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24/09/2013 | FRANCE | N°12-16943

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 septembre 2013, 12-16943


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 23 janvier 2012) que M. X... a été engagé par la société Moral Caraïbes le 16 décembre 1994 ; que promu le 1er janvier 2009 au poste de chargé de développement et communication, il a été licencié le 29 janvier 2010 pour faute grave ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes en paiement d'une indemnité de préavis, d'une indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages-intérêts pou

r licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que l'...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 23 janvier 2012) que M. X... a été engagé par la société Moral Caraïbes le 16 décembre 1994 ; que promu le 1er janvier 2009 au poste de chargé de développement et communication, il a été licencié le 29 janvier 2010 pour faute grave ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes en paiement d'une indemnité de préavis, d'une indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que l'usage du téléphone de l'entreprise à des fins personnelles est toléré, de sorte qu'est sans cause réelle et sérieuse le licenciement fondé sur l'utilisation du téléphone portable mis à la disposition du salarié, alors qu'une utilisation privée est largement tolérée dans l'entreprise et que l'intéressé n'a fait l'objet d'aucune remarque ni mise en garde ; que dans ses conclusions d'appel le salarié faisait valoir qu'il croyait de bonne foi disposer d'un abonnement téléphonique illimité, qu'il n'avait jamais été informé des conditions d'utilisation de son téléphone, qu'il n'était pas destinataire des factures téléphoniques relatives à l'utilisation de l'appareil et qu'il n'avait jamais été mis en garde après réception de ces factures par l'employeur ; qu'en laissant sans réponse ces conclusions pertinentes du salarié, qui étaient pourtant de nature à établir la bonne foi de celui-ci, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que c'est au juge et non aux parties qu'il appartient de qualifier la faute invoquée à l'appui d'un licenciement ; qu'en qualifiant de gravement fautif le comportement imputé au salarié, au seul visa de la lettre de licenciement intégralement reproduite, la cour d'appel a méconnu le principe susvisé et a violé les articles L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;
3°/ que dans ses conclusions d'appel, le salarié faisait valoir que les factures antérieures au mois d'octobre 2009 étaient relatives à des faits prescrits ; qu'en se déterminant par des motifs ne permettant pas de vérifier, dans l'hypothèse où ils auraient caractérisé des fautes, si les griefs invoqués étaient ou non atteints par la prescription, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1332-4 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant fait ressortir que les faits n'étaient pas prescrits pour s'être poursuivis dans les deux mois précédant l'engagement de la procédure disciplinaire malgré une première mise en garde, la cour d'appel a constaté, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que le salarié avait persisté à user du téléphone de l'entreprise de façon continuelle et journalière quasiment exclusivement à des fins privées et en appelant des numéros de téléphone surtaxés sans aucun lien avec son activité professionnelle ; qu'elle a pu en déduire que ces agissements rendaient impossible son maintien dans l'entreprise et constituaient une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre septembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes en paiement d'une indemnité de préavis, d'une indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QU' il doit être rappelé que si les outils mis à la disposition des salariés dans le cadre de l'exécution de leurs obligations contractuelles, ressources bureautiques ou informatiques, doivent conserver une vocation professionnelle, le caractère répétitif d'un comportement, son temps ou sa durée peuvent légitimer une sanction ; qu'en l'espèce, le comportement de M. X... est générateur d'un préjudice financier pour la société ; qu'en effet, l'examen des factures téléphoniques prouve que M. X... a abusé de manière régulière de l'outil de travail mis à sa disposition en le détournant de son objet, ayant en effet passé de nombreux appels téléphoniques en dehors de ses heures de travail et appelé des numéros de téléphones surtaxés sans aucun lien avec son activité professionnelle ; que le décompte « ligne à ligne » des communications téléphoniques pour cette ligne attribuée à M. X..., pour la seule période allant du 1er août 2009 au 31 décembre 2009, cela représente un listing de 240 pages, soit plus de 9100 lignes de consommations répertoriées par Orange : 659.777 secondes de consommation téléphonique, soit 183 heures de communication pour un coût de 3.312,37 ¿ ; que M. X... utilisait cette ligne téléphonique quasiment exclusivement pour des besoins personnels ; qu'il n'est que de reprendre certaines pages comme la page numéro 3 par exemple où 32 appels sur 33 sont passés toujours vers le même téléphone portable métropolitain ; que les numéros appelés en Guadeloupe sont rares et pourtant l'activité de M. X... est