nul et l'obligeait à restituer les sommes perçues en exécution de ce plan ; qu'en déduisant de l'insuffisance du plan que le licenciement Monsieur X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, pour refuser de déduire de la créance allouée au salarié à titre de dommages et intérêts l'indemnité supra-légale de licenciement perçue par le salarié en exécution du plan, comme il le lui était demandé, la cour d'appel a violé les articles L. 1235-10 et L. 1235-11 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-15062
Date de la décision : 25/09/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10 janvier 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 sep. 2013, pourvoi n°12-15062


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.15062
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