LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 31 mai 2011), que Mme X..., engagée par l'association Bassin services personnes en qualité d'agent à domicile par contrat du 3 octobre 2008, a été licenciée pour faute grave par lettre du 26 février 2009 ;
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de déclarer le licenciement fondé sur une faute grave et de la débouter de ses demandes alors, selon le moyen :
1°/ que le salarié jouit dans l'entreprise et en dehors de celle-ci de sa liberté d'expression ; que l'usage de celle-ci ne peut constituer une faute justifiant un licenciement, sauf à caractériser un abus dans l'exercice de ce droit ; qu'en se bornant à relever, pour conclure à l'existence d'une faute grave, que la salariée, employée en qualité de simple agent à domicile, aurait indiqué à deux de ses collègues, lors d'une conversation au marché, soit hors de l'entreprise, que l'association employeur « était au bord de la faillite » et les aurait incitées à la quitter pour venir travailler dans une entreprise concurrente, sans nullement rechercher ni préciser d'où il ressortait que les propos qu'aurait ainsi tenus l'exposante caractérisaient un usage abusif de sa liberté d'expression, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail, ensemble l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
2°/ que la lettre de licenciement circonscrit les termes du débat judiciaire ; que dans la lettre de licenciement, l'employeur reprochait à la salariée, à titre de faute grave, d'avoir mené une « campagne de dénigrement contre Bassin services personnes, votre employeur », caractérisée par le fait d'avoir « clamé auprès d'un certain nombre de vos collègues que l'association n'allait pas bien, qu'elle était dans le rouge et qu'elles devaient quitter la structure avant de se retrouver sans travail » et « tenu le même discours alarmiste auprès de certains clients ; en leur faisant douter de la bonne santé de BSP puisque vous déclariez que l'association n'allait pas bien, que tous les salariés partaient et qu'ils seraient mieux traités dans une autre structure » ; qu'en se bornant à relever que lors d'une conversation tenue en-dehors de l'entreprise, la salariée aurait indiqué à deux de ses collègues que l'association était au bord de la faillite et les avait incitées à la quitter pour venir travailler dans une entreprise concurrente, la cour d'appel n'a pas caractérisé les faits constitutifs, selon l'employeur, de la prétendue « campagne de dénigrement » qu'aurait mené l'exposante et a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
3°/ que l'employeur reprochait à la salariée, à titre de faute grave, d'avoir mené une « campagne de dénigrement¿ contre Bassin services personnes, votre employeur », caractérisée par le fait d'avoir « clamé auprès d'un certain nombre de vos collègues que l'association n'allait pas bien, qu'elle était dans le rouge et qu'elles devaient quitter la structure avant de se retrouver sans travail » et « tenu le même discours alarmiste auprès de certains clients ; en leur faisant douter de la bonne santé de BSP puisque vous déclariez que l'association n'allait pas bien, que tous les salariés partaient et qu'ils seraient mieux traités dans une autre structure » ; qu'en se bornant à relever que lors d'une conversation tenue en-dehors de l'entreprise, l'exposante aurait indiqué à deux de ses collègues que l'association était au bord de la faillite et les avait incitées à la quitter pour venir travailler dans une entreprise concurrente, la cour d'appel n'a pas caractérisé des faits constitutifs d'un manquement à l'obligation de loyauté à l'égard de l'employeur et a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
4°/ que seuls des faits imputables au salarié peuvent constituer une faute grave ; qu'en retenant qu'« il ressort des différentes attestations versées aux débats que certains membres de la société 33 services, qui exerce une activité concurrente, se sont livrés, tant auprès du personnel de l'association que de ses clients, à une campagne de déstabilisation en alléguant ses difficultés financières et sa fin prochaine », la cour d'appel, qui s'est prononcée au regard de faits qui ne sont pas imputables à l'exposante, a violé les dispositions des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
5°/ que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la durée limitée du préavis ; qu'en se bornant à relever à l'encontre de la salariée, employée à temps partiel en simple qualité d'agent à domicile, le fait d'avoir, dans le cadre d'une conversation privée tenue sur un marché, en-dehors de l'entreprise, indiqué à deux de ses collègues que l'employeur était au bord de la faillite et les aurait incitées à la quitter pour venir travailler dans une entreprise concurrente, la cour d'appel n'a nullement caractérisé des faits constitutifs d'une faute grave et a violé les dispositions des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la salariée avait indiqué à deux collègues que l'employeur était au bord de la faillite pour les inciter à le quitter pour venir travailler pour une entreprise concurrente alors qu'une campagne de dénigrement était organisée par certains membres de cette dernière, la cour d'appel a pu décider que ce comportement, constitutif d'un manquement à l'obligation de loyauté envers l'employeur, rendait impossible le maintien de l'intéressée dans l'entreprise et constituait une faute grave ; que le moyen, nouveau, mélangé de fait et de droit et partant irrecevable en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre septembre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour Mme X...
LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT INFIRMATIF ATTAQUÉ D'AVOIR déclaré le licenciement de l'exposante fondé sur une faute grave et débouté l'exposante de toutes ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE l'employeur est une association à but non lucratif de services d'aide à domicile ; que la lettre de licenciement qui fixe les limites du débat, reprise par le jugement, fait grief à Madame X... d'avoir participé à la campagne de dénigrement orchestrée contre l'association tant auprès des autres salariées qu'auprès de ses clients ; qu'il ressort des différentes attestations versées aux débats que certains membres de la société 33 services, qui exerce une activité concurrente, se sont livrés, tant auprès du personnel de l'association que de ses clients, à une campagne de déstabilisation en alléguant ses difficultés financières et sa fin prochaine ; qu'il résulte plus spécialement des attestations établies par Isabelle Y... et Christine Z..., que Madame X... leur aurait elle-même indiqué que l'association était au bord de la faillite et les avaient incitées à la quitter pour venir travailler dans l'entreprise 33 services ; que ce manquement caractérisé à l'obligation de loyauté à l'égard de son employeur qui pèse sur le salarié ne permettait pas à Madame X... de demeurer dans l'entreprise, même pendant la durée limitée du préavis, en raison des risques encourus par l'association et doit en conséquence s'analyser comme une faute grave privative d'indemnités.
ALORS D'UNE PART QUE le salarié jouit dans l'entreprise et endehors de celle-ci de sa liberté d'expression ; que l'usage de celle-ci ne peut constituer une faute justifiant un licenciement, sauf à caractériser un abus dans l'exercice de ce droit ; qu'en se bornant à relever, pour conclure à l'existence d'une faute grave, que l'exposante, employée en qualité de simple agent à domicile, aurait indiqué à deux de ses collègues, lors d'une conversation au marché, soit hors de l'entreprise, que l'Association employeur « était au bord de la faillite » et les aurait incitées à la quitter pour venir travailler dans une entreprise concurrente, sans nullement rechercher ni préciser d'où il ressortait que les propos qu'aurait ainsi tenus l'exposante caractérisaient un usage abusif de sa liberté d'expression, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L 1234-1, L 1234-5 et L 1234-9 du Code du travail ensemble l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
ALORS D'AUTRE PART QUE la lettre de licenciement circonscrit les termes du débat judiciaire ; que dans la lettre de licenciement, l'employeur reprochait à l'exposante, à titre de faute grave, d'avoir mené une « campagne de dénigrement¿contre BASSIN SERVICES PERSONNES, votre employeur », caractérisée par le fait d'avoir « clamé auprès d'un certain nombre de vos collègues que l'Association n'allait pas bien, qu'elle était dans le rouge et qu'elles devaient quitter la structure avant de se retrouver sans travail » et « tenu le même discours alarmiste auprès de certains clients ; en leur faisant douter de la bonne santé de BSP puisque vous déclariez que l'Association n'allait pas bien, que tous les salariés partaient et qu'ils seraient mieux traités dans une autre structure » ; qu'en se bornant à relever que lors d'une conversation tenue en-dehors de l'entreprise, l'exposante aurait indiqué à deux de ses collègues que l'Association était au bord de la faillite et les avait incitées à la quitter pour venir travailler dans une entreprise concurrente, la Cour d'appel n'a pas caractérisé les faits constitutifs, selon l'employeur, de la prétendue « campagne de dénigrement » qu'aurait mené l'exposante et a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L 1234-1, L 1234-5 et L 1234-9 du Code du travail ;
ALORS DE TROISIEME PART QUE l'employeur reprochait à l'exposante, à titre de faute grave, d'avoir mené une « campagne de dénigrement¿contre BASSIN SERVICES PERSONNES, votre employeur », caractérisée par le fait d'avoir « clamé auprès d'un certain nombre de vos collègues que l'Association n'allait pas bien, qu'elle était dans le rouge et qu'elles devaient quitter la structure avant de se retrouver sans travail » et « tenu le même discours alarmiste auprès de certains clients ; en leur faisant douter de la bonne santé de BSP puisque vous déclariez que l'Association n'allait pas bien, que tous les salariés partaient et qu'ils seraient mieux traités dans une autre structure » ; qu'en se bornant à relever que lors d'une conversation tenue en-dehors de l'entreprise, l'exposante aurait indiqué à deux de ses collègues que l'Association était au bord de la faillite et les avait incitées à la quitter pour venir travailler dans une entreprise concurrente, la Cour d'appel n'a pas caractérisé des faits constitutifs d'un manquement à l'obligation de loyauté à l'égard de l'employeur et a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L 1234-1, L 1234-5 et L 1234-9 du Code du travail ;
ALORS DE QUATRIEME PART QUE seuls des faits imputables au salarié peuvent constituer une faute grave ; qu'en retenant qu'« il ressort des différentes attestations versées aux débats que certains membres de la société 33 services, qui exerce une activité concurrente, se sont livrés, tant auprès du personnel de l'association que de ses clients, à une campagne de déstabilisation en alléguant ses difficultés financières et sa fin prochaine », la Cour d'appel qui s'est prononcée au regard de faits qui ne sont pas imputables à l'exposante a violé les dispositions des articles L 1234-1, L 1234-5 et L 1234-9 du Code du travail ;
ALORS ENFIN et en tout état de cause QUE la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la durée limitée du préavis ; qu'en se bornant à relever à l'encontre de l'exposante, employée à temps partiel en simple qualité d'agent à domicile, le fait d'avoir, dans le cadre d'une conversation privée tenue sur un marché, en-dehors de l'entreprise, indiqué à deux de ses collègues que l'employeur était au bord de la faillite et les aurait incitées à la quitter pour venir travailler dans une entreprise concurrente, la Cour d'appel n'a nullement caractérisé des faits constitutifs d'une faute grave et a violé les dispositions des articles L 1234-1, L 1234-5 et L 1234-9 du Code du travail ;