limitée à ce département ; que les faits reprochés sont d'ailleurs rappelés de façon détaillée dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du débat : « Nous vous avons adressé un premier courrier en date du 10 décembre 2009 (courrier remis en main propre contre décharge) constatant, à la lecture du détail des factures transmises par notre opérateur téléphonique, des consommations excessives de votre part depuis le mois de juin 2009. Nous vous avons demandé dans ce courrier de nous apporter vos éclaircissements motivés sur ces différentes consommations (communication, chargement multimédia, SMS¿) dans les meilleurs délais - tout en vous rappelant qu'un téléphone portable d'entreprise ne peut être qu'à usage strictement professionnel. Sans réponse de votre part, nous vous avons adressé un courrier recommandé avec accusé de réception, le 15 janvier 2010, pour une convocation à un entretien préalable le 25 janvier 2010. Le 15 janvier 2010, vous avez remis en fin de journée un courrier remis en main propre à Madame Béatrice Z..., relatif à vos consommations téléphoniques n'apportant aucune réponse plausible. Votre réponse est restée très évasive en nous indiquant que vous n'auriez pas été informé des conditions d'utilisation de ce téléphone, et que vous pensiez que l'utilisation était illimitée. Cette tentative d'"explication" après plus d'un mois de silence en dit long sur son manque de crédibilité et sur votre embarras. Il est évident pour tous que si les raisons que vous invoquez maintenant avaient eu une consistance quelconque, vous n'auriez pas attendu plus d'un mois pour nous les fournir. La moindre honnêteté aurait dû vous conduire à nous répondre immédiatement. Vous n'avez donc pu apporter aucun élément nous permettant de justifier votre comportement ; et aucune réponse précise autre que celle rapportée ci-dessus, invraisemblable, n'a été fournie concernant le courrier du 10 décembre 2009 pour lequel nous exigions des éclaircissements motivés. De tels agissements sont intolérables dans notre société, à l'encontre des dispositions définies dans le règlement intérieur, et ont une conséquence financière préjudiciable à l'entreprise, du fait de votre utilisation abusive du matériel et des abonnements à la charge de notre société. Ils sont contraires à la moindre morale et honnêteté respectée par la quasi-totalité des autres salariés. Encore une fois, autant une consommation téléphonique personnelle peut être tolérée, si elle reste limitée et raisonnable, autant ce que vous avez fait dépasse largement ces limites et ce, nous le pensons, très volontairement de votre part » ; qu'un tel comportement est abusif et constitue un manquement à son obligation de loyauté et de bonne foi dans l'exécution de son contrat de travail puisque le salarié a usé du téléphone dans l'entreprise de façon continuelle et journalière à des fins privées, rendant en conséquence impossible le maintien de ce dernier dans l'entreprise pendant la durée du préavis et constituant donc une faute grave ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'usage du téléphone de l'entreprise à des fins personnelles est toléré, de sorte qu'est sans cause réelle et sérieuse le licenciement fondé sur l'utilisation du téléphone portable mis à la disposition du salarié, alors qu'une utilisation privée est largement tolérée dans l'entreprise et que l'intéressé n'a fait l'objet d'aucune remarque ni mise en garde ; que dans ses conclusions d'appel (p. 13 et 14), M. X... faisait valoir qu'il croyait de bonne foi disposer d'un abonnement téléphonique illimité, qu'il n'avait jamais été informé des conditions d'utilisation de son téléphone, qu'il n'était pas destinataire des factures téléphoniques relatives à l'utilisation de l'appareil et qu'il n'avait jamais été mis en garde après réception de ces factures par l'employeur ; qu'en laissant sans réponse ces conclusions pertinentes du salarié, qui étaient pourtant de nature à établir la bonne foi de celui-ci, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU' en toute hypothèse, c'est au juge et non aux parties qu'il appartient de qualifier la faute invoquée à l'appui d'un licenciement ; qu'en qualifiant de gravement fautif le comportement imputé à M. X..., au seul visa de la lettre de licenciement intégralement reproduite, la cour d'appel a méconnu le principe susvisé et a violé les articles L.1234-1 et L.1234-9 du code du travail ;
ALORS, ENFIN, QUE dans ses conclusions d'appel (p. 13 § 4), M. X... faisait valoir que les factures antérieures au mois d'octobre 2009 étaient relatives à des faits prescrits ; qu'en se déterminant par des motifs ne permettant pas de vérifier, dans l'hypothèse où ils auraient caractérisé des fautes, si les griefs invoqués étaient ou non atteints par la prescription, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1332-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-16943
Date de la décision : 24/09/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Cour d'appel de Basse-Terre, 23 janvier 2012, 11/00537

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 23 janvier 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 sep. 2013, pourvoi n°12-16943


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.16943
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